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que

Telle est l'économie de la loi; son principe s'appli que également à l'arbitrage forcé, quant au jugement par défaut; cependant, il existe une distinction nous y avons établie à l'aide de la jurisprudence; elle est relative à la nomination d'un arbitre par le tribunal, quand l'associé n'en a pas fait choix. (V. § I", du Jugement par défaut des arbitres forcés, 2o vol., sect. xv.)

On dira sans doute qu'en arbitrage le législateur a violé le principe de la défense, et qu'il est sorti de la règle salutaire établie en faveur de la partie condamnée par défaut; mais, en examinant de plus près, on reconnaîtra que le législateur ne pouvait faire autrement que d'interdire la voie de l'opposition contre une sentence d'arbitres par défaut. S'il eût admis les règles de la procédure à cet égard, il eût fallu le ministère des avoués et suivre les délais prescrits; tout quoi eût été contraire à l'intention qui a fait créer l'arbitrage: savoir, la célérité des décisions, l'économie des frais, et autres considérations bienfaisantes. Au surplus, si la voie d'appel est déniée aux parties contre les jugemens d'arbitres par défaut, rien n'empêche qu'elles prennent les autres voies prévues par le Code pour attaquer ces mêmes jugemens.

S II.

De la tierce-opposition.

L'art. 1022 C. Pr. s'exprime en ces termés: «‹ Les jugemens arbitraux ne pourront, en aucun cas, étre » opposés à des tiers.»

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Par cette disposition, le législateur a voulu appliquer aux sentences arbitrales ce principe consacré par l'art. 1351 C. C., que les jugemens n'ont autorité de chose jugée qu'à l'égard des parties entre lesquelles ils ont été rendus, et pour cela il faut la réunion des conditions établies dans ce même article, qui n'est, au surplus, qu'une répétition du principe posé dans la loi romaine. (V. ff., 1. 13 et 14, de Except. rei jud.)

Néanmoins, sous l'ordonnance de 1667, art. 2, tit. 35, et d'après la loi du 10 juin 1793, il était admis qu'on pouvait attaquer les jugemens d'arbitres par la voie de la tierce-opposition, comme tous autres jugemens. On trouve dans notre jurisprudence plusieurs décisions à cet égard, notamment de la cour de cassation, arrêts des 5 frimaire an VIII, 11 vendémiaire an X, S., I, 1, 268; II, 1, 323; D., t. Ier, p. 793. Mais, depuis la publication de notre Code de procédure, il résulte évidemment du texte de l'article 1022 que si on opposait un jugement arbitral à des tiers, ceux-ci ne pourraient et n'auraient même pas besoin de se pourvoir contre par la voie de tierce-opposition. Ensuite, plusieurs auteurs qui se sont occupés de la disposition de l'art. 1022, sont tous d'accord sur ce point, que la tierce-opposition n'est pas ouverte contre les jugemens arbitraux, et la raison qu'ils donnent, surtout M. Carré, no 3367, c'est que lės juges qui ont rendu la sentence arbitrale sont du choix des parties entre lesquelles la contestation a existé; or, dès que l'art. 475 C. Pr. veut que la tierce-opposition soit portée devant le tribunal qui

aura rendu le jugement attaqué, il s'ensuit que des tiers ne peuvent être forcés à prendre pour juges des personnes qu'ils n'ont point choisies, ou qu'ils n'entendraient point avoir pour arbitres.

Nous ajouterons cette autre considération, que les arbitres, après avoir prononcé le jugement définitif, ont terminé leur mission; qu'ils n'ont plus de pouvoirs, et qu'il serait contraire au vou de la loi de faire revivre ces pouvoirs en attaquant devant eux leur propre décision, et en les appelant à se réformer par la voie de la tierce-opposition; car, bien que ces mêmes pouvoirs, tant qu'ils existent, soient égaux à ceux des juges ordinaires pour l'autorité de leur jugement avec la formalité de l'exequatur, il n'en est pas moins vrai qu'ils ne sont que momentanés, et qu'ils cessent, de plein droit, par l'accomplissement du mandat qui les a créés, tandis que les pouvoirs des juges de la loi sont permanens, et qu'ils durent, comme mandat de l'autorité publique, jusqu'à ce qu'une cause prévue ou absolue y mette fin.

