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CHAPITRE V.

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Le cérémonial d'ambassade. Le droit d'ambassade. Le droit de négociation. Le commerce diplomatique. ou international. Source du droit d'ambassade. - Le droit d'ambassade dans l'antiquité. Les Féciaux. Fin de l'antiquité. Bas-Empire. Diplomatie vénitienne. - Le Bailo. Temps modernes. Missions permanentes. Avantages des missions permanentes. -Fondement du droit d'ambassade. A qui appartient le droit d'envoyer des agents diplomatiques ?— Les États mi-souverains jouissent-ils du droit d'ambassade? - Et les États tributaires? Le droit d'ambassade actif appartient-il à un État uni à d'autres par un lien fédéral ? 1° Système d'États confédérés. 2o État fédéral. - Le droit d'envoyer des ministres publics appartient-il à des vice-rois, ou à des gouverneurs de provinces éloignées ? A qui, dans un État, appartient l'exercice du droit d'envoyer des agents diplomatiques à l'étranger? — Le droit d'envoyer des ministres appartient-il à un roi détrôné ? — A un usurpateur? - Cas où le droit d'envoyer des ministres est douteux ou contesté.

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- L'exercice du droit d'ambassade actif est-il forcé ? Un État peut-il se faire représenter par l'agent diplomatique d'un État étranger? - Un même ministre peut-il être chargé, en même temps, de plusieurs missions près de différents. gouvernements? Du droit d'ambassade passif. A qui ce droit appartient-il? Y a-t-il obligation, pour un État souverain, de recevoir des ministres publics des autres Puissances? L'état de guerre influe-t-il sur le droit d'ambassade actif et passif ? Conditions mises à la réception des ministres publics. Refus de recevoir.

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Quelle est, actuellement, à propos du droit d'ambassade actif et passif, la situation des envoyés des Puissan

ces étrangères auprès du Saint-Siège, et des envoyés du pape auprès des gouvernements étrangers? - Doctrine des auteurs italiens. Critique de cette doctrine.

Le cérémonial d'ambassade. Le droit d'ambassade. -Le droit de négociation. Le commerce diplomatique ou international.

LE CÉRÉMONIAL D'AMBASSADE, autrement dit CÉRÉMONIAL DIPLOMATIQUE, OU CÉRÉMONIAL DES MINISTRES PUBLICS, est l'ensemble des formalités observées entre les États, par rapport à la réception des employés diplomatiques de chaque classe; aux qualifications honorifiques qui peuvent leur être données; au rang qui s'observe entre eux en lieu tiers, en leur propre hôtel ou envers de tierces personnes; à l'étiquette observée dans les audiences qui leur sont données; aux solennités publiques auxquelles ils assistent; aux honneurs militaires et autres distinctions dont ils sont l'objet; aux visites de cérémonie ; etc., etc.

En d'autres termes, le cérémonial d'ambassade règle les honneurs et les distinctions qui s'accordent aux diplomates en fonctions, suivant le rang que leur assigne la classe à laquelle ils appartiennent (1).

Ce cérémonial s'est successivement formé depuis l'établissement des légations permanentes, et surtout depuis les grands congrès de paix de Westphalie (1648), de Nimègue (1678 et 1679), de Ryswick (1697), où furent réunis les ministres de tant d'États si différents en dignité et en puissance. Il commença à s'établir alors entre ces États, relativement au cérémonial des légations, certains usages et même certains principes

(1) Ch. de Martens, Le Guide diplomatique, édition citée, t. ler, p. 123.

communs et uniformes, qui sont entrés dans les mœurs diplomatiques des gouvernements modernes et contemporains.

On donne le nom de DROIT D'AMBASSADE OU DE LÉGA

TION, au droit, pour un État, pour un gouvernement, d'envoyer des ministres publics.

On désigne par DROIT DE NÉGOCIATION, le pouvoir, pour un État, de contracter des traités publics de nation à nation.

Par COMMERCE DIPLOMATIQUE, COMMERCE INTERNATIONAL, on entend les communications entre les peuples, par des mandataires investis de pouvoirs et d'instructions.

Tous ces différents sujets peuvent être compris dans un seul ordre de matières : la question des missions diplomatiques, ambassades ou légations, embrassant ce qui concerne le droit d'ambassade en luimême; les différents ordres de ministres; ce qu'il faut aux ministres pour entrer en fonctions; le cérémonial d'ambassade proprement dit; les droits et immurrités des ministres; la suite des ministres ; la manière de négocier et de terminer les missions; les droits des ministres dans les États auprès desquels ils ne sont pas accrédités; les missions secrètes; les courriers; etc.

Source du droit d'ambassade.

