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» atque episcopos iis Spiritu Sancto auctore præsidentes, » mittenda decrevimus, ut idipsum dicamus omnes, si» musque in eodem sensu et in eâdem sententiâ. »

>> ces maximes que nous avons reçues de nos pères, afin que >> nous disions tous la même chose, que nous soyons tous dans >> les mêmes sentiments, et que nous suivions tous la même >> doctrine. >>

Cette déclaration fut signée par les trente-quatre archevêques et évêques, et par les trente-quatre députés ecclésiastiques, qui composoient l'assemblée.

L'archevêque de Cambrai (M. de Brias, prédécesseur immédiat de Fénélon), en émettant son avis, fit une réflexion remarquable. Le Cambrésis et la partie de la Belgique qui en étoit voisine, venoient d'être réunis à la France par le traité de Nimègue en 1679; et c'étoit la première fois qu'on voyoit un archevêque de Cambrai et ses suffragants prendre place dans une assemblée de l'Eglise gallicane. Ce prélat ne craignit pas d'avouer avec candeur « qu'ayant été nourri dans des maximes >> opposées à celles de l'Eglise de France, il n'avoit pas >> cru d'abord pouvoir ètre de l'avis commun; mais >> qu'il étoit obligé de dire qu'il avoit été convaincu de » la force de la vérité établie par M. l'évêque de Tour>> nai et par MM. les commissaires, et qu'il étoit mainte>> nant bien persuadé que leur sentiment étoit le meil>> leur; qu'il y entroit d'autant plus volontiers, qu'on ne » prétendoit pas en faire une décision de foi, mais seule»ment en adopter l'opinion. »

L'assemblée crut devoir consigner dans son procèsverbal cette déclaration de l'archevêque de Cambrai. Bossuet lui-même fit usage dans la suite de cette déclaration, pour montrer que les évêques de France ne s'étoient proposé dans les quatre articles que de manifester l'opinion de l'Eglise de France, sans avoir prétendu rédiger une profession de foi qui dût être com

mune à tous les catholiques, et il fait observer à ce sujet « que1 le discours de l'archevêque de Cambrai fut approuvé » de toute l'assemblée, et que, pour en perpétuer la mé» moire, il fut inséré dans les actes. »

Mais ce qu'il est important de remarquer, c'est que l'édit du Roi qui fut rendu quatre jours après (le 23 mars 1682) pour donner force de loi à la Déclaration du clergé, fut rendu à la demande même de l'assemblée, et que le Roi se conforma dans toutes ses dispositions au projet qu'elle avoit présenté *.

L'assemblée alloit même encore plus loin; elle demandoit «< que l'édit prononçât que le serment que les » bacheliers en théologie font à Paris au commence>>ment de tous les actes, dans lequel on a introduit, >> depuis quarante ou cinquante ans, l'obligation de ne » rien dire ou écrire, qui soit contraire aux décrets des Papes sans restriction, sera réformé ; et pour cet effet, » on ajoutera à la fin de ce serment: Décrets et con» stitutions des Papes acceptés par l'Eglise. »

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L'édit du 23 mars. 1682 ne fait aucune mention de cette disposition, et nous ignorons les motifs qui déterminèrent le gouvernement à écarter cet article du projet présenté par l'assemblée.

Ainsi l'on doit à Bossuet, non-seulement d'avoir rédigé la célèbre déclaration du clergé de France, mais encore d'y avoir apporté autant de modération que de fermeté. Il avoit pesé avec tant d'exactitude toutes les expressions des quatre articles, que s'il ne put échapper entièrement aux déclamations de quelques ultramontains exagérés, jamais on ne put trouver à Rome le plus foible prétexte de censurer une doctrine qui étoit appuyée sur tant d'autorités et de monuments respectables.

1 Dissert. præv., n. vi.

*L'article 1 ajoute seulement « que les syndics des Facultés de » théologie présenteront aux procureurs généraux, comme aux or» dinaires des lieux, des copics des soumissions des professeurs, pour » s'obliger à enseigner la doctrine de la Déclaration. »

Il n'a peut-être jamais été donné qu'à Bossuet d'obtenir un tel ascendant sur l'opinion, non-seulement de ses contemporains, mais encore de la postérité. Plus d'un siècle s'est écoulé depuis sa mort, et telle est l'autorité du nom et de la doctrine de Bossuet, que, dans quelques circonstances et sur quelque question que ce soit, on marche toujours à sa suite avec confiance et sécurité.

Il auroit désiré que les quatre articles fussent accompagnés d'un écrit, dans lequel on se seroit borné à présenter les preuves les plus décisives et les plus propres à faire impression sur les esprits prévenus : dans cette vue, il avoit déjà préparé une espèce d'apologie, fondée sur les autorités les plus irrécusables, et dont Rome même ne pouvoit contester l'authenticité. Mais l'archevêque de Paris (M. de Harlay), en convenant de l'utilité du projet, crut y apercevoir des inconvénients qui le portèrent à l'écarter, et peut-être seroit-il injuste de lui en faire un reproche.

