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Enfin, cette disposition de l'art. 1007, « et en ce cas la mission des arbitres ne durera que trois mois », ne peut faire obstacle à la volonté des parties à ce sujet, dès que leur consentement est unanime et qu'on voit que la loi a eu pour but de favoriser l'arbitrage, en ne déclarant pas nul le compromis où la fixation du délai aurait été omise; seulement, si les. parties gardent le silence, la mission des arbitres ne doit durer que trois mois, à partir du jour du compromis.

9° (PROROGATION MALGRÉ LA CLAUSE DU COMPROMIS.) Si les parties avaient déclaré dans le compromis que les arbitres n'auront d'autre délai pour juger que celui de la loi, pourraient-elles, malgré cette clause, proroger ce délai à son expiration?

Cela est encore indubitable: puisqu'elles ont la fa- · culté de révoquer le compromis, elles ont, à plus forte raison, celle de revenir sur cette clause et de proroger le délai par un acte valable et explicite, fait soit devant les arbitres, soit devant notaire, soit sous signature privée.

10° (PROROGATION PAR UN SEUL ARBITRE, APRÈS DÉCÈS Ou déport de l'AUTRE.) Lorsque les parties ont autorisé les arbitres à proroger le délai de l'arbitrage, et que de trois arbitres, par exemple, deux se sont déportés, ou sont décédés, ou ont été empêchés; qu'avant leur remplacement, le délai fixé par le compromis expire, et que l'arbitre restant l'a prorogé, résulte-t-il de là que l'arbitrage cesse, nonobstant cette prorogation?

Décidé affirmativement par la cour suprême, arrêt

du 6 novembre 1809. D., t. Ier, 704; S., IX, 1oo, 374. Mais, il faut considérer que, dans l'espèce de cet arrêt, il y avait une circonstance résultant du compromis qui devait faire rendre sans effet la prorogation du seul arbitre restant. Aussi la cour régulatrice en fait-elle un des motifs de son arrêt dans cette phrase: D'après les conventions des arbitres, le concours des trois arbitres était nécessaire pour toute décision arbitrale. Effectivement, dans les faits de la cause, on remarque que le concours de tous les arbitres était nécessaire pour la prorogation du délai; qu'en conséquence le seul arbitre qui l'avait prorogé, après le déport des deux autres, était sans pouvoirs.

Ensuite, on remarque, dans les faits sur lesquels repose l'arrêt, que le premier délai fixé par les parties était expiré alors que le seul arbitre restant l'avait prorogé, et que, comme le dit ce même arrêt, il s'ensuivait qu'au jour où l'une des parties fit assigner son adversaire devant le tribunal de commerce pour une deuxième nomination d'arbitres en remplacement, la juridiction arbitrale avait entièrement cessé et n'aurait pu se renouveler sans le consentement unanime des parties, puisque le premier délai était expiré.

Néanmoins, de cette décision, on n'en doit pas conclure que si les parties, dans le compromis, avaient déclaré que la prorogation du délai pourrait être faite en cas de décès, déport, refus ou empêchement d'un des arbitres, par l'arbitre ou les arbitres restans, il ne faut pas en conclure, disons-nous, que

avant le remplacement de l'arbitre décédé ou qui

s'est déporté, etc., l'arbitre ou les arbitres restans ne pourraient pas faire une prorogation valable, le délai primitif étant sur le point d'expirer. Au surplus, l'art. 1012 C. Pr. suffit pour démontrer le fondement de cette proposition, lorsqu'il déclare que le compromis finit par le décès, refus, déport, empêchement d'un des arbitres, s'il n'y a clause qu'il sera passé outre, ou que le remplacement sera au choix de l'arbitre ou des arbitres restans. Les parties peuvent donc faire une pareille clause, dans le compromis, pour la prorogation du délai; toutefois, l'arbitre ou les arbitres restans ne pourraient faire la prorogation après l'expiration du délai primitif, dans le sens de l'arrêt précité, parce que la juridiction arbitrale aurait cessé et n'aurait pu se renouveler sans le consentement unanime des parties.

