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§ 17.

Titre à la

propriété

immobilière;

pas dans le but de changer la question de titre à la propriété spécifiée, déjà irrévocablement condamnée, ni de faire revivre la controverse entre les individus qui avaient fait la capture et ceux qui la réclamaient, mais dans le but de déterminer, de gouvernement à gouvernement, s'il avait été fait quelque injustice par les tribunaux d'une puissance aux citoyens de l'autre, et de décider quelle indemnité devrait être accordée à ces derniers.

La justesse de cette distinction fut reconnue par les ministres danois, et il fut conclu un traité par lequel une indemnité satisfaisante fut accordée aux réclamants américains 1.

Nous avons vu que la ferme possession, ou la sentence d'une cour compétente, suffit pour confirmer le titre de comment il celui qui a fait la capture aux biens personnels ou mobipendant liers pris en guerre. On appliqua une règle différente aux

se transféra

la guerre.

Jus

postliminii, propriétés réelles ou immeubles. Le propriétaire originaire de cette espèce de propriété a droit à ce qu'on appelle le bénéfice de postliminii, et le titre acquis pendant la guerre doit être confirmé par un traité de paix avant d'être considéré comme complétement valide. Cette règle ne peut s'appliquer souvent au cas d'une simple propriété privée, qui, selon l'usage général des nations modernes, est exempte de confiscation. Elle ne devient importante en pratique que dans les questions résultant d'aliénations de biens immeubles appartenant au gouvernement, faites par l'État belligérant adverse pendant son occupation militaire du pays. Un pareil titre doit être expressément confirmé par le traité de paix ou par l'opération de la cession du territoire faite par l'ennemi dans un pareil traité. Jusqu'à cette confirmation, ce titre reste susceptible d'être enlevé par le jus postliminii. Celui qui achète une portion du domaine national la prend au risque d'être évincé par le souverain

1 MARTENS, Nouveau Recueil, t. VIII, p. 350.

originaire propriétaire, quand il rentre en possession de ses domaines 1.

Grotius a consacré tout un chapitre de son grand ouvrage à prouver, par le témoignage universel de tous les siècles et de tous les peuples, que la bonne foi doit être observée envers l'ennemi. Et même Bynkershoek, qui soutient que toute autre espèce de fraude peut être employée envers lui, prohibe la perfidie, en se fondant sur ce que son caractère d'ennemi cesse au moyen du traité, dans toute l'étendue des termes de ce traité. «Je permets toute espèce de ruse,» dit-il, «la perfidie seule exceptée, non parce que contre l'ennemi il y ait quelque chose d'illégal,

parce que quand nous lui avons donné, notre foi, dans tout ce qui se rapporte à la promesse donnée, il cesse d'être ennemi. Certes sans cette modification les horreurs de la guerre s'étendraient indéfiniment et auraient une interminable durée. L'usage des nations civilisées a donc introduit un certain commercium belli, au moyen duquel la violence de la guerre peut être tempérée relativement à son sujet et à son but, et l'on peut conserver une espèce de rapport pacifique qui conduise d'abord à un arrangement de différends, et ensuite à la paix 2. >>

$18. Bonne foi envers les ennemis.

Il y a différentes manières de tempérer l'extrême rigueur $ 19. Trêve ou des droits de la guerre, au gré des parties belligérantes armistice. respectives. Parmi elles est la suspension d'hostilités au moyen de trêve ou d'armistice. Cette trêve peut être générale ou spéciale. Si elle est générale dans son appli

-

1 GROTIUS, de Jure belli ac pacis, lib. III, chap. vi, § 4; cap, ix, § 13. VATTEL, Droit des gens, liv. III, chap. x, § 197—200, 210, 212. KLÜBER, Droit des gens moderne de l'Europe, § 256-258. MARTENS, Précis, etc., liv. VIII, chap. iv, § 282, a. Quand le cas de conquête est compliqué de celui de révolution civile et de changement de gouvernement intérieur reconnu par la nation elle-même et par les puissances étrangères, il faut recourir à une modification de la règle dans son application pratique. Vide ante pt. I, chap. II, § 11, p. 38.

2 BYNKERSHOEK, Quæstionum juris publici lib. I, cap. 1. BINSON'S Admiralty Reports, vol. II, p. 139. The Daifje.

Ro

cation à toutes les hostilités en tous lieux, et doive durer longtemps ou pendant une période indéterminée, elle a quant à ses effets l'importance d'une paix temporaire, si ce n'est qu'elle laisse indécise la controverse qui a fait naître la guerre. Telles étaient les trêves anciennement conclues entre les puissances chrétiennes et les Turcs. Tel fut aussi l'armistice conclu en 1609 entre l'Espagne et ses provinces révoltées des Pays-Bas. Une trêve partielle se limite à certaines places, comme la suspension d'hostilités qui peut avoir lieu entre deux armées en présence, ou entre une forteresse assiégée et l'armée assiégeante1. Le pouvoir de conclure un armistice universel ou susde conclure pension d'hostilités, n'est pas nécessairement impliqué dans l'autorité ordinaire officielle du général ou de l'amiral commandant en chef les forces militaires ou navales de l'État. La conclusion d'une pareille trêve générale exige ou l'autorisation spéciale antérieure du pouvoir suprême de l'État, ou une ratification subséquente par ce pouvoir 2.

