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Des corps de troupes prussiennes vont être massés sur la frontière de Saxe pour pouvoir immédiatement l'occuper, en cas d'agression autrichienne.

Bismarck m'a de nouveau parlé de tentatives secrètes signalées par les agents diplomatiques, pour les accommodements entre l'Italie et l'Autriche pour la cession de la Vénétie.

Enfin, il m'a dit qu'il y avait une proposition de congrès faite par l'Angleterre à la France et à l'Italie qui pourrait amener un temps

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Mesures militaires arrêtées hier, sont tenues secrètes.

Elles consistent mobilisation complète de 3, 4, 5, 6 corps et de la garde, en 20 jours. Ces troupes forment un total de 168,900 hommes et vont être concentrées sur frontière autrichienne.

On mobilisera aussi 27,000 de la landwehr en Silésie pour les garnisons de Cosel, Neisse et Glatz.

Pour les quatre corps d'armée qui restent, on achète en attendant chevaux, artillerie et cavalerie.

Selon les événements, on se réserve de les mobiliser complètement dans huit ou dix jours, et les porter en ligne. Alors on aurait sur pied de guerre près de 300,000 hommes pour fin du mois.

D'après les calculs de l'état-major, l'Autriche a dès aujourd'hui 60,000 hommes prêts en Bohême. A la fin du mois, elle pourra en avoir 160,000: plus tard le reste.

On ne comprend pas ici pourquoi on arme et fait grand approvisionnement à Cracovie.

Moltke parla au ministère du subside hongrois en l'appuyant, mais on ne s'est pas décidé à le donner.

Je prie Votre Excellence de me dire l'époque approximative de mon rappel.

Signé: GOVONE.

No 110

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Télegramme.

Empereur m'a fait appeler aujourd'hui.

Paris. le 5 mai 1866.

Il m'a dit que l'Autriche lui fait proposition formelle de céder la Vénétie, à la condition que l'on laisserait Autriche libre de se dédom mager sur la Prusse.

La cession serait faite à la France, qui la rétrocéderait à l'Italie sans condition.

Empereur m'a demandé si nous pouvions rompre engagement avec la Prusse.

Je vous envoie courrier pour vous expliquer les détails.

En attendant, veuillez garder secret absolu, et réfléchir bien mûrement, car la chose en vaut la peine.

Je vous prie de me télégraphier votre première impression.

J'ai mis Empereur confidentiellement au courant de nos derniers rapports avec la Prusse.

Signé NIGRA.

N° 111

LE GÉNÉRAL DE LA MARMORA AU CHEVALIER NIGRA, A PARIS

Télégramme.

Reçu votre importante dépêche.

J'attends avec impatience courrier.

Florence, le 5 mai 1866.

Ma première impression est que c'est une question d'honneur et de loyauté de ne pas nous dégager avec la Prusse.

Surtout qu'elle vient d'armer et de déclarer à toutes les puissances qu'elle attaquera l'Autriche si l'Autriche nous attaque.

Mais comme le traité expire le 8 juillet, on pourrait arranger la chose avec un congrès.

L'Empereur n'oubliera pas qu'il nous a conseillé le traité avec la Prusse.

Vous ne me dites rien du congrès dont il est question à Londres. Signé LA MARMORA.

No 112

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Télégramme.

Paris, le 6 mai 1866.

Empereur m'a fait dire ce matin, avant de partir, que prince Metternich avait reçu autorisation formelle de signer la cession de la Vénétie, contre la simple promesse de neutralité.

Vous recevrez demain soir une lettre.

Veuillez me dire par le télégraphe si roi de Prusse a positivement promis de défendre si nous sommes attaqués.

On ne m'a pas dit un mot du congrès jusqu'ici.

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Hier soir, l'Empereur m'a fait appeler aux Tuileries. J'ai annoncé à Votre Excellence par le télégraphe le résumé de ce que l'Empereur m'a dit; je viens aujourd'hui vous raconter cet entretien dans tous ses détails.

L'Empereur m'a dit que l'Autriche lui avait fait la proposition suivante: « L'Autriche est disposée à céder la Vénétie quand elle se sera emparée de..... La France et l'Italie promettraient de ne pas secourir la Prusse en restant neutres. La cession de la Vénétie serait faite à la France, qui en ferait la rétrocession à l'Italie saus condition. L'Italie paierait une somme d'argent à fixer; cette somme serait destinée à la construction de forteresses autrichiennes sur la nouvelle frontière de l'Autriche du côté de l'Italie. >>

J'ai demandé à l'Empereur si cette proposition était vraiment sérieuse. Il m'a répondu qu'elle était formelle. Il m'a dit qu'il avait répondu en prenant le temps de réfléchir, mais en déclarant qu'en tout cas la cession devrait se faire avant que l'Autriche occupât la Silésie.

