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mistrative, mais ses adversaires étaient puissamment organis et ils ne dissimulaient pas aux fonctionnaires que trop de zéle faveur du ministère présent serait puni par le ministère prochai Les élections furent défavorables au cabinet Molé, dont la retrai devint alors irrévocable.

La victoire fut mortelle aussi aux vainqueurs. Quand il s'agit partager le pouvoir conquis, toutes les prétentions, toutes les rép gnances un instant écartées reparurent; on ne parvint pas à s'e tendre, et le roi dut, après des intrigues et des combinaisons pr longées pendant un mois, constituer un ministère provisoir n'ayant pas de couleur politique et chargé seulement d'expédier 1 affaire courantes et de ne pas laisser les services en souffran (31 mars). Ce fut là le châtiment de cette immorale coalition doctrines contraires.

§ V. ÉMEUTE DES 12 ET 13 MAI. — Un événement tout à fait in prévu mit fin à cette sitnation anomale.

Une société secrète, dite des Saisons, dirigée par Armand Barbe Martin Bernard et Auguste Blanqui, prit les armes, le dimand 12 mai, dans l'après-midi. Barbès alla attaquer le poste du Pala de justice, dont le chef, le lieutenant Drouineau, fut tué, puis se por sur la préfecture de police, d'où il fut repoussé, et, de là, se rend à l'Hôtel de Ville, où il désarma le poste, peu nombreux, de la gar nationale. D'autres groupes d'insurgés se répandirent dans les qual tiers Saint-Denis et Saint-Martin, élevant partout des barricades.

L'autorité, prise à l'improviste, se remit bientôt et adopta de mesures vigoureuses qui eurent promptement raison de la révolte Le soir même, les insurgés étaient battus sur tous les points; ceu qui essayérent de reprendre la lutte, le lendemain, ne tinren guère.

Barbès, Martin Bernard, et 17 autres prisonniers comparurent le 27 juin devant la Cour des pairs. Le meurtre du lieutenant Droui neau était la charge la plus grave relevée contre Barbès, car cet officier avait été tué d'un coup de feu tiré avant tout combat. Barbės protesta énergiquement contre cette imputation, sans pouveir ou vouloir indiquer le coupable. On sait maintenant qu'il le connaissait et ne voulut pas le dénoncer.

Le 12 juillet, Barbès fut condamné à mort; Martin Bernard à b déportation, l'accusé Mialon aux travaux forcés à perpétuité, les autres de cinq à quinze ans de détention, ou de deux à cinq ans d'emprisonnement. Quatre furent acquittés.

Barbès était connu pour sa loyauté; ceux même qui repoussaient le plus ses opinions rendaient hommage à son caractère chevaleresque. La condamnation portée contre lui émut douloureusement l'opinion. Des démarches, pour obtenir une commutation de peine furent faites auprès du roi; Victor Hugo lui adressa ces vers :

Par votre ange envolée ainsi qu'une colombe!

Par ce royal enfant, doux et frêle roseau!

Grâce encore une fois! grâce au nom de la tombe!
Grâce au nom du bercean!

Louis-Philippe, toujours prêt à écarter la peine de mort, substitua la déportation, que Barbès subit au mont Saint-Michel. Blanqui, arrêté un peu plus tard, fut condamné à la même peine que Barbés et obtint même commutation.

Cette émeute fit cesser soudainement toutes les complications ministérielles. Le 12 mai fut nommé un nouveau ministère composé du maréchal Soult aux affaires étrangères avec la présidence du tanseil, MM. Teste à la justice; le général Schneider à la guerre; Paperré à la marine; Duchâtel à l'intérieur; Cunin-Gridaine au commerce; Dufaure aux travaux publics; Passy aux finances; Filemain à l'instruction publique.

Encore une fois, les chefs de la coalition étaient mis de côté.

VL QUESTION D'ORIENT. - Dès son avénement, le ministère du 12 mai se trouva aux prises avec une des plus graves difficultés de la politique européenne, la question d'Orient.

