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Est-ce ma demande elle-même, qui devra être déclarée non recevable?

Quelques auteurs enseignent que la sanction de notre texte ne consiste pas seulement dans le rejet de la preuve testimoniale invoquée à l'appui des demandes non justifiées par écrit, qui seraient ultérieurement formées, mais dans la non-recevabilité de ces demandes elles-mêmes; c'est, d'après eux, une déchéance, par suite de laquelle la convention se trouve annulée, et la partie privée du droit, qui en résultait pour elle.

Telle est, disent-ils, la conséquence nécessaire de la formule, par laquelle l'article 1346 consacre cette sanction :

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....

après lequel, LES AUTRES DEMANDES, dont il n'y aurait point de preuve par écrit, ne seront pas reçues. » Ce n'est donc point la preuve testimoniale qu'il prohibe; ce sont les autres demandes, que l'on voudrait ensuite former.

Et ils ajoutent qu'on ne doit pas oublier, en effet, qu'il s'agit d'une mesure tendant à simplifier les procès, et, par conséquent, prescrite d'une manière absolue. (Comp. Zachariæ, Aubry et Rau, t. VI, p. 440; Marcadé, art. 1346, no 4; Bonnier, no 163.)

Nous ne pensons pas, pour notre part, que le législateur ait entendu consacrer une doctrine aussi rigoureuse; et, à notre avis, la sanction de l'article 1346 consiste uniquement dans la prohibition de la preuve testimoniale pour les autres demandes, qui seraient ensuite formées, sans que ces demandes elles-mêmes puissent être déclarées non recevables; la voie demeurant ouverte à tous les autres modes de preuves, et notamment à l'interrogatoire sur faits et articles et au serment :

1° Il est vrai que la formule de l'article 1346 semble favoriser d'abord l'interprétation, que nous combattons. Mais cette formule doit être interprétée suivant la règle générale, secundum subjectam materiam, d'après les

principes essentiels de la matière, dans laquelle elle est employée.

Or, ce mode d'interprétation, qui est le vrai, va nous amener à reconnaître que, en employant, dans l'article 1346, le mot demandes, le législateur n'a porté sa pensée que sur le mode de preuve à l'aide duquel on prétendrait établir les autres demandes, c'est-à-dire uniquement sur la preuve testimoniale.

En effet, c'est un principe fondamental de notre matière que la règle posée dans l'article 1341, qui prohibe la preuve testimoniale pour toute chose excédant la valeur de 150 francs, ne concerne nullement le fond du droit et la validité de la convention elle-même; laquelle, au contraire, quoique non justifiée par écrit, peut être établie par tous les autres moyens de preuves;

Or, les articles 1345 et 1346 ne sont que l'application de l'article 1341;

Donc, ils ont le même caractère, et ne vont pas au delà.

Cette démonstration apparaît d'une manière irrésistible, suivant nous, par le rapprochement de l'article 1345 et de l'article 1346.

les

Nous avons reconnu que l'article 1345 n'est pas applicable à celles des demandes, pour lesquelles le créancier peut invoquer un autre genre de preuve que la preuve testimoniale (Supra, nos 60 et suiv.); d'où il suit que demandes, qu'il n'a pas jointes à ses premières demandes,. et qu'il forme ultérieurement, ne sont rejetées qu'au point de vue de la preuve testimoniale, et que, s'il invoque un autre mode de preuve, il est recevable à l'employer; voilà l'article 1345;

Or, l'article 1346 n'est lui-même que la sanction de l'article 1345;

Donc, il ne prononce, comme l'article 1345, que la prohibition de la preuve testimoniale, et non point la non-recevabilité absolue de la nouvelle demande.

Ainsi entendus, les articles 1344, 1345 et 1346 présentent une théorie très-concordante; tandis que l'interprétation contraire la remplit de contradictions.

2o On objecte que, précisément, l'article 1346 pose une règle nouvelle et différente de la règle sur laquelle les autres articles de cette section sont fondés; il a pour but de prévenir la multiplicité des procès.

Cet argument ne saurait nous atteindre, puisque nous n'avons pas admis que l'article 1346 contienne une règle différente de la règle fondamentale de l'article 1344, dont les articles suivants, 1342, 1343, 1344 et 1345 ne sont, comme l'article 1346, que le développement.

