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but de s'y faire des partisans, afin que dans l'occasion ils fussent moins fermes dans leurs oppositions. Cl. Fauchet, dans son Traité des Libertés de l'Eglise gallicane, cite un indult de l'an 1440, qui fut donné pour faire taire le parlement de Paris, qui s'opposait aux injustes levées du pape. Cette matière, au reste, n'est plus que du domaine de l'histoire. Ceux qui voudraient en savoir plus long sur ce point pourront consulter le Traité de l'indult, par le président de Saint-Vallier.

LXX.

Priviléges des rois et reines de France.

Et pareillement plusieurs autres privileges octroyez particulierement aux rois et reines de France, à leurs enfants, princes du sang, et à leurs serviteurs, familliers et domestiques, dont le rapport n'a semblé estre de ce memoire, ains plustost appartenir à aultre traité.

Priviléges.] Dutillet a publié un inventaire fort exact de tous ces priviléges dans son Recueil des Rois de France, leur Couronne et Maison.

LXXI.

Des exemptions.

Mais je n'y obmettray les exemptions d'aucunes eglises, chapitres, corps, colleges, abbayes et monasteres de leurs prelats legitimes et ordinaires, qui sont les diocesains et metropolitains, lesquelles exemptions ont autresfois esté octroyées par les rois et princes mesmes, ou par les papes à leur poursuite, et pour très-grandes et importantes considérati ons, depuis debattues et soustenues és conciles de Basle et de Constance: dont furent dés lors publiez quelques mémoires. Tant y a qu'on peut dire avec vérité, pour ce regard, que nul monastere, eglise, college, ou autre corps ecclesiastique, ne peut estre exempté de son ordinaire, pour se dire depen dre immediatement du saint-siege, sans licence et per mission du roy.

Exemptions.] On tient en France pour maxime constante que la juridiction des évêques est de droit divin, parce qu'ils l'ont reçue immédiatement de J.-C.; en sorte qu'il n'est point au pouvoir du pape de se l'arroger, ou de l'étendre et diminuer à son gré, comme le prétendent les ultramontains. (Voyez ci-dessus, p. 74, la note sur la formule: Evéque par la grâce, etc.) Il n'a donc pas le pouvoir d'exempter qui que ce soit de la juridiction de l'évêque; il faut, au contraire, reconnaître comme un fait, qui est en même temps un principe, savoir, qu'aucune exemption n'a pu être accordée, et n'a été admise en effet qu'avec le consentement des rois et des évêques.

Observons ensuite que les exemptions même accordées de cette manière, étant contre le droit commun, n'ont jamais rien eu de favorable. Aussi voit-on que, dès avant la révolution, le conseil d'état, se fondant sur ce que ces exemptions n'avaient pu être accordées que du consentement du roi, s'était appliqué à faire tout rentrer dans le droit commun, surtout à l'égard des chapitres.

L'état où le concordat a trouvé la religion, en 1801, a permis de faire table rase; il a établi, à nouveau, un droit commun, sans exemption ni privilége: l'article 10 de la loi organique le dit expressément.

Ou autre corps.] Observez, d'ailleurs, que nul corps, collége, congrégation ou société quelconque, ne peut s'in¬ troduire et s'établir dans le royaume, sans l'expresse autorisation de la puissance temporelle, qui, en les admettant s'il y a lieu, fait ses conditions, au nombre desquelles est toujours la soumission aux ordinaires. Cette doctrine se trouve développée dans mon plaidoyer pour le Constitutionnel, § 2; elle a été consacrée par les arrêts de la cour, Il convient d'y joindre le décret du 3 messidor an XII, avec le rapport de M. de Portalis, rapporté ci-après.

LXXII.

De la pluralité des bénéfices.

Je ne puis aussi obmettre en ce lieu ce que le pape Alexandre III, en une sienne epistre decretale, remarque pour une coustume ancienne de l'Église gallicane, de pouvoir tenir ensemble plusieurs benefices; ce qu'il

dit toutesfois estre contre les anciennes reigles ecclesiastiques, notamment pour le regard des benefices qui ont charge d'ames, et requierent residence personnelle et actuelle.

Coustume ancienne.] Est-ce bien là une liberté ? N'est-ce pas plutôt un abus ?

Loysel, dans son plaidoyer pour l'Université, rapporte que, du temps de saint Louis, cette question fut agitée, et que l'on demeura d'accord que nul homme ne pouvait tenir deux bénéfices sans péché mortel. A plus forte raison n'en peut-il réunir vingt-cinq. (Voyez les exemples cités dans la note sur l'article XLIX.)

