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la masse des créanciers, ne se trouve jamais dans les conditions voulues pour obtenir l'assistance. Il en est ainsi également du curateur à une succession vacante (1). Dans le même ordre d'idées, il a été décidé que l'assistance judiciaire accordée en vue d'une demande d'interdiction ne peut profiter à l'interdit; par suite, le recouvrement des frais exposés par la partie assistée en vue de faire prononcer l'interdiction et qui a obtenu gain de cause peut être poursuivi sur les biens de l'interdit (D. M. F. 17 avril 1891).

4. PERSONNES MORALES. Les personnes morales, communes et établissements publics, ne pouvaient bénéficier de l'assistance, en vertu de la loi de 1851; l'art. 1er de la loi de 1901 accorde cette faveur à tous les établissements publics ou d'utilité publique, quel que soit leur objet, ainsi qu'aux associations privées poursuivant une œuvre d'assistance et jouissant de la personnalité civile, si leurs ressources sont insuffisantes.

5. CAS DIVERS D'APPLICATION. La loi de 1851 n'accordait l'assistance que pour les actions en justice, à l'exclusion des contrats volontaires. La loi nouvelle l'étend, en dehors de tout litige, aux actes de juridiction gracieuse, aux actes conservatoires (art. 1), et aux actes et procédures d'exécution, même lorsque ces actes sont faits et ces procédures suivies en vertu d'actes conventionnels (art. 2).

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I. Actes de la juridiction gracieuse. On entend plus spécialement par juridiction gracieuse, dans le langage du droit, celle qui s'exerce sur des demandes qui n'ont pas d'adversaires connus ou présumés (Garsonnet, Cours de procédure civile, t. VII, p. 205 et suiv., § 1444). L'assistance judiciaire s'applique incontestablement aux actes de ces procédures spéciales et notamment aux demandes d'adoption, d'homologation des délibérations de conseils de famille en matière d'emprunt ou d'aliénation, à la première phase des demandes d'interdiction, de conseil judiciaire, aux actions en rectification d'actes de l'état civil qui ressortent à la juridiction gracieuse de la chambre du conseil (Garsonnet, Procéd., VII, § 1444, p. 215).

La loi du 10 juillet 1901 embrasse, de plus, sous le nom d'actes de juridiction gracieuse, tous les actes qui émanent des tribunaux, Conseils et Cours ou même qui nécessitent simplement l'intervention de l'un des magistrats de ces tribunaux, Cours et Conseils, et qui ne sont pas faits à l'occasion d'un litige proprement dit : telles sont notamment les ordonnances sur requêtes (ordonnances relatives à l'ouverture d'un testament, aux envois en possession, à la délivrance d'une seconde grosse, à la correction paternelle, à l'exequatur d'une sentence arbitrale), les appositions et levées de scellés, les actes de no

(1) En ce sens, décision du bureau de la Cour d'appel de Bordeaux du 1er décembre 1881; R. P. 6062; S. 82. 2. 229; P. 82. 1. 11. 114; D. 82. 3. 72; Dorigny, p. 53; FuzierHerman, R. G. A., V Assist. jud., no 34.

toriété dressés par le juge de paix (V. Dalloz, Rép., V° Organisation judiciaire, no 465-3° et 6o). On doit comprendre dans la même catégorie les avis de parents; ces derniers actes ont, du reste, été expressément visés dans le rapport fait à la Chambre des députés, par M. Raoul Bompard, au nom de la commission chargée d'examiner les différents projets de revision de la loi du 22 janvier 1851 (Annexe, no 511, au procès-verbal de la séance du 13 déc. 1898, § III; Inst. 3060, p. 2).

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Il. Actes conservatoires. Les actes conservatoires sont ceux qui ont principalement pour objet, soit de maintenir l'existence d'un droit menacé de périr par le fait d'une déchéance ou d'une prescription, soit de prévenir la perte ou l'altération même du gage pouvant assurer l'utile exécution du droit (C. Paris, 27 janv. 1851, D. P. 51.2.58). Cette formule est assez imprécise, et les travaux préparatoires de la loi ne permettent pas de déterminer très exactement les actes que l'on a entendu ainsi viser.

D'après le premier rapport de M. Bompard : « Le secours de l'assistance sera valablement accordé pour toute procédure tendant à revendiquer un droit, à sauvegarder un intérêt sous quelque aspect qu'elle se présente. » Ces termes semblent exclure tous les actes qui auraient un caractère conventionnel. En parlant de « procédures »>, M. Bompard a entendu certainement que les actes résultant d'un accord entre les parties intéressées ne pourraient bénéficier de l'assistance judiciaire. Sous réserve de cette observation, on ne saurait méconnaître que les bureaux d'assistance ont le plus large pouvoir d'appréciation pour déterminer les actes que la loi a entendu comprendre sous l'expression générique d'actes conservatoires (V. Simon, Comirentaire de la loi nouvelle, p. 42 et 43) (1). Parmi les plus usuels, il convient de citer les inventaires, les appositions de scellés, les constitutions et les inscriptions judiciaires ou légales d'hypothèque, les demandes en séparation de patrimoine, les interventions à partage, les actes interruptifs de prescription, les protêts, etc. (Inst. 3060, p. 2), les sommations, les procès-verbaux de constat, les protestations par huissiers.

