Page images
PDF
EPUB

ment ayant produit pour l'exécutoire des dépens, ladite Administration a été colloquée au rang de l'hypothèque légale ;

Attendu que les créanciers colloqués postérieurement, Edouard SaintPaul et Jean-Baptiste Noguès, ont contredit les collocations qui précèdent; qu'ils soutiennent... que la créance de l'Administration n'est pas garantie par l'hypothèque légale ;

En ce qui concerne la collocation de l'administration de l'Enregistrement :

Attendu que le jugement de séparation de biens, en condamnant le mari aux dépens, a créé au profit de l'administration une créance personnelle et directe qui ne procède nullement de la femme et qui, par suite, ne peut pas être garantie par l'hypothèque légale ; qu'il y a lieu, tout en maintenant la collocation,de déclarer qu'elle viendra seulement au rang chirographaire ;

Attendu que la partie qui succombe doit être condamnée aux dépens; Par ces motifs,

Le tribunal, ouï le juge-commissaire et le ministère public, jugeant en matière sommaire et en dernier ressort pour l'administration de l'Enregistrement..

Dit et juge que l'administration de l'Enregistrement n'est pas garantie par l'hypothèque légale ;

Réforme le règlement provisoire en ce sens que la collocation... de l'Administration sera reportée au rang chirographaire ;

Condamne ladite Administration et la femme Arieu aux dépens.

La Direction générale a déféré ce jugement à la Cour de Cassation pour :

Violation des art. 2121 et 2135, C. civ., 14, 17 et 18 de la loi du 22 janvier 1851, en ce que le jugement attaqué a décidé à tort que l'hypothèque légale de la femme mariée ne garantit pas le recouvrement des frais d'une instance en séparation de biens auxquels le mari a été condamné, parce que, dans l'espèce, cette condamnation a été prononcée, non au profit de la femme assistée judiciairement, mais au profit de l'administration de l'Enregistrement, conformément à l'article 17 de la loi du 22 janvier 1851, et que celle-ci doit, par suite, être considérée comme créancière directe et personnelle du mari condamné.

La Cour a admis ce moyen et a cassé le jugement de Bagnères par un arrêt du 24 novembre 1903 qui est ainsi conçu :

La Cour,

Donne défaut contre les défendeurs et statuant sur le moyen unique du pourvoi ;

Vu l'art. 18 de la loi du 22 janvier 1851;

Attendu que le bénéfice de l'hypothèque légale de la femme s'étend aux frais du jugement de séparation de biens qu'elle a obtenu contre son mari au même titre que la créance dont ce jugement a pour but d'assurer le payement ;

Attendu que si l'art. 18 de la loi du 22 janvier 1851 confère à l'administration de l'Enregistrement un droit propre à l'effet de poursuivre directement contre le mari le recouvrement des dépens, l'Administration n'en

exerce pas moins les droits de la femme que la loi lui transfère avec toutes leurs garanties;

Attendu qu'il appert des constatations du jugement attaqué que l'assistance judiciaire a été accordée à la dame Arieu pour introduire contre son mari une demande en séparation de biens à laquelle il a été fait droit par jugement du 3 février 1877; — qu'un ordre ayant été ouvert sur le prix des immeubles d'Arieu vendus après saisie, la Régie a été colloquée au rang de l'hypothèque de la dame Arieu pour le montant de l'exécutoire délivré contre le mari, mais qu'à la suite de contredits formés par d'autres créanciers, le tribunal a décidé que la créance de la Régie n'était pas garantie par cette hypothèque et « qu'elle serait reportée au rang chirographaire; qu'en statuant ainsi, le jugement attaqué a violé le texte de loi ci-dessus visé ;

Par ces motifs,

Casse et annule le jugement rendu entre les parties le 17 janvier 1899 par le tribunal civil de Bagnères-de-Bigorre, en tant qu'il a décidé « que la créance de l'Administration n'est pas garantie par l'hypothèque légale et qu'il a réformé le règlement provisoire « en ce sens que la collocation de l'Administration sera reportée au rang chirographaire >> ; Remet...

Observations. Cette décision ne nous paraît devoir être approuvée que sous cette importante réserve que le rang hypothécaire reconnu à la créance du Trésor ne préjudiciera pas à l'assisté.

La thèse de la Régie, consacrée par la Cour, est la suivante : Les frais faits pour assurer à la femme le paiement de ses reprises jouissent des mêmes garanties que ces dernières et notamment de l'hypothèque légale (V. notamment, Aubry et Rau, 5° éd., III, § 269 ter, p. 372, note 9).