Cette question, qui a pris et pourra prendre encore différentes formes, s'agitait alors entre Constantinople et Alexandrie, entre le sultan Mahmoud et le pacha d'Égypte Méhémet Ali. Le traité de Kutayeh, conclu en 1833 à la suite de la bataille de Koniah, gagnée par Ibrahim sur les troupes impériales, assurait la possession de la Syrie à Méhémet. Le sultan n'avait consenti à ce traité qu'à contrecu-ur et ne songeait qu'à s'en affranchir.

En 1859, jugeant le moment opportun, il envoya à son général Hafiz Pacha, l'ordre de reprendre les hostilités. L'ordre fut exécuté, les Turcs passèrent l'Euphrate, envahirent les possessions égyptiernes et y brûlérent des villages. A cette nouvelle, Méhemet fit appel aux puissances européennes, déclarant que si les troupes turques repassaient l'Euphrate, les troupes égyptiennes feraient un mouvement rétrograde et que, si l'hérédité de la Syrie lui était ac

cordée, il rappellerait Ibrahim avec une partie de son armée et e trerait en arrangement pour une paix définitive. Mais rien ne vi suspendre la marche des Turcs et bientôt les deux armées se tre vèrent en présence.

Cependant, le maréchal Soult avait expédié deux de ses aides camp pour empêcher le conflit d'éclater. Ces officiers n'arriver que pour constater la victoire d'lbrahim. Le 24 juin, l'armée t que avait été anéantie près du village de Nézib; encore une f la route de Constantinople était ouverte à Ibrahim.

Mahmoud n'apprit pas le désastre de son armée; il mourut 30 juin, avant que la nouvelle en fût arrivée à Constantinople laissait le trône à son fils Abdul Medjid, àgé de 16 ans. Cet évér ment donnait une influence dominante au grand vizir Khosre Pacha. Le commandant de la flotte ottomane, Ahmet-Feti-Pad ennemi de Khosrew et en redoutant la haine, quitta les Dardanel avec toute la flotte et la conduisit à Alexandrie, où il la livra vice-roi.

Dès que la nouvelle de la reprise des hostilités était parvenu Paris, le ministère avait demandé aux Chambres un crédit de millions pour augmenter les armements maritimes en vue éventualités d'une lutte en Orient; ce crédit fut alloué, après vive discussion où, chacune des solutions possibles de la questi d'Orient fut examinée et trouva des défenseurs, et après un d cours où le rapporteur de la commission, Théodore Jouffroy, dis en terminant : « Une responsabilité immense est imposée au cal net. En recevant de la Chambre les dix millions qu'il est venu demander, il contracte l'engagement de faire remplir à la Frant dans les événements de l'Orient, un rôle digne d'elle, un rôle q ne la laisse pas tomber de la position élevée qu'elle occupe Europe. C'est là une tâche grande et difficile: le cabinet duit sentir toute l'étendue et tout le poids. »

La Chambre donnait ce solennel avertissement presque à l'heu où le canon retentissait dans la plaine de Nézib. L'aide de cam du maréchal Soult arrivait trop tard, pour que l'ordre qu'il appor tait d'Alexandrie à Ibrahim, de ne pas combattre, pût être exécuté toutefois, Ibrahim s'arrêta, une seconde fois, en frémissant. La lutte entrait dans le domaine de la diplomatie et il ne fut p donné au cabinet du 12 mai de la résoudre. Il la légua, compli quée et périlleuse, au ministère qui devait lui succéder.

Le 6 août, la session législative fut close. Le cabinet du 12 mai

put achever en paix l'année 1859. Le 23 décembre s'ouvrit la session de 1810.

§ VII. ALGÉRIE. — Pendant les premiers mois de 1839, l'Algérie, placée sous le commandement du maréchal Valée, fut relativemen! tranquile. Le maréchal s'occupa d'organiser l'administration de la province de Constantine.

