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température; tels font les charmes de ce beau pays, que les Sauvages ne peuvent s'en éloigner, & qu'ils ne le quitteront qu'à regret, malgré tous les traités & les conventions. On ne doit pas en être furpris: attachés à la terre qui les a vu naître, qui leur fournit abondamment à leurs befoins, qui, enfin, eft pour eux une véritable mere, ces peuples, que nous nommons Sauvages, aiment cette terre comme leur patrie, & ils regrettent de l'avoir cédée à des étrangers, Tout récemment encore ils viennent de faire de nouvelles incur

fions, principalement aux environs de l'Ohio. Si cette conduite des Sauvages n'eft pas jufte, au moins elle est bien pardonnable. En effet, il ne faut que jetter les yeux fur la Carte de Kentucke, pour se convaincre qu'il n'y a peut-être pas de contrée plus favorisée de la nature qu'on fe figure un vaste terrain, coupé par une infinité de rivieres & de ruiffeaux de différentes

grandeurs, qui arrofent une terre fertile de fa nature, où croiffent fans culture diverses plantes utiles, & plusieurs fortes d'arbres chargés de fruits: qu'on se représente de jolis côteaux couverts de verdure, ou ombragés par le faîte orgueilleux d'arbres qui percent les nues : qu'on joigne à tout cela la douceur du climat, dont la température est telle, qu'à peine y connoit-on trois mois d'un hiver affez doux, l'on aura une foible idée de ce fortuné territoire, & l'on avouera que ces pauvres Sauvages n'ont pas tort de le

regretter. Cette relation du Colonel Boon, faite avec cette fimplicité & cette candeur qui annoncent la vérité, & lui prêtent de nouveaux charmes, eft intéreffante, & peut donner matiere à réflexions. Le Lecteur ne peut s'empêcher de s'intéreffer vivement à la fituation d'un homme abandonné feul au milieu d'un vaste défert, à une distance très-grande de tout établiffement, n'ayant pour

compagnon de fes malheurs, pour témoin & pour confident de fes peines,

que les hôtes féroces des bois, dont les hurlemens continuels troublòient feuls le filence & l'horreur de ces fauvages lieux, rendus plus terribles encore par la présence des Sauvages, entre les mains defquels il pouvoit tomber à tout moment. Telle fut la fituation du Colonel Boon pendant trois mois qu'il demeura privé de toute fociété humaine.

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A ces détails géographiques & historiques, l'Auteur a ajouté d'autres morceaux non moins curieux; l'affemblée des Sauvages Piankashaws, & des réflexions fur les Indiens. Par le premier, il nous donne une idée de l'éloquence des Sauvages; dans le second, il nous fait connoître leurs moeurs, leurs coutumes, leur génie, &c. matiere intéreffante pour le Philofophe qui veut méditer fur l'homme.

Tels font les objets que notre Auteur

a traités, & tel eft l'Ouvrage dont je préfente la traduction au Public, perfuadé qu'il mérite quelqu'attention de fa part.

J'ai annoncé dans une note, page 70, une Introduction, où je comptois raffembler quelques morceaux, qui ont un rapport plus ou moins direct à l'histoire de Kentucke; mais j'ai préféré de les rejetter à la fin, comme à leur véritable place; & c'est ce que l'on trouve fous l'article d'Additions. Le premier & le plus important, eft une Déclaration & une Ordonnance du Congrès, concernant l'érection de nouveaux Etats, & la maniere dont il doit être difpofé des terres à l'oueft des États-Unis. On fait que vers l'Ohio & le Miffiffipi il y a de grands territoires dépendans des États-Unis, lefquels font encore déferts, ou fort peu habités. Le Congrès voulant hâter la population de ces vaftes contrées, y a fait plufieurs conceffions de

terres aux Officiers & aux Soldats de l'Armée Continentale, qui ont fervi dans la derniere guerre, & a déterminé la maniere dont il doit être procédé à la vente des autres parties reftantes: c'est ce qu'il a fait fpar cette Déclaration & cette Ordonnance, dont la date eft affez récente, & que j'ai également traduites de l'Anglois. Ceux qui s'intéreffent au fort de ces nouvelles Colonies de l'oueft, parmi lesquelles Kentucke tient le premier rang, verront fans doute avec plaifir ces actes du Congrès, d'autant plus qu'on vient d'apprendre par les Papiers publics, qu'une lettre de Danville, dans le Comté de Lincoln (1), annonce que les Habitans de Kentucke ont arrêté de demander à la légiflation de Virginie, dont ce territoire dépend, un acte de féparation, pour former un nouvel Etat, fous le nom de Communauté de Kentucke.

(1) C'eft un des trois Comtés de Kentucke. Voyez ci-deffous, page 6.

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