Mais, en admettant même que le législateur eût posé incidemment, par un véritable hors-d'œuvre, une règle nouvelle dans l'article 1346, nous ne croyons pas que cette règle dût avoir cette conséquence exorbitante d'entraîner la nullité d'une convention et la déchéance absolue d'un droit!

«S'il s'agit de diminuer les procès, dit M. Colmet de Santerre, cette considération est-elle assez puissante pour déclarer déchu de son droit celui qui n'a pas observé l'article 1346? et l'économie des frais n'est-elle pas obtenue par la prohibition de l'enquête, c'est-à-dire de la partie la plus coûteuse de la procédure? » (T. V, n° 319 bis, IV.)

Voilà ce que pense de cet argument l'un des jurisconsultes les plus autorisés, parmi ceux-là même qui enseignent que l'article 1346 a posé une règle nouvelle, différente de la règle posée par l'article 1345. (Comp. Toullier, t. V, no 49; Duranton, t. XIII, no 328; Larombière, t. V, art. 1346, no 12.)

II

Il n'est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes.

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80. Quels sont les faits juridiques, dont la preuve testimoniale est prohibée par cette seconde règle? Et dans quels cas est-on fondé à dire que la preuve testimoniale, offerte par l'une des parties, irait contre et outre le contenu à l'acte ?

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87.

88.

89.

Suite.
Suite.

La preuve testimoniale peut être admise des faits, qui tendent soit à interpréter les clauses obscures ou ambiguës d'un acte écrit, soit à préciser l'étendue et la portée des énonciations, plus ou moins vagues, qu'il renferme.

90.

91. 92.

Suite.
Suite.

- Lorsqu'il y a un acte écrit d'un marché, et qu'on n'y a pas exprimé le temps et le lieu où il a été fait, peut-on être admis à la preuve testimoniale du temps et du lieu?

93.

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Suite.

94. Cette seconde règle n'est applicable qu'entre les parties ellesmêmes signataires de l'acte; elle ne saurait être appliquée aux tiers, qui n'y ont point figuré.

78.-Voici, pour cette fois, une règle nouvelle, distincte de la règle que nous venons d'exposer, quoique le Code de 1804, à l'exemple des Ordonnances de 1566 et 1667 les ait réunies toutes les deux dans un seul texte (art. 1341).

C'est la prééminence de la preuve littérale sur la preuve testimoniale! (Comp. supra, no 2 à 5.)

Règle tout à la fois logique et nécessaire.

Quoi de plus logique, en effet, que de présumer, lorsque les parties prennent le soin de passer un acte écrit de leur convention et en font les frais parfois assez considérables, qu'elles y constatent, exactement et complétement, toutes les clauses, conditions ou modalités qui la constituent! c'est précisément pour cela qu'elles écrivent, afin de bien préciser et d'arrêter définitivement la preuve des droits et des obligations, que leur convention devra produire ni plus; - ni moins; - ni autrement! - ce qui est, en effet, l'un des grands avantages de la preuve préconstituée.

:

Nous ajoutons Règle nécessaire aussi; car ce serait tromper la plus légitime attente des parties, que d'admettre la preuve testimoniale contre et outre l'acte écrit, qu'elles ont fait, d'un commun accord, dans l'intention même presque toujours d'écarter cette espèce de preuve.

A un point de vue plus élevé encore, dans l'intérêt général de la société, qui ne voit combien la menace des preuves testimoniales, suspendue, en quelque sorte, sur tous les actes écrits, ébranlerait la foi qui leur est due, et qu'elle jetterait l'incertitude dans celles des relations. sociales, qui précisément reposent sur l'une des bases les plus solides du droit civil, sur les actes écrits!

79. Le motif même, que nous venons d'en fournir, suffit à démontrer que cette règle est applicable, sans qu'il y ait à distinguer si la chose, qui fait l'objet de la convention, est d'une valeur supérieure ou inférieure à 450 fr.

C'est ce que porte d'ailleurs formellement notre texte « Encore qu'il s'agisse d'une somme ou valeur moindre de cent cinquante francs. »

On peut même ajouter que, dans le cas où il s'agit d'une valeur moindre de 150 fr., la règle se trouve d'autant mieux justifiée, puisque la preuve testimoniale étant alors permise, la rédaction d'un acte écrit n'était pas

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