Il m'importe de savoir ce que Bismarck a voulu dire; d'autant plus que la Prusse nous recommandait il y a peu de jours de ne pas attaquer les premiers. No 124 Signé LA MARMORA. LE COMTE DE BARRAL AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA Télégramme. Berlin, le 10 mai 1866. Il y a eu évidemment erreur dans la transmission d'un chiffre. Bismarck ne m'a pas dit que la guerre pourrait commencer par nous, mais que l'Autriche pourrait commencer par nous : ce qui signifie tout le contraire, et n'est nullement probable. Signé BARRAL. No 125 LE COMTE DE LAUNAY AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA Saint-Pétersbourg, le 7 mai 1866. Le cabinet français jugeant insuffisant le désarmement simultané proposé par l'Angleterre, s'il n'y a pas entente sur les questions vénitiennes des duchés et de la réforme allemande, a fait demander au gouvernement russe son opinion. Le prince Gortschakoff a répondu aujourd'hui que l'Empereur serait favorable à l'idée de se concerter pour le règlement des différends entre l'Italie, la Prusse et l'Autriche, mais que Sa Majesté insiste pour le désarmement, afin que les puissances s'occupent avec plus de tranquillité des solutions. L'Angleterre aussi paraît favorable à un congrès. Je désire des instructions. Signé: LAUNAY. No 126 LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA Paris, le 11 mai 1866 Le gouvernement français propose un Congrès pour trois questions, savoir Vénétie, Schleswig, et réforme de la Confédération-Germanique. Les idées de l'Empereur seraient la cession de la Vénétie à l'Italie, de la Silésie à l'Autriche; la Prusse aurait les duchés et quelques principautés germaniques de sa convenance. Sur le Rhin on établirait trois ou quatre petits duchés faisant partie de la Confédération-Germanique, mais sous la protection de la France. Des princes germaniques dépossédés par la Prusse iraient dans les principautés du Danube. Ces idées sont celles de l'Empereur, mais je n'ai pas besoin de dire que leur application rencontrerait l'opposition de la majorité des puissances, dans le cas où elles seraient émises au Congrès. Signé NIGRA. No 127 LE MARQUIS D'AZEGLIO AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA Londres, le 11 mai 1866. Des pourparlers qu'on tâche de tenir très-secrets, ont lieu depuis quatre jours par l'initiative de la France, pour qu'on s'entende avec l'Angleterre et la Russie, sur les bases du Congrès relativement à la Vénétie, aux duchés et à la Confédération-Germanique. Mise en présence de la responsabilité d'un refus, l'Angleterre a accepté en principe, mais refusait catégoriquement de s'engager à imposer pareille décision autrement que par persuasion. Il paraît que le vrai motif caché est de gagner du temps. No 128 LE GÉNÉRAL DE LA MARMORA AUX AGENTS DIPLOMATIQUES DE L'ITALIE A L'ÉTRANGER Florence, le 11 mai 1866. Monsieur le Ministre, l'attitude défensive, que j'ai constatée dans ma circulaire du 27 avril dernier, est toujours gardée par le gouvernement du Roi. Nous avons eu l'occasion d'en renouveler l'assurance aux puissances amies. Mais en faisant ainsi connaître son attitude actuelle, le gouvernement du Roi n'entend pas, et il le déclare hautement, prendre des engagements d'aucune sorte pour l'avenir. L'Italie n'arme que pour sa défense, mais, en attendant, les événements ont prouvé qu'il était indispensable, pour le rétablissement de la tranquillité en Europe, que la solution de la question de Venise ne soit pas plus longtemps différée. Si les puissances amies peuvent offrir des moyens propres à résoudre pacifiquement les questions pendantes en Italie et ailleurs, comme par exemple un Congrès général, nous ne les repousserons pas, nous nous empresserons même, lorsque des propositions de ce genre seront pratiques, d'en faciliter la réussite. Quant aux armements auxquels nous nous trouvons forcés, les puissances comprendront, j'en ai la ferme confiance, qu'ils ne peuvent être contremandés, tant que se prolongera la condition actuelle des choses. Votre Excellence voudra bien s'exprimer dans ce sens lorsque l'occasion s'en présentera. Réponse négative de la Prusse à la note autrichienne du 26 avril, touchant un arrangement dans les duchés, est partie. Bismarck me dit de nouveau que l'attitude hostile du Hanovre obligera probablement la Prusse à diriger les premières opérations militaires contre le royaume de Hanovre. Les représentants des États secondaires ici tiennent un langage extrêmement belliqueux et regardent la lutte comme très-prochaine. On m'assure de source certaine qu'une dernière et très-pressante tentative faite par lord Russell auprès de l'Empereur d'Autriche, pour l'engager à un arrangement avec l'Italie, a définitivement échouée. Un tiers de la landwehr vient d'être mobilisé. Signé BARRAL. No 130 LE MARQUIS D'AZEGLIO AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA Londres, le 13 mai 1866. Lord Russell vient de me dire que, dans un entretien avec lord Cowley, l'Empereur avait accepté le principe que, si le Congrès se réunit, chaque puissance conservera plus tard sa liberté d'action. Fleury tient un langage très-pacifique. . Le bruit s'est répandu depuis hier de la cession de la Vénétie à la France. No 131 Signé D'AZEGLIO. LE GÉNÉRAL DE LA MARMORA AU CHEVALIER NIGRA, A PARIS (Telégramme.) Florence, le 14 mai 1866. De Londres, on me mande que le bruit s'était répandu de la cession de la Vénétie à la France. Comme cela est d'accord avec les projets de l'Empereur, je dois vous dire de tâcher que, si la Vénétie est cédée, elle nous revienne par le suffrage universel, et non par une cession à la France: ce qui seraít humiliant, et ferait un effet déplorable en Italie, ayant plus de 300,000 hommes prêts à marcher. La France aurait une part tout aussi glorieuse en décidant l'Autriche à appliquer le suffrage universel. La situation de l'Italie serait alors satisfaisante vis-à-vis de l'Europe et particulièrement de l'Autriche, dont les relations à venir avec l'Italie seraient compromises par la rétrocession. Franchement, moi qui ai toujours cherché à faciliter une solution pacifique de la question vénitienne, je préférerais la guerre à une telle solution. Signé LA MARMORA. N 132 LE COMTE D'USEDOM AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA Florence, le 15 mai 18€6. Un télégramme du comte de Bismarck d'hier au soir m'annonce la probabilité d'un Congrès ou des Conférences sur les questions politiques pendantes. Selon l'opinion du comte de Bismarck, la France, l'Italie et la Prusse n'y devraient pas paraître sans s'être mises d'accord sur leurs intentions, et le comte de Goltz a déjà reçu des instructions dans ce sens, car on croit que cette entente préalable devra être négociée à Paris comme point central. Le comte de Bismarck voudrait savoir si le gouvernement italien partage cette opinion du cabinet prussien, et si l'on donnera au commandeur Nigra les instructions respectives. Signé D'USEDOM. |