D'autre part, l'Administration a, contre l'adversaire de l'assisté, pour le paiement des dépens de l'instance, une action personnelle analogue à celle qui résulte pour l'avoué de la distraction des dépens prononcée en vertu de l'art. 133, C. proc. civ. Or, il est reconnu que l'avoué distractionnaire des dépens peut, dans les instances en séparation de biens, se prévaloir contre le mari de l'hypothèque légale de la femme, comme le ferait sa cliente ellemême; puisque c'est une partie de la créance de celle-ci qui a été disjointe au profit de l'avoué, elle doit nécessairement avoir été transférée avec les garanties qui l'accompagnaient dans les mains de la femme.

Il doit en être de même de l'action du Trésor poursuivant le recouvrement des frais d'assistance judiciaire. L'assisté qui a gagné son procès est créancier de ces frais en vertu du jugement qui prononce la condamnation aux dépens. C'est cette créance dont la Régie poursuit le recouvrement comme substituée, ou mieux comme adjointe à l'assisté. Il est donc naturel qu'elle l'exerce avec les mêmes garanties et dans les mêmes conditions que si cette action était exercée par l'assisté lui-même.

Telle est la thèse de l'Administration. Elle pèche en un point, c'est

que l'analogie alléguée entre l'action du Trésor et celle de l'avoué distractionnaire des dépens n'est pas complète. Ainsi que la Direction générale le reconnaît dans son mémoire ampliatif devant la Cour, l'avoué distractionnaire reste créancier de son client et peut agir contre lui pour le remboursement des dépens exposés en son nom; le Trésor, au contraire, n'a pas, en principe, d'action contre l'assisté gagnant qui se trouve dispensé de tout payement. La dispense des droits, en d'autres termes, est définitive dans l'hypothèse prévue et a le caractère non d'un simple crédit, mais d'une véritable libéralité. Or « donner et retenir ne vaut », et il est inadmissible que, en cas d'insuffisance des fonds affectés au paiement des reprises, le Trésor vienne en concours avec la femme pour le paiement des frais dont elle a été exemptée; ce serait lui retirer indirectement le bénéfice qui lui a été accordé. Un tel résultat est en contradiction absolue avec l'esprit de la loi de 1851, qui n'autorise le retrait de l'assistance que dans deux hypothèses strictement déterminées (art. 21, retour à meilleure fortune ou fraude) ne se rencontrant pas en l'espèce, et qui n'accorde au Trésor d'action contre l'assisté que pour les avances (amendes de timbre, droits des actes à enregistrer dans un délai déterminé, frais de transport, etc.), à l'exclusion des frais afférents aux actes de procédure proprement dits.

Nous estimons, pour ces motifs, que la doctrine de l'arrêt cidessus n'est applicable, malgré la généralité des termes employés, que pour le cas où l'action du Trésor peut s'exercer concurremment avec celle de la femme, sans nuire à celle-ci, et que s'il y a insuffisance de fonds, le Trésor ne doit être colloqué qu'après la femme, ainsi que la Direction générale l'a décidé dans une solution du 2 février 1899 toujours appliquée depuis lors (R. E., 1948). Annoter: T. A., Assistance judiciaire, 41

--

; ou Supplément, eod.

F, 33.

Art. 3466.

Congrégation. Association religieuse. Biens mis gratuitement à la disposition d'une congrégation. Absence de distribution de revenus. Clauses d'adjonction et de réversion.

1. — Les taxes d'accroissement et sur le revenu sont dues par une association religieuse, par cela seul qu'elle est une association ayant un but religieux, et elle a ce caractère dès lors que non seulement elle met gratuitement ses immeubles à la disposition des membres d'une congrégation religieuse, mais encore lorsqu'elle pourvoit au traitement des religieux qui enseignent dans lesdits immeubles.

Il importe peu, dans ces conditions, que l'association soit exclusivement formée entre laïques.

II. Est considéré à bon droit comme n'ayant pas pour objet de distribuer ses produits entre ses membres et passible, en conséquence, de la taxe sur le revenu dans les conditions fixées par la loi du 28 décembre 1880, art. 3, la société civile dont le but exclusif est de fournir gratuitement à des congrégations religieuses enseignantes des locaux pour accomplir leur mission, qui tire ses revenus d'offrandes et non des bénéfices de son exploitation et dont les membres abdiquent toute idée de gain puisqu'ils attribuent, lors de leur décès, leur part sociale à la société, à l'exclusion de leurs héritiers.

III. · Comporte la double clause d'adjonction et de réversion la société civile dont les statuts exposent, d'une part, que les parts sociales peuvent être cédées à des tiers avec le consentement de l'unanimité des associés et, d'autre part, que, en cas de décès de l'un des associés au cours de la société, sa part accroîtra à ses coassociés survivants, sans que ses héritiers puissent rien prétendre. Le fait que les membres survivants ne sont pas tenus d'élire un nouvel associé et que chaque associé a le droit de disposer de sa part de son vivant n'est pas de nature à faire obstacle à l'application de l'art. 4 de la loi du 28 décembre 1880, cette loi soumettant à la taxe d'accroissement les sociétés civiles qui admettent les clauses d'adjonction et de réversion, sans spécifier que lesdites clauses doivent être forcées.

