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LIVRE V

UXIÈME RÉPUBLIQUE-EMPIRE - TROISIÈME RÉPUBLIQUE

(1848-1874)

SECTION I

DEUXIÈME RÉPUBLIQUE

24 février 1848 2 décembre 1852

CHAPITRE PREMIER

vernement provisoire. - La République proclamée.

Drapeau rouge.

od au travail. - Dévastations. La peine de mort. - Adhésions. Inauaration de la République. Les morts de Février.

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· La Révolution de février

I. LE GOUVERNEMENT PROVISOIRE. fut réellement une « surprise » que pour les amis, volontairement aveugles, du gouvernement royal qui ne voulurent pas voir les menait la politique outrageusement «< conservatrice » de Guizot. L'élection des membres du gouvernement provisoire ne pas aussi rapidement improvisée qu'il plut aux mêmes perinnes de le dire et de le faire croire. Au palais Bourbon, chacun #s noms proposés, et c'était naturellement les noms de députés es plus notoirement acquis à la cause démocratique, fut soumis la sanction de la foule qui emplissait la salle et des membres de "Assemblée restés en séance. Les uns furent acclamés tout d'une Vois; les autres acceptés, avec plus ou moins d'empressement, par

la majorité, mais, au milieu du tumulte qui régnait dans la salle il était impossible qu'aucun fût porté au pouvoir en vertu d'un vol formulé suivant les règles usitées dans les parlements. D'ailleur cette chambre, produit du suffrage restreint, docile instrument la royauté, opiniâtrément hostile à toute réforme, ne pouvait su sister avec l'avénement de la République et du suffrage universe Les élus se rendirent à l'Hôtel de Ville.

Dans la matinée de ce même jour, 24 février, lorsqu'il était én dent que les événements tournaient à une révolution, des rése se tenaient aux bureaux des deux journaux républicains le Nata nal et la Réforme et l'on s'y occupait de composer des listes, sing d'un gouvernement, du moins d'un comité de direction. Des de côtés, on mit en tête les noms de plusieurs députés et, par coïncidence facile à comprendre, le choix se porta sur ceux furent, quelques heures plus tard, désignés au palais Bourbon. outre, la réunion du National ajouta ceux d'Armand Marrast et Ferdinand Flocon, rédacteurs en chef des deux feuilles répub caines. La presse radicale (puisqu'on l'appelait ainsi) méritait in cette justice. A la Réforme, on inscrivit, en outre, ceux de Le Blanc, à qui ses ouvrages sur l'organisation du travail avait fast grande popularité parmi les ouvriers, et d'Albert, ouvrier model ayant une influence considérable sur la population ouvrière.

Les listes des deux journaux, rapidement copiées et distribue circulaient déjà dans le public lorsque s'y répandit celle des dep tés. La concordance, à peu près complète, de celle-ci avec celle prépara et activa l'adhésion générale.

Lorsque les députés arrivèrent à l'Hôtel de Ville, ils y trouvere déjà installés Marrast, Flocon, Louis Blanc et Albert. Il fut, d'abay convenu que tous quatre auraient le titre de secrétaires du gouve nement provisoire et ils signèrent, en cette qualité, quelquesdes premiers actes officiels. Mais, dans la soirée même du 24, reconnut leur droit à figurer au même titre que les députés toute différence disparut.

Le premier soin du gouvernement fut d'adresser au peupl Français une proclamation où il annonçait sa composition, s installalion et déclarait :

« Le gouvernement provisoire veut la République, sauf ratifice tion par le peuple qui sera immédiatement consulté ;

«L'unité de la nation, formée désormais de toutes les classes dratoyens qui la composent; le gouvernement de la nation par elle-même:

La liberté, l'égalité et la fraternité pour principes, le peuple pour devise et mot d'ordre; voilà le gouvernement démocratique que la France se doit à elle-même et que ses efforts sauront lui

assurer. »

[ne autre proclamation remercia la garde nationale de son concours et fit appel au zèle et au dévouement de cette milice dont tous les citoyens allaient maintenant faire partie.

