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rompus peu de temps auparavant, quoique le traité de Vienne en eùt garanti la durée. Les puissances européennes ont pourtant reconnu l'indépendance de la Belgique, en se proposant un but noble et élevé. Pourquoi, animées du même esprit, n'interviendraient-elles pas en notre faveur?

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L'union de la Belgique avec la Hollande, dit le protocole de Londres du 19 février, se brisa; des commu«nications officielles ne tardèrent pas à convaincre les cinq cours que les moyens primitivement destinés à la maintenir, ne pourraient plus ni la rétablir pour le moment, ni la con« server pour la suite, et que désor mais, au lieu de confondre les affections et le bonheur de deux peuples, elle ne mettrait en présence « que des passions et des haines; elle « ne ferait jaillir de leur choc que la « guerre avec tous ses désastres. Il n'appartenait pas aux puissances de juger des causes qui venaient de " rompre les liens qu'elles avaient for

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més; mais quand elles voyaient ces « liens rompus, il leur appartenait d'atteindre encore l'objet qu'elles s'étaient proposé en les formant. Il leur appartenait d'assurer, à la faveur des combinaisons nouvelles, cette tranquillité de l'Europe, dont l'u« nion de la Belgique avec la Hollande avait constitué une des bases.

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<< La cause des Belges est identique avec la nôtre, et s'il y a entre elles une dissemblance quelconque, elle est toute en notre faveur. La Pologne a été jadis indépendante et puissante. Le congrès de Vienne a même songé au rétablissement de cette indépendance et de l'intégrité du territoire polonais; mais comme ces vnes ont été rétrécies par des circonstances impérieuses, il a créé un royaume qu'il a renfermé dans des limites étroites et qu'il a réuni à la Russie. Toutefois, si d'un côté il a fait preuve de ses bonnes intentions à notre égard, en garantissant aussi la nationalité aux autres provinces polonaises, il a démontré de l'autre l'insuffisance de ses dispositions concernant la Pologne en général, dispositions qui n'avaient, pour ainsi dire, que le caractère provisoire. Le royaume à qui le congrès de Vienne a garanti une constitution, a été réuni au plus paissant des États despotiques. Cette liaison était difficile à établir; sa durée

était même impossible, car elle portait en elle-même trop de germes de sa propre dissolution. Peut-on enfin nous opposer cet argument, que la Russie, cette puissance redoutable à toute l'Europe, saura bien à la suite d'une latte, même acharnée, nous soumettre et nous pacifier, en nous exterminant? La paix de l'esclavage, la paix du tombeau, une paix de nature à faire naître une guerre terrible à la première occasion favorable, pourrait-elle répondre aux intentions nobles et élevées des puissances européennes ?

« Je le répète, tout traité est la conséquence, ou de quelques faits, ou de quelques combinaisons politiques; si d'autres faits remplacent les premiers, si ces combinaisons changent, les parties contractantes doivent modifier leurs arrangements d'après les nouvelles combinaisons, afin qu'elles puissent conserver les principes qu'elles ont une fois adoptés, et assurer le but qu'elles se sont proposé. Le congrès de Vienne pouvait disposer de la Belgique, conquise par les puissances alliées, et de la Pologne, occupée par les armées russes; mais la Pologne délivrée, la Pologne, qui repousse les forces nombrenses des agresseurs, a bien le droit d'être reçue dans la grande famille des puissances indépendantes de l'Europe, comme la Belgique, qui a été reçue après avoir secoué le joug de la Hollande.

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Tels sont les principes que vous mettrez en avant, tels sont les arguments dont vous vous servirez, pour appuyer la demande que vous êtes autorisé à faire au gouvernement près duquel vous êtes accrédité: la demande de la reconnaissance formelle et positive du gouvernement national dans le royaume de Pologne, et de l'indépendance de ce royaume.

Varsovie, le 31 mars 1831.

« Le ministre des relations extérieures du gouvernement national de Pologne, comte G. MALACHOWSKI. »

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sion. Une partie de cette nation, les habitants de la contrée appelée royaume de Pologne, réduits au désespoir, ont réclamé l'exercice de leurs anciens droits. L'usurpateur de notre patrie a qualifié cette réclamation du nom de rébellion, et a fait avancer de nom breux bataillons pour nous subjuguer de nouveau. Au moment de notre in

surrection notre armée ne comptait que 30,000 combattants. La méfiance soupçonneuse de nos souverains n'a jamais permis d'établir dans le pays ni fonderie de canons, ni moulins à poudre, ni tous autres établissements semblables. Le patriotisme a dû tout créer. Aujourd'hui nous avons des troupes plus nombreuses, pourvues d'armes prises en partie à l'ennemi, ou fabriquées dans des établissements formés à la hate. Lorsque dans le cœur de l'hiver l'ennemi est venu attaquer nos demeures, nous nous sommes mis en campagne avec des forces inégales; en peu de temps nous avons soutenu des combats meurtriers dont aucun n'a été sans mérite, et plusieurs ont été de glorieuses victoires.

