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l'échéance, refuse de s'acquitter. D'un autre côté, l'article 193 du Code de procédure ne distinguait pas le cas où la reconnaissance était provoquée avant le terme de l'obligation, d'avec celui où elle était provoquée après le terme; et il mettait indifféremment les frais à la charge du créancier si le débiteur ne déniait pas sa signature. La loi du 3 septembre accorde implicitement au créancier la répétition des frais de la reconnaissance, lorsqu'elle n'a été provoquée qu'après l'échéance du terme, et cela, soit que le débiteur ait confessé, soit qu'il ait dénié sa signa

ture.

En outre, cette loi reconnaît bien que la reconnaissance ou la vérification, quoique provoquée avant l'échéance de l'obligation, est un jugement susceptible de produire une hypothèque judiciaire; mais elle suspend l'effet de cette hypothèque en interdisant au créancier la faculté de prendre aucune inscription avant l'échéance ou l'exigibilité; d'où il suit que si, au mépris de cette défeuse absolue, le créancier prenait une inscription, la radiation pourrait en être demandée, tant par le débiteur que par les autres créanciers (1), à moins qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 5 août 1807, il ne fût convenu que le créancier pourrait prendre inscription avant l'échéance.

288. Les décisions arbitrales doivent être mises aussi au rang des jugemens qui emportent hypothèque; mais elles ne peuvent produire cet effet qu'autant qu'elles sont revêtues de l'ordonnance judiciaire d'exécution.

289. Les jugemens rendus dans les pays de l'obéissance du roi, dans les colonies françaises, emportent hypothèque comme tous autres jugemens, pourvu qu'ils soient enregistrés en France (2).

(1) Répertoire de jurisprudence, vo Hyp., sect. 2, §. 3, art. 5. (2) L'inscription prise en vertu d'une sentence arbitrale non revêtue

290. L'hypothèque judiciaire ainsi constituée s'applique aux immeubles actuels du débiteur et à tous ceux qu'il pourra acquérir par la suite, sauf les réductions autorisées par l'article 2161 du Code.

S. 2. De l'hypothèque résultant des jugemens rendus par des tribunaux étrangers.

SOMMAIRE.

291. L'hypothèque ne peut résulter des jugemens rendus en pays étranger qu'autant qu'ils ont été déclarés exécutoires par un tribunal français.

292. Mode à suivre pour rendre exécutoires les jugemens rendus en pays étranger, entre étrangers et Français. 293. Une nouvelle discussion est également nécessaire quand le jugement est rendu entre étrangers.

294. Quand les jugemens étrangers produisent hypothèque en France, sans avoir été préalablement rendus exécutoires. 295. Les principes qui viennent d'être développés s'appliquent aux sentences arbitrales rendues en pays étranger, ainsi qu'aux jugemens portant vérification ou reconnaissance d'écriture sous seing privé.

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291. L'hypothèque ne peut résulter des jugemens rendus en pays étranger, porte l'article 2123 (1), qu'autant

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de l'ordonnance du président du tribunal de première instance, ou de celui de la cour, si le compromis est sur appel, est nulle, alors même qu'elle aurait été prise après le dépôt et l'enregistrement. ( Arrêt de cas ́sation, Journal du palais, tom. 5, p. 401. )

(1) Il ne faut pas confondre, avec les jugemens rendus en pays étranger, les jugemens des consuls français, qui sont rendus à l'étranger, et néanmoins emportent hypothèque. L'art. 2123 doit s'entendre des jugevens rendus par des tribunaux étrangers.

qu'ils ont été déclarés exécutoires par un tribunal français, sans préjudice des dispositions contraires qui peuvent être dans les lois politiques ou dans les traités.

La force coactive des jugemens étrangers, en France, ne peut dériver que de l'autorité souveraine de France. Quand le sceau de cette autorité s'imprime d'avance à ces actes par des traités entre les deux nations, dans lesquels ils sont réciproquement déclarés exécutoires, ou dans des lois politiques, il est inutile qu'ils soient de nouveau rendus exécutoires par les tribunaux français. Telle est l'exception à la règle, que les jugemens rendus en pays étranger n'emportent hypothèque qu'autant qu'ils sont déclarés exécutoires par un tribunal français.

Nous allons donner quelques développemens sur cette règle, et l'exception qui y est apportée par la loi.

292. Quel est le mode à suivre pour parvenir à rendre exécutoires les jugemens rendus en pays étranger? Suffitil d'une simple ordonnance d'exécution?