Nous ajouterons à cette énumération les saisies-arrêts qui sont à la fois des actes conservatoires (dans la première phase de la procédure) et d'exécution (dans la dernière phase). Voir T. A., Procé

dure, 644 et le rapport de M. Bompard, précité.

La question de savoir à quel point de la procédure la saisie-arrêt · cesse d'être une mesure conservatoire pour devenir une mesure

(1) Jugé que le bénéfice de l'assistance judiciaire ne peut être accordé à une étrangère pour faire, au ministère de la justice, la déclaration par laquelle elle réclame la qualité de française conformément à l'art. 9 C. civ. (Jug. Nice, du 20 mai 1902, confirmé par la Cour d Aix, le 17 juillet 1902; R. E. 3280). Nous avons fait des réserves sur cette décision.

d'exécution est controversée (V. Garsonnet, Procédure, 2e éd., IV, § 1463, p. 471 et suiv.). D'après ce dernier auteur, « le saisissant n'exécute pas encore son débiteur en faisant défense au tiers saisi de le payer, mais il commence à l'exécuter en ordonnant à ce tiers saisi de payer entre ses propres mains, et cette exécution se consomme à son profit quand la créance lui est définitivement attribuée; aussi l'exploit de saisie-arrêt n'est-il qu'une mesure conservatoire, mais la demande de validité et, à plus forte raison, le jugement passé en force de chose jugée qui valide la saisie-arrêt sont-ils des actes d'exécution » (op. cit., p. 474).

III. Actes d'exécution.

Aux termes de l'art. 2, l'assistance s'étend de plein droit aux actes et procédures d'exécution, à opérer en vertu de décisions déjà obtenues avec le bénéfice de l'assistance judiciaire; elle peut, en outre, être accordée, mais dans les formes ordinaires, pour tous les autres actes et procédures d'exécution, même pour ceux auxquels il serait procédé en vertu d'actes conventionnels. Il s'agit d'ailleurs uniquement des actes d'exécution forcée, c'est-à-dire des actes des procédures énoncées sous ce nom au Code de procédure civile; la loi a laissé en dehors de ses prévisions les actes d'exécution, qui ne sont que la réalisation volontaire d'une convention.

Afin de garantir la partie poursuivie de toute vexation de la part de l'assisté, le législateur a voulu que ces actes et procédures d'exécution, qui pourraient avoir lieu avec le bénéfice de l'assistance judiciaire fussent, dans tous les cas, déterminés par le bureau lui-même. Cette détermination doit être faite, dans la première hypothèse visée par l'art. 2, sur la demande de l'assisté, par une décision spéciale du bureau qui a accordé l'assistance pour l'instance sur le fond et, dans la seconde hypothèse, par la décision du bureau qui statue sur la demande d'assistance. Les intéressés doivent fournir toutes les justifications nécessaires à ce sujet, avant de pouvoir bénéficier des immunités accordées.

Les actes et procédures d'exécution effectués en vertu de décisions obtenues avec le bénéfice de l'assistance judiciaire peuvent faire naître des instances nouvelles, soit entre l'assisté et la partie poursuivie, soit entre l'assisté et un tiers. Dans ces deux cas, le bénéfice de la décision primitive qui a accordé l'assistance subsiste en ce qui concerne la constatation de l'insuffisance des ressources de l'assisté. Mais l'assistance doit être néanmoins prononcée au fond par le bu eau compétent, selon les distinctions établies à l'art. 3. Le bureau saisi dans ces conditions n'a plus alors à examiner qu'un seul point: celui de savoir si 'instance nouvelle est suffisamment justifiée et ne constitue pas une mesure purement vexatoire à l'encontre de la partie adverse (art. 4).

Il va sans dire, d'ailleurs, que les dispositions spéciales des art. 2 et 4 ne concernent que la partie poursuivante. La partie poursuivie ou les tiers qui seraient appelés à intervenir dans des instances incidentes à des procédures d'exécution, ne pourraient obtenir l'assistance judiciaire que dans les formes ordinaires, et cela alors même qu'ils auraient déjà bénéficié de l'assistance dans un premier procès suivi contre la partie poursuivante (Inst. 3060, p. 4 et 5). En matière de divorce ou de séparation de corps, il arrive très fréquemment que le jugement, qui prononce la rupture du lien conjugal, commet d'office le président de la chambre des notaires pour procéder à la liquidation de la société pécuniaire ayant existé entre les époux. Dans ce cas, le bénéfice de l'assistance judiciaire ne peut profiter à ces actes que si le bureau compétent a pris une décision les visant spécialement. Sans doute, la liquidation étant ordonnée par le tribunal ne saurait être considérée comme une mesure vexatoire, et le bureau saisi ne pourra qu'accorder l'assistance demandée. Mais le texte est précis et ne comporte aucune interprétation. Aussi bien, il serait facile d'éviter cette double comparution des parties, en accordant, dès l'origine, le bénéfice de l'assistance judiciaire, tant pour la procédure principale que pour la liquidation qui pourra en résulter.

