Page images
PDF
EPUB

Mais il semble que l'Administration n'a pas régulièrement liquidé les droits exigibles. La taxe de 0 fr. 40 0/0 était due depuis le décès de 1888, qui n'avait donné lieu à aucun paiement, jusqu'à celui de 1892 pour lequel les droits ont été acquittés. Pour la période comprise entre 1892 et la promulgation de la loi de 1895, l'association était quitte envers le Trésor; la réclamation devait donc être limitée à la période antérieure, mais dans cette limite les droits étaient dus sans qu'il y eût lieu d'admettre l'imputation des droits postérieurement versés. On ne s'explique pas, en effet, comment les sommes versées à raison des décès de 1892 et de 1894, et qui n'ont pas dépassé le montant des droits exigibles à ces deux dates, ont pu rétroactivement être considérées comme couvrant la taxe due pour le décès de 1888. C'est vraisemblablement cette liquidation inexacte qui a induit en erreur le tribunal de la Seine.

La Cour reproduit dans ses motifs un argument d'équité invoqué par la Direction générale dans son pourvoi, mais qui ne nous paraît pas convaincant. Le refus de se libérer du droit exigible en 1888 ne peut, dit-elle, avoir pour effet de justifier la restitution de droits légitimement perçus.

Le résultat serait bizarre, en effet; mais la loi de 1895 en produit de plus bizarres encore, qui, pourtant, sont incontestables. Si, par exemple, les dames Fuller, Michiels et consorts avaient refusé de payer non seulement les droits dus à raison du décès de 1888, mais encore ceux exigibles pour les décès de 1892 et de 1894, elles n'eussent été condamnées à verser que la taxe de 0 fr. 40 0/0, c'està-dire une somme précisément égale au chiffre auquel elles demandaient que leurs versements fussent réduits; de telle sorte qu'une triple infraction à la loi les mettait dans une situation bien meilleure qu'une infraction isolée.

La rétroactivité des lois produit de ces bizarreries.
Annoter: Supplément, Congrégation, 19.

Art. 3446.

Hypothèque maritime.

Mainlevée.

Droit de 0 fr, 20 0/0.

Les mainlevées d'hypothèque maritime sont assujetties au droit de 0 fr. 20 0/0, comme les mainlevées d'hypothèque terrestre.

Cass. civ., 26 octobre 1903.

(Enregistrement c. Flornoy.)

MM. Maillet, rapp.;

[blocks in formation]

Sarrut, av. gén.; — Me Moutard-Martin, av.

Les faits sont exposés dans le jugement de Saint-Nazaire

du 19 janvier 1900, que nous avons reproduit sous l'art. 2329 de la

Revue.

La Direction générale a déféré ce jugement à la Cour de cassa

tion pour :

Violation des art. 1, no 7 de la loi du 28 février 1872 et 19 de la loi du 28 avril 1893, en ce que le tribunal a décidé que les consentements à mainlevée d'hypothèques maritimes doivent être rangés dans la catégorie des consentements purs et simples soumis au droit fixe de 3 fr., à l'exclusion du droit de 0 fr. 20 0/0 édicté pour les mainlevées d'hypothèques, sous le prétexte que la loi du 28 février 1872, qui a établi le droit gradué, auquel la loi du 28 avril 1893 a substitué le droit de 0 fr. 20 0/0, n'a pu comprendre dans ses termes les mainlevées relatives à l'hypothèque maritime qui n'a été introduite dans notre législation qu'en 1874.

A l'appui de son pourvoi, elle a fait valoir les considérations sui

vantes :

II. Le jugement attaqué donne cet unique motif que le législateur de 1872, qui a soumis au droit gradué les mainlevées d'hypothèque, n'a pu avoir en vue les mainlevées se rapportant à l'hypothèque maritime, qui n'existait pas encore, et qu'en conséquence ces derniers actes doivent être rangés dans la catégorie des consentements purs et simples soumis au droit fixe de 3 fr.

III. Ce raisonnement heurte les principes les plus certains de la législation fiscale.

La loi fiscale ne définit pas les contrats qu'elle tarife; c'est dans la loi civile qu'il convient de chercher cette définition.

L'enregistrement, disait Paul Pont, embrasse toutes les matières du droit : les principes en sont arbitraires, en tant qu'ils touchent à la quotité de l'impôt, que le législateur peut élever ou diminuer à son gré; mais ils rentrent dans les théories générales, dès qu'il s'agit de l'application de tel ou tel droit à tel ou tel acte. Ainsi, la perception du droit de vente, d'échange, de bail, de donation, de partage, etc., dépendra toujours de la qualification à donner à l'acte : il faudra apprécier, au préalable, si le contrat a plutôt les caractères de l'échange que ceux de la vente, s'il est à titre onéreux ou à titre gratuit, attributif ou simplement déclaratif de propriété (Dalloz, Jur. gén., Vo Enregistrement, no 4).

