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Il ne reste plus qu'à régler l'ordre dans lequel seront colloquées les personnes envers qui elle s'est ainsi engagée.

Quant à l'immeuble dont elle a garanti la vente, il a été par-là même irrévocablement affranchi de son hypothèque. La femme ne peut la faire revivre entre les mains d'un tiers par une cession postérieure.

Quant aux tiers créanciers, il faut distinguer: ou la femme leur a fait une cession directe de son hypothèque, ou elle s'est solidairement obligée envers eux. Dans le premier cas, les tiers créanciers, comme cessionnaires directs, comme acquéreurs des droits et noms de la femme, doivent avoir la priorité sur ceux envers qui elle s'est solidairement obligée, quelle que soit d'ailleurs la date de leurs transports. C'est ce qu'a jugé la troisième chambre de la cour royale de Paris, par un arrêt rapporté dans le journal du palais, tome 1, 1813, p. 522. Le motif de cet arrêt est que, nonobstant la faculté que la femme a de s'obliger avec son mari, elle peut transporter ses créances, tant celles qu'elle a contre son mari, que contre un tiers. Elle ne pourrait personnellement empêcher les créanciers envers qui elle s'est obligée, de s'emparer de sa collocation; mais le tiers cessionnaire agit de son chef, et peut, comme subrogé, primer ces créanciers à qui il n'a point été fait nominativement cession et transport des droits hypothécaires de la femme. Dans le second cas, les créanciers envers qui la femme s'est solidairement obligée, ne peuvent avoir que des droits égaux, et se distribueront au sol le franc le montant de la collocation de la femme. Un arrêt de la seconde chambre de la cour royale de Paris, rapporté au journal du palais, tom. 3, 1816, pag. 239, a consacré ces principes.

Telles sont les conséquences inévitables du principe que la femme peut contracter toute espèce d'obligation sous le régime de la communauté; il ne lui reste que son action en indemnité contre son mari, laquelle peut se trouver

dénuée du secours de l'hypothèque légale. La cour de cassation a adopté formellement ces principes dans son arrêt du 12 février 1811, et ils ont été proclamés avec une sorte de solennité par le grand juge ministre de la justice, dans une circulaire adressée aux procureurs gé

néraux.

Il faut convenir que si l'intérêt de la société exige qu'on allège l'état d'interdiction où se trouvent les maris, et qu'on rende à la circulation une partie de leurs immeubles, l'intérêt des familles qui le fonde et lui est si intimement lié exige aussi que la dot des femmes soit garantie, et que le sort d'un objet si précieux ne soit point commis à leur fragilité. Il faudrait donc, comme l'a fait le législateur, sous des précautions salutaires, favoriser les moyens d'affranchir la partie des immeubles inutilement grevée d'hypothèque, donner à cette franchise légale toute la latitude compatible avec l'intérêt des femmes, et enchaîner cette facilité funeste qui les porte si souvent à se dépouiller des droils dont la loi leur assure avec tant de soin la conservation.

Il est vrai que cette faculté leur est interdite sous le régime dotal; elles ne peuvent, sous ce régime, renoncer à leur hypothèque, ni directement, ni en garantissant la vente d'un immeuble de leur mari, ni en s'obligeant solidairement avec lui. La raison est que cette renonciation serait une véritable aliénation du fonds dotal qui est pro hibé par le Code. Ainsi l'a jugé la cour de cassation.

Si les immeubles du mari auxquels l'hypothèque de la femme a été restreinte, sont devenus insuffisans, elle peut, aux termes de l'article 2131, demander un supplément d'hypothèque. La spécialisation de son hypothèque doit l'assimiler, pour ce regard, au créancier ayant hypothèque conventionnelle, et ce surcroît d'hypothèque datera du jour qu'il aura été obtenu eu justice, parçe

que, comme hypothèque légale, il doit être indépendant de l'inscription. Il en serait de même pour le tuteur.

361. «Les jugemens sur les demandes des maris et des tuteurs, porte l'article 2145, ne seront rendus qu'après avoir entendu le procureur du roi, et contradictoirement avec lui. Dans le cas où le tribunal prononcera la réduction de l'hypothèque à certains immeubles, les inscriptions prises sur tous les autres seront rayées.

