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tions et communautés » les mots «< associations religieuses »> ne s'est pas livrée à une locution généralisant les deux premières et leur servant en quelque sorte de simple répétition;

Qu'en effet, refusant de restreindre les conditions d'exigibilité de la taxe aux règles ecclésiastiques de l'institution canonique, elle a entendu englober les autres associations religieuses;

Attendu qu'en l'espèce les dames Fuller, Michiels, Dienne, Aernout, Munier, Delattre et Pfeiffer ont formé une association religieuse spéciale;

Que la preuve de l'existence de cette association résulte de la combinaison des énonciations du contrat du 9 mars 1874 et des faits postérieurs à ce contrat ;

Qu'en effet, dans le contrat du 9 mars 1874, les dames susdites se présentent comme Dames de Marie Auxiliatrice de l'Immaculée-Conception;

Que, de plus, à la clause de reversion des parts indivises par elles acquises, elles ajoutent la clause d'attribution à la dernière survivante du bénéfice des changements, améliorations et embellissements qui auraient été faits;

Attendu qu'après le contrat elles ont fait demeurer dans l'immeuble acquis par elles, la communauté de Marie Auxiliatrice de l'ImmaculéeConception, qu'elles y ont demeuré avec ladite communauté et que celles d'entre elles qui survivent y demeurent encore ;

Attendu qu'au lieu d'agir dans leur intérêt particulier et personnel elles ont agi dans le but poursuivi pour la communauté religieuse elle-même et pour assurer ce but;

Attendu que dans ces circonstances et en présence des termes si larges de la loi il n'y a pas lieu de rechercher si l'association a eu une règle intérieure et un lien religieux autres que ceux de la communauté ellemême ;

Sur la question subsidiaire :

Attendu que la loi du 16 avril 1895, admettant pour les congrégations l'abonnement à la taxe d'accroissement, fait rétroactivement remonter cet abonnement à la date de la créance la plus ancienne due au Trésor;

Attendu que c'est à tort que l'Administration applique d'un côté la rétroactivité à la créance la plus ancienne qui est restée impayée jusqu'au moment de la loi, et que d'un autre côté elle refuse d'appliquer cette rétroactivité en ce qui concerne deux créances nées postérieurement et qui étaient payées avant la promulgation de la loi ;

Qu'en effet, la rétroactivité ouverte par le fait d'une créance restée impayée vise une période entière s'écoulant depuis la naissance de cette créance jusqu'au jour de la promulgation de la loi ; que de là suit que pour cette période tout payement, conforme au tarif de l'ancienne loi, fait antérieurement à la loi nouvelle et du chef d'une cause postérieure à la créance restée impayée, est censé n'avoir pas eu de base régulière;

Attendu dès lors dans l'espèce que le titre du paiement s'est trouvé annulé par un fait postérieur résultant de la loi elle-même ;

Qu'il s'ensuit qu'on ne se trouve pas en présence d'événements ultérieurs quelconques qui, aux termes de l'art. 60 de la loi du 22 frimaire an VII, lorsque la perception est régulièrement faite, ne peuvent ouvrir le droit à la restitution;

Attendu que l'Administration fait elle-même dans son mémoire le calcul de la taxe d'abonnement et qu'elle liquide ainsi qu'il suit depuis le jour de la naissance de la plus ancienne créance jusqu'à la loi du 16 avril 1895;

ANNÉE 1888.

Valeur déclarée, 228,000 fr., à 0.40 0/0, 912 fr. Prorata du 29 octobre au 31 décembre

ANNÉES 1889 à 1894.

Valeur déclarée, 217,000 fr., à 0.40 0/0. Soit 868 fr. par an.
En tout pour 6 ans.

ANNÉE 1895.

Valeur déclarée, 217,000 fr., à 0.40 0/0, 868 fr. Prorata du 1er janvier au 16 avril.

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159 fr. 60

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5,208 fr.