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Après les batailles sanglantes qui ont caractérisé le commencement de la guerre, votre confiance, et celle de la nation, m'ont appelé au commandement des braves. Alors, fier de sa supériorité numérique, l'ennemi avait étendu ses légions le long de la rive droite de la Vistule, et faisant jour et nuit, sur tous les points, des préparatifs menaçants pour le passage de ce fleuve, nous annonçait hautement une ruine prochaine. Nous avons quitté Praga, et depuis dix jours que nous en sommes sortis nous remportons une troisième victoire, et déjà ce plan de campagne, annoncé avec tant de fierté par l'ennemi, se trouve entièrement déjoué. Il a détruit lui-même sur la Vistule et le Wieprz, les préparatifs qni devaient le faire passer sur la rive gauche de la Vistule, et porter avec fai la dévastation dans nos paisibles demeures. Par des marches forcées il a dû jeter ses colonnes en arrière sur la route de Brzesc, pour sauver sa ligne d'opération menacée.

Sur ces entrefaites, d'autres guerriers polonais, après s'être glorieusement distingués dans plusieurs combats, ont franchi la frontière, dont l'oppression nous séparait depuis très long-temps de nos frères. Leurs premiers

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Depuis l'ouverture de la campagne, dans un temps très court, mais fécond en grands événements, l'ennemi a perda plus de 50,000 hommes, dont Varsovie a vu 16,000 prisonniers dans ses murs. Plasieurs régiments de différentes armes ont été entièrement détruits; le sixième corps de l'armée russe n'existe plus. Nous avons pris onze drapeaux, quinze à seize mille armes, trente canons, un grand nombre de caissons et chariots, remplis de munitions de guerre, et beaucoup de bagages.

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Néanmoins, compagnons d'armes, quelque brillant que soit ce que nous avons fait jusqu'ici, ce n'est qu'un commencement. L'ennemi possède une puissance fondée depuis quelques siècles aux dépens de ses voisins, et son orgueil qui étouffe en lui tout sentiment de justice ne nous permet pas d'espérer un arrangement prochain. Pour sortir victorieux d'une lutte que nous avons entreprise avec une aussi grande détermination, il nous fant de la persévérance, surtout lorsque les événements de la guerre rendent nécessaires des mouvements rétrogrades. Tout en rendant justice au courage dont vous avez fait preuve jusqu'ici, je vous exhorte à la persévérance. Des combats et des fatigues nous attendent encore, mais pleins de confiance dans la sainteté de notre cause nous sortirons victorienx de cette lutte, et les destinées futures de notre patrie seront consolidées.

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nos ennemis ont résolu d'imprimer à la guerre qu'ils nous font. Ce ne sont plus les proclamations injurienses du maréchal Diebitsch, ce n'est plus même l'ukase barbare de l'empereur, qui servent de ligne de conduite aux troupes russes; leurs commandants ne consultent déjà que la haine implacable qu'ils ont conçue pour le nom polonais, et la férocité de leurs soldats.

« Les habitants du district de Mariampol restèrent fidèles à la voix de leur patrie, et se préparèrent, dès le commencement de la campagne, à une défense opiniâtre; un corps de partisans se forma sous le commandement du colonel Puszet, qui inquieta continuellement l'ennerai, et parvint même à obtenir des avantages importants. Vers la fin d'avril les gardes renforcérent les troupes russes qui étaient destinées à comprimer l'insurrection du district de Mariampol. Le colonel Paszet, n'étant pas informé de cette augmentation des forces de l'ennemi, attaqua Mariampol le 21 avril, et se vit obligé de se retirer; mais le major Schon, qui commandait un autre détachement de partisaus, se laissant emporter par l'ardeur de son conrage, combattit jusqu'à la dernière extrémité, et après avoir reçu plusieurs blessures, tomba entre les mains de l'ennemi, Les sentiments de l'honneur, ceux qu'on doit au courage et au malbeur, auraient dû servir de sauvegarde à ce brave officier, décoré de la Légiond'Honneur et de la croix militaire de Pologne; mais nos ennemis ont, dans cette guerre, abjuré ces sentiments, et, sans avoir aucun égard aux blessures et aux souffrances du major Schon, ils le chargèrent de fers, l'exposèrent aux insultes des soldats et des juifs, et le pendirent le lendemain. Plusieurs officiers et plusieurs citoyens, qui avaient pris part à l'insurrection, furent fusillés sur-le-champ. Après cette défaite, tout le district de Mariampol se vit livré à la barbarie des Russes; les villages farent saccagés et incendiés; les maisons des citoyens furent pillées, et les propriétaires de ces maisons emprisonnés, ou exposés à toutes les vexations et à toutes les vengeances d'un ennemi cruel.