L'Autriche n'avait pas encore répondu à cette dernière considération, qu'on peut maintenir comme une contre-proposition. L'Empereur m'a prié de lui répéter le texte du traité et a demandé s'il nous était possible de nous délier des engagements pris avec la Prusse. Je lui ai dit que je vous avais écrit confidentiellement et secrètement. Cependant, je lui ai fait connaître la déclaration que nous nous sommes fait faire en dernier lieu par le roi de Prusse touchant le mode d'interprétation qu'il donne au traité, interprétation suivant laquelle le Roi de Prusse ne se croirait pas obligé de secourir l'Italie, si elle était attaquée par l'Autriche. Cette déclaration a paru étrange à l'Empereur, et il a dit qu'il y avait à examiner si en présence de cette déclaration, le gouvernement italien ne serait pas en droit de dénoncer le traité.

Maintenant, il vous appartient d'examiner sérieusement ce nouvel aspect de la question. J'attends la réponse de Votre Excellence pour la communiquer à l'Empereur. La chose est extrêmement délicate; tout cela doit rester secret pour tous, entre le Roi et Votre Excellence.

La proposition de l'Autriche a été dictée par la persuasion qu'en cas de guerre, l'Italie serait avec la Prusse, et que la Prusse garderait une neutralité bienveillante à l'égard de l'Italie. Cette proposition, nous fût-il possible de l'accepter, n'est pas exempte d'inconvénients. Avant tout, la Vénétie étant cédée à la France, nous contracterions avec cette puissance une nouvelle et très-grande obligation. L'Autriche resterait, après la guerre, également forte par l'acquisition de..... et plus hostile qu'auparavant à l'Italie. La Prusse deviendrait notre ennemie, l'Allemagne tout entière partagerait ces sentiments d'inimitié. Notre armée en serait mécontente, et peut-être le pays aussi. La France (je parle de la nation, et non plus de l'Empereur, qui a été et sera toujours ami de l'Italie) ferait peser sur nous d'une façon intolérable ce nouveau bienfait. Enfin, de quelque façon que la conduite de la Prusse soit peu convenable et ingrate à notre égard, nous ne pourrions éviter le reproche de déloyauté.

D'autre part, les hésitations et les déclarations de la Prusse ne nous laissent pas l'assurance qu'elle déclare la guerre la première, ou qu'elle nous suive, si nous sommes forcés de l'entreprendre ou de la subir par suite d'une agression de l'Autriche. Faire la guerre nous seuls me paraît tellement dangereux que je ne saurais vraiment admettre une telle éventualité. Si ensuite la guerre n'avait pas lieu, notre situation serait désastreuse politiquement et financièrement. Enfin, il ne faut pas perdre de vue l'incertitude des chances de la guerre. L'empire d'Autriche renferme encore en lui de tels éléments militaires, que la possibilité d'une déconfiture pour l'Italie, agissant isolément ou même accompagnée de la Prusse, est au nombre des événements à prévoir.

Ces considérations sont, les unes comme les autres, d'une gravité extraordinaire ; je vous les soumets pour que vous y réfléchissiez et délibériez.

Prenez bien garde que l'Autriche ne se montre disposée à céder la Vénétie que pour s'indemniser moyennant la .....; de sorte que d'une main elle signerait la cession et de l'autre elle tirerait l'épée; les deux faits seraient simultanés.

Je vous prie de m'envoyer votre réponse par un courrier exprès; car il est excessivement important que cette cerrespondance ne soit confiée qu'à des mains sûres. Je vous serai aussi reconnaissant, si vous voulez bien m'avertir par le télégraphe du départ du courrier.

Signé NIGRA.

N 11%

LE COMTE DE BARRAL AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Télégramme.

Berlin, le 6 mai 1866.

La réponse de l'Autriche à la demande de désarmement général est décidément négative.

M. de Bismarck vient de me dire que dès à présent l'on pouvait regarder l'armée prussienne comme entièrement mobilisée.

Deux grandes concentrations de troupes auront lieu à Wetzlar et à Coblentz pour surveiller les Etats secondaires.

Deux autres corps d'armée seront réunis à Erfurt et à Gorlitz, prêts à envahir la Saxe au premier signe hostile de l'Autriche, qu'il suppose toujours devoir infailliblement prendre l'offensive la première...

Malgré la gravité des dernières mesures, le Roi a encore des vues pacifiques, mais Bismarck se croit à peu près certain de l'entraîner. Toutefois, la Prusse n'attaquera pas la première, à moins de provocation directe...

On est excessivement préoccupé des négociations très-actives, assuret-on, qui se poursuivent entre la France et l'Autriche pour désintéresser l'Italie, et qui seraient allées jusqu'à l'offre de la ligne du Rhin à la France.

A l'observation que je lui ai faite sur le danger d'une pareille offre par une puissance allemande, Bismarck m'a répondu par un mouvement d'épaules, indiquant très-clairement que, le cas échéant, il ne reculerait pas devant ce moyen d'agrandissement.

Signé BARRAL.

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