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CONVENTION DE LA MARSA

(8 juin 1883.)

Son Altesse le Bey de Tunis, prenant en considération la nécessité d'améliorer la situation intérieure de la Tunisie, dans les conditions prévues par le traité du 12 mai 1881, et le Gouvernement de la République ayant à cœur de répondre à ce désir et de consolider ainsi les relations d'amitié heureusement existantes entre les deux pays, sont convenus de conclure une convention spéciale à cet effet: en conséquence, le Président de la République française a nommé pour son plénipotentiaire M. Pierre-Paul Cambon, son ministre résident à Tunis, officier de la Légion d'honneur, décoré de l'Haïd et grand-croix du Nichan Iftikar, etc., etc., lequel, après avoir communiqué ses pleins pouvoirs, trouvés en bonne et due forme, a arrêté avec Son Altesse le Bey de Tunis les dispositions suivantes :

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ARTICLE PREMIER. Afin de faciliter au Gouvernement français l'accomplissement de son protectorat, Son Altesse le Bey de Tunis s'engage à procéder aux réformes administratives, judiciaires et financières que le Gouvernement français jugera utiles.

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2. Le Gouvernement français garantira, à l'époque et sous les conditions qui lui paraîtront les meilleures, un emprunt à émettre par Son Altesse le Bey, pour la conversion ou le remboursement de la dette consolidée, s'élevant à la somme de cent vingt-cinq millions de francs, et de la dette flottante jusqu'à concurrence d'un maximum de dix-sept millions cinq cent cinquante mille francs.

Son Altesse le Bey s'interdit de contracter à l'avenir aucun emprunt pour le compte de la Régence sans l'autorisation du Gouvernement français.

3.- Sur les revenus de la Régence, Son Altesse le Bey prélèvera: 1° les sommes nécessaires pour assurer le service de l'emprunt garanti par la France; 2° la somme de deux millions de piastres (1.200.000 fr.) montant de sa liste civile, le surplus

des revenus devant être affecté aux dépenses d'administration de la Régence et au remboursement des charges du protectorat.

4. Le présent arrangement confirme et complète, en tant que de besoin, le traité du 12 mai 1881. Il ne modifiera pas les dispositions précédemment intervenues pour le règlement des contributions de guerre.

5. La présente Convention sera soumise à la ratification du Gouvernement de la République française, et l'instrument de ladite ratification sera remis à Son Altesse le Bey de Tunis dans le plus bref délai possible.

En foi de quoi, les soussignés ont dressé le présent acte et l'ont revêtu de leurs cachets.

Fait à la Marsa, le huit juin mil huit cent quatre-vingt-trois.

Signé Paul CAMBON, ALI, Bey de Tunis.

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Bien que les relations des puissances européennes avec le Maroc, et surtout de l'Espagne, datent de plusieurs siècles, l'histoire de ces relations, au point de vue diplomatique et surtout au point de vue des textes, n'offre quelque intérêt qu'à partir de la conquête de l'Algérie par la France.

Après sa défaite, l'émir Abd el-Kader, s'étant réfugié au Maroc, souleva le Sultan contre le Français. Mais tandis que le prince de Joinville bombardait Tanger, Bugeaud écrasa les Marocains à la bataille de l'Isly (13 mai 1843). Le règlement de la frontière algérienne fut la conséquence de cette victoire. Elle n'aboutit cependant qu'un an plus tard à un traité qui fut complété à son tour l'année suivante par le fameux traité du 18 mars 1845, dont les dispositions générales devaient servir de base principale à la politique marocaine de la France, et qu'on appelle généralement, bien qu'il ne porte aucune mention du lieu où il fut signé, le traité de Lalla-Maghnia.

Ses dispositions caractéristiques consistaient essentiellement à diviser, de la Méditerranée à l'Extrême Sud, la frontière en trois parties:

Une première partie, de l'embouchure de l'Oued-Kiss jusqu'à Teniet-Sassi, à environ quatre-vingts kilomètres de la mer, était fixée d'une manière précise.

Pour une deuxième partie, qui s'étendait de Teniet-Sassi « jusqu'au désert », on ne procédait à la détermination d'aucune lignefrontiere. On faisait une distribution des tribus. « La terre ne se laboure pas. »

Enfin pour tout ce qui s'étendait au sud de cette zone des tribus, la délimitation en était déclarée superflue.

Au sud de Teniet-Sassi, la France acquérait donc un droit de police et un droit de suite sur ses sujets arabes qui se réfugieraient en territoire marocain.

