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La relation de la substance de l'acte nul comme authentique, et du vice de forme que les parties auraient l'intention de purger, serait donc absolument inutile. 260. Il n'est pas question.en effet ici du fond de la disposition, mais de l'authenticité et de l'hypothèque qui y est attachée.

Le fond de la disposition, quand l'acte vaut comme sous seing privé, reste et n'a pas besoin d'être confirmé.

Le fond de la disposition, quand la substance de l'acte croule pour défaut de forme comme s'il s'agissait d'un testament, par exemple, non revêtu des solennités requises, à peine de nullité, est susceptible d'être confirmé, exėcuté ou ratifié, tout comme le fond d'une donation nulle en la forme peut être ratifié par les héritiers ou ayanscause du donateur après son décès; je dis après son décès, car tant qu'il existe, la donation nulle en la forme ne peut être ratifiée par lui; tout le nerf de la donation est dans les formes substantielles constitutives de son existence, et il faudrait pour qu'elle pût produire quelque effet, qu'elle fût refaite en la forme légale (1339.)

Le fond de la disposition, quand l'acte fait en contravention aux articles insérés en l'article 68 de la loi du 25 ventôse an 11, est nul pour n'être pas revêtu de la siguature de toutes les parties, dans le fond comme dans la forme, le fond de cet acte, dis-je, peut être ratifié expressément ou tacitement; la nullité peut être couverte, quant au fond, non quant à la forme, en sorte que la relation de l'hypothèque dans l'acte confirmatif serait

vaine.

Il en serait autrement si dans cet acte confirmatif, une hypothèque était additionnellement et dispositivement stipulée pour sûreté du fond de l'acte primitif qu'on a fait revivre. Elle devrait son existence à l'authenticité de la stipulation nouvelle insérée dans cet acte, et sa date à l'inscription prise en vertu de ce même acte.

261. Ce que nous disons se doit limiter à la ratification de l'acte nul comme authentique qui existe encore, et qui n'est point représenté par une copie légalement tirée. Cette copie pourrait suppléer les solennités de l'acte pri

mitif dans les circonstances suivantes :

Quand une copie n'est point ancienne, c'est un principe général que quoique certifiée et souscrite par les notaires les plus habiles et les plus dignes de foi, elle ne forme pas une preuve pleine et entière, mais une semi-preuve, ou plus ou moins, sous l'arbitrage d'un juge prudent et équitable, en ayant égard à la vraisemblance de la chose, au nombre et à la qualité des circonstances. Ce principe est consigné dans l'art. 1335 qui porte que lorsque ces copies ne sont point anciennes, elles ne peuvent servir que de commencement de preuve par écrit ; ce qu'il faut étendre au cas où il s'agirait d'un fait et d'un original anciens mais d'une copie non ancienne, au cas où les solennités seraient énoncées partie absente ou contredisant, en sorte qu'il faut qu'il conste de l'intervention du magistrat parties présentes ou dûment appelées, et que l'assertion des notaires ne peut suffire.

La raison est, 1o que l'écriture publique du notaire, dit Dumoulin, ne peut s'appliquer qu'à l'objet sur lequel il est prié d'acter par les parties, et il ne peut être prié par les parties que sur ce que les parties gèrent alors; 2o qu'un notaire ne peut dresser un acte que sur ce qui est fait, géré en sa présence par les parties, et sur ce qui dépend de leur consentement, ce dont il a connaissance par ses propres sens, la vue et l'ouie, par la perception des autres sens corporels comme le tact, l'odorat, le goût. Or, au temps de la confection de la copie, l'acte original ne se fait pas, son contenu n'est point géré par les parties, et les notaires ne peuvent être priés de la vérité d'un fait y contenu. Mais il faudrait limiter le principe général sus-énoncé si la copie était faite en présence et du consentement réci

proque des parties (§. 1er de l'art. 1335); et il faudrait encore pour cela que la partie adverse ne consentît pas simplement à la copie, mais acquiesçât à la vérité, à la preuve, à l'efficacité de l'original et de la copie, en appouvant la copie comme vraie, ou tacitement, ou expressément. Il ne serait pas nécessaire alors de l'intervention du juge, et la copie vaudrait comme confession authentique, de la part des parties, que la teneur et les solennités décrites sont vraies, et quant à ce, une copie de cette nature ferait la même foi que l'original, serait véritablement un acte authentique et original, et prouverait contre

tous ut ex tunc.

