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tio de la même somme, l'un offre ou paje sa part, il ne peut répéter la moitié du gage, quand le gage pourrait être partagé; activement; si un créancier a trois héritiers, ou si, ab initio, il y a trois créanciers sous la même hypothèque, et que le débiteur paie à l'un d'eux la troisième partie de la créance, les deux autres pourront vendre tout le fonds hypothéqué sans aucune déduction. Ainsi, le nerf de l'hypothèque, son lien et son acquittement ne se divisent pas même de la part du créancier; mais sa vertu reste indivise, et cela devrait être ainsi alors même que le débiteur, payant à un des héritiers sa part, serait convenu avec lui que le fonds serait affranchi pour cette part, et alors même que l'héritier qui a été payé le prétendrait ainsi, ou le soutiendrait en justice, en prenant en main pour le débiteur (1).

De ce que le gage ne peut être divisé malgré le créancier, vel quovis alio respectu, il s'ensuit donc qu'il a une sorte d'indivisibilité improprement dite. C'est comme si le créancier était convenu de n'être point tenu de recevoir une partie de la dette, même d'un des héritiers du débiteur. Cette convention, continue Dumoulin, renferme une indivisibilité de paiement, non véritable, mais impropre, en ce que l'obligation ne cesse pas d'être divisible, quoique non divisible entre les héritiers du débiteur. Le paiement aussi n'est pas moins divisible entr'eux qu'il ne l'était à l'égard du principal débiteur, en ce qu'il ne procure pas moins la libération de la partie pour la portion payée; il reste seulement indivis ob pactum, non indivisible, si ce n'est improprement et par abus du mot. Autrement, il faudrait dire qu'à l'égard du principal débiteur lui-même, le paiement d'une obligation purement divisible serait indivisible, ce qui serait inexact et con

(1) Dumoulin, Traité de dividuo et individuo, pag. 210, c. 1 et 2, t. 3

traire aux vraies notions du droit : Quod nimis falsum et ineptum est, dit Dumoulin.

Ces développemens ne sont point inutiles, ils servent à fonder l'une des colonnes de notre régime hypothécaire.

De ce que l'hypothèque n'est point de sa nature indivisible, il s'ensuit que la loi qui établit en certains cas que l'hypothèque sera générale, peut modifier ce priucipe en certains cas aussi, sans faire fléchir ce prétendu principe d'indivisibilité qu'on suppose pris dans la nature des choses. Ainsi se justifie l'une des bases du régime hypothécaire, la spécialité, à laquelle la réduction consentie ou forcée de l'hypothèque générale offre une latitude convenable.

La divisibilité ou la réductibilité de l'hypothèque n'est donc point, comme on l'a prétendu, une innovation aux anciennes doctrines, une infraction extraordinaire à des principes immuables et nécessaires. C'est pour les avoir dénaturés, qu'on est parvenu à accréditer l'erreur de l'indivisibilité, et les conséquences qui en dérivent. La loi, qui pose en principe que l'hypothèque ne pourra être divisée, peut limiter ou modifier ce principe sans forcer la nature des choses; elle peut, sans être accusée d'innovation, d'inconséquence ou d'injustice, statuer que l'hypothèque générale pourra être restreinte ou réduite, en certains cas.

Avec bien plus de raison lui adresserait-on ce reproche, si elle portait le ciseau dans l'hypothèque conventionnelle qui, sans être indivisible de sa nature, ne peut plus être divisée, et cela par un effet de la convention qui, libre dans le principe, est devenue une loi pour les parties qui l'ont faite, loi sacrée qu'elles ne peuvent plus rompre que de leur consentement réciproque, d'après la maxime quod ab initio voluntatis est ex post facto necessitatis.

D'un autre côté, c'est une erreur que de prétendre

que la loi ne peut pas enlever à l'hypothèque conventionnelle le caractère de généralité.

L'hypothèque n'est point générale de sa nature. C'était, dans le dernier état du droit romain, un pacte prétorien arbitraire, par lequel un droit sur la chose était donné au créancier pour sûreté de sa créance sans possession transférée à celui-ci; pacte qui, par cette quasi-possession, différait du gage qui était un contrat de bonne foi fondé sur la chose, et suppléait au délaut de mise en possession effective. La destination naturelle de ce pacte était de s'appliquer à des choses convenues et spécifiées, susceptibles d'une quasi-possession. Si on lui a donné plus d'extension, il ne l'a due qu'à une fiction de la loi qui ne s'alliait point d'abord avec la simplicité du droit des Romains.

Aussi voit-on que l'hypothèque conventionnelle se divisait en spéciale et en générale, au gré des parties, et que cette division s'appliquait aussi à l'hypothèque légale et prétorienne. C'est ainsi que lorsque le préteur envoyait en possession de la chose vicieuse pour raison du dommage causé, une hypothèque spéciale s'acquérait par le fait même de l'envoi du préteur, et qu'une hypothèque générale s'acquérait, au contraire, si l'envoi avait eu lieu pour conservation de la chose ou pour legs.