255 fr. 46

5,623 fr. 06

Attendu qu'il a été payé 15,750 fr. du chef des deux créances postérieures à la créance la plus ancienne et que les demanderesses demandent la restitution de 10,126 fr. 94;

Par ces motifs, joint les causes à l'effet de statuer en un seul et même jugement; déclare les offres non valables et non libératoires et condamne les dames Fuller et Dienne aux frais de ces offres; dit que les dames Fuller, Dienne, Michiels et autres ont formé une association religieuse sujette à la taxe d'accroissement, et que la taxe d'abonnement à l'accroissement en commençant rétroactivement à partir du 26 octobre 1888, date du décès de la dame Munier, a rendu vain le titre des créances payées postérieurement à cette date;

Condamne, en conséquence, l'Administration de l'Enregistrement à restituer aux dames Michiels et Fuller la somme de 10,126 fr. 94 due par elles à la date du 16 avril 1895;

Le tout sans préjudice des droits qui ont pu courir depuis.

La Direction générale a déféré ce jugement à la Cour de cassation. Son pourvoi se fondait sur le moyen suivant :

Violation de l'art. 60 de la loi du 22 frimaire an VII et fausse application de l'art. 8 de la loi du 16 avril 1895, en ce que le jugement attaqué a ordonné la restitution partielle des droits d'accroissement acquittés, en exécution de l'art. 9 de la loi du 29 décembre 1884, après les décès, survenus en 1892 et 1894, de deux membres d'une association religieuse, sous le prétexte que l'impôt, auquel avait donné ouverture un décès du 28 octobre 1888, restait dû lors de l'expiration du délai d'option fixé par l'art. 8 de la loi du 16 avril 1895,- qu'en vertu de cette disposition, l'association, pour tous les décès survenus dans son sein depuis et y compris celui du 28 octobre 1888, se trouvait ainsi constituée débitrice de la taxe annuelle substituée à l'ancien droit d'accroissement par l'art. 3 de la loi du 16 avril 1895 et que cette taxe, calculée depuis ladite date du 28 octobre 1888, était inférieure aux sommes versées pour les décès de 1892 et de 1894 alors qu'aucune partie de ces sommes régulièrement perçues n'était restituable.

Des observations présentées à l'appui du pourvoi nous extrayons ce qui suit :

V. La difficulté soumise à la Cour peut se résumer ainsi : « L'art. 8 de

la loi du 16 avril 1895 a-t-il eu pour effet de rendre rétroactivement irrégulières des perceptions qui étaient légitimes et justifiées au moment où elles ont été effectuées ? >>

Avant d'aborder l'examen de cette question, la Direction générale croit devoir rappeler que la non-rétroactivité des lois formant le droit commun (art. 2, C. civ.), les dispositions qui y dérogent ont un caractère exceptionnel et doivent, à ce titre, être interprétées restrictivement. VI. L'art. 8 de la loi de 1895 est ainsi conçu :

« Les congrégations, communautés et associations qui, au moment de la promulgation de la présente loi, seront débitrices des droits d'accroissement auront un délai de six mois à partir de cette époque pour se libérer, sans pénalité, mais à la condition de rembourser au Trésor tous les frais qu'il aurait exposés contre elles.

<< Elles pourront opter, à cet effet, entre l'application des règles anciennes et celle des règles établies par la présente loi, sans pouvoir toutefois se prévaloir de l'exemption accordée par le paragraphe 2 de l'art. 3. Dans ce dernier cas, la taxe annuelle sera calculée à compter du jour de la naissance de la plus ancienne créance du Trésor et liquidée sur la valeur brute des biens meubles et immeubles, telle que cette valeur aura été déclarée ou constatée pour le paiement de l'impôt sur le revenu, ou, à défaut, au moyen de la déclaration prévue par l'art. 4 de la présente loi.

<< Faute par elles de s'être libérées dans le délai ci-dessus imparti, les congrégations, communautés et associations devront acquitter sans préjudice de tous frais exposés, la taxe annuelle calculée comme il vient d'être dit, à compter du jour de l'ouverture de la plus ancienne créance du Trésor. Elles seront, en outre, passibles d'une amende égale à la moitié de la taxe exigible. »

Cet article vise exclusivement les droits d'accroissement encore dus au moment de la promulgation de la loi et laisse complètement en dehors de ses prévisions les taxes précédemment acquittées en conformité de la loi du 29 décembre 1884.

Le but général de la loi du 16 avril 1895 et la portée véritable des dispositions transitoires insérées dans l'art. 8 précité ressortent, d'ailleurs, nettement de l'exposé des motifs du projet déposé par le Gouvernement.

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« L'impôt-lit-on, en effet, dans ce document ne saurait être conte sté dans son principe. Le maintien intégral en est nécessaire. Il s'agit uniquement d'en organiser le recouvrement.....

