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sixième degré - entre le duc de Reichstadt, chef de la dynastie impériale, le comte de Chambord, chef de la branche aînée des Bourbons, et le comte de Paris, chef de la branche cadette, tous trois descendant en ligne directe de la grande impératrice Marie-Thérèse, et de sa fille MarieCaroline, reine de Naples. Combien de péripéties, de catastrophes dans la destinée de ces trois cousins issus de germains, et combien leurs noms seuls évoquent d'espérances et de déceptions! Que de réflexions philosophiques se présentent d'elles-mêmes à l'esprit, quand on pense à leurs trois berceaux! Comme le malheur qui frappe indistinctement toutes les dynasties devrait calmer les rancunes, apaiser les colères, éteindre les haines politiques! A quoi bon désirer des grandeurs qui sont si peu de chose, des trônes qui ont si peu de solidité, des gloires qui passent si vite? L'histoire de chaque règne n'estelle pas une oraison funèbre, et ne dirait-on point que la Providence met un cruel plaisir à se moquer au même degré de tous les empereurs et de tous les rois ?

Nous voulons esquisser cinq études sur la seconde femme et sur le fils de Napoléon I". La première sera intitulée: Les beaux jours de MarieLouise; la seconde, Marie-Louise et la Décadence de l'Empire; la troisième, Marie-Louise et l'Invasion de 1814, la quatrième, Marie-Louise, l'ile d'Elbe et les Cent-Jours; la cinquième, Marie-Louise et le duc de

Reichstadt. La première, celle que nous commençons aujourd'hui, - est une période d'éblouissements, d'infatuation, de splendeurs magiques, dont le radieux éclat doit former un contraste avec les ténèbres horribles qui la suivent. Avec l'aide de témoins oculaires, dont les mémoires consignent les précieux souvenirs, tels que le prince de Metternich, principal négociateur du mariage de l'archiduchesse, M. de Bausset et le général de Ségur, attachés tous deux à la maison de l'empereur Napoléon et le voyant de près tous les jours, Mme Durand, première femme de l'impératrice, le baron de Méneval, son secrétaire des commandements, nous essaierons de faire revivre ce brillant passé, en prenant pour devise la parole de Michelet : « L'histoire est une résurrection. Un excellent ouvrage allemand, qui mériterait d'être traduit: MarieLouise, Impératrice des Français, par M. de Helfert, a fait connaître en détail les premières années de la mère du roi de Rome. Enfin, nous avons trouvé aux archives du ministère des affaires étrangères, grâce à la direction intelligente et libérale qui facilite à un si haut degré les recherches historiques, un grand nombre de documents inédits fort curieux, par exemple les lettres adressées par l'empereur et l'impératrice d'Autriche à Napoléon, ainsi que les dépêches de son ambassadeur à Vienne, le comte Otto. Cette première étude s'arrêtera au début de la campagne

nous

de Russie, à cette époque d'apogée, où les prospérités inouïes semblaient devoir être éternelles. Jamais nuit plus terrible ne fut précédée d'un plus resplendissant soleil. Napoléon disait, sur le rocher de Sainte-Hélène. « Le règne de MarieLouise a été fort court; mais elle a dû bien en jouir, elle avait la terre à ses pieds. »

PREMIÈRE PARTIE

I

LES PREMIÈRES ANNÉES

L'archiduchesse d'Autriche Marie-Louise, impératrice des Français, reine d'Italie, puis duchesse de Parme, Plaisance et Guastalla, naquit à Vienne le 12 décembre 1791, de l'archiduc Fran çois, prince impérial, empereur d'Allemagne, l'année suivante, sous le nom de François II, et d'une princesse de Naples, Marie-Thérèse, fille du roi Ferdinand IV et de la reine Marie-Caroline.

Le père de Marie-Louise était né le 12 février 1768, - un an et demi avant l'empereur Napoléon. Petit-fils de la grande impératrice MarieThérèse, il avait pour père l'empereur Léopold II, frère de la reine de France Marie-Antoinette, au

quel il succéda le 1er mars 1792, et pour mère une princesse espagnole, fille du roi d'Espagne Charles III. Il devait se marier quatre fois. C'était un excellent mari, mais les sentiments de famille étaient chez lui si développés qu'il ne pouvait supporter le veuvage. En 1788, il épousa sa première femme, la princesse Elisabeth-Wilhelmine-Louise de Wurtemberg, qui mourut prématurément en couches, le 17 février 1790, laissant une petite fille, qui mourut elle-même à six mois. La même année, à Naples, par procuration, le 15 août, et à Vienne, personnellement le 19 septembre, il épousait la jeune princesse napolitaine Marie-Thérèse, fille de Ferdinand IV et de Marie-Caroline, qui régnaient sur les DeuxSiciles.

La jeune princesse, née le 6 juin 1772, avait alors dix-huit ans. Elle était douce, vertueuse, bien élevée. Jamais elle ne donna que les meilleurs exemples à la cour de Vienne. Sa mère qui, dans un règne de trente-six ans, passa par tant d'épreuves et montra de très grandes qualités, en même temps que de très grands défauts, était une femme extraordinaire.

La reine de Naples, Marie-Caroline, énergique jusqu'à l'exagération, courageuse jusqu'à l'héroïsme, croyant que la sévérité, et parfois même la cruauté rentrent dans les obligations des sou verains, religieuse jusqu'à la superstition, autoritaire jusqu'au despotisme, tour à tour passion

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