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L'ordonnance de 1667 ne parle du désaveu que pour le placer au nombre des moyens de requête civile, lorsqu'il est jugé valable: aussi la procédure à suivre sur le désaveu n'était pas la même dans les divers parle

ments.

Au Châtelet de Paris, l'instance était introduite au moyen de la déclaration faite par la partie au greffe, qu'elle n'avait jamais donné de pouvoir pour faire tel acte, et qu'elle désavouait l'officier ministériel qui avait fait cet

acte en son nom.

L'officier désavoué devait recevoir copie de cette déclaration, avec assignation, pour voir statuer sur le désaveu, contradictoirement avec la partie qui pouvait profiter de l'acte, et à l'égard de laquelle la nullité de cet acte devait être prononcée.

Les instances en désaveu étaient communiquées au ministère public, tant au Châtelet qu'au parlement de Paris.

Devant le parlement de Toulouse, on ne pouvait désavouer un procureur sans l'intimer en son nom; si le désaveu était jugé valable, le procureur désavoué était condamné aux dépens, dommages et intérêts, tant envers sa partie qu'envers les autres parties de l'instance. Dans le cas, au contraire, où le désaveu était rejeté, le demandeur encourait les mêmes condamnations. C'est ce qui résulte d'un arrêt de réglement du 4 septembre 1722.

Cet usage de condamner ainsi à des dommages-intérêts, soit le désavouant, soit le désavoué, suivant les circonstances, était général, dans tous les tribunaux et cours du royaume; parceque tous avaient senti que le dol de l'officier ministériel ou l'impudence du plaideur qui l'attaque témérairement méritaient d'être punis, et qu'un tiers ne pouvait souffrir des torts de l'un ou de l'autre.

J'ai fait observer qu'aux termes de l'ordonnance de 1667 (art. 34 tit. 35), le désaveu jugé valable fournissait

un moyen de requête civile: mais comme cette voie extraordinaire ne pouvait être prise que contre les arrêts ou les jugements en dernier ressort, dans le cas où le désaveu était dirigé contre un jugement susceptible d'être réformé sur l'opposition ou sur l'appel, on prenait d'abord l'une de ces voies, et l'on concluait ensuite à ce qu'en faisant droit au désaveu, l'opposition ou l'appel fût accueilli, et le jugement déclaré nul.

Le titre 18, liv. 2, part. 1, du Code de procédure, règle l'effet du désaveu, et la forine d'instruction à suivre pour le faire juger (1 et 2). Ses dispositions ont confirmé presque toutes les règles ou plutôt les usages qu'on suivait au Châtelet de Paris. ( 2 ). Je me bornerai à remarquer que dans l'article 352, le législateur détermine d'une manière générale les cas dans lesquels une partie peut se pourvoir en désaveu, et fait par là cesser le vague de la législation et de la jurisprudence sur cet objet important. De même, dans l'art. 355, en décidant que le désaveu peut être dirigé contre les héritiers de l'officier ministériel, le Code consacre un point de doctrine controversé jusqu'à ce jour parmi les auteurs les plus recommandables; ou plutôt, il introduit à cet égard, une innovation dans la jurisprudence; car il existe plusieurs décisions souveraines, entre autres deux arrêts du parlement de Paris, le premier sous la date du 23 février 1580,

(1) L'acte passé au greffe contenant les moyens de désaveu, il n'est pas utile qu'ils soient répétés dans l'exploit, dit M. PiG., t. 1, p. 435. Tel est aussi l'avis de M. D. C., p. 266.

(2) L'avoué désavoué peut fournir par requête ses moyens de défense. (Art. 75 du tarif.) Il jouit pour se défendre des délais accordés par les art. 75 et 77, C. P. C., et le demandeur en désaveu peut répliquer. V. MM. CARR., t. 1, p. 831, no 1308; F. L., t. 2, p. 75; PIG., t. 1, p. 438 et 439; et PIG., COMM. t. 1, p. 623.

(3) Dans le désaveu incident, dit M. PIG., t. 1, p. 439, 8 al., toutes les parties en cause peuvent défendre au désaveu.

l'autre du 14 mars 1671, en faveur des héritiers de M. Lestorel, procureur au parlement, qui ont jugé qu'un procureur ne pouvait être désavoué après son décès, parce que le fait qui donne lieu au désaveu est un fait personnel qu'on ne peut imputer aux héritiers. (Coff.) (1).

Le titre IX de la seconde partie du réglement du Conseil, du 28 juin 1738, a fixé, en ces termes, la procédure qui doit être observée à la Cour de cassation, en matière. de désaveu.

Art. 1er. La partie qui voudra former un désaveu au Conseil sera tenue de consigner préalablement, pour sûreté des dommages-intérêts des autres parties, la somme de 150 liv., entre les mains du greffier du Conseil, qui s'en chargera sans droits ni frais, pour être, après le jugement du désaveu, ladite somme délivrée, aussi sans frais, à qui il appartiendra.