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Nous avons vu que lorsque, soit le mari, soit la femme, formaient une demande en réduction, il fallait qu'elle fût précédée d'un avis du conseil de famille. Nous observerons ici qu'il n'est pas douteux qu'aux termes de l'article 2144, l'avis des quatre plus proches parens de la femme doit être approbatif pour válider et garantir son consentement, qui ne serait plus libre si on l'abandonnait à l'exclusive influence de son mari. L'adhésion du procureur du roi ne saurait balancer non plus un avis négatif de ces proches parens; car son ministère étant tout de protection, n'ayant pas d'ailleurs les élémens suffisaus pour connaître avec exactitude la valeur des biens. du mari, n'intervient que pour joindre son adhésion à celle de la femme et du conseil de famille, ou pour s'y opposer et les combattre si l'intérêt de la femme l'exige. Dans le doute, au moins est-il certain qu'il doit pencher pour le rejet de la demande en réduction.

L'article 2143 étant rédigé dans le même esprit que l'article 2144, il en doit être de même de l'avis du conseil de famille du mineur, et ce qui confirme cette vérité, c'est que lorsque l'hypothèque du pupille est restreinte dans l'acte de tutelle, un avis approbatif du conseil de famille est nécessaire; il en doit donc être de même lorsque la demande en réduction est formée après l'acceptation de la tutelle.

La radiation dont parle l'art. 2145 est une suite néces saire du consentement que l'hypothèque frappe sur les

immeubles désignés, et de l'affranchissement de tous les

autres.

La demande en restriction de l'hypothèque doit être portée devant le tribunal du domicile du mari ou du tuteur. L'art. 2159 le présuppose, puisqu'il dit que lorsque la réduction a pour objet des créances éventuelles ou indéterminées, il faut renvoyer la demande par-devant le tribunal où le créancier et le débiteur doivent être jugés. Quand les immeubles sont situés dans divers arrondissemens, c'est une raison de plus pour éviter aux maris et tuteurs d'aller de tribunaux en tribunaux, pour y subir les chances et les frais de trois procédures différentes.

362. Nous terminerons cette discussion par une observation générale, c'est que quoique les hypothèques légales de la femme et du mineur soient restreintes, elles ne conservent pas moins leur attribut essentiel, qui est d'exister indépendamment de toute inscription, d'avoir rang du jour du mariage ou de l'acceptation de la tutelle, et elles produiront sur les immeubles affectés ou désignés le même effet qu'elles auraient produit si la réduction ou la restriction n'eussent pas été convenues ou prononcées.

SECTION II.

Quelles sont les circonstances où l'inscription ne peut plus être prise utilement ?

SOMMAIRE.

363. Cas où l'inscription ne peut plus être prise utilement. 364. On ne doit point comprendre dans les cas où l'inscription ne peut plus être prise utilement, celui de l'article 2109, ni la disposition de l'article 2111, ni celle de la loi du 3 septembre 1807.

365. L'inscription prise par un créancier hypothécaire, depuis l'ouverture d'une succession vacante, est sans effet comme celle prise depuis l'ouverture d'une succession acceptée sous bénéfice d'inventaire.

La faillite, ainsi que l'acceptation d'une succession sous bénéfice d'inventaire, est une époque à laquelle le sort et la nature de toutes les créances doivent être définitivement réglés.

366. Les mêmes considérations militent avec la même force dans le cas de la vacance d'une succession.

367. Les mêmes raisons doivent faire décider que l'inscription ne peut plus être prise valablement dans le cas de la cession judiciaire.

368. Quid de l'inscription prise après l'adjudication définitive sur expropriation forcée?

369. Quid dans le cas d'une aliénation volontaire?

370. Les dispositions de l'art. 2146 ne s'appliquent ni au privilége du vendeur, ni à celui du cohéritier ou copartageant, ni à celui des créanciers et légataires.

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363. Nous avons expliqué, dans le paragraphe précédent, quelle était la relation de l'inscription aux différentes espèces d'hypothèques ; nous avons démontré qu'elle formait une condition essentielle de leur existence; et que les hypothèques légales seules de la femme et du mineurexistaient indépendamment de toute inscription, et que leur date était irrévocablement fixée au jour du mariage ou de l'acceptation de la tutelle.

La date de l'hypothèque ne s'établissant que par l'inscription, il est donc bien important de savoir quand cette inscription pourra être valablement prise, ou, ce qui revient au même, quand elle sera tardivement prise.

Nous ne dirons rien encore de la forme de l'inscription et de sa nullité lorsqu'elle est prise dans un temps utile; nous nous occuperons, au contraire, des cas où l'hypo

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