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nomination des maires et des adjoints avait lieu par décret dans les chefs-lieux de département et d'arrondissement et dans les villes de 3,000 habitants; par arrêté du préfet dans les autres communes. La loi du 5 mai 1855 ajouta que la nomination serait faite par décret dans les chefs-lieux de canton. Une loi du 22 juillet 1870 rétablit l'obligation de choisir le maire et les adjoints dans le conseil municipal. Nous avons exposé, au commencement du chapitre précédent, les changements nombreux et éphémères que cette partie de la législation éprouva dans la période de 1870 à 1884.

CHAPITRE TRENTE ET UNIÈME.

ORGANISATION SPÉCIALE DES VILLES DE PARIS ET DE LYON.

Sommaire.

78. Caractère exceptionnel de la ville de Paris.

79. Élection des conseillers par quartier.

80. Nombre exceptionnel des conseillers municipaux.

Les fonctions de maire sont

partagées entre le préfet de la Seine et le préfet de police.

81. Maires d'arrondissement.

82. Ville de Lyon.

83. Villes chefs-lieux de département dont la population est supérieure à 40,000 habitants.

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78. L'uniformité législative n'a pas été poussée jusqu'à l'application à la ville de Paris du régime des autres communes. Paris est non-seulement une grande ville, exceptionnelle par son étendue et par sa population, elle est de plus la capitale de la France, le siège du gouvernement, la tête du pays. Le caractère municipal, loin d'y dominer, n'est au contraire que l'accessoire et certainement Paris appartient plus à la France qu'aux Parisiens. C'est un centre qui attire du dehors et de l'intérieur tous les hommes qui ont les plus hautes et les plus nobles aspirations; mais là aussi se donnent rendez-vous toutes les ambi

tions légitimes ou non; c'est le théâtre où doivent s'exécuter les plus mauvais desseins, soit parce qu'il est facile aux criminels qui les conçoivent de s'y cacher pendant la préparation, soit parce qu'ils y trouvent pour l'exécution les ressources les plus diverses en hommes et instruments. Comme on y peut frapper la société à la tête, il est facile de s'expliquer pourquoi les ambitieux y viennent de toutes parts, car en vérité Paris réalise le vœu de cet insensé qui voulait que le peuple n'eût qu'une tête pour pouvoir l'abattre d'un coup. Déjà lorsque la capitale n'avait que 7 à 800,000 habitants, le roi Henri III, la regardant des hauteurs de Saint-Cloud, s'écriait : « Tête trop grosse pour le corps. » Que penserait-il aujourd'hui, qu'elle est occupée par plus de deux millions d'habitants! - Aussi a-t-il à toute époque été reconnu qu'un régime spécial devait être établi pour la capitale. A toute époque aussi le droit commun a été réclamé pour Paris et ces réclamations ont toujours été appuyées sur ce sophisme, que la ville capable de fournir les éléments de l'administration la plus éclairée ne devait pas être moins bien traitée que la plus petite commune de nos campagnes. Sophisme assurément, car ce qui manque à cette ville ce n'est assurément pas le nombre des hommes distingués; ce qui lui manque, c'est la volonté de les élire et de maintenir leurs représentants dans la limite des pouvoirs et des intérêts municipaux. Le conseil élu de la capitale est un parlement qui tend à dominer les autres et il est nommé pour préparer les cadres des forces révolutionnaires.

La solution consisterait à distinguer d'une manière précise les services d'intérêt général et ceux d'intérêt municipal. Cette nomenclature faite, on pourrait, sans trop d'inconvénients, laisser ces derniers au conseil municipal; les autres seraient placés sous l'autorité du Parlement et la direction du Gouvernement. Tout ce qui intéresse l'ordre et la sûreté appartiendrait au Président de la République ou au préfet. Le maire de Paris ne serait que le président du conseil municipal et le pouvoir exécutif de ses décisions dans les matières strictement municipales. Mais il ne serait à aucun degré le délégué du Gouvernement pour l'exécution des lois. On comprend en effet que cette délégation

lui soit donnée là où il n'y a pas de représentant du pouvoir central; mais pourquoi dans les villes où il y a un préfet ou un sous-préfet le maire est-il chargé, sous leur autorité, d'une mission que le représentant du Chef de l'État pourrait mieux remplir? En tout cas, les raisons les plus fortes demandent que l'organisation de Paris soit faite d'après cette distinction, et que le maire, si on lui donne ce nom, soit réduit à n'être que le président du conseil municipal et ne soit chargé que de l'exécution de ses délibérations1.