NAUX CIVILS.

6. TRIBUNAUX DEVANT LESQUELS L'ASSISTANCE EST ACCORDÉE. TRIBUD'après l'art. 1er de la loi de 1901, l'assistance peut être accordée pour tous les litiges portés devant les tribunaux civils, les juges des référés, la chambre du conseil, les tribunaux de commerce, les juges de paix, la Cour d'appel, la Cour de cassation, les Conseils de préfecture, le Conseil d'Etat, le tribunal des conflits.

A l'égard des Conseils de prud'hommes, il existe une organisation spéciale, résultant de la loi du 7 août 1850 (Inst. 1861), d'après laquelle les actes et jugements concernant les contestations entre patrons et ouvriers sont visés pour timbre et enregistrés en débet, les droits étant mis à la charge de la partie qui succombe. L'art. 27 de la loi du 22 janvier 1851, auquel la loi de 1901 n'a pas dérogé, a étendu l'application de ces règles: 1° à toutes les causes, qui sont de la compétence des conseils de prud'hommes et dont les juges de paix sont saisis dans les lieux où les conseils ne sont pas établis; 2o à toutes les contestations énoncées dans les nos 3 et 4 de l'art. 5 de la loi du 25 mai 1838, entre maîtres et domestiques et pour le payement des mois de nourrices.

L'immunité s'applique, d'ailleurs, non seulement en première instance, mais encore en appel et devant la Cour de cassation. C'est ce qui résulte de l'article 2 de la loi du 7 août 1850 et de la référence à toutes les dispositions de cette loi contenues dans l'article 27 de la loi du 22 janvier 1851.

De plus, d'après une décision ministérielle du 20 juin 1809 (V.Instr. n° 439 et 1796 § 11), les actes de procédure, procès-verbaux et jugements faits ou rendus dans les matières qui sont de la juridiction des prud'hommes et qui sont soumises soit à ce conseil, soit au juge de paix faisant office de conseil de prud'hommes dans les lieux où il n'existe pas de conseil, doivent être enregistrés gratis, si la somme faisant l'objet du différend n'excède pas 25 francs (Inst. n° 3121). L'assistance judiciaire n'est d'ailleurs pas admise devant les ministres, même statuant au contentieux (C. Aix, 17 juillet 1902, R. E. 3280).

7. TRIBUNAUX RÉPRESSIFS. I. Tribunaux correctionnels et de simple police. Les obligations de la partie civile devant les tribunaux correctionnels et de simple police ont été fixées par les art. 162 et 194, C. inst. crim., et par les art. 158, 159 et 160 du décret du 18 juin 1811.

D'après ces dispositions, toute partie civile qui intervient au procès, à quelque époque que ce soit, est responsable envers l'Etat de tous les frais dont celui-ci a fait l'avance, et cela alors même qu'elle gagne sa cause. Le jugement qui met fin à l'instance doit donc toujours porter condamnation de la partie civile aux dépens (Circ. du garde des sceaux du 3 mai 1821). De plus, la partie civile qui n'a pas justifié de son indigence est tenue de consigner au greffe la somme présumée nécessaire pour les frais de la procédure, lorsque la constitution comme partie civile a eu lieu au moment de la remise de la plainte aux mains du procureur de la République ou du juge d'instruction.

La consignation est inutile: 1° dans le cas où la personne lésée a usé du droit de citation directe, qui lui est conféré par l'art. 182, C. inst. crim. (Cass., ch. réun., 4 mai 1833; Dalloz, Répert., V° Frais et dépens, no 994-5°; Ch. crim., 26 juillet 1889; D. P. 90.1.226). 20 Lorsque la partie civile ne s'est constituée qu'au cours de l'instruction ouverte sur la réquisition d'office du ministère public ou des débats devant le tribunal (Cass., 8 juillet 1881; Dalloz, Repert., V Frais et dépens, no 596, note 1; Cass., 22 janvier 1887, Dall. pér., 87.1.415).

L'assistance judiciaire accordée à la partie civile modifie les obligations résultant pour elle des dispositions précédentes.

D'une part, elle n'est plus, en aucun cas, obligée à la consignation préalable des frais de la procédure. De plus, la partie civile qui gagne son procès n'est plus tenue des dépens, lesquels doivent être supportés par son adversaire. Enfin, lorsque la partie civile succombe, elle n'est plus débitrice que des sommes dont il est question dans les paragraphes 6 et 9 de l'art. 14 de la loi de 1901. Elle est, d'ailleurs, réputée succomber non seulement quand le con

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