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DE L'A PÉNALITÉ

DANS

TOUTES LES PARTIES DU MONDE connu.

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ESCLAVES.-ESCLAVAGE. La loi du plus fort, le droit de la guerre injurieux à la nature, l'ambition, la soif des conquêtes, l'amour de la domination, l'habitude de la mollesse introduisirent l'esclavage, qui, à la honte de l'humanité, a régné chez presque tous les peuples du monde. L'histoire étale partout les horreurs de la servitude; les Hébreux, les Grecs, les Romains, tous les peuples de l'Asie, tous ceux enfin qui se trouvaient à la tête de la civilisation antique, sont autant de témoins de l'universalité de cette énorme injustice exercée avec plus ou moins de violence sur toute la sur-' face de la terre. — On reconnaissait deux sortes d'esclavage ou de servitude, la réelle et la personnelle : la servitude réelle était celle qui attachait l'esclave au fonds de la terre; la servitude personnelle regardait le service de la maison et se rapportait davantage à la personne du maître. Chez les Juifs la servitude des étrangers était personnelle et réelle; ils exerçaient à leur égard les traitemens les

plus rudes; en vain Moïse leur criait : « Vous n'au> rez point sur vos esclaves d'empire rigoureux; vous » ne les opprimerez point. » Il ne put jamais venir à bout, par ses exhortations, d'adoucir la dureté de sa nation féroce: il tâcha donc par ses lois d'y porter quelque remède. Il commença par fixer un terme à l'esclavage, et par ordonner qu'il ne durerait tout au plus que jusqu'à l'année du jubilé pour les étrangers, et par rapport aux Hébreux pendant l'espace de six ans. Il établit encore que personne ne pourrait vendre sa liberté, à moins qu'il ne fût réduit à n'avoir plus absolument de quoi vivre. Il prescrivit que, quand les esclaves se racheteraient, on leur tiendrait compte de leur service, de la même manière que les revenus déjà tirés d'une terre vendue entraient en compensation dans le prix du rachat, lorsque l'ancien propriétaire la recouvrait. Si un maître avait crevé un œil ou cassé une dent à son esclave, et à plus forte raison sans doute s'il lui avait fait un mal plus considérable, l'esclave devait avoir sa liberté, en dédommagement de cette perte. Une autre loi de ce législateur porte que si un maître frappe son esclave, et que l'esclave meure sous le bâton, le maître doit être puni comme coupable d'homicide : il est vrai que la loi ajoute que si l'esclave vit un jour ou deux, le maître est exempt de la peine. La raison de cette loi était peut-être que quand l'esclave ne mourait pas sur-le-champ, on présumait que le maître n'avait pas eu dessein de le tuer, et pour lors on le croyait assez puni d'avoir perdu ce que l'esclave lui avait coûté ou le service qu'il en aurait tiré;

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c'est du moins ce que donnent à entendre les paroles qui suivent le texte : car cet esclave est son argent.-Les Lacédémoniens furent les premiers de la Grèce, qui introduisirent l'usage des esclaves, ou qui commencèrent à réduire en servitude les Grecs qu'ils avaient faits prisonniers de guerre ils allèrent encore plus loin, ils traitèrent les ilotes avec la dernière barbarie. Ces peuples habitans du territoire de Sparte, ayant été vaincus dans leur révolte par les Spartiates, furent condamnés à un esclavage perpétuel, avec la défense aux maîtres de les affranchir ni de les vendre hors du pays: ainsi les ilotes se virent soumis à tous les travaux hors de la maison, et à toutes sortes d'insultes dans la maison; l'excès de leur malheur allait au point qu'ils n'étaient pas seulement esclaves d'un citoyen, mais encore du public. Il n'en était pas de même chez les autres peuples de la Grèce, l'esclavage y était extrêmement adouci, et même les esclaves trop rudement traités par leurs maîtres pouvaient demander d'être vendus à un autre. -Les Athéniens, au rapport de Xénophon, traitaient leurs esclaves avec beaucoup de douceur : ils punissaient sévèrement, quelquefois même de mort, celui qui avait battu l'esclave d'un autre. Les premiers Romains traitaient leurs esclaves avec plus de bonté que ne l'a jamais fait aucun peuple : les maîtres les regardaient comme leurs compagnons; ils vivaient, travaillaient et mangeaient avec eux. Le plus grand châtiment qu'ils infligeaient à un esclave qui avait commis quelque faute, était de lui attacher une fourche sur le dos ou sur la poitrine, de lui éten

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dre les bras aux deux bouts de la fourche, et de le promener ainsi dans les places publiques; c'était une peine ignominieuse, et rien de plus : les mœurs suffisaient pour maintenir la fidélité des esclaves.— Lorsque les Romains se furent agrandis par leurs conquêtes et par leurs rapines, la condition des esclaves s'aggrava, on ne se fit plus aucun scrupule de les traiter inhumainement.. Comme il n'y avait plus de mœurs on recourut aux lois; il en fallut même de terribles pour établir la sûreté de ces maîtres cruels, qui vivaient au milieu de leurs esclaves comme au milieu de leurs ennemis. On fit sous Auguste, c'est-à-dire au commencement de la tyrannie, ce sénatus-consulte Syllanien, et plusieurs autres lois qui ordonnèrent que, lorsqu'un maître serait tué, tous les esclaves qui étaient sous le même toit, ou dans un lieu assez près de la maison pour qu'on pût entendre la voix d'un homme, seraient condamnés à la mort: ceux qui dans ce cas cachaient un esclave pour le sauver, étaient punis comme meurtriers. Celui-là même à qui son maître aurait ordonné de le tuer et qui lui aurait obéi, aurait été coupable; celui qui ne l'aurait pas empêché de se tuer lui-même aurait été puni. Si un maître avait été tué dans un voyage, on faisait mourir ceux qui étaient restés avec lui et ceux qui s'étaient enfuis: et cependant ce maître, pendant sa vie, pouvait tuer impunément ses esclaves et les mettre à la torture. Il est vrai que dans la suite il y eut des empereurs qui diminuèrent cette autorité Claude ordonna que les esclaves qui, étant malades, auraient été abandonnés par leurs maî

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