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thèque périt avant d'avoir reçu une existence légale, quelque régulière que soit d'ailleurs l'inscription destinée à la lui donner. C'est à M. Tarrible que nous devons encore la substance des réflexions contenues dans cette section. Comme il est impossible de rien dire après lui de plus judicieux et de plus solide en cette matière, il m'a paru sage de retracer ses réflexions.

La faculté de prendre inscription n'est pas illimitée ; il est des cas où elle n'est plus possible. Nous allons présenter de ces cas un tableau rapide.

L'art. 2146 du Code civil en indique deux : les inscriptions, porte cet article, ne produisent aucun effet si elles sont prises dans le délai pendant lequel les actes faits avant l'ouverture des faillites sont déclarés nuls. Il en est de même, ajoute-t-il, entre les créanciers d'une succession, si l'inscription n'a été faite par l'un d'eux que depuis l'ouverture et dans le cas où la succession n'est acceptée que par bénéfice d'inventaire.

Les articles 443, 444, 445 et 446 du Code de commerce, semblables en ce point aux lois antérieures, clarent nuls les actes donnant bypothèque sur les biens du failli, et susceptibles d'être annullés les actes d'aliénation, d'obligation ou de paiement faits dans les dix jours qui précèdent l'ouverture de la faillite. L'inscription est donc sans effet si elle a été prise dans les dix jours qui précèdent l'ouverture de la faillite, et à plus forte raison, elle ne peut plus être prise utilement après l'ouverture de la faillite.

L'inscription ne produit non plus aucun effet quand elle a été prise par le créancier d'une succession, si elle ne l'a été que depuis l'ouverture de cette succession, el si cette succession n'a été acceptée que sous bénéfice d'inventaire.

364. On ne doit point comprendre dans les cas où l'inscription ne peut plus être prise utilement, celui de l'arti

cle 2109 du Code, qui porte que durant les soixante jours accordés au copartageant pour inscrire le privilége de la soulte sur l'immeuble qui doit la fournir, nulle hypothèque ne peut avoir lieu sur le même immeuble; ni la disposition de l'art. 2111 qui dit que pendant les six mois accordés aux créanciers et légataires d'une succession, pour inscrire le privilége de la séparation du patrimoine, nulle hypothèque ne peut être établie avec effet sur les biens de la succession par les héritiers ou représentans au prėjudice des créanciers ou légataires; ni enfin la disposition de la loi du 3 septembre 1807, portant que lorsqu'il aura été rendu un jugement sur une demande en reconnaissance d'obligation sous seing privé, formée avant l'échéance ou l'exigibilité de cette obligation, il ne pourra être pris aucune inscription hypothécaire en vertu de ce jugement qu'à défaut de paiement de l'obligation après son échéance ou son existence, à moins qu'il n'y ait eu stipu lation contraire.

Dans ces cas, en effet, la faculté de l'inscription est plutôt suspendue qu'elle n'est anéantie, puisque rien n'empêche que le créancier hypothécaire n'inscrive sour hypothèque après les intervalles indiqués.

365. L'inscription prise par un créancier hypothécaire depuis l'ouverture d'une succession vacante, est sans effet et tardive tout comme celle prise depuis l'ouverture d'une succession acceptée sous bénéfice d'inventaire.

Le cas où une succession est vacante a en effet une si grande analogie avec celui où la succession a été acceptée sous bénéfice d'inventaire, que l'art. 814 du Code civil déclare communes aux curateurs des successions vacantes, les dispositions de la section III du titre des successions, sur les formes de l'inventaire, sur le mode d'administration et sur les comptes à rendre de la part de l'héritier bénéficiaire.

La faillite ainsi que l'acceptation d'une succession squs

bénéfice d'inventaire est un signe qui annonce que tous les biens du débiteur vont être mis en vente, et que leur prix va être distribué aux créanciers. Dès l'instant où la faillite et le bénéfice d'inventaire sont constatés, la possession et l'administration des biens sont ôtées au débiteur et confiées à des syndics ou à des héritiers bénéficiaires qui doivent un compte rigoureux. Il a paru sans doute équitable de fixer dans le même moment le sort et la nature de toutes les créances, et de ne pas souffrir qu'un créancier, à l'aide de quelques formalités que le hasard le mettait en position de remplir plus promptement, pût améliorer sa condition aux dépens des autres créanciers: on a voulu que les créanciers qui, dans cet instant, avaient une hypothèque ou un privilége bien établis, en conservassent les avantages; mais que ceux qui n'avaient qu'une hypothèque imparfaite et non consolidée par l'inscription demeurassent confondus dans la classe commune des créanciers chirographaires.

