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dat y relaté et reçu par le même notaire, quoique toute sa teneur y fût insérée, si au temps même où se faisait le second acte, le premier ne pouvait être répété, refait par la même partie ou les mêmes parties comparaissantes; par la même partie, putà si elle avait fait devant un notaire un testament, et ensuite un codicile dans lequel, en ajoutant à ce testament ou en le révoquant, elle rappelait sa teneur. Certainement, disait Dumoulin, ce second acte ou codicile fera pleine foi du testament y relaté comme le premier original, quand cet original aurait péri ou qu'il n'apparaîtrait pas, parce que l'un et l'autre acte dépend de la volonté du même disposant qui pouvait de nouveau refaire l'un et l'autre à l'époque du dernier, et Dumoulin disait que la décision devait être la même dans le cas où le second acte aurait lieu devant un autre notaire, parce que ce second acte fait par lui-même pleine foi de tout ce qui pouvait être fait ou révoqué par le même comparant, même relativement à tous les accessoires qui sont en suspens jusqu'au décès. Par les mêmes parties comparaissantes, putà si quelqu'un avait donné entre-vifs à un individu présent et acceptant, et qu'ensuite il eût donné, à cause de mort, à la même personne présente et acceptante, en tant que le premier acte par le défaut de capacité du donateur encore mineur, ou pour défaut d'insinuation ou autrement, pourrait être détruit. Certainement, continuait Dumoulin, le second acte contenant la teneur du premier, reçu même par un autre notaire, fait pleine foi, parce qu'au temps du dernier acte, le premier pouvait aussi avoir lieu par la volonté et le pouvoir des parties concourant ensemble, et ainsi le second acte est indistinctement authentique, même pour le premier acte et après un intervalle de temps écoulé, ce qui aura lieu, ajoutait-il, même dans le cas où le dispositif seulement du premier acte serait répété dans le second.

Mais, concluait-il, pour que le premier acte revive par

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la force du second acte seul, il faut que ce soit ut ex nunc et non ut ex tunc, parce qu'il ne pourrait valoir, quant à l'hypothèque, à la date du premier acte, mais à la date de l'acte relatant seulement, à moins que l'original authentique du premier acte ne fût reproduit.

J'ai cru devoir exposer en substance la doctrine de Dumoulin sur ce point, quoique peu applicable à notre usage, parce qu'il me semble qu'on ne peut avoir un guide plus habile que ce profond jurisconsulte, même dans des matières desquelles on ne peut tirer des inductions que par analogie.

266. Après avoir parlé des règles constitutives de l'authenticité d'un acte en France, il nous reste à traiter la question de savoir si un acte authentique passé à l'étranger pourrait produire hypothèque sur les immeubles situés en France.

L'article 2128 du Code civil est ainsi conçu: « Les <«< contrats passés en pays étrangers ne peuvent donner « d'hypothèque sur les biens de France, s'il n'y a des dispositions contraires à ce principe, dans les lois po<«<litiques ou dans les traités. »

Les notaires, pour que leurs actes puissent produire hypothèque sur les biens situés dans ce royaume, doivent donc être des notaires établis en France; car l'autorité publique qui est la cause efficiente de l'hypothèque, et du sceau de laquelle les notaires sont dépositaires, ne peut être une autorité étrangère non reconnue en France où l'on ne reconnaît d'autre autorité que celle du roi.

De-là vient la maxime extrà territorium jus dicenti impunè non paretur.

Pour qu'un acte public puisse produire hypothèque, il ne suffit pas, en effet, de la qualité de personnes publiques qu'ont les notaires étrangers dans les lieux où ils sont établis (1), laquelle peut donner à leurs actes en France, (1) Pothier, Traité de l'hypothèque.

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et par tout ailleurs, une autorité de créance, il faut encore que le notaire qui le reçoit ait une autorité de pouvoir et de jurisdiction nécessaire. Or, si un notaire qui instrumente en France, hors de l'étendue de son ressort, ne fait qu'un acte nul qui peut tout au plus valoir comme écriture privée, quand il est revêtu de la signature de toutes les parties, à combien plus forte raison doi -il en être ainsi relativement à l'hypothèque d'un acte passé à l'étranger?

267. Comme l'autorité française est reconnue dans tous les pays de l'obéissance du roi, il s'ensuit que les contrats reçus dans les colonies pourront emporter hypothèque, pourvu cependant qu'on ait eu soin de les faire enregistrer en France (1).

268. Vainement quelques auteurs ont ils cherché à excepter le contrat de mariage de cette règle, en le faisant jouir, quoique passé à l'étranger, de l'hypothèque sur les biens situés en France? Cette question, fort controversée autrefois, ne nous semble pas devoir faire aujourd'hui la matière d'un doute. Les dispositions de l'article 2128 du Code sont générales, et comprennent nécessairement le contrat de mariage comme tous les autres contrats. Ainsi il serait inutile de retracer ici les savantes discussions des jurisconsultes sur cette question qui n'en est plus une.

