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vres et peu aisées, déjà frappées à Paris, par la crise des loyers. Il s'y joignit en province un autre fléau, celui des inondations qu ravagea surtout les départements où coulent la Loire et l'Alier L'empereur se rendit à Lyon et dans d'autres localités inondées. distribuant de l'or, de la main à la main, avec plus d'ostentation que de justesse. Les journaux officieux célébrèrent à l'envi la genérosité impériale et il y eut des « peintres pour « immortalis sur la toile ces stériles prodigalités.

§ XI. LE CLERGÉ. Des disputes assez animées se produ depuis plusieurs années entre les divers membres du parti cat lique, les uns libéraux, les autres ultramontains. Les évêques & les archevêques ne dédaignaient pas d'y prendre part. Les merde; ments des évêques répondaient aux articles des journaux res gieux, les écrits des prélats d'opinions diverses s'entre-croisaiert En 1854, l'archevêque de Paris ayant censuré le journal l'Univers, fut désapprouvé par le pape. Une certaine exaltation se produisad! dans l'esprit des croyants. On annonça à grand bruit divers m racles nouveaux, dont le plus célèbre fut celui de la Vierge qu apparaissant près de la Salette, dans les Alpes dauphinoises, aur parlé à deux enfants. Le clergé français et la cour de Rome da. nèrent à ce miracle la consécration de leur autorité (1855).

Après de graves débats entre les membres du clergé, Pie proclama le dogme de l'Immaculée-Conception (1854), qui fut s gnifié par une bulle. Le conseil d'État, après une courte best tion, en autorisa la publication (1855). Le clergé d'ailleurs avas. devancé cette autorisation, et sur tout le territoire il en cèle brait la proclamation par des fêtes brillantes. Pendant que L gouvernement impérial interdisait ailleurs toute polémique parte ou écrite, il laissait le champ libre au parti clérical; cette liberte lui donnait une nouvelle force. Le public, qui n'avait pourtant pas d'autre aliment intellectuel, ne s'inquiéta guère des disputes le sacristies, mais une certaine exaltation se propagea dans le monde religieux.

§ XII. NECROLOGIE. En 1855, la mort frappe Dupont de l'Eure), Ch. Lacretelle, madame Émile de Girardin, Isabey, le sculpteur Rude, Gérard de Nerval, M. Molé, le docteur Mazerde. l'amiral Bruat.

En 1856, meurent l'orfévre Froment-Meurice, David d'Angers. sculpteur, Adolphe Adam, compositeur, l'historien Augustin Thierry, Paul Delaroche, peintre, Salvandy.

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§I. MEURTRE DE L'Archevêque Sibour. L'année 1857 fut inaugurée par un crime. Le 3 janvier, l'archevêque de Paris, Monseigneur Sibour, achevait les offices d'ouverture de la neuvaine de Sainte-Geneviève, à l'église Saint-Étienne-du-Mont, lorsqu'un homme, en costume laïque, placé sur son passage, le frappa d'un coup de couteau catalan. L'archevêque mourut le jour même. L'assassin avait frappé en criant: A bas les déesses; » il ne chercha pas à fuir et se laissa arrêter sans résistance. C'était un prêtre interdit, nommé Verger. Quand on lui demanda l'explication de ses étranges paroles, il répondit avoir voulu protester contre le dogme, récemment promulgué, de l'Immaculée-Conception. Monseigneur Sibour était pourtant un de ceux qui avaient combattu cette curieuse innovation. Verger, dont l'esprit ne paraissait pas, d'ailleurs, bien sain, avait vraisemblablement agi par vengeance. Il fut condamné à mort et exécuté.

II. SESSION LÉGISLATIVE. La session de 1857, commencée le 16 février, n'eut pas plus d'importance que la précédente et n'excita pas davantage l'attention publique.

Le Corps législatif réforma le code pénal militaire, rejeta un projet de loi tendant à accorder une dotation annuelle de 100,000 francs au général Pélissier, pour la prise de Sébastopol, qui lui avait déjà valu le titre de maréchal, renouvela le privilége de la Banque de France, créa les paquebots transatlantiques, vota 80,000 francs pour acheter la maison de Longwood, que Napoléon avant habitée à Sainte-Hélène, puis le budget, sans insister sur l'acFroissement du déficit.