$ 20. Pouvoir

un armistice.

$ 21. Période de son

opération.

Une trêve partielle ou suspension limitée d'hostilités peut être conclue entre les officiers respectifs de terre ou de mer des États belligérants, sans aucune autorisation spéciale à cet effet, quand dans la nature et l'étendue de leurs commandements cette autorisation est nécessairement impliquée comme essentielle à l'accomplissement de leurs devoirs officiels 3.

La suspension d'hostilités lie les parties contractantes et toutes celles qui agissent immédiatement sous leur direction du moment où elle est conclue. Mais il faut qu'elle soit dûment promulguée pour avoir force d'obligation légale relativement aux autres sujets des États belligérants; de sorte que si avant cette notification ils ont

1 VATTEL, Droit des gens, liv. III, chap. xvi, § 235, 236.

2 GROTIUS, de Jure belli ac pacis, lib. III, cap. xxII, § 8. Note de Barbeyrac. VATTEL, Droit des gens, liv. III, chap. xvi, § 233–238.

3 Vide ante pt. III, chap. 11, § 3 et 4, p. 228-229.

commis quelque acte d'hostilité, ils ne sont pas responsables, à moins qu'on ne puisse imputer leur ignorance à leur faute ou à leur négligence. Mais comme le pouvoir suprême de l'État est obligé de remplir ses propres engagements, ou ceux contractés avec son autorisation expresse ou tacite, le gouvernement de celui qui fait une capture est obligé, dans le cas d'une suspension d'hostilités maritimes, de restituer toutes les prises faites en contravention à l'armistice. Pour prévenir les disputes et les difficultés s'élevant de pareilles questions, il est d'usage de stipuler dans la convention de l'armistice comme dans les traités de paix une période future dans laquelle les hostilités doivent cesser en rapport, nécessaire avec la situation et la distance des lieux 1.

$ 22. Règles

prétation des conventions de trêves.

Outre les maximes générales applicables à l'interprétation de tous les traités internationaux, il y a quelques pour l'interrègles particulières applicables aux conventions de suspension d'hostilités. La première de ces règles particulières, comme l'expose Vattel, c'est que chaque partie peut faire dans son territoire ou dans les limites prescrites par l'armistice tout ce qu'elle pourrait faire en temps de paix. Ainsi chacune des parties belligérantes peut lever des troupes, les mettre en marche, réunir des provisions et autres munitions de guerre, recevoir des renforts de ses alliés ou réparer les fortifications d'une place non absolument assiégée.

La seconde règle c'est qu'aucune des parties ne peut profiter de la trêve pour exécuter sans péril pour ellemême ce que la continuation des hostilités l'aurait empêchée de faire. Un pareil acte serait une violation frauduleuse de l'armistice. Par exemple, dans le cas d'une trêve entre le commandant d'une ville fortifiée et l'armée assiégeante, aucune des parties n'est libre de continuer les

1 GROTIUS, de Jure belli ac pacis, lib. III, cap. XXI, § 5. Droit des gens, liv. III, chap. XVI, § 239.

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VATTEL,

§ 23.

Reprise des hostilités à

ouvrages construits soit pour l'attaque soit par la défense, ni d'ériger dans ce but de nouvelles fortifications. La garnison ne peut pas non plus profiter de la trêve pour introduire des provisions ou des secours dans la place, par les passages ou autres moyens que l'armée assiégeante aurait pu rompre ou empêcher si les hostilités n'avaient été interrompues par l'armistice.

La troisième règle établie par Vattel est plutôt un corollaire des règles précédentes qu'un principe distinct capable d'une application séparée. Comme la trêve ne fait que suspendre les hostilités sans terminer la guerre, toutes les choses doivent rester dans leur précédent état dans les lieux dont la possession était spécialement contestée à l'époque de la conclusion de l'armistice 1.

Il est évident que les parties contractantes peuvent par convention expresse déroger à certains égards et à tous égards à ces conditions générales.

A l'expiration de la période stipulée dans la trêve, les l'expiration hostilités recomméncent naturellement sans nouvelle dé de la trêve. claration de guerre. Mais si la trêve a été conclue pour

un temps indéterminé ou pour une très-longue période, la bonne foi et l'humanité concourent pour exiger qu'un avis préalable soit donné à l'ennemi de l'intention de terminer une trêve qu'il peut justement regarder comme équivalente à un traité de paix. Tel fut le devoir imprimé par le collége des Féciaux aux Romains à l'expiration de la longue trêve qu'ils avaient faite avec le peuple de Veies. Ce peuple avait recommencé les hostilités avant l'expiration du temps limité dans la trêve. Cependant les Romains jugèrent nécessaire de lui envoyer des hérauts, et de demander satisfaction avant de reprendre la guerre2.

1 VATTEL, Droit des gens, liv. III, chap. xvI, § 245-251. 2 TITE-LIVE, Hist., lib. IV, cap. xxx. Pour les lois de la guerre observées par les Romains, voyez WHEATON, Histoire du droit des gens, t. I, p. 17.

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