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Cette époque, on peut le dire, est absolument inconnue de toute une génération. Les travaux historiques qui l'ont pris pour sujet sont ou de simples résumés trop incomplets, ou de volumineux ouvrages qui ne sont, par le fait même de leur étendue, accessibles qu'à un petit nombre de lecteurs. C'est pour obvier à cet inconvénient, et mettre à la portée de tous l'étude de l'histoire contemporaine, étude d'un intérêt si indiscutable et si puissant, que nous avons entrepris la publication du présent volume.

Pour mener à bien ce travail, délicat et difficile entre tous, nous ne pouvions nous adresser mieux qu'à M. Frédéric Lock, que ses études antérieures nous recommandaient tout spécialement.

Nous n'insisterons pas sur les difficultés d'une semblable tâche. M. Lock a compris que son œuvre devait être le développement du résumé de Théophile Lavallée; qu'il ne s'agissait point ici d'un ouvrage de polémique, pouvant prêter aux discussions des uns ou des autres; faisant abnėgation de ses vues personnelles, il a exposé tous les faits historiques, politiques, littéraires ou scientifiques, déduisant la logique et la morale des événements, avec une simplicité, une rectitude de jugement et une impartialité qui frapperont les lecteurs, nous n'en saurions douter.

Le continuateur de l'œuvre de Théophile Lavallée s'est astreint à suivre le plan matériel de son devancier, de manière à faire de ce cinquième volume le complément nécessaire et indispensable des quatre premiers.

Nous pensons donc que cet ouvrage, tel qu'ila été conçu et exécuté, peut trouver place dans les écoles et dans toutes

les bibliothèques privées et publiques; il doit être mis entre les mains de la jeunesse, et sera d'un haut intérêt pour tous ceux qui ont touché, de près ou de loin, à la période comprise entre la chute de l'empereur Napoléon Ier et celle du roi Louis-Philippe.

Nous croyons avoir suffisamment indiqué, par ces quelques mots, la façon dont a été composée cette histoire contemporaine, et le but essentiellement patriotique que l'auteur a eu en vue.

Le sixième volume, comprenant la période de février 1848 à 1874, auquel M. F. Lock met la dernière main, paraitra dans le courant de cette année. Cette Histoire des Français depuis le temps des Gaulois jusqu'à nos jours (1874), sera donc la plus complète qui existe.

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Les Bourbons. - Le comte d'Artois en France.

Arrivée de Louis XVIII. Déclaration de Saint-Ouen. Louis XVIII à Paris.

Premiers actes. - Premier ministère. -L'ouverture des Chambres.

Convention du 25 avril.

· Traité du 30 mai.

La Charte.

§ I. LES BOURBONS. La France de 1814 ne connaissait pas les Bourbons. Les hommes âgés alors de 40 à 50 ans se rappelaient confusément qu'au temps de leur jeunesse, la nation s'était levée tout entière pour mettre fin aux intolérables abus de l'ancien régime; que Louis XVI avait juré une Constitution, mais que lui-même, sa femme, ses frères, toute sa famille, avaient employé tous les moyens licites et illicites, jusques et y compris l'intervention des armes étrangères, pour remettre la nation sous le joug; beaucoup de ces hommes avaient répondu à l'appel de la patrie en danger, à la levée en masse, à la réquisition et avaient combattu

pour la République contre l'invasion ayant pour auxiliaires des princes de la maison de Bourbon; qu'enfin, le roi Louis XVI, jugé et condamné par la Convention nationale, avait été publiquement exécuté le 21 janvier 1795, et que cette date avait été célébrée assez longtemps par une fête commémorative.

Depuis, un autre Bourbon, le jeune duc d'Enghien, qui avait porté les armes contre la France, avait été arrêté, de nuit, sur territoire neutre, amené à Paris, enfermé à Vincennes, jugé, condamné et fusillé dans un des fossés du château. Mais, cet événe→ ment, accompli par les ordres de Bonaparte, alors premier consul, entouré d'un certain mystère, n'avait guère été ébruité et n'avait pas fortement ému le public,

Qui était ce Louis-Stanislas-Xavier, que le Sénat de l'Empire venait de déclarer roi des Français? Quelques survivants d'avant 1789 savaient seuls que ces noms étaient ceux du comte de Provence, frère de Louis XVI, prince sournois qui avait mené de souterraines intrigues contre le roi et avait été un des plus perfides ennemis de la reine, un des plus assidus colporteurs ou inventeurs de médisances et de calomnies contre Marie-Antoinette, un de ceux qui avaient le plus contribué à perdre l'Autrichienne dans l'esprit public.

Les mêmes hommes pouvaient se souvenir des galanteries de l'autre frère de Louis XVI, le comte d'Artois, qui, lui, avait compromis la reine par son amour autant que le comte de Provence la compromettait par ses méchants propos. Personne ne savait que, par suite d'un serment fait à sa dernière maîtresse mourante, madame de Polastron, et chevaleresquement tenu, le comte avait renoncé à la vie galante et s'était jeté à corps perdu dans la dévotion. Moins vaillant chevalier, il n'avait pas même mis le pied sur la côte de Quiberon,

Les fils du comte d'Artois, les dues d'Angoulême et de Berry étaient parfaitement inconnus, et l'on avait oublié que la femme du premier était la fille de Louis XVI, enfermée au Temple avec son père et sa mère, puis échangée contre les plénipotentiaires français capturés dans le guet-apens de Rastadt.

Depuis 1795, date, non moins oubliée, de la mort du fils de Louis XVI, Louis-Stanislas-Xavier avait pris le titre de Louis XVIII, comme successeur légitime de son neveu, et avait joué, sans grand éclat, le rôle de prétendant, errant à travers les monarchies indifférentes, fuyant devant les armes victorieuses de Napoléon et, en

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