Ces faits, qui sont incontestables, viennent à l'appui des idées que je vous ai énoncées dans la circulaire précédente; ces faits doivent être signalés à

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C'est avec une peine sensible que nous revenons sur ce sujet, et que, pressés par l'urgence du moment, nous nous voyons forcés de nous plaindre à haute voix, et de demander, dans des circonstances aussi graves, l'appui des cabinets européens.

Quand la lutte entre l'empereur de Russie et la Pologne a commencé, quand on croyait généralement en Europe qu'au bout de quelques semaines, à la suite d'une seule bataille, l'armée russe ferait rentrer les Polonais sous le joug d'une obéissance passive, la Prusse assista avec impassibilité au spectacle de l'extermination du peuple polonais. Nous avions lieu d'être alors étonnés de cette indifférence, mais nous n'avions pas le droit de nous en plaindre. L'abandon où l'on nous a laissés ne nous a point découragés; nous avons multiplié nos efforts, nous avons prodigué notre sang, nous ne nous sommes pas laissés abattre par des revers, nous avons résisté, nous résistons encore à la puissance colossale de la Russie; car si nous n'avons jusqu'à présent aucun allié, nous n'avions non plus qu'un seul adversaire à combattre.

« Mais au moment où nous avons cru mériter l'estime, et peut-être même l'intérêt des autres puissances, au moment où nos efforts et nos sacrifices allaient porter leurs fruits, pouvonsnous voir sans douleur une puissance

voisine porter secours à nos ennemis pour arrêter nos succès et nous dépouiller des avantages brillants que notre position actuelle nous avait assurés?

« La Prusse a refusé d'arrêter de sa main le glaive exterminateur qui était suspendu sur nos têtes, et elle tend aujourd'hui une main secourable à nos ennemis pour éloigner le jour de notre triomphe.

<< Tant que cette puissance ne manifestait l'intérêt qu'elle portait à nos ennemis que par des mesures injustes et vexatoires, mais qui n'étaient pas de nature à exercer une influence décisive sur la marche de nos affaires; tant qu'elle entravait nos communications, qu'elle gênait le passage de nos voyageurs, qu'elle arrêtait nos fonds et ceux des particuliers, nous protestions contre ces mesures, mais nous ne voulions pas élever la voix pour nous plaindre à une puissance dont la bienveillance nous aurait été précieuse, et qui, certes, n'avait aucun reproche à nous faire.

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Mais aujourd'hui que nos destinées dépendent en grande partie de la conduite que la Prusse suivra à notre égard, nous ne pouvons pas garder plus long-temps le silence.

L'armée polonaise, en se portant vers le théâtre de l'insurrection, en appuyant par des forces considérables l'héroïsme de nos frères de Lithuanie, a obtenu des résultats importants; l'armée d'invasion, après avoir essayé des pertes considérables, se voit anjourd'hui cernée par une insurrection énergique, et qui s'est encore fortifiée par nos secours; elle n'ose pas s'avancer: elle ne peut plus même se maintenir dans le royaume; il faut qu'elle recule, car ses lignes d'opérations n'existent plus; les renforts, les vivres, les munitions dont elle a besoin, ne peuvent plus lui arriver que du fond de la Russie; le général en chef avait basé ces opérations militaires sur ces données, qui étaient positives. Notre triomphe nous paraissait assuré; sans remporter même de victoires, nous étions sûrs de vaincre l'ennemi ; nous en étions sûrs, car nous comptions sur la neutralité du cabinet de Berlin. Mais

si l'armée russe se voit pressée de vivres, elle en tire de la Prusse; si elle manque de munitions, la Prusse lui en fournit; et, en devenant ainsi un arse

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vers.