Quand de simples particuliers passent une convention, ou souscrivent un engagement par-devant un officier public étranger, capable de lui donner une forme probante et authentique, cet acte public, pour être exécutoire en France, n'a besoin que d'une ordonnance de pareatis, parce que les parties elles-mêmes ayant été juges et arbitres de leurs propres intérêts, l'autorité publique n'a point le droit de les discuter elle-même, si d'ailleurs l'acte n'a rien de contraire aux bounes mœurs, et si les parties sont capables de transiger. Il suffit donc, dans ce cas, d'impri mer à l'acte cette force coactive qu'il ne peut avoir en France, puisque celle qu'il tient de l'autorité publique de son pays ne saurait dépasser les limites des frontières, et il est impossible que le gouvernement français puisse se refuser à lui donner ce caractère d'exécution, puisqu'en vertu du droit des gens, et sans qu'il soit besoin de stipu lations politiques, ce qui est authentique dans un pays l'est

chez toutes les nations. La nécessité du commerce, qui exige que les individus d'une nation contractent avec les individus d'une autre nation, exige aussi qu'il y ait dans chaque état des moyens établis pour assurer la vérité des conventions, et que ces moyens produisent leur effet en tout pays; et ces formes étant une fois determinées, les actes qui en sont revêtus sont valables et pro bans dans leur forme extérieure pour tous les t tous les temps et fuoq pour tous les lieux.

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Mais quand l'autorité souveraine, qui rend la justice par l'organe de ses tribunaux, juge les contestations qui divisent les parties, quand ces parties viennent déposer au pied d'un tribunal leurs droits et leurs prétentions pour l'en rendre l'arbitre, l'acte par lequel ce tribunal termine leurs différends est un acte spécial et tout pur de la puissance souveraine, d'après cette maxime fondamentale de notre monarchie, que le roi est la source de toute justice.

Or, cet acte émané d'un souverain étranger, étant un acte tout pur de sa souveraine puissance, qui ne peut dépasser les limites de ses états, comment concevoir qu'il sera, dans tous les cas, possible de mettre cet acte à exécution en France en le revêtissant d'une simple ordonnance d'exécution? Le fond de cet acte peut-il donc recevoir une force qu'il n'a pas en France, d'une simple formule, et sans aucun examen? On le concevrait ainsi, s'il était l'ouvrage de simples particuliers, et qu'il fût dans leur domaine; mais c'est un acte de justice souveraine qui ne peut s'étendre en France, qu'autant que le roi de France se l'approprie et lui imprime le sceau de sa propre justice, et qu'il fait du fond de cet acte son propre ouvrage. Le simple raisonnement nous conduit donc à conclu é qu'il faut que ces jugemens soient assujettis à une nouvelle discussion préalable pour être déclarés exécutoires en France (1).

(1) Les jugemens rendus en pays étranger contre des Français ne ·

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Une loi positive vient à l'appui de ce raisonnement fondé sur les simples notions du droit public; c'est l'art. 121 de l'ordonnance de 1629, ainsi conçu (1) : « Les ju<< gemens rendus, contrats ou obligations reçus ès-royau«mes, souverainetés étrangères, pour quelque cause que « ce soit, n'auront aucune hypothèque, ni exécution en « notre royaume, mais tiendront les contrats lieu de simples promesses, et nonobstant les jugemens, nos su<< jets contre lesquels ils ont été rendus, pourront de nou « veau débattre les droits comme entiers, par-devant nos a officiers.» Nos sujets pourront de nouveau débattre les droits comme entiers: ces mots donnent la mesure de ce que peut en France un jugement rendu en pays étranger, entre un étranger et un Français, et ils établissent que les droits des parties doivent de nouveau être discutés par-devaut les tribunaux français. La cour d'appel de Poitiers et la cour de cassation out jugé conformément à ces principes, par des arrêts rapportés dans la collection des arrêts et jugemens, an 14, art. 27 (2).

Vainement a-t-on cherché à éluder l'article 121 de l'or donnance de 1629, au moyen d'une distinction, en soutenant que si cet article exigeait une nouvelle discussion, ce

peuvent être attaqués en France, lorsqu'ils ont été rendus du consentement de toutes les parties. ( Arrêt de la cour royale de Paris, du 14 juillet 1809.)

(1) La disgrâce du principal auteur de cette ordonnance, du chancelier Michel de Marillac, la fit tomber dans une sorte de discrédit; mais l'article 121 de cette ordonnance n'a pas moins constamment eu la force d'une loi de Pétat. La cour de cassation l'a consacré sur-tout par son arrêt du 18 pluviòse an 12.

(2) L'article 1o de l'ordonnance de 1629, relatif à l'exécution des jugemens rendus en pays étrangers, ne s'applique point à des jugemens étrangers, qui ne sont que la conséquence nécessaire ou l'exécution de décisions souveraines rendues en France contre un Français. En conséquence, ces jugemens obtiennent en France l'autorité de la chose jugée, sans être susceptibles d'aucune révision. ( Arrêt de la cour de cassation, du 30 juillet 1810.)

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