Le droit d'ambassade puise sa source dans la nature des choses. C'est en effet une condition élémentaire de l'entretien des relations entre les sociétés politiques, que leurs affaires soient dirigées exclusivement par les chefs d'États et par leurs ministres, responsables, selon la constitution particulière des divers pays, soit envers le chef seul du gouvernement, soit aussi envers les mandataires de la nation. Or, pour peu que les affaires à traiter soient importantes et compliquées, il serait difficile pour ceux qui gouvernent les nations de les terminer par une simple corres

pondance il devient donc nécessaire de s'aboucher. Mais les entrevues personnelles entre les chefs d'Etats n'étant pas toujours sans difficultés, ils se trouvent dans la nécessité d'envoyer des mandataires munis de pleins pouvoirs et d'instructions, pour traiter en leur nom avec les Puissances étrangères.

Telle est l'origine des ambassades, tel est le fondement des droits essentiels des plénipotentiaires des États.

Ainsi donc nécessité de communications entre les peuples;

Insuffisance et difficulté des rapports personnels des chefs d'États;

Emploi nécessaire de mandataires investis de pouvoirs et d'instructions.

Le droit d'ambassade dans l'antiquité.

Aucun traité spécial sur le droit d'ambassade n'a été laissé par les peuples anciens, ni surtout par les Romains. Il sera à jamais regrettable pour l'éraditiou que les manuscrits ne nous aient pas transmis le traité d'Aristote sur les ambassades (1), qui aurait éclaire cette partie encore trop peu connue de l'antiquité. On en est donc réduit à chercher des guides parmi les historiens, et dans les traités écrits par des modernes sur le droit des ambassadeurs, particulièrement dans le traité d'Alberic Gentilis De legationibus (2).

Ce que l'on sait par la lecture des historiens et même des poëtes, c'est que les peuples du monde. ancien entretenaient entre eux. des relations diplomatiques, sinon permanentes, du moins transitoires (3). Ils

(1) Barbeyrac a contesté qu'Aristote ait écrit un ouvrage sur les ambassadeurs.

(2) M. Egger a publié une étude savante sur les traités publics chez les Grecs et les Romains.

(3) Des acteurs ont été parfois choisis, chez les Grecs, pour ambassadeurs. Parmi les ambassadeurs envoyés à Gnosse par les citoyens da Teos, figurait un certain Ménéclès, habile musi

traitaient ensemble par leurs hommes d'États et leurs orateurs, sur leurs intérêts réciproques, à mesure que ces intérêts surgissaient occasionnellement (1). Rome

cien, qui donna dans la ville crétoise des concerts assez semblables à ceux qu'on nomme aujourd'hui des concerts historiques. Les Gnossiens, dans leur lettre aux citoyens de Téos, se montrèrent fort touchés d'avoir entendu exécuter ainsi les chants de Timothée, de Polyïdus et de leurs anciens poètes; ils remercièrent vivement la ville de Téos du choix qu'elle avait fait d'un tel représentant, choix qui sans doute avait contribué au facile succès de l'ambassade. L'exemple de ce Ménéclès n'était d'ailleurs pas une exception. Les artistes grecs, associés aux cérémonies du culte, étaient considérés comme inviolables; on les choisissait donc volontiers à ce titre pour ambassadeurs, et il semblait ainsi que leur personne dût être doublement respectée chez les peuples où on les envoyait. Ischandros, Néoptolème, enfin le célèbre Eschine, qui représentèrent Athènes en Macédoine, étaient d'anciens acteurs, et l'on ne voit pas qu'ils aient eu à s'en excuser, quand, du moins, ils exerçaient avec talent leur profession. Etudes historiques sur les traités publics chez les Grecs et chez les Romains, par E. Egger, 1866, p. 137 et suiv.

(1) Nous savons, dit M. Egger, quels étaient les caractères et comme les divers degrés de la fonction de négociateur chez les Grecs. Il y avait les hérauts (zńpuxes, quelquefois sipnvonoi, et plus tard peoita, feciales, caduceatores), porteurs de premières propositions de paix; les ambassadeurs proprement dits (péσes, peoßevrai, legati, oratores), qui prenaient quelquefois le titre de plénipotentiaires (aúrozpáropes), quand on les dispensait formellement d'en référer à leurs commettants pour la conclusion du traité. Le chef d'ambassade s'appelait appeσбeurs, en latin princeps legation's. Les personnes qui formaient la suite de l'ambassadeur sont les xólovo, en latin asseclæ. On trouve même une fois mentionné le secrétaire de l'ambassade. Comme chez les modernes, l'ambassadeur quelquefois, soit par honneur, soit par surcroît d'autorité active, réunissait au titre de la fonction diplomatique celui de quelque autre fonction militaire ou civile. C'est ainsi qu'on trouve dans Polybe (xxx, 5) l'exemple d'un amiral rhodien ambassadeur à Rome. En tous cas, l'ambassadeur paraît avoir été d'ordinaire choisi parmi les personnes d'un âge mûr. Dans quelques États grecs la loi déterminait un âge au-dessous duquel on ne pouvait exercer cette grave fonction. Si l'ambassadeur doit faire partie d'un congrès, il y prend le titre spécial de cuvedpos. Si l'ambassade avait pour objet la poursuite et le redressement d'un délit, l'envoyé s'appelait plus spécialement έκδικος, et sa fonction εκδικία. Si l'ambassade avait un objet purement religieux, elle s'appelait

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