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l'engagement d'une chose que ce créancier avait voulue et acceptée.

134. On n'a suivi en France ni le droit du préteur, ni les principes rigoureux du droit civil; mais la simple convention ne suffit cependant point pour produire l'hypothèque, il faut qu'elle soit revêtue du sceau de l'autorité publique.

Mais il faut, pour cela, que l'hypothèque soit expressément convenue et stipulée dans l'acte ; car, de nos jours, le sceau de l'autorité publique ne suffit pas seul non plus pour la produire.

L'authenticité de l'acte ne fait donc que donner la vie à la convention hypothécaire ; l'une est inséparable de l'autre : toutes deux forment la condition indivisible de l'existence de l'hypothèque ; de sorte que l'une en l'absence de l'autre ne produit aucun effet.

135. Cette vérité mérite d'être développée sous toutes ses faces.

Si l'hypothèque a été stipulée dans l'acte, mais que cet acte n'ait point un caractère d'authenticité, l'hypothėque n'existe point, et elle ne pourra recevoir l'être que du dépôt chez un notaire, et de la reconnaissance de cet acte sous seing privé, avec stipulation nouvelle de l'hypothèque : revêtue alors de l'authenticité qui seule peut lui donner sa force, elle datera du jour même du dépôt et de la reconnaissance.

Si l'acte est authentique, mais que l'hypothèque n'ait point été expressément et dispositivement stipulée, vainement s'efforcerait-on d'attacher à l'authenticité une vertu qu'elle n'a plus, en l'absence de la volonté expresse et positive des parties.

Ainsi des termes énonciatifs et présuppositifs, mais non dispositifs, ne pourraient être le fondement d'une hypothèque.

Il est certain, en effet, que les termes énonciatifs et pré

suppositifs (1) ne disposent point, même dans les testamens. et sur-tout dans les contrats, mais font seulement preuve entre les parties pour la validité de l'acte qui est principalement constitué et consommé; non si l'on agite la question au principal sur l'énoncé même, parce qu'alors ces termes énonciatifs ne font pas même preuve entre les parties, quoiqu'ils fassent naître une sorte de présomption. Ces mots n'induisent donc rien dans la vérité de la chose, mais simplement dans l'opinion.

137. Vainement ces termes seraient-ils proférés (2) par celui-là même qui ne pourrait ignorer l'existence ou la non existence de l'hypothèque, parce que, dans ce cas, ils ne pourraient avoir plus de force qu'une confession sciemment faite, au moyen de laquelle le débiteur aurait explicitement avoué que sa chose est hypothéquée. Les principes les plus constans, en effet, sont que, dès qu'il s'agit de la propriété ou d'un autre droit réel, la confession, même faite sciemment, n'induit aucune mutation de propriété ni aucune autre disposition: Nemo alienare præsumitur. Or, l'hypothèque est un droit réel, renfermant un principe d'aliénation, par conséquent d'une mutation de propriété, et doit être soumise à la règle susénoncée, et la confession qu'il existe une hypothèque ne la pourrait produire.

138. Si la stipulation d'hypothèque se trouvait dans un acte nul, non pour défaut de forme, mais per defectum materiæ, elle croulerait pareillement, parce que l'acte principal n'existant pas, toutes les clauses, stipulations et confessions y incluses tombent et s'évanouissent (3).

139. Il n'y a d'exception à cette règle que quand le contrat peut valoir usque ad modum concessum (4); en

(1) Dumoulin, t. I, tit. 1; Gloss. 4, in verbo, mettre en sa main,

(2) Dumoulin, ibidem.

(3) Dumoulin, tit. 1, des fiefs.

(4) L. si unus, l. si acceptatio de pectis.

sorte que si ce que je fais ne peut exister comme tel, il subsistera comme il pourra valoir : Si quod (1) ago non valet ut ago, valeat ut valere potest. Nec obstat que l'on dise que l'acte n'opère point au-delà de l'intention des parties contractantes ; cela ne peut s'entendre que de l'intention primitive ou secondaire, et toutes les fois que cette intention secondaire subsiste, elle soutient l'acte et par conséquent tous ses accessoires, tels qu'hypothèques, fidėjusseurs ou cautions: or, cette intention secondaire ne peut s'entendre que de l'intention concernant le complément et l'exécution de l'obligation expressément et principalement contractée (2).

140. Si, par exemple, dans l'espèce de la loi 7. si absentis, Cod. si cert. pet., une obligation a été expressément et principalement contractée pour le sort principal avec des intérêts nomine absentis, quoique le prêteur entendît acquérir primitivement et directement pour l'absent, et que pareillement le débiteur entendît s'obliger pour l'absent; cependant comme il a été secondairement entendu que si l'absent ne veut pas ratifier le contrat, remaneat nomen au prêteur et stipulant lui-même nomine suo, alors même qu'il a fait cet acte nomine alieno, au moyen de cette intention secondaire, le contrat se soutient en soi, et conséquemment les hypothèques, cautions et autres accessoires subsistent (3).

(1) Si tam augusti loci de serv., 1. via. in princip. de servitut. rustic. prædior.

(2) Dumoulin, t. 2, p. 70, Col. 1, n. 184.