79. La ville de Paris nomme aujourd'hui son conseil municipal. C'est la loi provisoire, encore en vigueur sur ce point, du 14 avril 1871 qui, pour la première fois, a fait élire par le suffrage universel les conseillers municipaux de la capitale. Chacun des 20 arrondissements est, à cet effet, divisé en quatre quartiers, et chaque quartier élit un conseiller au scrutin individuel. Les auteurs de la loi avaient espéré qu'en écartant le scrutin de liste et en morcelant les arrondissements en petites circonscriptions, ils feraient prédominer le caractère municipal sur le côté politique. Leur espérance a été trompée par le résultat; mais si le but avait pu être atteint, ils avaient employé le moyen le meilleur ou le moins imparfait pour y arriver. Leur échec prouve que l'entreprise était impossible.

So. Au point de vue de l'élection des conseillers municipaux, Paris est donc en dehors du droit commun en ce point

1 Le ministère du 2 janvier 1870, nomma une commission chargée de préparer un projet de loi sur l'organisation municipale de la ville de Paris. Tous les systèmes furent examinés dans cette commission; mais les travaux de la commission furent suspendus avant qu'elle eût pris parti. Parmi les combinaisons qu'on mit en discussion, la commission distingua la proposition d'un membre qui faisait du Corps législatif le conseil municipal de la capitale. L'auteur de la proposition faisait valoir que la capitale d'un État appartient à l'État, que la nation entière est intéressée à la bonne administration de cette ville, et que la tranquillité d'une commune où siègent les grands pouvoirs publics est affaire d'importance pour le pays entier. L'administration d'une capitale ne devait donc pas, ajoutait-il, être considérée comme une affaire locale, mais comme une affaire nationale, et c'est au pouvoir législatif élu par la France entière qu'il fallait confier les attributions du conseil municipal de Paris.

que, dans toutes les communes, c'est au scrutin de liste qu'on les nomme, tandis qu'ils sont à Paris élus au scrutin individuel. Le régime est exceptionnel aussi en ce que le nombre de 36, qui est le maximum d'après la loi générale, est porté à 80 pour la capitale. Les attributions du conseil municipal de Paris sont celles que la loi donne aux autres conseils municipaux. Il tient quatre sessions ordinaires et peut être convoqué en session extraordinaire par le préfet. L'importance du budget a cependant fait trouver insuffisante la durée normale des sessions et par exception la loi du 14 avril 1871, article 11, dispose que la session où le budget sera discuté pourra durer six semaines.

Les fonctions de maire de la ville de Paris sont partagées entre le préfet du département de la Seine et le préfet de la police. C'est le préfet de la Seine qui représente la ville et c'est le préfet de police qui est chargé de la police municipale. Dans les autres communes, le maire est délégué du pouvoir central et remplit des attributions qui appartiendraient au représentant direct de l'autorité; à Paris, au contraire, ce sont les représentants du Gouvernement qui sont investis de fonctions municipales 1.

81. Il n'y a pas de mairie centrale à Paris; chaque arrondissement a son maire.

Depuis que la loi du 16 juin 1859 a reporté les limites de Paris aux fortifications et compris dans son enceinte les villes. de la banlieue, la capitale se divise en vingt arrondissements. Chacun des arrondissements a un maire et deux adjoints. Ces maires diffèrent beaucoup du maire ordinaire, et leurs attributions sont fort restreintes. Comme l'arrondissement est une simple division administrative et n'a pas de personnalité, la loi n'a pas établi de conseil municipal et n'a donné à cette autorité municipale aucun pouvoir qui ressemble à la gestion économique des biens de la commune. Paris ne forme qu'une

1 Un arrêté du 3 brumaire an IX avait étendu les pouvoirs du préfet de police aux territoires de Sèvres, Saint-Cloud et Meudon dans le département de Seine-et-Oise. Un arrêté du 24 mars 1871 a soumis à ce régime tout le département de Seine-et-Oise.

B. IV.

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