Abd-el-Kader songeait à tirer parti du traité de la Tafna, qui l'avait reconnu comme souverain. Durant tout le cours de l'année, il commit des actes d'hostilité qu'il dissimulait en interprétant cerbines obscurités du traité sur la délimitation entre le territoire francas et le sien. Au mois de novembre, il jeta tout à fait le masque et proclama la guerre sainte. Le gouvernement français envoya des renforts qui élevèrent le chifire de l'armée d'Afrique à 60,000 hommes.

A la fin d'octobre, une expédition, commandée par le duc d'Or Jeans, était allée reconnaitre le territoire de la province de ConStantine au delà du Biban, en franchissant de dangereux défilés peles les Portes de fer, parce qu'ils sont formés de passages fort Bruils à travers des masses rocheuses de couleur rougeâtre. L'expeddon, qui n'eut pas d'ennemis à combattre, poursuivit sa route jusqu'à Alger.

. LETTRES, SCIENCE, INDUSTRIE. - A la fin de 1838 et au comencement de 1859, la librairie Didot fit paraitre les premiers volumes de sa belle collection des Classiques grecs, avec traduction latme.- En 1859, Gérard de Nerval fit jouer son drame de Léo Burckart. Lamartine fait ses adieux à la poésie dans les Recueillements poétiques. Mademoiselle Rachel débute (12 juin) à la

Cedie-Française.

Une importante découverte scientifique fut faite en 1839, c'est crile de la photographie, due aux recherches combinées de MM. Da

rre et Niepce. Pour la faire entrer immédiatement dans le domaine public, les Chambres en acquirent la propriété au moyen dune rente annuelle pour chacun des deux inventeurs. Depuis, le procédé a été bien perfectionné et la photographie a reçu bien des acations différentes.

Le 4 mai, fut ouverte, à Paris, une Exposition des produits de Industrie nationale, dont la richesse prouva que les crises poli

s les plus graves n'arrêtaient pas le progrès dans toutes les branches de l'industrie française.

Le 2 acút, eut lieu l'inauguration du chemin de fer de Paris à

Versailles (rive droite). C'était le second chemin de fer ayant s point de départ à Paris.

A l'année 1859 appartient aussi un premier essai de réfor pénitentiaire par la fondation de la colonie de Mettray, destiné recevoir de jeunes détenus, qui y sont instruits aux travaux l'agriculture.

CHAPITRE XVI

L'Orient. Réforme électorale. Dotation. Ministère du 1 mars Anniversaire de Juillet. Affaire de Boulogne. Attentat Darinės.

§ I. SESSION DE 1840. L'ORIENT. En ouvrant la session légis tive, le roi disait : « Notre pavillon, de concert avec celui de Grande-Bretagne, et fidèle à l'esprit de cette union toujours avantageuse aux intérêts des deux pays, a veillé sur l'indépenda et la sûreté immédiate de l'empire ottoman. Notre politique toujours d'assurer la conservation et l'intégrité de cet empi dont l'existence est si essentielle au maintien de la paix généra Nos efforts ont au moins réussi à arrêter dans l'Orient le co des hostilités que nous avions voulu prévenir, et quelles que soi les complications qui résultent de la diversité des intérêts, l'espérance que l'accord des grandes puissances amènera bien une solution équitable et pacifique.

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Ainsi, la Chambre, en reprenant ses séances le 25 décemb retrouvait cette question d'Orient qu'elle avait laissée en litige commencement de juillet. La diplomatie avait marché lentemen avait-elle marché sûrement?

Dès le début de la nouvelle crise, la France et l'Angleter s'étaient promptement mises d'accord sur la nécessité d'envoy dans les eaux de Constantinople des forces importantes, non-seide ment pour imposer la paix aux belligérants, mais encore pour écar ter toute action exclusive de la part d'une puissance quelconque Cette puissance ne pouvait être que la Russie, à laquelle le traik d'Unkiar-Sekelessi donnait le droit de protéger la Turquie. ferait-on si la Russie prétendait exercer ce droit? La question av été posée entre les deux cabinets unis et ils avaient décidé que s' les vaisseaux russes entraient à Constantinople, les navires anglas et français y entreraient aussi, de gré ou de force. Préalablement

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