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point se placer sous cette hypothèque, parce qu'elle est étrangère à l'administration tutélaire.

Cette hypothèque s'applique à toutes les créances que les mineurs ou interdits ont sur leur tuteur, et qui résul tent de la gestion de ce dernier, comme le porte l'art. 2135,

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Il suit des dispositions de ces deux articles que les pupilles n'ont point d'hypothèque légale sur les biens de leurs subrogés tuteurs et curateurs, et que ceux qui ne sont assistés par la loi que d'un conseil judiciaire n'en ont point non plus sur les biens de ce conseil.

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Toute la responsabilité légale est fixée sur la tête du tuteur, parce qu'il a le maniement des deniers du pupille, et qu'il est réellement le seul comptable. En effet, le subrogé tuteur n'a dans aucune de ses attributions (1) le maniement des deuiers du pupille, ni l'administration de sa fortune il n'a qu'un droit de surveillance. Ses fonctions consistent en général, d'après l'art. 420 du Code civil, à agir pour les intérêts du mineur ou de l'interdit lorsqu'ils se trouvent en opposition avec ceux du tuteur. Ainsi l'article 446 charge le subrogé tuteur de provoquer la destitution du tuteur qui s'est rendu indigne de la tutelle; l'art. 451 le charge d'assister à l'inventaire qui doit être fait par le tuteur; l'art. 452 le charge d'assister à la. vente des meubles; l'art. 2137 le charge, sous sa responsabilité personnelle et sous peine de tous dommages et intérêts, de veiller à ce que les inscriptions soient prises sans délai sur les biens du tuteur, pour raison de sa gestion, même de faire faire ces inscriptions. Mais aucune de ces attributions ne met dans sa main un maniement réel des deniers du mineur. D'ailleurs l'hypothèque légale ne se présume pas, et la loi garde sur ce point un silence ab

(1) Voyez Répert. de jurisp., vo Hyp.

solu; et l'on voit dans les observations du tribunat, surla rédaction de l'art. 2135 du Code civil, que la proposition faite par le conseil d'état de faire porter l'hypothèque légale du pupille sur le subrogé tuteur fut supprimée, attendu, y est-il dit, « qu'il est de l'intérêt de la société de dégager autant qu'il est possible les immeubles des hypothèques; qu'il n'y a pas de nécessité d'imprimer l'hypothèque légale sur les biens du subrogé tuteur; que, « pour la sûreté de sa responsabilité, il est raisonnable «de se contenter de l'action que le mineur peut exercer << contre lui, etc.... »

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Le subrogé tuteur pourrait-il être passible de l'hypothèque légale dans certains cas, par exemple, lorsqu'il s'ouvre une succession à laquelle sont appelès le tuteur et le pupille, ou que le tuteur étant cité devant les tribunaux pour cause de malversation, le subrogé tuteur se trouve provisoirement chargé d'administrer? Je ne le pense pas. L'hypothèque générale est une charge trop considérable pour qu'on puisse l'établir par analogie dans le silence de la loi. Ce silence a d'ailleurs pour motif que le subrogé tuteur ne peut être qu'accidentellement chargé d'administrer, que cette administration ne doit point durer, et que dès-lors elle ne peut être assimilée pour son importance à celle du tuteur, où viennent se placer tous les intérêts et toute la fortune du pupille. La responsabilité du subrogė tuteur est donc dans ce cas purement personnelle.

Il en est de même des curateurs, et si nous parcourous les divers articles du Code qui règlent leurs fonctions nous verrons que nulle part ils n'ont le maniement des deuiers du mineur.

L'article 480 exige qu'un curateur assiste le mineur émancipé qui reçoit le compte de la tutelle. L'article 482 veut que le curateur assiste le mineur émancipé qui reçoit un capital mobilier et qui en donne décharge, et même que le curateur surveille l'emploi du capital reçu. Les ar

ticles 499 et 513 portent que les faibles d'esprit et les prodigues auxquels il est donné un conseil, ne pourront plaider, transiger, recevoir un capital mobilier, ni en donner décharge, aliéner ni grever leurs biens d'hypothèque, sans l'assistance de la personne préposée pour ce conseil, laquelle n'est elle-même qu'une espèce de curateur. Les curateurs n'ayant donc jamais le maniement réel des deniers, ni une gestion effective, ne peuvent être passibles de l'hypothèque légale.

318. Il en est autrement du protuteur préposé à l'administration spéciale des biens que le mineur domicilié en France a dans les colonies ou réciproquement. Les fonctions déférées sous ce nom sont de véritables tutelles, tout comme les fonctions déférées au co-tuteur, nom que la loi donne au mari de la mère tutrice remariée, dans le cas où la tutelle lui est conservée. Les protuteurs et les co-tuteurs sont donc soumis à l'hypothèque légale du mineur.