Outre la première division de l'hypothèque en générale et spéciale, elle se divisait encore en expresse et en tacite. L'hypothèque tacite se divisait également en conventionnelle ou légale; en sorte que l'hypothèque, soit expresse, soit tacite, était susceptible du double caractère de spécialité et de généralité; et ce qu'il faut remarquer, c'est que l'hypothèque tacite, qui est l'hypothèque légale de nos jours, reposait sur une convention fictive des parties.

Ainsi, et en remontant à l'origine du droit d'hypothèque, sa généralité est d'exception, et non de principe éternel et nécessaire. La généralité et l'indivisibilité

n'étant donc point les caractères essentiels et primitifs de l'hypothèque, il s'ensuit que le législateur n'a point, comme on l'a prétendu, porté atteinte aux principes du droit en décrétant que l'hypothèque conventionnelle devait être spécialisée, et que l'hypothèque générale pouvait, en certains cas, être réduite. Ce principe de spécialisation n'a rien de contraire à la liberté des conventions; loin de là, il la favorise et la consolide. En effet, l'hypothèque générale attachée au sceau de l'autorité publique apposé à un acte notarié, était, en France, une émanation directe et nécessaire de la loi qui voulait que les actes publics contenant obligation emportassent d'euxmêmes, et sans stipulation, hypothèque générale sur les biens présens et à venir; hypothèque qui paralysait entièrement l'hypothèque spéciale, puisque celle-ci ne dérogeait point à l'hypothèque générale. De cette manière, l'hypothèque spéciale nuisait plus au créancier qu'elle ne lui était utile, parce qu'il était forcé de discuter l'immeuble spécialement hypothéqué, avant d'avoir l'effet de l'hypothèque générale, et la position du débiteur devenait beaucoup plus pénible. La généralité obligée de l'hypothèque était donc un véritable fléau.

L'hypothèque conventionnelle n'aura lieu de nos jours, au contraire, qu'au moyen d'une stipulation expresse et dispositive; et, en l'absence de cette stipulation, les facultés immobilières d'une partie ne se trouveront plus malgré elle enchaînées. Toutefois les parties tiennent de la loi, ou plutôt de leur volonté, le pouvoir de donner à cette hypothèque conventionnelle toute la latitude compatible avec leur intérêt et celui des tiers.

Les attaques dirigées contre notre régime hypothécaire, étayées de cette double assertion, que l'hypothèque est générale et indivisible de sa nature, portent donc à faux.

La spécialité est puisée dans la nature des choses. De temps immémorial, et dès l'aurore de la législation ro

maine, elle a formé la racine du droit hypothécaire. Si ses ramifications se sont étendues pour couvrir et protéger davantage des intérêts plus précieux et plus compliqués, c'est par l'effet d'une fiction, et la loi, en les modifiant ou en les restreignant, loin de s'égarer, s'est rapprochée de l'immuable vérité.

Telles sont les idées que l'on doit se former du droit d'hypothèque, tel qu'il est défini dans l'article 2114 du Code civil.

130. L'hypothèque avec tous ses attributs suit l'immeuble qu'elle affecte, en quelque main qu'il passe, à moins que l'acquéreur ne remplisse les formalités établies par la loi pour la purger. Elle est tellement inhérente au fonds, elle en affecte si virtuellement le domaine, qu'elle revit et subsiste encore quand le créancier qui a fait l'acquisition commutable du domaine hypothéqué, voit la propriété lui échapper par l'effet de la résolution du contrat. L. fin in fin. ff. de except. rei judic. ; et l'on ne distingue pas si cette résolution fingat retrò an non; cette distinction est renversée, rejetée par ladite loi, §. 21. ff. de except. rei. jud., où l'on voit que le domaine est enlevé sur la poursuite d'un créancier postérieur, et conséquemment par une cause qui n'opère pas de plein droit et ne suppose pas que le domaine retrò defuisse, mais au contraire le présuppose, et dans ce cas néanmoins, l'hypothèque plus ancienne revit par la raison seule que le domaine n'a point été acquis irrévocablement, mais révocablement. D'où il suit qu'il ne se fait pas confusion de l'hypothèque dans le cas où le domaine de la chose est révoqué par une cause de révocation inhérente au temps de l'acquisition qui renfermait le germe implicite de l'événement résolutoire.

On doit encore appliquer à l'hypothèque la décision relative à l'usufruit dans le cas de la loi si tibi, f. quibus modis ususfruct. amitt. Dans l'espèce de cette loi, l'usufruitier ayaul acquis le domaine révocablement, l'usufruit est

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