2. La permission de former ledit désaveu sera demandée par une requête en forme de vu d'arrêt, signée de l'avocat et de la partie même, ou du porteur de sa procuration spéciale, passée devant notaires, dont il restera minute; à laquelle requête seront jointes la quittance de consignation et une expédition de ladite procuration : le tout à peine de nullité.

3. Ladite requête et les pièces y jointes seront remises au sieur rapporteur de l'instance, pour y être, à son rapport, statué par un arrêt au premier conseil, ainsi qu'il appartiendra.

4. S'il n'y a pas lieu d'accorder la permission de former le désaveu, il sera ordonné que, sans s'arrêter à ladite requête, il sera passé outre au jugement de l'instance, et

(1) M. CARR., t. 1, p. 832, no 1309, pense avec raison que maintenant le désaveu peut être exercé tant en cas de mort civile qu'en cas de mort naturelle.

que la somme de 150 liv., consignée par le demandeur, sera remise et délivrée aux autres parties par le greffier, entre les mains duquel ladite somme aura été consignée ; ce qui sera exécuté quand même il aurait été omis d'y prononcer.

5. Pourra néanmoins être ordonné, s'il y échet, que ladite requête demeurera jointe à l'instance, pour y être fait droit lors du jugement d'icelle; auquel cas il ne pourra être fait aucunes écritures ni procédures sur le désayeu jusqu'audit paiement.

6. En cas que le désaveu paraisse mériter d'être instruit, il sera ordonné que le demandeur sera tenu de le former, ainsi qu'il sera prescrit ci-après; sinon, il sera passé outre au jugement de l'instance.

7. Dans le cas où le désaveu concernera des procédures faites ailleurs qu'au conseil, l'instruction en pourra être renvoyée, s'il y échet, devant les juges ordinaires, pour y être statué dans le délai qui sera prescrit ; après lequel, sur le vu dudit jugement, ou faute de le rapporter, il sera passé outre au jugement de l'instance pendante au Conseil, ainsi qu'il appartiendra.

8. Lorsque la permission de former le désaveu au Conseil aura été accordée, ledit désaveu sera fait au greffe, par un acte signé de la partie même, ou du porteur de sa procuration, et ce dans trois jours, à compter de la date de l'arrêt qui en aura accordé la permission; sinon, ledit désaveu ne pourra pas être formé, et la somme de 150 liv. demeurera acquise à la partie, ainsi qu'il a été dit ci-dessus.

9. L'arrêt qui aura accordé la permission de former le désaveu sera signifié à la personne de l'avoué, à son domicile, et ladite signification vaudra sommation de défendre audit désaveu, sans qu'il puisse être donné aucune assignation, ni fait aucune sommation ni autre procédure, et copie sera donnée par le même exploit, de l'acte de désa

veu, et de la procuration, s'il a été signé par le procureur; sinon, il sera passé outre au jugement de l'instance, comme si le désaveu n'avait pas été formé, et la somme consignée demeurera acquise à la partie, ainsi qu'il a été ci-dessus réglé.

10. La signification portée par l'article précédent sera faite dans la quinzaine, à compter du jour de la date de l'arrêt, si la personne désavouée est domiciliée dans le lieu où se fera la procédure du Conseil, ou dans les délais marqués au titre des assignations, si elle est domiciliée hors dudit lieu; sinon, il sera passé outre au jugement de ladite instance, comme si le désaveu n'avait pas été formé; et faute par le demandeur de justifier desdites significations, à la première réquisition qui lui en sera faite par les autres parties de l'instance, il ne sera plus recevable à poursuivre le jugement du désaveu, et la somme par lui consignée demeurera acquise à la partie dans l'un et l'autre cas, ainsi qu'il a été dit ci-dessus.

11. Ledit arrêt sera pareillement signifié aux autres parties de l'instance, au domicile de leurs avocats, dans ledit délai de quinzaine, et dans la forme portée par l'article 9 ci-dessus; le tout sous les peines prescrites par l'article précédent.

12. La personne désavouée sera tenue de fournir des défenses au désaveu, dans huitaine pour tout délai, à compter du jour de la signification à elle faite dudit arrêt, si elle est domiciliée dans le lieu où se fera la procédure du Conseil, ou du jour de l'expiration des délais marqués au titre des assignations, si elle est domiciliée ailleurs.

13. Et à l'égard des parties de l'instance auxquelles ledit arrêt aura été signifié, elles seront pareillement tenues de défendre audit désaveu, dans ledit délai de huitaine, à compter du jour de ladite signification.

14. Ces défenses de chacune des parties mentionnées dans les deux articles précédents seront contenues dans

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