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Il est possible que le chef de l'armée russe renonce à ce plan, et que nous n'ayons plus lieu de reprocher à la Prusse une nouvelle violation du système de neutralité. Il y a cependant des faits qui restent; nous vous les transmettons en vous recommandant de les porter à la connaissance du gouvernement..... Ce gouvernement appréciera sans doute la justice de nos réclamations, et voudra bien intercéder auprès de la cour de Berlin pour faire cesser un état de choses si nuisible à nos intérêts et si peu conforme aux devoirs de l'équité.

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La sagesse et la justice du gouvernement prussien nous sont connues; nous avons évité tout ce qui aurait pu l'offenser; nous n'avons laissé échapper ancune occasion pour dissiper ses préventions et gagner sa confiance, nous n'avons rien à nous reprocher: il nous est donc d'autant plus pénible de voir le cabinet de Berlin se laisser guider à notre égard par un esprit de malveillance qu'il est difficile de s'expliquer; nous espérons cependant que l'intercession des puissances mieux disposées pour nous, que le temps surtout fera comprendre à la Prusse quelle devra être la nature de ses rapports avec la Pologne, et qu'il la fera

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« Je ne me hasarderais pas à écrire à V. M., si je n'avais l'espérance qu'elle daignera reconnaître non titre de cominandant en chef des forces nationales de Pologne, et dans l'importance de l'objet que mon devoir m'impose de lại soumettre, une autorisation suffisante pour le faire.

Depuis l'avènement de V. M. au trône, elle n'a pas cessé de donner, dans son gouvernement paternel, des prenves éclatantes de justice et de loyauté; me confiant dans ces hautes vertus, je sens déjà quelques soulagements aux chagrins et aux vexations que les autorités civiles et militaires de V. M. m'ont fait éprouver.

« Vous avez reconnu, sire, de concert avec les autres cours, le principe de non-intervention, et on ne peut pas donter que les ministres de V. M. n'aient reçn des ordres en conséquence, et c'est par cette raison que nous n'avons pas de droit de nous plaindre de V. M., mais de porter nos plaintes devant elle.

« L'armée et moi sommes tous les jours témoins oculaires, que, malgré Ja neutralité que V. M. a daigné assurer officiellement vouloir garder à l'égard de la Pologne, les autorités civiles et militaires des frontières ne se contentent pas seulement de violer la neutralité, mais témoignent tant de bienveillance aux Russes, qu'on ne doit pent-être attribuer qu'aux secours de tonte espèce qu'ils leur procurent, si ces derniers ne se sont pas vus forcés de s'éloigner.

« 1° Les Russes reçoivent des subsistances des magasins de Thorn et de ses environs ;

2o Des artilleurs prussiens ont été envoyés dans l'armée russe, pour les employer contre nous;

30 L'armée russe recoit des munitions des forteresses prussiennes ;

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40 Plusieurs régiments russes sont recomplétés en Prusse;

«50 Un ingénieur prussien, Kwedzyn, de Marienwerder, a été employé à la construction d'un pont sur la Vistule, près de Zlatorla, pour le passage des Russes; les matériaux nécessaires ont été également fournis par la Prusse.

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Je pourrais rapporter encore une infinité d'autres circonstances qui équivalent à des commencements d'hostilités; mais je me contente de représenter à V. M. les faits précédents, persuadé qu'ils suffiront pour porter V. M. à faire cesser l'état de choses actuel, qu'elle ignore sans doute, et qui est si contraire à sa politique et à son équité.

Je vous prie, sire, de me pardonner la liberté que j'ai prise de vous écrire, et vous supplie de prêter l'oreille à la voix de l'humanité, et d'avoir pitié des faibles que les géants ne parviendraient pas à subjuguer sans les secours que les autorités civiles et militaires prusiennes leur fournissent clandestine

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Journal des opérations militaires.

«Le dernier renfort qui devait rejoindre l'armée y arriva le 24 août. Le commandant en chef se proposait de donner l'assaut à Varsovie le 27; mais ayant appris qu'un corps de rebelles, sorti de la ville, s'était dirigé sur Brzesc-Litewski, et avait même osé s'en approcher, il prit la résolution de hâter le moment de l'attaque, afin de ne pas donner le temps à ce corps de revenir pour défendre la capitale.

« Le commandant en chef envoya sur ces entrefaites pour la dernière fois, au chef du gouvernement provisoire dans

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