La nécessité d'assurer la prompte et complète exécution des meures commandées par les circonstances, détermina le gouvernement à concentrer dans ses mains les pouvoirs qui, dans un état ormal, doivent rester séparés : le législatif et l'exécutif. Les miistères furent donc répartis entre les membres du gouvernement. La présidence du conseil, sans portefeuille, fut unanimement dérée à Dupont (de l'Eure); Lamartine eut les Affaires étrangères; Cremieux la Justice; Ledru-Rollin l'Intérieur ; Arago la Marine; le énéral Bedeau la Guerre; Carnot l'Instruction publique; Bethmont le Commerce; Marie les Travaux publics; Goudchaux les Fiances; Garnier-Pagès fut nommé maire de Paris avec MM. Guiard et Flocon adjoints. Le colonel Courtais reçut le commandement de la garde nationale et le général Cavaignac fut nommé gouverheur-général de l'Algérie.

Par d'autres décrets, la Chambre des députés fut dissoute, défense fut faite à la Chambre des pairs de se réunir, la garde municipale fut licenciée et le palais des Tuileries affecté à un Hôtel des Invalides civils; les objets engagés au Mont-de-piété pour une somme inférieure à dix francs furent restitués aux emprunteurs. Jeux proclamations furent adressées à l'armée, l'une pour l'inviter se rallier à la révolution, l'autre pour arrêter la désorganisation certains corps dont les soldats se dispersaient, se croyant désamais libérés du service militaire.

§ II. — LA RÉPUBLIQUE. — Ces premières et impérieuses mesures complies, le gouvernement reprit une discussion déjà entamée sujet de sa première proclamation: Fallait-il décréter immédiatement la République? Tous les membres étaient d'accord pour vouloir la République, la proclamation le constatait. Mais il y avait divergence sur le droit de la proclamer avant que la souveraineté nationale se fût prononcée. Toutefois, le danger de laisser les esprits dans l'incertitude sur la nature du gouvernement et de donner ainsi ouverture aux entreprises des partis finit par rallier toutes les opinions et le décret suivant fut adopté :

« Citoyens, le gouvernement provisoire déclare que le gouver nement actuel de la France est un gouvernement républicain: que la nation sera appelée immédiatement à ratifier par son la résolution du gouvernement provisoire et du peuple de Paris. Cette résolution établissait péremptoirement la République; personnel des membres du gouvernement restait seul provisoin Vers le milieu de la nuit, le gouvernement suspendit ses trim pour prendre un repas en commun, dans le local même où il geait. Avec un couteau prêté par M. Flottard, on se partagea dup de munition et du fromage de gruyère laissés par les soldats; homme du peuple apporta un seau d'eau où chacun puisa avect tasse ébréchée; on eut aussi une bouteille de vin. « Voici, dit martine, un repas de bon augure pour un gouvernement à marché. Telle fut la première des orgies auxquelles se list rent les dictateurs » de 1848.

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Puis, on se remit à l'œuvre.

Une lourde tâche pèse sur tout gouvernement qui surgit d'u révolution. Il lui faut accomplir les réformes dont le refus a ama la chute du gouvernement précédent, réparer les inévitables mages causés par le fait même de la révolution, arrêter les dont elle peut devenir le prétexte, résister à des exigences de sonnables ou intempestives, remplir, enfin, les devoirs ordini d'un gouvernement normal. Les plus puissantes organisations maines peuvent n'y pas suffire.

§ III. LE DRAPEAU ROUGE. Sur un certain nombre de ba cades élevées dans la journée et dans la nuit du 23 février, lese toyens armés avaient arboré le drapeau rouge. En 1830, le drapa tricolore s'était tout naturellement opposé au drapeau blanc portaient les troupes royales. En 1848, le gouvernement ayant drapeau tricolore, ceux qui voulaient le renverser avaient dù adat ter un emblème différent. De là, vraisemblablement, l'adoption drapeau rouge. Toutefois, une partie des combattants devaient attacher une autre signification, car, le 25 février au matin, place de l'Hôtel de Ville fut envahie par une multitude au milie de laquelle flottaient des drapeaux rouges et dont les délégués vi rent demander au gouvernement de décréter la substitution drapeau rouge au tricolore. Louis Blanc, qui appuya la motion, valoir qu'à une situation nouvelle il fallait un symbole nouvel, que le drapeau tricolore, signe d'une transaction avec la royauté. devait disparaître avec cette royauté, que la couleur rouge avait

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