Si le droit spécial de l'enregistrement pose la base des droits à percevoir et en fixe les quotités, - déclare en ce sens un arrêt de la Chambre civile du 6 juillet 1871, rendu sur le rapport de M. le conseiller Larombière et les conclusions de M. le premier avocat général de Raynal, - il appartient à l'Administration de rechercher, pour l'application de la loi fiscale, quels sont, d'après les règles ordinaires du droit commun, la nature réelle et le caractère légal des actes et des contrats qui donnent ouverture à des perceptions (D. P. 71.1.341; S. 71.1.61.)

Quand la loi fiscale soumet à tel droit les ventes d'immeubles, par exemple, elle entend donc que, tant qu'elle ne sera pas abrogée, ce droit sera appliqué à tous les contrats ayant, d'après la loi civile, le caractère de vente immobilière. Et la loi civile à consulter pour la détermination du caractère de la convention ne peut être que celle en vigueur à la date même de cette

convention.

Aussi, selon la remarque de MM. Championnière et Rigaud (t. I, no 60). Quoique la loi du 22 frimaire an VII ait été promulguée sous l'empire de l'ancien droit, les contrats qui sont tarifés par elle sont ceux que le Code a caractérisés. Ainsi, les actes libératoires, obligatoires et translatifs, dont le droit doit être aujourd'hui perçu, ne sont pas ceux qui, suivant les principes en vigueur en l'an VII, étaient libératoires, obligatoires et translatifs, mais bien ceux qui, suivant les principes du Code, ont ces caractères ou plutôt ces effets. »

[ocr errors]

La Cour a fait l'application de ces principes dans une espèce caractéristique. Il dépendait d'une succession ouverte le 6 juin 1809, des bestiaux et des ustensiles aratoires ayant le caractère d'immeubles par destination aux termes de l'art. 524, C. civ. Dans la déclaration souscrite pour le paiement du droit de mutation par décès, ces bestiaux et ustensiles furent compris parmi les biens meubles de l'hérédité et taxés comme tels. L'Administration ayant considéré comme insuffisante la perception effectuée par le receveur et réclamé la différence entre la somme perçue et celle exigible d'après le tarif édicté par la loi du 22 frimaire an VII pour les transmissions par décès de biens immeubles, sa demande fut rejetée par un jugement du tribunal de Bayeux sous le prétexte qu'à l'époque de la promulgation de la loi de frimaire, les animaux attachés à la culture et les ustensiles aratoires placés par le propriétaire pour le service et l'exploitation du fonds étaient meubles suivant la coutume de Normandie, alors en vigueur au lieu de l'ouverture de la succession; que ce serait faire produire à l'art. 524, C. civ. un effet rétroactif que de l'appliquer aux droits établis par la loi de l'an VII pour en étendre la perception; que cette loi devait continuer à être observée dans chaque pays comme au temps de sa promulgation, tant qu'une loi nouvelle ou un nouveau décret n'aurait pas approprié au droit d'enregistrement les innovations du Code sur la distinction des biens.

Ce jugement a été cassé, en ces termes, par un arrêt du 20 juillet 1812: Vu l'art. 524, C. N., ainsi conçu :

Les objets que le propriétaire d'un fonds y a placés pour le service et l'exploitation de ce fonds sont immeubles par destination :

Ainsi, sont immeubles par destination, quand ils ont été placés par le propriétaire, pour le service et l'exploitation du fonds,

Les animaux attachés à la culture,

Les ustensiles aratoires, etc.;

Vu encore l'art. 7 de la loi du 30 ventôse de l'an XII, qui porte:

A compter du jour où ces lois sont exécutoires, les lois romaines, les ordonnances, les coutumes générales ou locales, les statuts ou règlements, cessent d'avoir force de loi générale et particulière dans les matières qui font l'objet des lois composant le présent Code;

Vu enfin l'art. 69, § 3, no 4 de la loi du 22 frimaire an VII, qui dispose : Sont susceptibles du droit de 1 fr. par 100 fr. les mutations des biens immeubles en propriété ou usufruit, qui auront lieu en ligne directe;

Attendu que, d'après l'art. 524, C. N. devant transcrit, les animaux attachés à la culture et les ustensiles aratoires sont immeubles par destination; que, dès lors, ils sont susceptibles du droit de 1 fr. par 100 fr., aux termes de l'art. 69, § 3, no 4 de loi du 22 frimaire an VII, lors des mutations en ligne directe; que cependant le tribunal de Bayeux a décidé qu'ils étaient meubles d'après la coutume de Normandie, dont les dispositions ont cessé d'avoir force de loi, aux termes de l'art. 7 de la loi du 30 ventose an XII; d'où il suit que ce tribunal a contrevenu aux art. 524, C. N., et 69, § 3, no 4 de la loi du 22 frimaire an VII, et faussement appliqué les art. 506, 515 et 518 de la coutume de Normandie ;

Par ces motifs, la Cour casse et annule, etc. (Conf. Cass. 22 mai 1833; S. 33.1.517; D. P. 33.1.219).