Le traité de 1845 présentait pourtant une lacune: il ne poussait pas assez avant dans le sud la distribution politique des tribus entre les deux gouvernements. Les Doui-Menia et les Oulad-Djerid, tribus notoirement algériennes, n'y étaient pas mentionnées.

Pour combler cette lacune et assurer, à un point de vue. plus général, la protection de la frontière, la pacification et la police de la région marocaine limitrophe et le développement des rapports économiques entre les deux territoires, trois accords furent signés les 20 juillet 1901, 20 avril et 7 mai 1902.

Ces accords ne purent être mis à exécution que plusieurs années après leur conclusion. L'occupation militaire du Touat par la France, ses progrès dans le sud Oranais, amenaient une certaine effervescence sur la frontière. De nombreuses agressions se produisirent. Mais l'insurrection du Rogui Bou Hamara fut la principale cause de ce retard dans l'œuvre de pacification. Ce prétendant était devenu maître de toute la région frontière, et il était impossible au maghzen d'y tenter la collaboration avec la France prévue par les accords.

Cette situation ne devait se modifier qu'à la suite de l'occupation d'Oudjda (mars 1907), motivée par le meurtre du Dr Mauchamp. Un des accords signés au printemps de 1910 par M. S. Pichon, ministre des affaires étrangères, et El Mokri, représentant du Sultan, précisa les conditions d'exécution du régime de frontière prévu dans ses grandes lignes en 1901 et 1902.

D'une manière générale, l'œuvre politique et administrative à réaliser dans la région frontière est confiée à une commission mixte qui comprend un Haut Commissaire français et un Haut Commissaire chérifien, disposant d'une police franco-marocaine, et, munis de pouvoirs suffisants pour réglementer l'ouverture de marchés et le contrôle des taxes, pour résoudre les difficultés survenues entre les tribus, etc. Le Haut Commissaire français est, à l'heure actuelle, le général commandant la division d'Oran. II est assisté d'un commissaire du gouvernement français à Oudjda. Il est placé sous la direction du ministère des Affaires étrangères. Actuellement, tous les marchés prévus par les accords de 19011902, sauf celui de Debdou, sont ouverts. Le marché d'Ain-SidiMellouk est complété par celui de Taourirt.

Aux conventions franco-marocaines, nous joignons le texte de la déclaration du 6 octobre 1904, qui a consacré l'entente intervenue entre la France et l'Espagne sur leurs droits et leurs intérêts respectifs au Maroc.

TRAITÉ DE LALLA-MAG HNIA

(18 mars 1845.)1

LOUANGES A DIEU UNIQUE! IL N'Y A DE DURABLE QUE

LE ROYAUME de Dieu !

TRAITÉ conclu entre les Plenipotentiaires de l'Empereur des Français et des possessions de l'Empire d'Algérie, et de l'Empereur de Maroc, de Suz, de Fez et des possessions de l'Empire d'Occident.

Les deux Empereurs animés d'un égal désir de consolider la paix heureusement rétablie entre eux, et voulant, pour cela, régler d'une manière définitive l'exécution de l'article 5 du Traité du 10 septembre de l'an de grâce 1844 [24 cha'ban de l'an 1260 de l'hégire].

Ont nommé pour leurs Commissaires plénipotentiaires, à l'effet de procéder à la fixation exacte et définitive de la limite de souveraineté entre les deux pays, savoir:

L'Empereur des Français, le sieur Aristide-Isidore, comte de la Rue, Maréchal de camp dans ses armées, Commandeur de l'ordre impérial de la Légion d'honneur, Commandeur de l'ordre d'Isabelle la Catholique, et chevalier de deuxième classe de l'ordre de Saint-Ferdinand d'Espagne.

L'Empereur de Maroc, le Sid Ahmida-Ben-Ali-el-Sudjâaï, gouverneur d'une des provinces de l'Empire;

Lesquels, après s'être réciproquement communiqué leurs pleins pouvoirs, sont convenus des articles suivants, dans le but du mutuel avantage des deux Pays et d'ajouter aux liens d'amitié qui les unissent:

1. Nous avons conservé l'orthographe des noms arabes, telle qu'elle a été employée successivement dans les traductions officielles. On remar quera que la manière de transposer les lettres a varié. Ainsi en 1845, on écrivait Ksar. On écrit aujourd'hui Qçar. La première manière était peutêtre plus naturelle. Comment marquer en effet la différence entre le Kef sec et le K'af guttural?

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