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suspendue, mais toujours prête à se réveiller sou>> dainement dans notre corps qui est celui du péché. »>

J'ajoute, dans l'Article suivant (1), que « les ames » transformées, outre le pouvoir de pécher comme » le premier ange et le premier homme,... ont de >> plus le fond de la concupiscence, quoique les effets >> sensibles puissent en être suspendus ou ralentis » par la grâce médicinale. » J'ai encore condamné dans le faux, les ames qui diroient qu'elles n'ont plus de concupiscence. Est-ce contredire ou éluder notre VII Article d'Issy, qui dit seulement « qu'en tout » état le chrétien a la concupiscence à combattre, » quoique non toujours également; ce qui l'oblige » en tout état, quoique non à tout moment, de de» mander force contre les tentations. »

Je n'ai admis que des suspensions des effets sensibles de la concupiscence, et non de tous ses effets. Les insensibles sont souvent les plus dangereux. Je n'ai pas même admis ces suspensions comme réglées, fixes, et par état; au contraire, je les ai supposées sans règle, et toujours incertaines pour leur durée; én sorte que, selon moi, la concupiscence est toujours ou agissante,.... ou prétè à se réveiller soudainement. N'est-ce pas reconnoître qu'en tout état on a la concupiscence à combattre, quoique non toujours également ?

XXIX.

DÉCLAR. L'auteur va par là jusqu'à affoiblir l'utilité et la nécessité de la mortification, contre les paroles de l'Apôtre et contre la pratique des saints. Il (1) Art. xxxvii, p. 238,

favorise la doctrine condamnée dans notre XVIIIe Article, et dans nos censures.

REP. Est-ce affoiblir l'utilité ou la nécessité des mortifications, que de « reconnoître la nécessité de » la mortification; d'autoriser les austérités corpo» relles qui sont par leur institution très-salutaires; » et enfin, de vouloir que les ames les plus parfaites » fassent une pénitence proportionnée à leurs forces, » à leur grâce et aux épreuves de leur état (1)? »

Mais en quoi consiste cette pénitence? Dans << une privation continuelle de tout ce qu'on ne goûteroit » que pour se contenter (2). »

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Les trois prélats peuvent-ils donner une règle plus rigoureuse et plus étendue que celle-là? Je les supplie de m'écouter encore : « Cette mortification, » ou pour mieux dire cette mort, va jusqu'à re>> trancher non-seulement tous les mouvemens volon» taires de la nature corrompue et révoltée par la volupté de la chair et par l'orgueil de l'esprit, mais >>> encore toutes les consolations les plus innocentes » que l'amour intéressé recherche avec empresse» ment (3). » J'y ajoute seulement quatre choses, dont il me semble que personne ne peut disconvenir la première, que ces austérités ne sanctifient qu'autant qu'elles sont animées par l'esprit d'amour et d'oraison; la seconde, que les ames ferventes y ont eu souvent trop d'attachement pendant leur ferveur sensible; la troisième, qu'elles perdent le goût sensible des austérités pendant les épreuves, où elles sont privées de cette ferveur sensible et consolante;

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la quatrième, que le directeur « expérimenté doit >> faire cesser ou diminuer certaines austérités corporelles auxquelles on étoit trop attaché. » Remarquez qu'il ne s'agit que de certaines et non pas de toutes. Voici la raison de cette conduite. « Cet >> adoucissement est nécessaire pour soulager leurs » corps défaillans dans la rigueur des peines inté» rieures, qui sont la plus terrible des pénitences.

XXX.

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DECLAR. Voici ce qu'on trouve dans ce livre sur la contemplation. Quand elle est pure et directe, elle ne s'occupe jamais d'aucune image sensible, d'aucune idée de la divinité qui soit distincte et nominable; c'est-à-dire limitée, mais seulement d'une très-pure et très-abstraite idée de l'être sans bornes.