« L'art. 69 (devenu l'art. 8 précité) contient des dispositions purement transitoires, principalement destinées à assurer le règlement du passé. Ces dispositions maintiennent et sauvegardent les droits du Trésor, tout en facilitant aux congrégations le moyen de se libérer » (J. off., Doc. parl., Chambre, p. 444).

Ainsi, par les modifications qu'il a apportées aux règles antérieures, le législateur s'est simplement proposé de couper court aux difficultés auxquelles le droit d'accroissement avait donné lieu dans le passé, tout en en prévenant le retour dans l'avenir; mais on ne saurait, sans méconnaître ses intentions évidentes, soutenir que la loi de 1895 remet en question les recettes précédemment effectuées et autorise la restitution, en tout ou en partie, des droits régulièrement perçus, sous l'empire de la loi du 29 décembre 1884, en vertu des tarifs alors en vigueur.

C'est en ce sens, au surplus, que la Chambre civile, par deux arrêts des 1er mai 1899 (S. 99.1.420) et 9 mai 1900 (J. E. 25905; Rép. pér. de Garnier, 9851; R. E. 2406) et la Chambre des requêtes, par un arrêt du 28 mars 1900 (J. E. 25881; Rép. pér., 9821; R. E. 2386) ont interprété la disposition dont il s'agit : « Attendu - portent ces arrêts dont les expressions sur

ce point spécial sont identiques

que les termes de l'art. 8 de ladite loi (de 1895) démontrent clairement l'intention du législateur de lui donner un effet rétroactif pour le recouvrement des droits encore dus à l'expiration de ce délai, alors même qu'ils faisaient l'objet d'une instance en cours. »> Il résulle nettement de ce motif que, dans l'esprit de la Cour, la rétroactivité est limitée aux droits encore dus et ne s'applique pas aux droits régulièrement payés.

Non seulement la loi de 1895 laisse toutes choses en l'état pour les perceptions effectuées, d'après l'ancien tarif, avant sa promulgation, mais encore elle prolonge, pendant six mois à partir de cette date, les effets de la législation antérieure et accorde aux redevables la faculté de se libérer, pendant ce délai, des droits exigibles suivant le tarif antérieur.

Le législateur a donc très nettement limité les effets des mesures nouvelles dans le passé.

VII. Pour décider le contraire, le jugement attaqué se fonde sur deux arguments principaux.

Il fait observer tout d'abord que la loi de 1895 déclare les congrégations — qui ne se sont pas libérées des droits arriérés dans le délai de six mois - débitrices de la taxe annuelle à partir de la plus ancienne créance du Trésor. Il en conclut que, cette hypothèse se réalisant, toute la période écoulée depuis le jour de la plus ancienne créance jusqu'à la promulgation de la loi est soumise aux règles nouvelles et que les paiements régulièrement effectués dans l'intervalle se trouvent rétroactivement sans cause.

Il ajoute que l'Administration elle-même reconnaît cet effet rétroactif de la loi sur la période intermédiaire, puisque dans son mémoire devant le tribunal elle liquide la taxe annuelle à la charge de l'association depuis la date de la plus ancienne créance du Trésor jusqu'à la loi du 16 avril 1895. Il est facile de démontrer que ni l'une ni l'autre de ces propositions ne sont fondées.

VIII. La mesure édictée par la loi de 1895, dans le dernier alinéa de l'art. 8, a évidemment le caractère d'un forfait. Le législateur ne tient aucun compte du nombre des faits imposables, décès ou retraites, dont chacun donnait auparavant ouverture à une taxe distincte; il considère uniquement la durée de la période pendant laquelle l'impôt n'a pas été payé.

En appliquant l'art. 8 dans cet esprit, l'Administration eût été fondée à réclamer la taxe annuelle depuis le 28 octobre 1888, date du premier décès n'ayant donné lieu à aucun paiement régulier, jusqu'au 2 janvier 1892, date du second décès, pour lequel le droit de 9 0/0 a été perçu et qui luimême a été suivi (en 1894) d'un troisième décès ayant également donné ouverture au droit de 9 0/3. La période écoulée du 2 janvier 1892 à la promulgation de la loi de 1895 était ainsi hors de cause, la période antérieure (du 28 octobre 1888 au 2 janvier 1892), pour laquelle les droits n'avaient pas été acquittés, étant seule passible de la taxe annuelle.

