Page images
PDF
EPUB

l'effet de négocier et conclure une paix 1807. avantageuse et honorable aux deux empires de Russie et de Turquie.

XIII. L'empereur des François et l'empereur de toutes les Russies se garantissent mutuellement l'intégrité de leurs possessions et de celles des puissances comprises au présent traité.

XIV. Le cérémonial des deux cours des Tuileries et de Saint-Pétersbourg, à l'égard des ambassadeurs, ministres et envoyés, qu'elles accréditeront l'une près de l'autre, sera établi sur le principe d'une réciprocité et d'une égalité parfaites, etc., etc. Fait à Tilsitt, le 7 juillet 1807.

Signé Ch. M. TALLEYRAND, prince de
Bénévent.

Le prince Alexandre KOURAKIN.
Le prince LABAnof de Rostoff.

Deux jours après, le traité entre la France et la Prusse fut également signé entre le prince de Bénévent et le maréchal comte de Kalkreuth. Par ce traité, le roi reconnoît les rois de Naples, de Hollande, de Westphalie et la confédération du Rhin; renonce à perpétuité aux provinces de l'ancien royaume de Pologne, qui, à diverses époques, ont passé sous sa domination, ainsi qu'à la possession de la ville de Dantzick.....

1807.

Ces deux traités furent présentés au sénat le 24 juillet par M. l'archichancelier Cambacérès, qui à ce sujet prononça le discours suivant:

« Messieurs,

« Le cours rapide des victoires de sa majesté l'empereur et roi offroit le présage infaillible d'une paix glorieuse.

« Ces espérances sont accomplies par les deux traités de paix que j'apporte au sénat. Sa majesté n'a point permis qu'ils fussent rendus publics avant que vous en ayez reçu la communication.

« Le sénat appréciera avec reconnoissance cette réserve délicate, et y verra une nouvelle preuve de l'attention de notre auguste souverain à maintenir les formes consacrées par nos usages et par nos lois.

« Au milieu des grands résultats que présentent ces transactions politiques, il en est un qui intéressera vos plus vives affections. Dévoués, comme vous l'êtes, messieurs, à la gloire de la dynastie impériale, avec quelle satisfaction ne verrez, vous pas sa splendeur toujours croissante porter au trône de Westphalie un jeune prince dont la sagesse et le courage viennent de se signaler par de si nobles travaux!

« Dans cette disposition, comme dans

toutes celles qui composent ces traités, vous retrouverez, messieurs, les soins constants du fondateur de l'empire pour consolider le grand système dont il a posé les bases.

« Votre cœur applaudira aux conceptions d'un génie ami de l'humanité, dont toutes les vues, dont toutes les précautions ont pour objet d'éloigner l'effusion du sang humain.

1807.

« Le continent peut enfin se promettre une paix durable. Les entrevues mémorables qui viennent d'avoir lieu sur les bords du Niémen sont les gages d'une longue tranquillité. Les rapports d'estime et de confiance qui se sont établis entre les souverains des deux plus puissantes nations de l'Europe, offrent une garantie contre laquelle désormais tous les efforts de la haine et de l'ambition viendront échouer. >> L'empereur suivit de près le courrier Retour de qui avoit apporté à Paris le traité de Til- à Paris. sitt. Il arriva à Saint-Cloud le 27 juillet, à cinq heures du matin, en fort bonne santé. Soixante coups de canon annoncè→ rent son arrivée. A huit heures du soir, il recut les ministres, convoqua le conseil d'état pour le lendemain à sept heures du matin; et à onze heures, il reçut le sénat et tous les grands corps de l'état. Il vouloit paroître aussi grand et aussi infatigable

l'empereur

1807.

que

:

César il est permis de croire qu'il le prit souvent pour modèle.

Lorsqu'il monta sur le trône, une sorte de pudeur l'avoit empêché de prendre le titre de roi de France, que ses partisans avoient solennellement proscrit et condamné il n'y avoit pas encore six ans (1).

Il n'ignoroit pas la puissance des mots sur l'esprit de la multitude : il pensa que celui d'empereur déplaîroit moins que celui de roi à des républicains qui connoissoient mieux l'histoire romaine que celle de leur pays.

Cependant il ne se dissimuloit pas davantage qu'en sa qualité d'empereur, qu'il s'étoit donnée de son propre mouvement, il ne joueroit qu'un rôle de théâtre tant qu'il ne seroit pas authentiquement reconnu par les autres souverains; et même que ce rôle deviendroit plus odieux, sans cesser d'être précaire, s'il ne devoit sa reconnoissance qu'à la puissance de ses arme et au droit du plus fort.

Il prit soudain la résolution de s'affranchir de tout respect humain, de déplacer tous les trônes de l'Europe, de briser toutes les couronnes sur la tête de leurs légi

(1) « La royauté ne se relèvera jamais en France, avoi¿ dit le président du directoire à la fête du 10 août 1798. On n'y verra plus de rois ; ils sont proscrits et condamnés dans le cœur de tous les François. »

times titulaires, de créer de nouveaux titres, de nouveaux états, de nouvelles dynasties, et de se placer au milieu de cette clientelle comme principe de vie, comme source de puissance, et l'ancien des rois.

La crainte qu'il inspiroit lui épargna la moitié de son ouvrage. Des princes qui attachoient plus de prix à leur dignité qu'à leur honneur, coururent au-devant du joug qu'il voulut bien leur imposer, consentirent à échanger leurs vieux et respectables titres pour des titres qu'il daigna leur conférer, et reconnurent son ancienneté dès-lors qu'ils se soumirent à sa protection.

Les seuls cabinets de Vienne et de St.Pétersbourg conservèrent sur le continent le rang qu'ils tenoient de leur puissance, et le ton qui convenoit à leur rang; mais il fallut en même temps prendre les armes pour soutenir l'un et l'autre.

Le sort des armes les trahit. L'Autriche, ́vaincue la première, reconnut dans le vainqueur d'Austerlitz le successeur immédiat de Charlemagne ; et le descendant des czars fit alliance avec le vainqueur de Friedland.

Il n'étoit pas encore au point où il vouloit arriver; mais arrivé là, il ne voyoit plus rien au-dessus de lui. Quelle puis->

1807.

« PreviousContinue »