Il put croire que la doctrine de l'Eglise gallicane n'avoit besoin que de se montrer pour se défendre, et que ce seroit en quelque sorte douter de son orthodoxie, que de paroître croire qu'elle eût besoin d'une apologie. Mais M. de Harlay étoit encore plus fondé à craindre que cette apologie ne fût une espèce de défi et d'appel à tous les écrivains ultramontains; que ce seroit provoquer les contradictions, au lieu de les prévenir; que dans tout ce qui est abandonné aux disputes des hommes, les opinions les plus raisonnables et les mieux fondées ne peuvent échapper à toutes les objections; qu'en un mot ce seroit ouvrir inutilement un vaste champ de controverse; qu'il valoit mieux attendre qu'on fût attaqué pour se défendre, et qu'on seroit toujours à temps de répondre aux objections qu'on feroit, sans s'épuiser à résoudre des objections que ne l'on feroit peut-être jamais.

Ces considérations pouvoient paroître assez plausibles pour faire impression, et engager Bossuet lui-même à suspendre l'exécution de son premier dessein.

Mais ce qu'il n'a pu faire sous le nom et sous l'autorité de l'assemblée de 1682, il l'a depuis exécuté dans son grand ouvrage de la Défense de la Déclaration du clergé, l'un des monuments les plus imposants de la prodigieuse érudition de Bossuet, et de son dévouement à la gloire de l'Eglise gallicane *.

Ce fut l'évêque de Tournai (Choiseul) qui rédigea la lettre que l'assemblée crut devoir adresser à tous les évêques de France (du 19 mars 1682), pour leur demander leur approbation et leur adhésion aux quatre Articles.

XV. Lettre de l'assemblée de 1682 aux évêques de France sur les quatre articles.

L'esprit dans lequel cette lettre est conçue honore le caractère de l'évêque de Tournai. On a vu qu'il différa d'abord d'opinion avec Bossuet sur des points essentiels. Mais des évêques tels que M. de Choiseul et Bossuet, qui ne portoient dans leurs discussions que l'amour de la vérité, peuvent bien envisager d'abord une question importante sous des points de vue opposés, mais ils finissent par se réunir dans le même sentiment; c'est ce qu'on observe dans cette lettre de l'évêque de Tournai. Nous ne parlons pas des éloges qu'il y donne au magnifique discours que Bossuet avoit prononcé à l'ouverture de l'assemblée. Ces sortes d'éloges ne sont très-souvent que des formules consacrées par l'usage et les bienséances; mais en cette occasion cet éloge est plus remarquable. L'évêque de Tournai y déclare formellement « que l'heureux succès de l'assem» blée doit être surtout attribué à l'éloquence et à l'éru»dition avec laquelle M. l'évêque de Meaux avoit rappelé » tous les cœurs et tous les esprits à l'union entre eux et » au maintien de l'unité de l'Eglise. »

Nous prenons le parti de renvoyer aux Pièces justificatives tout ce qui regarde ce célèbre ouvrage de Bossuet. Il exige le récit de beaucoup de faits et de détails, qui suspendroient trop longtemps la marche de notre histoire,

Ce qui est bien plus honorable encore à l'évêque de Tournai, c'est qu'on voit dans cette lettre qu'il étoit revenu sincèrement à l'opinion de Bossuet sur l'indéfectibilité du saint Siége, opinion qui avoit fini par devenir celle de toute l'assemblée. Il rappelle les paroles décisives de saint Cyprien, dont le témoignage a d'autant plus de force, que ses démêlés avec le pape saint Etienne le rendent moins suspect de prévention et d'adulation. « Celui qui abandonne la chaire de PIERRE » sur laquelle l'Eglise a été fondée, n'est plus dans l'E» glise, et celui qui ne conserve pas l'unité, n'a plus la » foi. »

Fidèle à la loi que l'Eglise de France s'étoit imposée de montrer autant d'estime et de respect pour la personne d'Innocent XI, que de fermeté pour réprimer ses prétentions ou ses entreprises, l'évêque de Tournai rend l'hommage le plus touchant « aux grandes qua» lités et aux vertus pastorales d'un pontife qui méritoit » d'étre révéré non-seulement comme la pierre de l'Eglise, » mais encore comme l'exemple et le modèle des fidèles dans >> toutes sortes de bonnes œuvres. »

Cette lettre finit par ces paroles prophétiques : « De » même que le concile de Constantinople est devenu univer» sel et œcuménique par l'acquiescement des Pères du » concile de Rome; ainsi notre assemblée deviendra par »notre unanimité un concile national de tout le royaume; » et les articles de doctrine que nous vous envoyons, se» ront des canons de toute l'Eglise gallicane, respectables » aux fidèles et dignes de l'immortalité. »

La déclaration de l'assemblée de 1682 n'éprouva et ne pouvoit éprouver aucune opposition en France; elle ne faisoit que confirmer une doctrine qui, dans tous les temps, avoit été chère à l'université et à la faculté de théologie de Paris; et par un concours singulier de circonstances, celui des ordres religieux 1 qu'on accusoit de professer habituellement les maximes les plus favorables aux prétentions ultramontaines, se trouvoit alors Les jésuites.

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