Dans tous les contrats possibles, en effet, qu'ils appartiennent au droit des gens et à tout le genre-humain, ou qu'ils soient particuliers à un peuple, l'hypothèque est un pur effet du droit civil, attaché au sceau de l'autorité pu

(1) Arrêt de la cour de cassation du 7 décembre 1807; lai du 29 septembre 1791, art. 10; loi du 5 décembre 1790, art. 5. On peut prendre inscription sur un bien situé en France en vertu d'un acte signé par un prince, et contresigné par son secrétaire intime de cabinet, dans un pays dont il était alors souverain, et qui depuis a été réuni à la France. (Arrêté du7 fructidor an 3; arrêt de la cour de cassation du 7 juin 1809.)

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blique de France; autorité qui est de pouvoir et de jurisdiction.

Boullenois, Traité de la personnalité et de la réalité des lois, tom. 1, pag. 631, et d'autres auteurs, pensaient que l'hypothèque devait être attachée de droit aux contrats de mariage passés à l'étranger, par la raison que cette espèce de contrat est de toutes les parties du monde, mais cette opinion ne peut être admise. Si l'hypothèque est stipulée dans le contrat de mariage, il faut la soumettre aux règles communes; si elle n'a point été stipulée, elle existe non en vertu du contrat, mais par la force seule de la loi,

269. L'article 2128 renferme cependant une exception à cette règle dans le cas où il y aurait des dispositions contraires à ce principe dans les lois politiques ou dans les traités,

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Quand le roi de France, en vertu de son autorité souveraine, croira devoir accorder aux actes étrangers la vertu d'emporter hypothèque sur les biens immeubles situés en France, ces actes produiront cet effet, non par eux-mêmes, mais par la volonté du souverain de France. Il en sera de même quand, par des traités passés entre le roi de France et un souverain étranger, il aura été donné une hypothėque réciproque aux actes publics; c'est ainsi que par un traité entre le roi de France et le roi de Sardaigne, qui a été revêtu de lettres-patentes enregistrées au parlement de Paris le 24 septembre 1760, on a donné une hypothèque réciproque, dans les états des deux monarques, aux actes publics, arrêts, jugemens, etc...., et que des traités semblables avaient été faits avec la Lorraine, aux mois de juillet 1718 et juillet 1738, traités qui sont devenus inutiles par la réunion de la Lorraine à la couronne de France.

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270. Mais comment et par quels moyens l'hypothèque sera-t-elle, dans ces cas, attachée aux actes publics reçus à l'étranger? Faudra-t-il qu'elle soit expressément et

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spécialement stipulée conformément aux lois de France ou devra-t-on suivre pour cet objet le prescrit de la loi du lieu où l'acte est passé?

Pour résoudre cette question, il faut fixer le principe qui sert de base à l'exception. Quand l'acte public reçu à l'étranger produit hypothèque en France, ce n'est point en vertu de l'autorité étrangère ou d'une extension fictive de cette autorité en France, c'est en vertu de l'autorité du roi de France qui seul peut donner à ces actes une vertu que par eux-mêmes ils n'ont pas, et qui leur imprime d'avance le sceau de son autorité. Dans aucun cas, en effet, l'autorité étrangère ne peut avoir de force civile en France; et s'il est certain que l'acte public dont nous parlons ne pourrait avoir d'exécution parée en France, sans qu'on n'y eût préalablement apposé le scel royal, et qu'il ne fût rendu exécutoire en France, à plus forte raison estil certain que cet acte qui produira hypothèque en France, ue la devra qu'à l'autorité du roi de France. Il en sera d'un traité réciproque fait entre les deux souveraius, comme d'une loi politique faite par le roi de France seul. Dans ce dernier cas, il n'est pas douteux que le roi de France donne sur les biens de France, aux actes publics étrangers, une vertu qu'ils n'ont pas; dira-t-on, dans ce cas, que c'est par une extension de l'autorité étrangère que ces actes produiront hypothèque en France? non certes. Donc c'est encore par un pur effet de l'autorité du roi de France, qu'ils produisent hypothèque en France par les stipulations d'un traité réciproque.

Ce principe bien établi, la conséquence est évidente, l'hypothèque ne sera valable qu'autant qu'on se conformera aux dispositions de l'article 2129 du Code, pour la stipulation et la spécialité. Dans le cas où par une loi particulière, par exemple, le roi de France aurait donné aux actes publics étrangers la vertu de produire hypothèque sur les immeubles d'un débiteur français, pourrait-on

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