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avoir de rapporteurs, qui s'empressent å vous empoisonner du récit de toutes les petites fautes des particuliers: mais il faut avoir des gens de bien, qui, malgré eux, soient chargés en conscience de vous avertir des choses qui le mériteront: ceuxlà ne vous diront que le nécessaire, et laisseront le superflu aux tracassiers.

Vous devez aussi veiller pour soutenir dans leur emploi les gens de bien qui sont en fonction empêcher les rapports calomnieux et les soupçons injustes. diminuer le faste de la cour quand vous pourrez, faire entrer peu-à-peu Monseigneur dans toutes les affaires, empêcher que le venin de l'impiété ne se glisse au-tour de lui; en un mot, être la sentinelle de Dieu au milieu d'Israël, pour protéger tout le bien et pour réprimer tout le mal, mais suivant les bornes de votre autorité.

Pour Saint-Cyr, je croirois qu'une inspection générale et une attention suivie pour redresser dans ce général tout ce qui en aura besoin, suffit à une personne accablée de tant d'affaires, appellée à de plus grands biens, capable d'objets plus étendus.

Il faut encore ajouter que vous ne pouvez éviter d'écouter ceux qui vou

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dront se plaindre ou vous avertir : tout cela va assez loin ainsi je m'y bornerai. Les bonnes œuvres que vous voulez tourner du côté de l'homme, me paroissent fort à propos elles seront sans contradiction et sans embarras. Pour celles de Paris, je crois que vous y trouveriez des traverses continuelles qui vous commettroient trop.

Vous avez, à la cour, des personnes, qui paroissent bien intentionnées : elles méritent que vous les traitiez bien, et que vous les encouragiez mais il y faut beaucoup de précaution: car mille gens se feroient dévots pour vous plaire. Ils paroîtroient touchés aux personnes qui vous approchent, et iroient par là à leur but ce seroit nourrir l'hypocrisie, et vous exposer à passer pour trop crédule. Ainsi il faut connoître à fond la droiture et le désintéressement des gens qui paroissent se tourner à Dieu avant que de leur montrer qu'on fait attention à ces commencements de vertu.

Si ce sont des femmes qui aient besoin d'être soutenues, faites les aider par des personnes de confiance, sans que vous paroissiez vous-même.

Je crois que vous devez admettre peu de gens dans vos conversations pieuses, où vous cherchez à être en liberté. Ce

qui vous est bon n'est pas toujours proportionné au besoin des autres. JesusChrist disoit : J'ai d'autres choses à vous enseigner: mais vous ne pouvez pas encore les porter. Les peres de l'église ne découvroient les mysteres du christianisme à ceux qui vouloient se faire chrétiens qu'à mesure qu'ils les trouvoient disposés à les croire.

En attendant que vous puissiez faire du bien par le choix des pasteurs, tâchez de diminuer le mal.

Pour votre famille, rendez-lui les soins qui dépendent de vous, seion les regles de modération que vous avez dans le cœur: mais évitez également deux choses: l'une, de refuser de parler pour vos parents, quand il est raisonnable de le faire; l'autre, de vous fâcher quand votre recommandation ne réussit pas.

Il faut faire simplement ce que vous devez, et prendre en paix et en humilité les mauvais succès: l'orgueil aimeroit mieux se dépiter, ou il prendroit le parti de ne parler plus, ou bien il éclateroit pour arracher ce qu'on lui refuse.

Il me paroît que vous aimerez, comme il faut, vos parents, sans ignorer leurs défauts, et sans perdre de vue leurs bonnes qualités.

Enfin, madame, soyez bien persuadée, que pour la correction de vos défauts et pour l'accomplissement de vos devoirs, le principal est d'y travailler par le dedans et non par le dehors.

Ce détail extérieur, quand vous vous y donneriez toute entiere, sera toujours au-dessus de vos forces. Mais si vous laissez faire à l'Esprit de Dieu ce qu'il faut, pour vous faite mourir à vous-même, et pour couper jusqu'aux dernieres racines du Moi; les défauts tomberont peu-à-peu commes d'eux-mêmes, et Dieu élargira votre cœur, au point que vous ne serez embarrassée de l'étendue d'aucun devoir: Alors l'étendue de vos devoirs croîtra avec l'étendue de vos vertus et avec la capacité de votre fonds. Car Dieu vous donnera de nouveaux biens à faire, à proportion de la nouvelle étendue qu'il "aura donnée à votre intérieur.

Tous nos défauts ne viennent que 'd'être encore attachés et recourbés sur nous-mêmes : c'est par le Moi, qui veut mettre les vertus à son usage et à son point. Renoncez donc, sans hésiter jamais, à ce malheureux Moi, dans les moindres choses où l'esprit de grace vous fera sentir que vous de recherchez encore. Voilà le vrai et total crucifiement : tout le reste

ne va qu'aux sens et à la superficie de l'ame. Tout ceux qui travaillent à mourir autrement, quittent la vie par un côté, et la reprennent par plusieurs autres : ce n'est jamais fait.

Vous verrez, par expérience, que quand on prend pour mourir à soi le chemin que je vous propose, Dieu ne laisse rien à l'ame, et qu'il la poursuit sans relâche; impitoyable, jusqu'à ce qu'il lui ait ôté le dernier souffle de vie propre, pour la faire vivre en lui dans une paix et une liberté d'esprit infinie.

LETTRE II.

Du même.

Uand M. de Meaux, madame, m'a proposé d'approuver son livre, je lui ai témoigné avec attendrissement, que je serois ravi de donner cette marque publique de la conformité de mes sentiments avec un prélat que j'ai regardé depuis ma jeunesse, comme mon maître dans la science de la religion je lui ai même offert d'aller à Germini pour dresser de concert avec lui mon approbation.

J'ai dit en même-temps à messieurs de

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