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15. Suite.

Dans quel cas l'enfant est-il présumé avoir été conçu pendant le mariage?

16. Dans quel cas l'enfant ne peut-il plus être présumé appartenir au mari?

17. Que faut-il faire pour savoir si l'enfant a été conçu pendant le mariage ou s'il a pour père le mari?

18.

19.

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La supputation des délais de la gestation doit se faire par jours et non par heures.

De combien de jours exactement se compose le maximum ou le minimum de la durée de la grossesse?

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20. La conception pendant le mariage, qui suffit pour la légitimité de l'enfant, en est-elle aussi la condition indispensable?

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22. — La présomption légale, qui détermine le maximum et le minimum de la durée de la grossesse, n'admet pas la preuve contraire. 23. Il en est autrement de la présomption légale, qui attribue au mari la paternité de l'enfant conçu ou né pendant le mariage.

24. La manière plus ou moins régulière et directe, dont la maternité de la femme est prouvée, peut avoir de l'influence sur la présomption légale de paternité du mari. Renvoi.

8. Régulièrement, l'enfant légitime est celui qui a été conçu d'une femme mariée, pendant son mariage, et des œuvres de son mari.

1o Le mariage; 2° la maternité de la femme; 3° la paternité du mari; 4° la conception de l'enfant pendant leur mariage; 5° enfin l'identité de cet enfant voilà au complet toutes les conditions constitutives de la légitimité véritable.

-

9. Parmi ces conditions, il y en a trois dont la preuve positive et directe est possible: l'existence du mariage; - la maternité de la femme; l'identité de l'enfant.

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La célébration du mariage, nous savons comment elle se prouve (t. III, no 383 et suiv.); aussi la loi supposet-elle ici cette preuve préalablement établie.

La maternité de la femme est un fait qui se révèle par des signes extérieurs, par la grossesse, par l'accouchement. Aussi la loi ordonne-t-elle d'abord de le constater dans l'acte de naissance (art. 57 et t. I, no 296) et per

met-elle ensuite d'en fournir la preuve même par d'autres moyens (art. 323).

Enfin l'identité de l'enfant est encore un fait susceptible d'être constaté (art. 323-341).

10. Restent les deux dernières conditions: la paternité du mari et la conception de l'enfant pendant le mariage.

Or, ce sont là deux faits dont la nature a caché le secret à toutes nos recherches:

Elle a couvert le mystère de la génération d'un voile qui ne nous permet pas d'en découvrir l'auteur;

Elle a soumis la grossesse à des lois, en apparence du moins, si variables et si incertaines, qu'aujourd'hui même, après tant de siècles d'observations, il nous est toujours impossible de connaître avec certitude l'époque précise de la conception.

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11. Il fallait pourtant poser, à cet égard, des règles: l'intérêt de la société, l'intérêt de l'enfant, l'honneur des femmes et du mariage, toutes les considérations enfin les plus élevées et les plus puissantes exigeaient que la transmission des générations légitimes ne fût pas abandonnée au hasard et à l'arbitraire. Mais comment faire ?

S'en rapporter aux déclarations des époux?

Il y avait là un double danger: favorables à l'enfant, ces déclarations pouvaient, au mépris de la morale et de l'ordre public, attribuer la légitimité au fruit d'un commerce coupable; - contraires à l'enfant, elles pouvaient être arrachées à la mère par une haine insensée contre son mari.... a matre irata (L. 29, 21, ff. de Probationibus), et au père par les transports d'une jalousie aveugle. Aussi est-ce un principe ancien et constant, que ces sortes de déclarations, insuffisantes pour conférer à l'enfant la légitimité que la loi lui refuse, peuvent encore moins lui enlever celle que la loi lui confère (L. 29, su-· pra; L, 14, Cod. de Probat.; Montpellier, 4 févr. 1824,.

Calmel, Sirey, 1825, II, 118; Bordeaux, 28 janv. 1835, Laquille, Dev., 1835, II, 313; Toulouse, 4 juill. 1843, Haulié, Dev., 1844, II, 397; voy. toutefois Paris, 11 mai 1816, Delatour, Sirey, 1817, II, 44; Décret du 19 floréal an ; Merlin, Rép., t. VII, vo Légitimité, sect. 1, § 2, n° 6; Richefort, État des familles, t. I, p. 75 et 356; voy. aussi notre t. I, n° 17).

Fallait-il s'en remettre aux magistrats, et leur confier le soin de déterminer, suivant les circonstances, la durée plus ou moins longue de la grossesse ?