les

366. Ces considérations et ces motifs militent avec la même force dans le cas de la vacance d'une succession. Dès l'instant de l'ouverture, le débiteur n'existe plus; biens placés dans la main d'un curateur doivent être vendus, et leur prix doit être distribué aux créanciers. Si la conversion de ces biens en argent et la distribution du prix pouvaient se faire sur-le-champ, chaque créancier se présenterait avec son titre days l'état où il se trouverait alors, et serait colloqué dans le rang que ce titre lui assignerait. Or, les délais inséparables des procédures judiciaires n'ont pas pour but de ménager à quelques-uns des créanciers les moyens d'améliorer ou de consolider leur créance, mais de prendre les mesures nécessaires pour que le prix des ventes atteigne toute la valeur des biens vendus, et que les titres des créanciers soient vérifiés et classés.

Vainement dirait-on que la vacance d'une succession

ne prouve pas toujours son insolvabilité; mais il peut arriver aussi qu'une succession, quoique acceptée sous bénéfice d'inventaire, soit solvable, ce qui arrivera sur-tout fréquemment dans les successions dévolues aux mineurs qui, quelques riches qu'elles soient, ne peuvent cependant être acceptées que sous bénéfice d'inventaire, et cependant, dans ce dernier cas, le cours des inscriptions nouvelles est arrêté à l'époque de l'ouverture de la succession; pourquoi n'en serait-il pas de même à l'ouverture d'une succession vacante?

J'observerai ici que le principe que l'inscription ne produit aucun effet si elle est prise dans les dix jours de la faillite, ne peut s'appliquer aux priviléges sur les meubles qui sont laissés sous l'empire des règles communes. Quant aux immeubles, le vendeur, les prêteurs de fonds, les cohéritiers ou copartageans, les créanciers et légataires d'une succession, et le trésor public, peuvent inscrire leurs priviléges dans les dix jours de la faillite. La raison est que la prohibition de la loi ne s'applique qu'aux actes qui peuvent être faits en fraude des droits de la masse des créanciers. Or, les priviléges ci-dessus excluent toute idée de fraude: l'immeuble ne peut être censé vendu qu'autant que le prix en est payé ; le partage validé, qu'autant que les cohéritiers sont respectivement garantis. Dans "aucun cas, les créanciers de l'héritier ne doivent être payés avant les légataires et créanciers de la succession, et les immeubles acquis par le comptable depuis sa nomination, quelle que soit l'époque de l'ouverture de la faillite, ne sont pas moins censés acquis des deniers du trésor public.

Quant à l'hypothèque du trésor public sur les biens du comptable, elle doit être inscrite avant les dix jours. En ce qui concerne le privilége accordé au trésor par la loi du 5 septembre, pour frais de justice, il faut que le jugement soit autérieur aux dix jours; mais comme un délai de deux mois est imparti pour l'inscription de ce pri-,

vilége, il n'est pas nécessaire qu'elle ait lieu avant les dix jours.

367. Les mêmes raisous doivent faire décider que l'inscription ne peut plus être prise valablement dans le cas de la cession judiciaire, qu'un débiteur fait de ses biens à ses créanciers. Le débiteur, en effet, se dépouille de tous ses biens, et si la propriété de ces biens ne passe pas sur-le-champ à ses créanciers, ce n'est que parce que la valeur n'en est pas déterminée, et que l'ordre des créanciers n'étant pas encore réglé, on ne peut savoir quels sont ceux qui recueilleront cette valeur. Mais les biens abandonnés par le débiteur n'en sont pas moins vacans, et on nomme un curateur pour leur administration, tout comme dans le cas d'une vacance réelle de succession. Ce cas est donc identique avec ceux exprimés dans l'art. 2 146.

Cette opinion est confirmée par la disposition de la loi du 11 brumaire an 7, sur le même sujet; l'art. 5 de cette loi portait: <«< L'inscription qui serait faite dans les dix jours avant la faillite, banqueroute ou cessation publique de paiement d'un débiteur, ne confère point hypothèque. »

Cet article, en désignant les dix jours avant la faillite ou la banqueroute, ne faisait que retracer le vœu de l'ordonnance de 1673, qui ne s'appliquait qu'aux commerçans; mais, en ajoutant à ces circonstances celle de la cessation. publique de paiement d'un débiteur, il généralisa la disposition et l'étendit à toutes les inscriptions qui seraient prises sur les biens d'un débiteur quelconque dans les dix jours qui précéderaient la cessation publique des paie

mens.

L'art. 2146, en prononçant sur le même sujet, a adopté une autre rédaction. On ne voit ni dans les discussions du conseil d'état, ni dans les discours des orateurs, aucune réflexion qui explique les motifs de ce changement; on doit croire, par la même raison, que la loi nouvelle est rédigée dans le même esprit que celle du 11 bru

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