Si toutes les solennités requises pour la validité de l'acte qui n'existe plus, sont énoncées dans cette copie, quoique l'assertion de celui qui l'a faite ne suffise point pour les constater; cependant si les parties en préseuce desquelles, ou elles dûment appelées, la copie a été tirée, n'opposent rien, Dumoulin pense que toutes les formalités sont censées intervenues dans le premier acte, et que la copie fait pleine foi non-seulement à l'égard de ceux entre lesquels elle a été faite, mais même à l'égard des tiers en tant qu'un acte public leur peut préjudicier. Or la solennité extrinsèque est présumée énoncée quand on n'en oppose point le défaut nec in genere, nec in specie; il en serait autrement s'il était opposé in genere, comme si une partie disait que l'acte n'est point solennel ni probant, et qu'il ne peut y être ajouté foi; ce qui suffit pour qu'on ne doive pas attacher plus de foi à l'acte qu'il n'en mérite en soi'; car on n'est point tenu in specie vel in individuo de dévoiler le vice de forme ou le défaut de preuve qui doit peser sur son adversaire, ni de l'en instruire.

Toutes les solennités requises dans l'acte primitif étant donc énoncées dans la copie, le défaut d'authenticité de cet acte qui ne subsiste plus, sera couvert par cette copie, et les hypothèques subsisteront ut ex tunc. Je dis qui

ne subsiste plus, parce que si cet acte subsistait, la représentation pouvant toujours en être exigée, le défaut de solennité (1) sortirait et apparaîtrait de l'acte même et nonobstant le silence des parties, et qu'elles ne l'aient point opposé lors de la confection de la copie nec in genere nec in specie, la copie serait infectée du même vice que l'acte original, et ne pourrait valoir davantage.

262. Les grosses ou premières expéditions maintiendront, comme les copies dont nous venons de parler, les hypothèques ut ex tunc, et feront la même foi que l'original. Il ne peut être délivré à la partie intéressée qu'une grosse, à peine de destitution du notaire, à moius qu'il n'y ait ordonnance du président du tribunal de première instance, portant injonction au notaire d'en délivrer une autre, laquelle ordonnance demeurera jointe à la minute (art. 26 de la loi du 25 ventôse an XI).

263. Mais cette seconde grosse, délivrée sur ordonnance du président, ferait-elle la même foi que l'original qui aurait disparu ou qui n'existerait plus? Quoique l'expression dont se sert la loi dans l'article 1335, no 1er, semble induire la négative, j'ai cependant de la peine à croire que cette expédition ne puisse être mise au rang des grosses ou premières expéditions, et qu'on ne doive pas l'assimiler à la copie tirée de l'autorité du magistrat.

La jurisprudence du parlement de Paris était, quant à la date de l'hypothèque, réellement contradictoire. Elle avait consacré en principe que l'hypothèque ne datait que du jour de la délivrance de la seconde grosse, et cela pour empêcher qu'un créancier remboursé ne s'entendît avec son débiteur pour faire revivre son hypothèque au préjudice des créanciers postérieurs, ce qui impliquait contradiction: car, comme l'observe fort bien M. Delvincourt, si c'était la présomption de paiement qui empêchait de

(1) In authent., si quis collat.

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colloquer le créancier à son rang, la même présomption devait empêcher qu'il ne fût colloqué en aucune manière. Un arrêt du 30 août 1768 prouve cependant que le parlement de Paris était revenu ensuite à une doctrine plus saine.

264. Mais la règle établie par l'article 16 de la loi du 25 ventôse est-elle tellement rigoureuse qu'on ne puisse y apporter quelques exceptions fondées sur la justice et la raison? Le motif de cette prohibition est le préjudice qui pourrait résulter de la délivrance de deux grosses à l'une des parties, pour l'autre partie qui peut-être a satisfait à son obligation, comme il peut en apparoir par l'écriture biffée ou la quittance écrite au dos de la première expédition. Mais ce préjudice ne pourrait avoir lieu dans les actes dont l'effet dépend de la seule volonté de celui qui denanderait une seconde grosse. C'est l'opinion de Dumoulin, que le chancelier Guilielme, qui avait pour ses commentaires la plus grande admiration, a convertie en loi par l'article 178 de l'ordonnance de 1539.

Mais, outre les actes dont nous venons de parler, dans lesquels se réfléchit l'authenticité de l'original, et qui maintiennent les hypothèques ex tunc, n'y en a-t-il pas d'autres qui, différens du premier, ont cependant la vertu de le faire revivre?

Dumoulin élevait la question de la manière suivante, en annonçant qu'elle était de la plus haute importance in praxi. Titius a institué un fondé de pouvoir pour vendre son fonds en présence de deux notaires; ensuite ce fondé de pouvoir a passé vente, devant ces notaires, à Caïus auquel les notaires livrent expédition de l'acte de vente dans lequel, comme il est d'usage, est insérée tout au long la teneur de la procuration. Cette expédition fait-elle pleine foi du mandat, non-seulement contre celui qui, comme procureur fondé, a vendu, mais encore contre Titius et contre tous autres ? Dumoulin décidait, tom. 1, tit. 1, dénombrement, que l'acte ne ferait pas pleine foi du man

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