319. Au reste, le pupille et l'interdit ont hypothèque légale sur les biens de leur tuteur, pour toutes créances, soit qu'elles dérivent du défaut d'emploi utile des somines par lui perçues, soit qu'elles résultent d'indemnités dues par le tuteur, pour omission de recette, négligence ou mauvaise administration, ou autre cause quelconque, même pour les créances qu'ils avaient sur leur tuteur avant l'acceptation de la tutelle. Dans ce dernier cas, en effet, le tuteur devait s'exécuter lui-même, et verser ces créances dans la caisse de son pupille, tout comme il devait recouvrer contre d'autres débiteurs ce qu'ils pouvaient devoir au pupille. L. quotiens 9, §. et generaliter 3 et 4, ff. de administ. et peric. tutor. L. tutor datus 69, ff. de fidejuss. argum. L. si pupilli 6, §. ult. Tout ce que le tuteur devait exiger de soi-même, et qu'il n'aura pas fait rentrer dans la caisse du pupille, tombera sous l'hypothèque légale, comme tout ce que celui qui gère les

affaires d'autrui n'a pas exigé contre lui-même, tombe sous l'action negotiorum gestorum. Il ne reste dès-lors qu'à examiner la nature de la dette du tuteur envers son pupille, et si elle est telle qu'elle doive être acquittée dans la durée de la gestion, ou si étant ex die vel conditione, l'acquittement n'en peut être exigé avant l'expiration de la tutelle; car si dans tout le temps de l'administration de la tutelle, le jour ou la condition de la dette n'a pas encore existé, comme on ne pourrait dans ce cas imputer au tuteur aucune omission ou négligence, pour n'avoir pas exigé l'acquittement de la dette contre soi-même, il est clair que cette dette ne saurait tomber sous l'hypothèque légale. Cùmque in hoc casu, dit Voët, nulla neglectæ exactionis culpa aut mora solutionis appareat, neque tutor in ullo peccaverit, consequens est hujus modi debitum in tutelæ judicium non transferri adeòque non fieri pupilli intuitu privilegiatum aut hypothecatum. Si, au contraire, la dette était pure, ou si le jour était échu, ou la condition apurée dans le temps de l'administration, la dette tomberait sous l'hypothèque légale. L. adversùs 3, C. de hæredibus tut. et curat. L. ità autem 5, §. debitor 4, ff. de admin. et peric. tut. L. si tutor 5, §. de tutel, et rat, distrah. D'où il faut conclure, dit Voët, qu'une telle dette commence ensuite à être munie de l'hypothèque légale qui accompague l'action de la tutelle, argum. de la loi quotiens tutor 9,

si pater familias 1,ff. de administr. et peric. tut. Cette conclusion de Voet fait naître la question de savoir si l'hypothèque légale ne datera que de la condition apurée ou du jour échu, ou si, au contraire, elle rétroagira à la date de l'acceptation de la tutelle. Les expressions de ce jurisconsulte semblent induire le contraire, cui consequens est, ut deinceps debitum tale incipiat hypotheca legali, actionem tutelæ comitante, munitum esse. Mais nous répondrons que le texte de l'article 2121 du Code est précis, ainsi que celui de l'article 2135; qu'ils accordent hy

pothèque légale au mineur, pour toutes créances à partir de l'acceptation de la tutelle; que quand la loi a voulu fixer une date particulière à l'hypothèque légale, elle s'en est formellement expliquée, comme pour les sommes dotales provenant de successions échues à la femme, ou de donations à elle faites pendant le mariage, ou l'indemnité des dettes par elle contractées avec son mari, et le remploi de ses propres aliénés; qu'en conséquence on ne peut fixer à l'hypothèque légale des pupilles d'autre date que celle fixée par la loi.

L'hypothèque légale da pupille diffère donc en cela de l'hypothèque légale de la femme; la raison de cette différence est que la tutelle a une durée fixe, tandis que le mariage ayant une durée indéfinie, il faut restreindre autant que possible l'état d'interdiction où se trouve le mari, quant à la disposition de ses biens. D'ailleurs la femme a sur le pupille l'avantage de pouvoir former demande en séparation de biens, quand son mari dissipe ses biens au point de ne plus offrir de sûreté suffisante pour les sommes qui pourraient lui écheoir par succession ou donation.

320. Au rang des créances privilégiées du pupille, doivent être placés les frais du procès auxquels le tuteur aurait été condamné en justice, pour la reddition de son compte, les arrérages échus de rentes ou autres prestations annuelles dues par le tuteur, alors même qu'il ne devrait pas le sort principal.

321. Ici s'élève une autre question: si le tuteur doit purement et simplement, ou au père du pupille, ou au pupille lui-même, le sort principal, mais si l'usage de cet argent du pupille, sous des intérêts annuels, lui a été laissé pour l'avenir par ses co-tuteurs ou protuteurs, ou que d'une autre manière la novation de la dette primitive ait eu lieu par le fait des autres protuteurs, une telle dette, respectivement au tuteur débiteur, tombera-t-elle

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