Cette session était la dernière de la législature. Aux termes de la Constitution, les élections générales eurent lieu en 1857. Un député devait être élu par groupe de 35,000 électeurs; mais le gouvernement avait la faculté de composer à son gré les groupes ou airconscriptions électorales. En vertu de ce droit, il découpait de la façon la plus bizarre les départements, suivant l'intérêt des candidatures qu'il voulait faire réussir. A ce système, d'un emploi

si commode, se joignait la pression administrative mettant toute les forces officielles au service des candidats bien pensants et tour nant ces mêmes forces contre des candidats ennemis du gouver nement et de la société. » C'était, en réalité, le gouvernement qu nommait les députés chargés de le contrôler; cela se fit en 185 comme cela s'était fait en 1852.

Les élections furent une occasion de divergence entre les pa blicains les uns voulaient l'abstention absolue; d'autres vos laient voter à condition que les élus refuseraient le serment con stitutionnel; d'autres encore voulaient que les élus presse serment et prissent part aux débats législatifs. Ni l'une ni l'auth opinion ne triompha absolument. Beaucoup de républicains votèrent pas; parmi le petit nombre de républicains élus, MM. rimon et Émile Ollivier, nommés à Paris, Curé et Hénon, élus Lyon, prêtèrent le serment; MM. Carnot et Goudchaux, élus à B ris, le refusèrent. Paris avait élu aussi le général Cavaignac, mourut avant l'ouverture de la session.

Le nouveau Corps législatif tint, au mois de novembre, session de quelques jours pour se constituer et procéder à la ve fication des pouvoirs. Cette dernière opération amena un pro contre M. Migeon, député du Bas-Rhin, qui, candidat officiel 1852, avait été réélu, malgré le ministère, en 1857. On ac mula contre lui un grand luxe d'accusations, et il fut condam pour port illégal de la Légion d'honneur; M. Migeon donna sa mission.

§ III. NECROLOGIE. Le 15 juillet 1857, mourut Béranger, connu, injurié, calomnié comme Marrast. On oublia que, pendan quinze ans, il fut le clairon de l'opposition libérale et sont vaillamment la charge contre les Bourbons. Parce qu'il avait oppos les souvenirs de la France victorieuse à la France vaincue, pare qu'il avait rappelé aux rois coalisés le soldat de fortune qui ava laissé la poussière de son pied sur leur bandeau royal, on voulu voir en lui le précurseur, l'apologiste, le complice du 2 Décembre L'histoire sera plus juste pour Béranger.

Le second empire voulut exploiter cette gloire à son profit, et, sous prétexte d'honorer la mémoire de l'illustre chansonuler." entoura ses obsèques d'une pompe officielle et militaire quil eût repoussée avec dédain, s'il l'avait pu prévoir, et qui écarta de son convoi une partie des amis restés fidèles à sa gloire atta quée.

Le général Cavaignac vivait modestement et très-retiré, dans le département de la Sarthe. Son beau-père ayant subi des pertes d'argent, le général rendit spontanément aux créanciers la dot de sa femme. Il était atteint d'une maladie de cœur à laquelle il succomba le 28 octobre 1857. Sa jeune veuve le ramena à son domicile de Paris, rue de Londres; c'est de là qu'il fut conduit u cimetière Montmartre, dans la sépulture où étaient déjà réunis on père, sa mère, son oncle et son frère (31 octobre). L'autorité éfendit qu'aucun discours fût prononcé sur sa tombe. D'injustes ancunes politiques empêchèrent que le convoi d'Eugène Cavaignac ût suivi d'une aussi nombreuse assistance qu'il aurait dû l'être. L'année 1857 vit également mourir Alfred de Musset (1er mai); ustave Planche, critique parfois passionné, mais plus souvent quitable (18 septembre); le sculpteur Simart; Auguste Comte, fonlateur du positivisme; le mathématicien Cauchy; le graveur Desnoyers; le jurisconsulte Isambert; la duchesse de Nemours, morte à Claremont (Angleterre).