D'ailleurs, observe fort bien M. Merson', p. 103, ne pourrait-il pas arriver qu'au moment où le jugement arbitral serait attaqué par voie de tierce-opposition, il y eût quelque empêchement physique de la part d'un ou de plusieurs des arbitres qui l'auraient prononcé, de procéder sur cette action? Dans ce cas, l'auteur de l'action pourrait-il être admis à provoquer la nomination de nouveaux arbitres? En outre, un tribunal arbitral est-il constitué comme un tribunal ordinaire, dont l'autorité est entière, sans attribution de tel ou tel juge, pourvu que les magistrats

qui le composent aient reçu du prince un pouvoir spécial, ou qu'en cas d'absence, un suppléant siége en vertu du réglement?

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D'un autre côté, ne pourrait-on pas encore dire pour fortifier ces raisonnemens, que l'art. 1016 voulant que, en aucun cas, un jugement arbitral ne soit sujet à l'opposition, et que ce jugement ne puisse, en aucun cas, être opposé à des tiers (art. 1022), ces dispositions de la loi suffisent pour en tirer la conséquence que la voie de la tierce-opposition est interdite?

Enfin, si l'on prétendait qu'au moins la tierce-opposition pourrait être portée devant le tribunal qui eût été compétent pour connaître du litige, s'il n'y avait pas eu d'arbitrage, ne répondrait-on pas avec raison que ce serait méconnaître les dispositions des art. 1016 et 1022 précités, et que si le législateur eût eu l'intention d'admettre cette voie contre les sentences arbitrales, il s'en fùt expliqué comme il l'a fait à l'égard de la requête civile (art. 1026), en désignant le tribunal où elle doit être portée?

Concluons donc de tout ce que nous venons de dire que le tiers, contre lequel on voudrait se prévaloir d'un jugement arbitral, n'a pas besoin de l'attaquer et d'en discuter le mérite en ce qui l'intéresse; que s'il était actionné aux fins de l'exécution de ce jugement, il pourrait se borner à proposer les exceptions de droit pour arrêter cette exécution, ou bien il pourrait se pourvoir par action principale, à l'effet de faire déclarer que ledit jugement ne peut lui être opposé. D'un autre côté, si le tiers voulait attaquer le

jugement arbitral par tierce-opposition, il s'exposerait à être déclaré non recevable, comme dans le cas où il se pourvoirait par opposition à l'ordonnance d'exequatur.

Du reste, on peut tirer ces inductions de l'arrêt de de la cour suprême, du 15 février 1808, D., t. Ier, p. 618, et plus particulièrement d'un arrêt de la cour d'Aix, S., XVII, 1, 415. Cet arrêt, du 3 février 1817, où l'on examine l'espèce dans son rapport avec l'art. 1022, a rendu très-sensibles les motifs de fin de non recevoir contre l'opposition d'un tiers à un jugement arbitral, et on doit dire, comme les magistrats d'Aix, qu'une sentence d'arbitres ne pouvant, d'après cet article, être opposée à des tiers, il s'ensuit que les droits de ceux-ci n'ont reçu aucune atteinte par la sentence, qu'ils restent intacts, et qu'étant ainsi conservés par le vœu de la loi, ces tiers peuvent les faire valoir par autres voies juridiques que celles de l'opposition et de la tierce-opposition.

Maintenant, voyons si néanmoins un jugement arbitral pourrait produire certains effets vis-à-vis des

tiers.

1o Il est bien certain, d'après l'art. 2123 C. C., que les jugemens arbitraux emportent hypothèques du moment qu'ils sont revêtus de l'ordonnance judiciaire d'exécution. Sous ce rapport, ils peuvent donc être opposés à des tiers à raison des inscriptions prises à la suite de leur obtention.

2o A l'égard des co-débiteurs solidaires ou des cautions qui n'ont point été parties dans le compromis, les auteurs du Praticien, t. V, p. 400, sont d'avis

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