La doctrine de cet arrêt est directement applicable à l'espèce.

Les mainlevées de l'hypothèque instituée par la loi du 10 décembre 1874 sont tombées de plein droit sous l'empire des dispositions de la loi du 28 février 1872 relatives aux mainlevées d'hypothèques, tout comme les transmissions de biens que le Code civil a fait passer de la classe des meubles dans celle des immeubles sont tombées de plein droit sous l'empire des dispositions de la loi du 22 frimaire an VII, relatives aux immeubles, nonobstant leur nature immobilière à l'époque de la promulgation de cette loi.

Conformément à ces conclusions, la Cour a cassé le jugement de Saint-Nazaire par l'arrêt dont la teneur suit:

La Cour: Donne défaut contre le défendeur;
Sur le moyen unique du pourvoi :

Vu l'art. 19 de la loi du 28 avril 1893;

Attendu que ce texte assujettit au droit proportionnel les actes désignés dans l'art. 1er de la loi du 28 février 1872 et pour lesquels cette loi avait converti en un droit gradué le droit fixe établi par la loi du 22 frimaire an VII et par les lois subséquentes ;

Attendu que ledit article comprend, notamment, dans cette catégorie d'actes << les consentements à mainlevées totales ou partielles d'hypothèques » sur lesquels la quotité du droit est déterminée « par le montant des sommes faisant l'objet de la mainlevée » ;

Attendu que cette disposition générale et absolue s'applique à toutes les hypothèques sans distinction; qu'en conséquence, elle a été étendue nécessairement à l'hypothèque maritime instituée par les lois des 10 décembre 1874 et 10 juillet 1885; que si les dites lois ne soumettent l'acte constitutif d'hypothèque qu'à un droit fixe, elles ne contiennent aucune disposition exceptionnelle en ce qui concerne le consentement à mainlevée ;

D'où il suit qu'en décidant que les actes de cette nature n'étaient passibles que du droit fixe édicté par les art. 68, § 1, no 21 de la loi du 22 frimaire an VII et 43, n° 7 de la loi du 28 avril 1816, le jugement attaqué a violé le texte de loi ci-dessus visé ;

Par ces motifs, casse et annule le jugement rendu entre les parties, par le tribunal civil de Saint-Nazaire, le 19 janvier 1900...

Observations. Cette décision confirme les prévisions que nous émettions en appréciant le jugement de St-Nazaire, et le pourvoi de la Direction générale est conforme de tous points à nos observations auxquelles nous ne pouvons que nous référer.

Annoter: T. A., Hypothèque maritime et Mainlevée, 20; plément, Hypothèque maritime, 3 et Mainlevée, 1.

Art. 3447.

[ocr errors]

Assurances contre l'incendie. Taxe de 6 fr.
lion.
fin au cours de l'année. Déduction.

Base de la perception.

[ocr errors]

ou Sup

[blocks in formation]

Polices ayant pris

Pour la liquidation de la taxe annuelle de 6 fr. par million à la

charge des compagnies d'assurances contre l'incendie, on doit défalquer du total des capitaux assurés le montant des assurances qui ont pris fin au cours de l'année sans avoir donné lieu au payement d'une prime durant cette année. En cas de résiliation ou d'annulation du contrat, il y a lieu de déduire autant de fois le capital assuré qu'il s'est écoulé d'exercices pour lesquels la prime n'a pu être recouvrée.

Solution du 28 octobre 1903; Inst. 3134, § 3.

Annoter: Supplément, Assurances, 7.

Art. 3448.

Rede

Concessions de terrains dans les cimetières. vance payée à chaque inhumation nouvelle. - Droit supplémentaire d'enregistrement.

Les redevances acquittées pour secondes et ultérieures inhumations constituent des suppléments de prix dont l'exigibilité donne ouverture à des droits d'enregistrement complémentaires d'après le tarif appliqué à l'acte de concession de sépulture.

Solution du 31 décembre 1902 (1).

Les règlements municipaux sur les cimetières imposent généralement aux cessionnaires de terrains, propriétaires de caveaux destinés à la réception de plusieurs corps, l'obligation de verser un supplément de redevance pour secondes et ultérieures inhumations. Ce supplément de redevance, de même que le droit acquitté lors de la signature du contrat de cession, donne lieu à partage entre la ville et les établissements charitables, mais doit-il être assujetti également au droit d'enregistrement?

L'Inspection générale des finances, qui a soulevé la question, a proposé de la résoudre affirmativement. La Direction générale de l'Enregistrement a, dans une solution du 31 décembre 1902, émis l'avis que cette opinion était justifiée. Les sommes versées à titre de redevances complémentaires pour secondes et ultérieures inhumations constituent, à ses yeux, des suppléments de prix dont l'exigibilité est soumise à une condition suspensive et l'accomplissement de la condition donne ouverture à des droits complémentaires d'après le tarif appliqué à l'acte de concession.

Annoter T. A., Concession, 54.

(1) Revue des services financiers, octobre 1903, p. 406.

« PreviousContinue »