LXXIII.

Pluralité des bénéfices sub eodem tecto.

Et neantmoins la vérité est que la mesme Église gallicane a tenu, et la cour de France jugé, que le pape ne peut conferer à une mesme personne plusieurs benefices sub eodem tecto, soit à vie ou à certains temps, mesmes quand ils sont uniformes, comme deux chanoinies, prebendes ou dignitez en mesmes eglise cathedrale ou collegiale; et a modifié les facultez d'aucuns legats pour ce regard.

La cour a jugé.] Voyez, dans les Preuves des Libertés, chap. 23, nos 49 et 52, les arrêts des 20 février 1539 et 23 juin 1547.

LXXIV.

Des dimes inféodées.

J'oseray encore mettre entre les privileges, mais non ecclesiastiques, le droict de tenir dixmes en fief par gens purs laïcs. Ce qu'on ne peut nier avoir prins son origine d'une licence et abus commencé sous Charles Martel, maire du palais, continué principalement sous les rois de sa race, et neantmoins toleré pour aucunes considerations, mais avec tel temperament sous les der

niers, que le lay peut rendre ou donner tels fiefs à l'Eglise, et l'Eglise les recevoir et retenir sans permission du prince; et qu'estans'retournez en main ecclesiastique, ils ne sont sujets à retraicts de personne laye sous pretexte de lignage, feudalité, ny autrement; et dès lors en appartient la cognoissance au juge ecclesiastique pour le regard du petitoire.

Dixmes en fief.] Il y a deux bonnes raisons pour que cet article ne soit plus nécessaire: 4° il n'y a plus de dîmes; 2o il n'y a plus de fiefs. Dieu en soit loué !

LXXV.

Le roi jure à son sacre de protéger nos libertés.

Or, pour la conservation de ces libertez et privileges (que nos rois tres-chrestiens, qui portent la couronne de franchise sur tous autres, jurent solemnellement à leur sacre et couronnement de garder et faire garder inviolables), se peuvent remarquer plusieurs et divers moyens sagement pratiquez par nos ancêtres, selon les occurrences et les temps.

Pour la conservation de ces libertez.] Des libertés sans garantie n'auraient pas duré si long-temps.

Couronne de franchise.] Cette expression, remarquable et honorable pour la couronne de France, a été employée pour la première fois par le jurisconsulte Balde, dans sa Consultation no 418. (Voyez les notes sur les articles IV et XV ci-dessus.)

A leur sacre.] L'ancien serment du sacre était spécial pour ce qui regardait l'Église; sous la restauration, Charles X a juré solennellement à son sacre « de maintenir et d'honorer la religion, de rendre bonne justice à tous, et de gouverner selon les lois du royaume et la Charte constitutionnelle. » Le serment de 1830 est entièrement politique, et ne renferme point de clause particulière à l'Eglise.

LXXVI.

Conférences amiables. Premier moyen de défendre nos libertés.

Premierement par conferences amiables avec le sainct pere, ou en personne, ou par ambassadeur. Et à cet effect se trouve que les anciens rois de France (mesmes ceux de la race de Pepin, qui ont eu plus de sujet de communication avec le sainct siege que leurs predecesseurs), avoyent comme pour marche commune la ville de Grenoble, où encores le roy Hugues, pere de Robert, invita le pape, par forme d'usance et coustume, par une epistre escrite par Gerbert, lors archevesque de Rheims, depuis pape, sur le différend de l'archevesché de Rheims. Ou en personne.] Là vient le proverbe On s'entend mieux de près que de loin.

Pie VII est venu sacrer Napoléon à Paris.

LXXVII.

Deuxième moyen. Examen des bulles avant leur exécution.

Secondement, observans soigneusement que toutes bulles et expeditions venans de cour de Rome fussent visitées, pour sçavoir si en icelles y avoit aucune chose qui portast prejudice, en quelque maniere que ce fust, aux droicts et libertez de l'Eglise gallicane, et à l'authorité du roy. Dont se trouve encores ordonnance expresse du roy Loys onziesme, suivie par les predecesseurs de l'empereur Charles cinquiesme, lors vassaux de la couronne de France, et par luy-mêmes, en un sien edict fait à Madrid, en 1543, et practiqué en Espagne et autres pays de son obeissance, avec plus de rigueur et moins de respect qu'en ce royaume.

Fussent visitées.] C'est en quoi excellaient surtout les parlements, qui ne seront jamais complétement remplacés en cette partie par un conseil d'état. (Voyez la note sur l'article XLIV, et les exemples qui y sont rapportés.)

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