Peut-être même aurait-on pu soutenir, en appliquant littéralement l'art. 8 au cas particulier, que cette taxe était due depuis le 28 octobre 1888 jusqu'au jour de la promulgation de la loi, sans tenir compte de la période intermédiaire.

La Direction générale n'a pas émis cette prétention devant le tribunal et n'a même pas réclamé la taxe annuelle à raison du décès survenu le 28 octobre 1888. Interprétant la loi dans le sens le plus libéral, elle s'est bornée à calculer la taxe annuelle depuis la date de la plus ancienne créance du Trésor jusqu'au jour de la promulgation de la loi nouvelle et à mettre le total ainsi obtenu en regard des paiements effectués à raison de deux décès (sur trois qui se sont produits). Cette comparaison faisant ressortir un excédent en faveur des versements déjà opérés, l'Administration a déclaré ne

pas insister au sujet du paiement de la taxe annuelle pour la période non affranchie de l'impôt. On s'explique difficilement que la modération dont elle a fait ainsi preuve soit méconnue au point d'être invoquée contre elle.

Si la thèse du jugement était admise, il en résulterait que le fait par l'association d'avoir refusé d'acquitter l'impôt dû en 1888 rendrait restituables des perceptions opérées en 1892 et 1895, alors que, de l'aveu même du tribunal, ces perceptions seraient inattaquables si Mmes Fuller et Michiels s'étaient libérées en 1888 de leur dette à l'égard du Trésor. L'étrangeté d'un tel résultat démontre bien le vice du raisonnement d'où il procède.

Conformément à ces conclusions, la Cour a cassé le jugement de la Seine sur le chef qui lui était déféré. Son arrêt est ainsi conçu : Donne défaut contre les défenderesses;

La Cour;
Sur le moyen unique du pourvoi :

Vu l'art. 60 de la loi du 22 frimaire an VII;

Attendu qu'aux termes de cette disposition, tout droit d'enregistrement perçu régulièrement ne peut être restitué, quels que soient les événements ultérieurs, sauf les cas prévus par la loi ;

Attendu qu'une perception est régulière lorsque les préposés de l'Administration ont fait une exacte application des tarifs aux actes produits et aux déclarations des parties;

Attendu que le jugement attaqué constate que, lors des décès des dames Aernout et Dienne, religieuses de la congrégation de Marie Auxiliatrice de l'Immaculée-Conception, les défenderesses ont versé au bureau de l'enregistrement de Paris, les 9 avril 1892 et 22 novembre 1894, les sommes de 6,750 fr. et de 9,000 fr., montant des droits exigibles en vertu de l'art. 9 de la loi du 29 décembre 1884 alors en vigueur;

Attendu que si la taxe annuelle, substituée par la loi du 16 avril 1895 au droit d'accroissement, est devenue obligatoire, même en ce qui concerne la période antérieure à sa promulgation, pour toutes les congrégations, communautés et associations religieuses encore débitrices envers le Trésor, à l'expiration du délai de six mois que leur accordait l'art. 8 pour se libérer, l'effet rétroactif de cette loi est strictement limité au recouvrement des droits dus à cette date et ne saurait être étendu à ceux régulièrement perçus sous l'empire des anciens tarifs; qu'il suit de là que la taxe nouvelle ne pouvait s'appliquer rétroactivement aux perceptions opérées en 1892 et en 1894 après les décès des dames Aernout et Dienne; qu'il importe peu que les défenderesses fussent encore débitrices, à cette époque, envers le Trésor, de l'impôt auquel avait donné ouverture le décès de la dame Munier survenu le 28 octobre 1888 et que le refus de se libérer de cette dette ne peut avoir pour effet la restitution de droits légitimement perçus; qu'en décidant le contraire, le jugement attaqué a violé le texte de loi ci-dessus visé ;

Par ces motits, casse et annule le jugement rendu entre les parties par le tribunal civil de la Seine le 13 novembre 1897...

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Observations. Nous pensons, ainsi que le décide l'arrêt ci-dessus, que les droits régulièrement perçus sous l'empire de la législation antérieure à 1895 ne sont pas devenus restituables par l'effet de cette dernière loi. Celle-ci n'a évidemment visé que les droits encore dus.

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