(Ainsi statué, sur les trois points par le tribunal et par la Cour.)

Laon, 13 juin 1901

et Cass. req., 1er décembre 1903.

(Société civile des Ecoles de Marle c. Enregistrement.)

MM. Voisin, rapp.; Feuilloley, av. gen. ; - Me Chabrol, av.

Le jugement est ainsi conçu :

[ocr errors]

Attendu qu'à la date du 16 juin 1899, l'administration de l'Enregistrement a fait délivrer aux opposants une contrainte tendant au paiement d'une somme de 1.469 fr. 39 tant pour droit d'accroissement que pour taxe sur le revenu :

Attendu que la Société civile de Marle a fait opposition à cette contrainte et a prétendu que cette somme n'était pas due: 1o la société ne rentrant pas dans les «< communautés ou associations religieuses » comprises en l'art. 9 de la loi du 29 décembre 1884; 2o l'acte de société ne contenant pas la double clause de réversion et d'adjonction sur laquelle est basée la perception en vertu de l'art. 4 de la loi du 16 avril 1895;

Attendu que les tribunaux sont souverains appréciateurs pour déterminer le caractère des associations qui peuvent être soumises à la loi;

Que, dans la cause actuelle, le tribunal a tous les éléments nécessaires pour apprécier le caractère religieux de la Société civile de Marle, caractère que révèlent notamment les signes suivants : absence de tout esprit de lucre de la part des associés; alimentation de la caisse sociale par des

offrandes; affectation gratuite des biens sociaux à une œuvre religieuse ; Attendu qu'il ressort des éléments de la cause que la société civile de Marle a été fondée non pas dans l'intérêt privé des associés, mais dans le but exclusif d'affecter le patrimoine social à fournir à des congrégations religieuses enseignantes, les locaux destinés à accomplir leur mission, aucun gain, en effet, ne pouvant advenir aux associés, la société n'exigeant pas de loyer des congrégations religieuses qui occupent ces immeubles ; Que, non seulement la dite société affecte gratuitement ces immeubles à des œuvres religieuses, mais encore qu'elle pourvoit au traitement des religieux qui enseignent dans lesdits immeubles;

Attendu que la société ne tire pas ses revenus du produit des apports sociaux ou des bénéfices de l'exploitation, mais d'offrandes, ainsi que cela résulte de tous les inventaires ;

Attendu encore que chaque associé en entrant dans la société a abdiqué tout appåt de gain, puisqu'il est stipulé qu'il abandonne le droit de retirer de la société des avantages pécuniaires en attribuant, lors de son décès, sa part sociale à la société à l'exclusion de ses héritiers;

Attendu, en outre, que l'acte de société renferme la double clause d'adjonction et de réversion;

Que la clause d'adjonction est bien nette qui permet toujours de remplacer un sociétaire avec le consentement unanime des associés restants; Que la clause de réversion n'est pas moins formelle lorsqu'en l'art. 11 on stipule que la part de l'associé décédé accroîtra à ses coassociés, sans que ses héritiers ou représentants puissent rien prétendre ni de ses apports, ni de ses profits;

Par ces motifs............

[ocr errors]

Les parties ont déféré ce jugement à la Cour de cassation. Leur pourvoi se fonde sur un moyen unique divisé en trois branches. MOYEN DE CASSATION. 1r BRANCHE. Violation de la loi du 29 juin 1872, des art. 3 et 4 de la loi du 28 décembre 1880, 9 de la loi du 29 décembre 1884, 3 de la loi du 16 avril 1895, 7 de la loi du 20 avril 1810 et manque de base legale, en ce que le jugement attaqué a, par une fausse interprétation des actes et des statuts de la société, déclaré la dite société «< association religieuse >> au sens des lois précitées, et, comme telle, assujettie à l'impôt de 4 0/0 sur le revenu forfaitaire et à la taxe d'accroissement, alors que ni les statuts ni les actes de la société ne donnent à cette société aucun des caractères auxquels se reconnaissent les associations religieuses.

[ocr errors]

2 BRANCHE. Violation des mêmes textes, en ce que le jugement attaqué a décidé que la dite société rentrait dans la catégorie de celles dont l'objet n'est pas de distribuer leurs bénéfices entre leurs membres et l'a ainsi assujettie, à cet autre titre, aux impôts précités, alors que l'objet de cette société est, au contraire, la distribution immédiate ou différée de la totalité des bénéfices;

3 BRANCHE. · Violation des mêmes textes,

en ce que le jugement attaqué a décidé que les statuts de la société contiennent les clauses d'adjonction et de réversion qui donnent ouverture à l'application de la taxe d'accroissement, alors que ces statuts ne comportent ni la elause d'adjonction ni celle de réversion.

« PreviousContinue »