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pothèque fût imprimée sur l'usufruit non séparé de la propriété, c'est-à-dire que l'usufruit puisse être hypothéqué avant sa constitution, ou que la simple stipulation d'hypothèque sur cet usufruit puisse donner le droit de le revendiquer par la voie hypothécaire, ou d'en transmettre l'utilité ou l'avantage à un tiers. La raison s'en tire des articles 578 et 2118 du Code civil, dont l'un définit l'usufruit, le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d'en conserver la substance, et l'autre porte sont seuls susceptibles d'hypothèque, 1o les biens immobiliers et leurs accessoires réputés immeubles; 2° l'usufruit des mêmes biens et accessoires pendant le temps de sa durée; ce qui donne à entendre qu'il n'y a d'usufruit susceptible d'hypothèque ou de droit d'usufruit en général, que quand il est formel, existant par lui-même seorsim à proprietate, et qu'il a été préalablement constitué et détaché de la propriété

Cependant, quoiqu'une stipulation d'hypothèque sur l'usufruit nou détaché de la propriété ne se soit peut-être pas présentée à la pensée des rédacteurs de la loi, nous n'en persistons pas moins à penser qu'elle serait en soi très-valide quoiqu'insolite. L'usufruit, en tant qu'il est une partie intégrante du domaine, offre d'ailleurs le caractère d'immuabilité requis pour fonder l'hypothèque. Or, toutes les fois qu'on rencontrera dans une chose cette fixité qui assure la perpétuité du gage et l'acquittement de l'obligation, on ne pourra se refuser de la regarder comme susceptible d'hypothèque; c'est par cette raison et par une conséquence de ce principe, qu'on doit regarder le droit d'emphyteose comme susceptible d'être hypothéqué, et qu'il devrait en être de même de la rente foncière stipulée non rachetable avant trente ans; c'est l'opinion de M. Malleville, tom. IV, pag. 265.

216. L'hypothèque consentie sur l'usufruit formel ne

frappe point le droit d'usufruit en lui-même, et s'applique beaucoup moins au droit de vendre cet usufruit à un tiers ; mais simplement juri fructûs vel commoditatem percipiendi, vendendi, locandi, in extenuationem debiti et in eâ commoditate tuendus est creditor, vel qui emit ab eo etiam contrà proprietarium, quemadmodùm quivis emptor, vel conductor vel causam habens ab usufructuario; et c'est par cette raison que l'hypothèque s'évanouit avec le droit de l'usufruitier, et ne peut jamais, en tant qu'elle procure la vente du droit de perception des fruits, excéder le temps de la jouissance qui reste à courir. Voyez Dumoulin, ubi suprà, no 328.

217. Au reste, le sort de cette hypothèque est subordonné au mode de constitution de l'usufruit formel; s'il a été constitué sub die, vel sub conditione, le propriétaire perçoit encore les fruits pendente die vel conditione, et le droit d'hypothèque ne sera efficace que lorsque le jour ou la condition sera arrivé.

Si un usufruit a été légué pour cinq ans à Mævius, et qu'il soit déclaré dans le testament que cet usufruit passera à Titius après l'expiration de ces cinq ans, que Mævius vienne à mourir deux ans après la mort du testateur, l'usufruit des trois années restantes n'appartiendra point encore à Titius, mais l'utilité en appartiendra dans l'intervalle à l'héritier, comme propriétaire, en sorte que l'hypothèque consentie par Mævius ne portera que sur deux années de jouissance, et celle consentie par Titius ne produira son effet qu'après l'expiration des cinq années. L. uxori 35, ff. de usu et usufr. legato. L. et post litem 12, §. ult. ff. familiæ erciscun. argum l. si tibi ususfructus 8, ff. usufruct. quemadm. cavea.

Si l'usufruit est légué à Titius, et après lui à Mævius, il n'y aura point là de substitution fideicommissaire, mais deux constitutions d'usufruit ayant leur source commune dans le testament, de sorte que Titius mort, Mævius tiendra

l'usufruit des mains mêmes du testateur; l'usufruit de l'un et de l'autre pourra être hypothéqué au même instant, mais l'hypothèque consentie par Mævius ne produira son effet qu'après le décès de Titius. Il en serait autrement si la transmission de l'usufruit s'étendait à une série indéfinie d'individus, il y aurait alors substitution fideicommissaire, parce qu'on ne peut concevoir une propriété perpétuellement séparée de l'usufruit.

Si l'usufruit d'un fonds a été légué sous condition à Caïus, et que ce fonds, séparation faite de l'usufruit, ait été légué purement à Titius, l'usufruit se joindra dans l'intervalle avec la propriété, et profitera, non à l'héritier, mais au légataire de la propriété, de sorte que la suspension de la condition profitera à celui-là même auquel le non-événement de cette condition aurait profité. L'hypothèque que l'usufruitier peut consentir d'avance n'opérera done son effet qu'après le laps de ce temps de jouissance intermédiaire.