(3) La qualité convenable et applicable à l'acte, et au moyen de laquelle l'acte pent subsister, est toujours sous-entendue, quel que soit celui qui agisse et gère, alors même qu'elle n'est en aucune manière exprimée. C'est ainsi que celui qui se dit procureur fondé est censé, par cela même, agir en qualité de fondé de pouvoir. L. penult., ff. si quis cautio. C'est ainsi que celui qui se dit mari est censé agir au nom de sa femme. Il en est de même des tuteurs et autres semblables. C'est ainsi que l'usufruitier, quoiqu'il ne se dise point tel, s'il gère et agit purement et simple

141. Il n'est point contraire aux principes, en effet (1), que l'hypothèque subsiste pour partie, soit de la chose hypothéquée, soit de la chose pour laquelle on hypothèque, comme si, par exemple, celui qui hypothèque n'était propriétaire du fonds que pour partie, ou s'il en était propriétaire in totum, et que le domaine fût résolu pour partie ex causá vetustiori, ou si un fondé de pouvoir avait hypothéqué pour une somme plus forte que son mandat ne le comportait.

142. Il en serait autrement de l'intention secondaire par laquelle l'acte ne se soutiendrait pas, lequel demeurerait nul et sans effet, parce qu'alors il ne peut plus rester d'hypothèques, de fidejusseurs ni d'autres accessoires. Cette théorie qui, au premier coup-d'œil, pourrait paraître obscure et abstraite, mérite d'être méditée et remarquée, dit Dumoulin, parce qu'elle peut trouver son application dans beaucoup de circonstances.

143. La règle quòd valeat actus ut valere poterat cessera d'être applicable toutes les fois que le contrat sera nul ipso jure, sur-tout quand il le sera ob peccatum contrà legem et jus publicum, et l'on exciperait vainement, dans ce cas, de l'intention secondaire, parce qu'elle ne peut s'entendre, comme nous l'avons déjà dit, que de l'intention concernant l'accomplissement implementum, et

ment sans aucune qualité, pourvu qu'il n'en exprime point de contradictoire, est censé agir en qualité de fondé de pouvoir du propriétaire, puisque, dans le doute, un acte est toujours censé fait sous la qualité qui peut lui servir de fondement, et le faire subsister alors même qu'elle n'est point exprimée. Toutes les lois se réunissent pour établir en principe qu'on doit toujours donner à l'acte l'interprétation et la qualité qui peuvent le faire subsister. L. ex ubi est, ibi, semper in dubiis id agendum est, ut quàm tutissimo loco res sit. ff. de rebus dubiis ; l. quoties in actionib., eod. titul.; l. quoties, ff.de verbor. oblig.; quoties idem sermo, ff. de regul. juris. ; vid. Dumoulin, tom. I, S. I, n os 31 et 32. (1) Ut in leg. vectigal., ff. de pignor., l. fin. C. communia de legat.

l'exécution d'une obligation expressément et principalement contractée, seul cas où l'on puisse dire que ab initio valuit et substitit aliqua hypotheca; mais ici l'acte est anéanti, et l'hypothèque a disparu dès le principe.

144. Si donc un contrat était nul (1) comme usuraire, en ce que directement ou indirectement il aurait été convenu, non qu'on pût racheter le sort principal après un certain temps seulement, mais qu'après un certain temps on pût être contraint à racheter le sort principal, ou à donner ou à perdre quelque chose de plus considérable, l'hypothèque stipulée dans ce contrat disparaîtrait, et ne subsisterait pas même pour le sort principal (2). Dumoulin remarque cependant que cette rigueur qui fait perdre l'hypothèque pour le sort principal, ne doit avoir lieu que contre celui qui a illicitement contracté ou donné pouvoir pour contracter. Il en serait autrement si, à l'insçu du maître, un tuteur, procureur, ou negotiorum gestor, avait illicitement et vicieusement contracté, quia, dit Dumoulin, tunc licet contractus nullitati subjaceat, tamen in quantum superest obligatio videlicet ad sortem,vel congruam satisfactionem, supererit etiam hypo

(1) Dumoulin, ibidem.

(2) Aux termes de l'article II du décret du 17 mars 1808 (Bulletin, no 3210), toute hypothèque prise par un Juif non patenté était nulle, s'il était prouvé qu'elle avait été prise pour une créance résultant d'une lettre de change, ou pour un fait quelconque de commerce, négoce ou trafic. Cette disposition devait avoir lieu pendant dix ans à compter de la date du décret, sauf prorogation s'il y avait lieu.

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Cette disposition, et celles des articles 4 et 13 du même décret, qui voulaient que le paiement d'aucune lettre de change, billet à ordre, obligation ou promesse, souscrits par un Français non commerçant, au profit d'un Juif, ne pût être exigé, à moins que le porteur ne prouvât que la valeur en avait été fournie entière et sans fraude; ces dispositions, disonsnous, n'ont point été appliquées aux Juifs établis à Bordeaux, et dans les départemens de la Gironde, des Landes, des Basses-Pyrénées, des Alpes-Maritimes, de l'Aude, du Doubs, de la Haute-Garonne, de 'Hérault, etc. (Décrets des 16 juin et 22 juillet 1808, 11 avril 1810, )

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