Page images
PDF
EPUB

dans toute sa force; qu'il convenoit du moins de les placer l'un et l'autre sur la même ligne » (1) *..

Ainsi furent écartées les raisons qu'on avoit fait valoir en faveur de l'article..

Voici maintenant celles d'après lesquelles on en demanda la suppression.

«< Il y auroit sans doute de l'inconvénient, a-t-on dit, à s'éloigner de la maxime qui veut que l'adultère de la mère ne décide point de l'illégitimité de l'enfant: toutefois il ne faut pas se lier de manière à ne point céder à l'évidence, dans une matière où les juges ont plus besoin d'exemples que de règles » (2). « Ces questions doivent être jugées d'après les princi-. pes généraux de la matière. Il est permis à la femme d'opposer à la demande en divorce l'exception de la réconciliation: elle feroit valoir que, depuis la séparation, son mari est venu la trouver, que l'enfant qui vient de naître est le fruit de ce rapprochement; et. cependant la seconde partie de l'article défendroit au juge de l'écouter. La loi ne doit pas empêcher les Tribunaux de prononcer sur tous ces cas d'après les.. circonstances » (3).

>>

[ocr errors]

(1) Le Consu Cambacérés, Procès-verbal du 22 fructidor an 10, tome II, page 20. — (2) Le Consul Cambacérés, ibid. (3) M. Tronchet, ibid. pages 20 et 21.

* Nota. La rédaction de la Section posoit la règle d'une manière absolue ; en décidant indistinctement que, malgré l'adultère de la femme, l'enfant appartiendroit au mari, si les époux habitoient ensemble, elle sembloit exclure le mari du droit de le désavoUS sous aucun prétexte.

L'article fut retranché (1).

Par suite,l'article que la Section avoit présenté au titre De la Paternité et de la Filiation *, n'a pas été reproduit. On a pensé que « la circonstance de la demeure du mari dans une autre maison que la femme, n'est pas assez décisive pour en faire dépendre le sort de l'enfant » (2). On s'en est donc tenu au principe général que l'éloignement du mari établit l'impossibilité physique de cohabitation, et l'on n'a pas cru devoir faire dériver du fait de la séparation de corps des indices qu'elle ne donne pas toujours. Le juge prendra sans doute en considération cette position respective des deux époux, mais il ne la regardeṛa pas comme décisive.

2. CIRCONSTANCE. L'impuissance accidentelle du Mari.

AVANT d'exposer les motifs qui ont fait admettre la cause d'impuissance accidentelle, il est utile de rappeler ceux qui ont fait rejeter la cause d'impuissance naturelle.

Je sais que ce rejet n'est prononcé que par l'article 313 mais peut-être la disposition eût-elle été mieux placée dans l'article qui nous occupe; car, comme l'impuissance naturelle se rapporte à l'impos. sibilité physique de cohabitation, il étoit assez natu

(1) Décision, Procès-verbal du 22 fructidor an 10, tome II, page 22.-(2) M. Bigot-Préamenue, ibid.

* Voyez page 17.

rel, après avoir énoncé les deux causes d'où elle résulteroit, d'exclure celles qui auroient pu la produire, mais qu'on ne vouloit pas admettre.

J'ai donc cru que, pour ne pas scinder la matière, il convenoit de rapprocher les deux sortes d'impuis

sance.

Pourquoi la Cause d'impuissance naturelle a été re

jetée.

« L'IMPUSJSANCE naturelle est la supposition plus ou moins probable, qu'un homme auroit été produit, sans avoir reçu de la nature la faculté de produire.

» La loi romaine admettoit l'impuissance naturelle: mais ce peuple, pour lequel l'honnêteté publique et la révérence des mœurs étoient la loi suprême, ne nous a pas transmis un exemple d'application.

» La religion l'introduisit seulement au huitième siècle dans sa doctrine et ses décisions, mais avec cette restriction remarquable, qu'elle ne rendit jamais que des décisions provisoires, sur ce motif que l'Église pouvoit avoir été trompée, et des décisions toujours réformables, si l'homme accusé d'impuissance donnoit par la suite des preuves contraires et matérielles dans un mariage subséquent.

De là nos Tribunaux l'ont adoptée, mais sans la restriction qui en modéroit l'inconséquence. Cette restriction religieuse ne pouvoit se concilier avec ce principe social d'une force extrême, que l'ordre des

familles et l'état des mariages doivent être immuables. Plus on sentoit le besoin de saisir la vérité, plus on multiplioit les moyens insensés de la découvrir; et dix siècles perdus à rechercher follement la cause mystérieuse d'un effet incertain n'ont produit que des contradictions, des scandales, et des démentis donnés par la nature elle-même à des jugemens fondés sur les plus spécieuses vraisemblances.

» Depuis long-temps la rareté extrême de ces cas monstrueux, s'ils existent, l'infamie et l'insuffisance des épreuves, l'obscurité insurmontable de la cause et de l'effet, avoient fait condamner par tous les esprits sages ce moyen ridicule d'attaquer et de détruire une présomption juste et favorable, élevée loi elle même au rang de la vérité » (1).

par la

Le projet de la Commission alloit plus loin; il rejetoit indifféremment toute allégation d'impuissance de la part du mari, sans distinguer entre l'impuissance naturelle et l'impuissance accidentelle. L'article qu'elle présentoit étoit ainsi conçu: La loi n'admet point l'allégation de l'impuissancé naturelle ou accidentelle du mari (2).

La Section proposa la même disposition (3).

Cette exclusion générale et absolue de la cause d'impuissance fut combattue au Conseil d'état. On

(1) M. Duveyrier, Tribun Tome I.er, pages 629 et 630.- (2) Projet de Code civil, liv. I.er, titre VII, art. 2, page 53.— (3) 1.oo Rếdaction, chap. I.er, art. 1.er, Procès-verbal du 14 brumaire an 10

trouva étrange « que la Section rejetât, d'un côté, l'allégation d'impuissance, tandis que, de l'autre,'elle admettoit pour exception à la règle pater is est, l'impossibilité physique des approches du mari; ce qui comprend nécessairement l'impuissance, l'absence et la maladie » (1). « Si les causes d'impuissance ont quelquefois souillé la majesté des audiences publiques, il n'est il n'est pas moins vrai que quelques-unes d'entre elles étoient fondées; d'où il suit que c'est moins par la puissance de la loi que par la puissance de l'opinion, qu'on doit chercher à contenir les personnes qui voudroient introduire des causes de ce genre » (2). Alors les motifs du systême furent développés.

La Section avoit voulu « ne faire dépendre l'impossibilité physique que de faits positifs et faciles à prouver (3).

L'impuissance n'a ni l'un ni l'autre de ces carac

tères.

Il n'est pas de moyen de la reconnoître avec certitude. Il y a tant de doutes à cet égard, que l'on a vu des tribunaux déclarer le mari impuissant et ses enfans légitimes, parce que l'impuissance est quelquefois relative: la loi ne doit statuer que sur ce qui est

(1) Le Consul Cambacéré's, Procès-verbal du 14 brumairean 10; Voyez Projet de Code civil, liv. I.er, tit. VII, art. 2 et 5, page 53, 1.Te Rédaction, chap I.er, art. 1er et 4, Procès-verbal du 14 brùmaire an 10.- (2) Le Consul Cambacérés, ibid.-(3) M. Boulay,

Procès-verbal du 14 brumaire an 10.

« PreviousContinue »