Si le testateur avait légué son fonds à Titius, et l'usufruit de ce même fouds à Mævius, il ne faudrait pas, en s'attachant à la subtilité des lois romaines sur ce point, décider que l'un et l'autre concourraient pour l'usufruit, Titius gardant pour lui la propriété du sol; mais d'après les règles de l'équité, il faudrait dire que la nue propriété aurait été léguée à Titius, et l'usufruit à Mævius, de sorte que l'hypothèque consentie par Mævius ne s'applique pas seulement à la moitié, mais à la totalité de l'usufruit.

Si une certaine maison avec ses confins, et telle qu'elle est située et se comporte, avait été léguée à Titius, ad inhabitationem vel ad fruendum, ou un fonds ad alimenta, la pleine propriété et non le simple usufruit, sera censée avoir été léguée, l. 4, l. pen. §. qui fratris 1, ff. de alim. vel cibar. legat., à moins qu'il n'y eût la clause subséquente quamdiù vivit, ou autre semblable, de sorte que

l'hypothèque s'appliquerait non à l'usufruit, mais à la pleine propriété (1).

218. L'hypothèque sur l'usufruit s'éteindra avec cet usufruit, ou revivra dans les mêmes circonstances. Ainsi l'hypothèque s'évanouira quand l'usufruit s'éteindra par la mort naturelle ou civile de l'usufruitier, et l'expiration du temps pour lequel il aura été accordé. Elle disparaîtra pareillement par l'extinction de l'usufruit, par l'effet de la consolidation, c'est-à-dire de la réunion sur la même tête des deux qualités d'usufruitier et de propriétaire. Il faut toutefois tempérer cette disposition de la loi par l'équité, dans certains cas: 1° Quand l'acquisition du domaine de la propriété faite par l'usufruitier sera commutable et résolue ex causâ inexistenti contractui, l'usufruit revivra comme nous l'avons déjà observé sur la loi si tibi fundi 17, ff. quibus modis ususfr, etc.; 2a quand l'usufruit a été racheté d'un tiers par l'acquéreur de la nue propriété, et qu'il n'a pas pris fin naturá suâ, si par l'effet d'un pacte de réméré, cet acheteur est évincé, il ne pourra l'être que de la nue propriété, et on devra lui laisser l'usufruit pour la durée de la vie seulement de celui qui naguère était usufruitier, et qui a vendu son usufruit per l. necessario, §. fin. de peric. et commod. rei vendita. L'hypothèque revivra donc dans les mêmes circonstances.

219. La cession que ferait l'usufruitier de son droit à un tiers, n'opérerait rien quant à l'extinction de l'usufruit, parce qu'elle n'emporterait point la translation ou l'abandon dụ droit en lui-même qui, par la nature et la disposition de la loi, n'est point transmissible à un tiers du chef de l'usufruitier. L'usufruitier est dit, dans ce cas, nihil agere, et cette expression de l'empereur romain in §. penult. inst.

(1) Voyez, pour les fruits qui peuvent faire l'objet de l'usufruit et de l'action hypothécaire, ce que nous en dirons dans la seconde partię, chap. 1, sect. 3, de l'action hypothécaire.

de usufruct., ne s'applique point à la cession du droit de perception des fruits, comme quelques interprètes out voulu l'insinuer, mais à l'extinction du droit d'usufruit pour laquelle cedendo extraneo nihil agitur, la cession du domaine on d'un droit acquis ne se pouvant opérer - qu'autant qu'elle se fait selon les lois, et n'opéraut rien quant à ce domaine ou à ce droit acquis, quand elle est défendue, ainsi que l'enseigne Ulpien; ut plerumque dit Voet, nihil actum creditur ac negotium nullum est ubi contrà leges gestum, l. non dubium 5, C. de legibus.

220. Nec obstat ce que dit Celse, l. quod meo 18, S. si furioso 1, ff. de acquir, vel amilt. possess., que la possession de la chose se perd quand on livre cette chose à un furieux qui a eu un instant lucide, nonobstant que le furieux n'ait point acquis cette possession. Il n'est pas question, dans ce cas, de la perte du domaine ou d'un autre droit, mais de la seule possession qui étant purement de fait, se perd par le simple fait de tradition ou d'abandon; et l'on ne doit jamais argumenter, dit Voët, de la perte de la possession à la perte du domaine ou d'un autre droit acquis, la possession n'ayant rien de commun avec la propriété, l. naturaliter 12, §. 1,ff. de acquir. vel amitt. possess. Il y a donc cette différence, dit Ulpien, entre le domaine et la possession, que le domaine reste toujours sur la tête d'un individu, alors même qu'il ne veut plus être propriétaire ou qu'il veut abdiquer son droit; et que la possession s'éloigne de lui dès qu'il a résolu de ne plus, posséder; non qu'il soit obligé de garder malgré lui sa chose, s'il veut l'abandonner, mais le droit de domaine ne peut être abandonné par lui qu'autant qu'il l'a effectivement transféré à un autre. V. Voët, quibus modis ususfructus, etc....

221. Nous dirons, par exemple, du tuteur ou du mineur qui vend son immeuble sans formalités de justice et contre le vœu de la loi, et son opposition toute puissante,

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