SIV. FÈTES ET ENTREVUES DE

PRINCES L'empereur, après

me saison sanitaire aux eaux de Plombières, alla faire une isite à la reine Victoria, au château d'Osborne. Le 13 août, pour la fête de Napoléon, il instituait la médaille de Sainte-Hélène, décernée à tous ceux qui avaient figuré sur les registres d'un régiment sous le premier empire; puis, il fit l'inauguration solennelle des nouvelles constructions du Louvre; enfin, il eut à Stuttgard, avec l'empereur de Russie (25-28 septembre), une entrevue que Suivit bientôt, à Weymar, une conférence du czar avec l'empereur d'Autriche (1 octobre).

L'année 1857 faillit voir une guerre entre la Prusse et la Suisse, à propos de la principauté de Neuchatel, dont la première revendiquait la souveraineté. Elle y renonça par une transaction que mémazea Napoléon III (26 mai).

En Algérie, le gouverneur général, à la tête de 25,000 hommes, met les tribus de la grande Kabylie (mai-juillet).

V. LETTRES. Dans ces dernières années, Ponsard fit jouer Honneur et l'argent, œuvre d'une valeur poétique contestable, mais dont le succès fut très-vif, parce qu'elle faisait appel à des entiments de probité; première représentation de l'Étoile du Nord, de Meyerbeer; M. Emile Augier a donné le Gendre de M. Poirier (1854), en collaboration avec M. Jules Sandeau, le Mariage Olympe (1855); et M. Alexandre Dumas fils, le Demi-Monde

(1855); Victor Hugo publie les Contemplations, Villemain, les Sou venirs contemporains d'histoire et de littérature (1856); M. Mignef Charles-Quint au monastère de Saint-Just; Michelet, la Renai sance; V. Cousin, Madame de Sablé; Beulé, l'Acropole d'Athènes Alex. Dumas et George Sand commencent la publication, l'un Mes Mémoires, l'autre de l'Histoire de ma rie; on commença 2358 celle des Mémoires du maréchal Soult, du roi Joseph et da m chal Marmont. Ces derniers sont attaqués en justice par la fame Beauharnais, qui obtient un arrêt ordonnant la suppression des passages considérés comme calomnieux à l'égard du prince Eugen M. Gustave Flaubert fait paraître Madame Bovary (1857), donne lieu à un procès (pour outrage à la morale publique) sus d'acquittement.

L'abbé Dupanloup et M. Sylvestre de Sacy furent élus membe de l'Académie française.

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§ VI. ARTS, INDUSTrie. Le 50 novembre 1854, fut signé le trai qui concédait à M. Ferdinand de Lesseps le percement de l'isthe de Suez (400 kilomètres environ). En 1856, Josué Heilmann Mulhouse) invente la peigneuse mécanique. Sur le territoire de l'a cienne Halicaruasse, M. Newton, consul d'Angleterre, découvre ruines importantes du tombeau de Mausole et en rapporte à Lo dres des parties considérables, entre autres la statue de Maus

§ VII. LA PRESSE. —Le coup d'État avait chassé de France to les hommes dont la voix pouvait s'élever pour revendiquer droits de la justice et de la liberté. Aussi le silence de la vie blique n'était-il troublé que par le bruit des fêtes impériales etp le récit complaisamment étalé des aventures et des mésaventur de la cour, de la spéculation et de la galanterie. Les lois légué par l'Assemblée nationale à l'empire avaient été modifiées par décrets présidentiels, puis impériaux, de façon à détruire entiere ment le peu de liberté qui restait encore à la presse. La presse på riodique fut done soumise à un régime sous lequel aucun journal aucune revue ne pouvait paraître sans l'autorisation préalable de ministre de l'intérieur et du préfet de police; le gouvernem s'arrogeait le droit de suspendre et de supprimer un journal quand bon lui semblait, sans autre jugement que celui de son bon vialoir, sans instruction, sans débats contradictoires. Les citoress lésés par ses arrêtés n'avaient aucun droit d'en appeler aux tribenaux, pas même au conseil d'État.

Le décret de 1852, qui réglait le sort de la presse, divisat la

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