SECTION VII.

Des pouvoirs des arbitres et de leur compétence.

Quoique les arbitres n'aient aucun caractère public, néanmoins le compromis leur confère des pouvoirs réels et légitimes. Ils deviennent des juges relativement aux parties qui les ont nommés, puisque. la loi veut que leur sentence soit homologuée, après quoi elle en garantit l'exécution.

A la vérité, si le compromis accorde aux arbitres des pouvoirs que la loi autorise, il offre en mème temps aux parties une garantie contre les excès ou les abus de ces pouvoirs; dès que, d'un côté, elles ont dù, d'après l'art. 1006, déterminer le cercle de la com

pétence, en désignant, à peine de nullité, les objets du litige, et que, d'un autre côté, l'art. 1028 prévoit les cas où elles peuvent faire rendre sans effet la sentence de leurs juges volontaires; enfin, elles peuvent prendre, quand il y a lieu, les autres voies de droit pour attaquer la décision.

Maintenant, les pouvoirs des arbitres, dont l'objet et le but sont limités, suivant le vœu de l'article 1006, doivent-ils être renfermés dans certaines bornes pour leur exercice? En d'autres termes, les arbitres peuvent-ils agir comme les juges institués ? Sont-ils compétens pour ordonner tous actes d'instruction qu'ils croient nécessaires, afin d'éclairer davantage leur religion? Peuvent-ils y procéder euxmêmes? Peuvent-ils connaître des incidens qui s'élèvent devant eux? Peuvent-ils, surtout si l'on conteste leur compétence, s'attribuer la connaissance de ce chef important et y statuer?

Sur une partie de ces questions, nous verrons à la section XIII, de la Procédure devant les arbitres, tout ce qui y est relatif, et qui demeure indubitable; mais, dès ce moment, nous allons rapporter les arrêts qui ont résolu plusieurs difficultés concernant les pouvoirs des arbitres, ils suppléeront aux observations que nous aurions pu faire.

QUESTIONS ET DÉCISIONS.

1o (REMPLACEMENT D'UN ARBITRE.) Lorsque, dans un compromis, les parties ont stipulé que, en cas d'absence, de maladie ou de mort de l'un ou de plusieurs

des arbitres nommés par elles, le remplacement sera fait par les arbitres restans, si un premier remplacement a déjà été fait et qu'ensuite il y ait lieu à un nouveau, pourra-t-il être fait non seulement par ceux des arbitres restans et primitivement nommés par les parties, mais encore par ceux des arbitres restans qui ont été choisis au premier remplacement?

Décidé affirmativement par la cour de cassation, qui a considéré que dans ce cas on n'avait point dérogé à la loi du contrat, ni à l'intention des parties. Arrêt du 12 ventôse an XII, D., t. Ier, p. 660.

2° (EXCÈS DE POUVOIRS.) Les arbitres excèdent-ils leurs pouvoirs en nommant, par le jugement arbitral, un expert qu'ils chargent de visiter les lieux et de constater les réparations à faire par l'une des parties, pourvu qu'ils n'imposent point à cette partie l'obligation d'adhérer au rapport, ce qui constituerait l'expert un véritable juge?

Jugé affirmativement par la cour de Turin, arrêt du 4 avril 1808, D., t. Ier, p. 663.

30 (RENONCIATION A TOUT RECOURS AUX TRIBUNAUX.) Lorsque les parties sont convenues d'une manière géné

rale

en

que les contestations qui s'éleveraient sur l'exécution d'un bail seraient décidées par des arbitres, s'interdisant d'une manière absolue tout recours aux tribunaux, en s'en rapportant entièrement aux arbitres et en renonçant A TOUS MOYENS ÉVASIFS de l'observation de cette condition, sans laquelle le traité n'aurait pas eu lieu: les arbitres étaient-ils suffisamment autorisés, et ont-ils pu être compétens pour connaître d'une demande en rentrée en possession formée par les bail

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