Cette expérience avait été faite, et l'exemple du passé était là; on peut voir, dans les anciens recueils, tout ce que l'absence d'une règle fixe avait produit, surtout en ce qui concerne les naissances tardives, d'élucubrations scientifiques et de décisions judiciaires véritablement fabuleuses! Il s'en trouva qui prétendirent que les longues gestations pouvaient durer jusqu'à trois ans ! Ce fut sans doute une manifestation ironique de l'opinion d'alors qui répandit cet imprimé célèbre, dont le parlement de Paris, par arrêt du 13 juin 1637, crut nécessaire de défendre la publication; cet imprimé, d'après lequel le parlement de Grenoble aurait déclaré qu'une femme avait pu, pendant l'absence du mari, concevoir par la seule force de son imagination! (Merlin, Rép., t. VII, v° Légitimité, sect. 1, § 2, n° 1; Code matrimonial, t. II, p. 945; Nou veau Denizart, v° Grossesse, § 4, p. 530-535.)

Une solution législative était donc nécessaire pour mettre un terme à toutes ces discussions, qui recommençaient sans cesse, et pour asseoir sur une règle certaine l'état des familles.

Dans l'impossibilité d'acquérir cette preuve directe, dont la nature nous a dérobé le mystère, le législateur a eu recours à des présomptions, c'est-à-dire qu'il est arrivé, par le moyen des faits connus, à la connaissance aussi vraisemblable que possible de ces faits inconnus qu'il devait constater (art. 1349).

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12. C'est ainsi que de tout temps, chez toutes les nations policées, la paternité de l'enfant conçu par la femme mariée a été, de plein droit, présumée appartenir au mari.

« Pater is est, quem nuptiæ demonstrant, » disait la loi romaine (L. 5, ff. de in Jus vocando).

« L'enfant conçu pendant le mariage a pour père le « mari, » dit l'article 312 du Code Napoléon.

La cohabitation publique et obligée des époux ; la fidélité qu'ils se doivent; l'autorité du mari sur sa femme, voilà les faits connus, desquels il est assurément logique et moral de conclure que l'époux est l'auteur de la grossesse de l'épouse. Dans une telle situation, présumer que la femme a trahi ses devoirs et trompé son mari, ou même rester à cet égard dans le doute, ne serait pas seulement une atteinte profonde à l'ordre social; une telle présomption, ou même ce seul doute, serait inique et outrageant non moins qu'illogique et immoral (comp. un article sur la Paternité du mari, en droit romain, et dans l'ancienne jurisprudence française, par M. Louis Amiable, Revue historique de droit français et étranger, 1862, p. 6 et suiv. et p. 560 et suiv.).

13. Quant à l'époque de la conception, comment la déterminer? La présomption légale était ici d'autant plus difficile à établir, que tous les éléments de la question sont à peu près incertains, et qu'il n'y a point un fait bien connu d'où l'on puisse remonter à ce fait inconnu, qu'il s'agit de découvrir. L'époque de la conception, en effet, ne peut être déterminée que par celle de la naissance, ou pour mieux dire, par la durée de la grossesse; or, précisément la nature n'a point assigné à la gestation un terme uniforme; la seule chose unanimement reconnue, au milieu des dissidences scientifiques, c'est que la grossesse peut être tantôt plus courte, tantôt plus longue, et qu'il y a dès lors un certain espace de temps, pendant lequel la conception a été possible; de

telle sorte que le jour ni même l'époque n'en saurai e être fixés d'une manière précise et rigoureuse.

En cet état, le législateur a déterminé deux limites extrêmes l'une, pour les gestations les plus courtes, l'autre, pour les gestations les plus longues; et il a placé la possibilité de la conception, et par suite la présomp tion légale de la paternité du mari, dans tout le temps intermédiaire qui est compris entre le point de départ du maximum et le point de départ du minimum de la durée de la grossesse. L'enfant devra donc être considéré comme légitime, dès qu'il aura pu être conçu durant le mariage et des œuvres du mari, à l'une ou à l'autre de ces époques, ou plutôt pendant tout ce temps intermédiaire. 14. Mais quel sera le terme le plus court et le terme le plus long?

Sur ce point, le Conseil d'État devait, avant tout, emprunter le secours de la science physiologique. Fourcroy, dans un Précis sur l'époque de la naissance humaine, présenta au Conseil le résumé très-remarquable de toutes ·les doctrines médicales et juridiques qui, depuis l'antiquité jusqu'à nos jours, se sont agitées sur cette question; et sa conclusion fut «< que la fixation de cent quatre-vingt« six jours pour les naissances accélérées et de deux «< cent quatre-vingt-six jours pour les naissances tardives, se trouve parfaitement d'accord avec la portion la plus éclairée et la plus sage des physiciens, des na«<turalistes et des jurisconsultes. » (Locré, Législ. civ., t. VI, p. 50, 66.)

Cette conclusion toutefois n'a pas été complétement suivie; et les rédacteurs du Code Napoléon, appréciant eux-mêmes l'incertitude des observations de la science, ont adopté deux termes encore plus favorables à la légitimité de l'enfant, savoir: trois cents jours comme maximum, et cent quatre-vingts jours comme minimum de la durée de la grossesse ; ce qui correspondait, lors de la rédaction du Code Napoléon et sous l'ère républicaine de

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