RÉP. Je n'ai dit nulle part que la contemplation, quand elle est pure et directe, ne s'occupe volontairement d'aucune image sensible, etc. Je n'avois garde de le dire, puisque j'ai pris soin de dire au contraire expressément, que la contemplation pure et directe admet tous les objets que la pure foi nous peut présenter (1), et que par conséquent elle n'est ni négative ni exclusive de tout objet limité. J'ai dit seulement que «< la contemplation pure et directe est négative, en ce qu'elle ne s'occupe volontairement » d'aucune image sensible, d'aucune idée distincte et » nominable, etc. (2) » Ces paroles ne signifient pas que toute contemplation pure et directe soit négative, mais seulement que la contemplation pure et

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(1) Art. xxvii, p. 188, — (2) Ibid. p. 186.

directe est négative quand elle ne s'occupe volontairement d'aucune image sensible; et quand elle s'oc cupe de tous les objets que la pure foi nous peut présenter, alors la contemplation pure et directe n'est point négative. Est-il permis de me faire dire en général de toute contemplation, ce que je ne dis que de la négative, pendant que je dis si formellement le contraire de l'autre sorte de contemplation ? Pour la négative, c'est une simple présence de Dieu, c'est un regard libre et amoureux où l'on est occupé de l'idée universelle de l'être infiniment parfait, suivant ces paroles Ego sum qui sum. C'est ce que tant d'auteurs, avec saint Denis (1), ont exprimé en disant qu'on connoît Dieu non par ce qu'il est, mais par ce qu'il n'est pas; c'est-à-dire en excluant toute distinction qui vient d'une borne de l'être. C'est ainsi que saint Clément d'Alexandrie dit que les pensées différentes n'entrent point dans la contemplation du gnostique (2); « qu'il ne reçoit point la diversité des » images,... qu'on est conduit à la connoissance du » Tout-puissant en reconnoissant, non ce qu'il est, » mais ce qu'il n'est pas (3). » C'est ainsi que saint Grégoire de Nysse dit que « l'ame ne parvient à con» noître celui qu'elle cherche, que par connoître >> seulement qu'on ne peut le comprendre, et que » toute connoissance de ce qu'on peut comprendre

par l'entendement, devient un empêchement à ceux » qui le cherchent (4). » Combien s'en faut-il que je n'aie parlé comme le saint abbé Blosius, dont les ouvrages sont approuvés par tant de célèbres univer(1) Epist. ad Caium. — (2) Strom. lib. iv, p. 530. —(3) Ibid. lib v, (4) Serm. vi in Cantic. Cant. p. 560.

p. 582.

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sités de Flandres et d'Allemagne ? « Toute image, » dit-il (1), des choses divines, même la pensée de la » passion du Seigneur, empêche l'homme dans cette » vie mortelle, quand il veut s'élever à l'union mys>>tique avec Dieu. Il faut donc à cette heure laisser » ces sortes de pensées qui mettent un milieu entre » Dieu et l'ame. Qu'elle se hâte d'entrer dans un » saint silence. Quælibet imago de rebus divinis, >> item cogitatio de passione Domini, hominem » in hác mortali vitá impedit quando ad mysticam » cum Deo unionem consurgere vult. Ed ergo hord » ejusmodi sanctæ cogitationes reliquendæ sunt, » quæ medium aliquod constituunt inter animam et » Deum. Properet ad sanctum silentium. » Blosius parle ainsi de l'union mystique ou contemplative en général. Pour moi, je restreins cette maxime à l'espèce particulière de la contemplation négative.

XXXI.

DÉCLAR. D'où il s'ensuit qu'elle ne s'occupe point des autres objets, c'est-à-dire, des attributs des personnes divines, et de l'humanité même de JésusChrist.

RÉP. La contemplation pure et directe est quelquefois négative, et quelquefois ne l'est pas; mais, dans l'un et l'autre cas, c'est toujours la même nature de contemplation, puisqu'on y contemple de la même manière, savoir par une opération pure, ple et directe. Quand la contemplation pure et directe, comme je l'ai dit dans mon livre (2), ne s'ar

(1) Instit. cap. x11, §. 3.

· (2) Arţ. xxvii, p. 187, 189.

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