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du parti démocratique de tous les pays européens s'y étaient rendus ou y avaient envoyé leur adhésion. Il avait pour but avoué de chercher les moyens d'éviter désormais les guerres, et ses membres, d'un commun accord, avaient déclaré que le meilleur moyen était de détruire la puissance monarchique sous toutes ses formes, et notamment la puissance temporelle du pape. En dehors de ces questions spéciales, on y traita toutes les questions accessoires qui s'y rattachent directement : questions des salaires, de l'éducation, des réformes juridiques, de limitation du rôle de l'État dans la vie sociale, etc. Il arriva naturellement que, à côté des opinions justes et sensées, se produisirent les théories les plus folles. Au total, les monarchies européennes virent, dans ces réunions de vraies assises révolutionnaires, et nul gouvernement ne fit une opposition quelconque à l'intervention française en Italie.

L'expédition de Mentana souleva dans toute l'Italie une vive animosité contre la France; le ministère italien qui, par prudence, ne s'était pas opposé à cette intervention, fut renversé. Le Parlement de Florence montra nettement, en cette occasion, ses sentiments envers la France. Il fut désormais acquis que l'Italie se considérait comme dégagée de tout lien de reconnaissance à notre égard. D'autre part elle tenait la Vénétie de l'Allemagne; sa situation était donc clairement indiquée en cas de conflit entre ces deux nations. Une partie des troupes revint en France. Une division resta à Civita-Vecchia et à Viterbe. Les cléricaux avaient l'espoir que l'empereur profiterait des circonstances pour restituer au pape les territoires qui lui avaient été précédemment enlevés. Il n'en fut rien, et leur désappointement s'exhala en amères récriminations.

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§ XII. ALGERIE. COCHINCHINE. En 1866 une partie de l'Algérie avait été ravagée par les sauterelles. En 1867, un autre fléau, une sécheresse excessive et prolongée, fit périr en germe toutes les récoltes des Arabes. Il en résulta une épouvantable famine qui, malgré les efforts des colons, malgré les secours envoyés par des souscriptions faites en France, malgré les subventions tardives du Louvernement, fit périr un nombre de victimes qu'on évalue de 200,000 à 300,000.

Cette même année, à l'extrême Orient, la France prit possession des trois provinces de la Cochinchine occidentale, qui furent réunies aux provinces orientales déjà occupées par nous. Deux traités, T'un avec l'empereur d'Annam, l'autre avec le roi de Siam, ont assuré à la France la possession de ces terri'o'res.

§ XII. LETTRES. BEAUX-ARTS. L'exposition universelle, qui sucita des activités de tout genre, ne provoqua, de la part des Lettres françaises, aucun effort pour attester une supériorité qui a eu tant de part à la gloire et à l'influence de la France.

La Comédie-Française joua le Galilée, de Ponsard, et reprit H nani, de Victor Hugo.

Le Gymnase représenta les Idées de madame Aubray, F M. Alexandre Dumas fils.

Théophile Gautier publia son Voyage en Russie. Michele! donna Louis XV et Louis XVI (2 vol.), ouvrage qui achève s Histoire de France, en la reliant à son Histoire de la Révolutan M. P. Lanfrey fit paraître le premier volume de son Histoire d Napoléon Ir.

Dans le domaine de l'érudition, M. Michel Bréal publia le pre mier volume de la traduction de l'ouvrage de Bopp, Gramma:: comparée des langues indo-européennes, dont l'auteur mourait a cette même année.

L'exposition des Beaux-arts faisant partie de l'Exposition us verselle valut à l'École française quatre grands prix de peintur

La littérature française a fait, en 1867, des pertes sensibles de les principales sont: Victor Cousin (14 janvier); Ponsard (7 juillet Théophile Lavallée (27 juillet); le duc de Luynes (14 décembr Cormenin; Viennet et le docteur-journaliste Véron.

En 1867, l'art français a perdu Ingres (12 janvier); Brascass (20 février); Hittorf (25 mars); Louis Boulanger (avril); Lebe (15 juin); Th. Rousseau (2 décembre). Le théâtre a perdu made moiselle Georges.

A ces morts il faut ajouter les suivants : le chimiste Pelcu (51 mai); les docteurs Jobert de Lamballe (22 avril); Civic (13 Juin); Trousseau (22 juin); Velpeau (24 août); Rayer (10 sep tembre); l'ingénieur Perdonnet (1er octobre); le naturaliste Florrens (6 décembre); Poncelet, géomètre (25 décembre).

CHAPITRE XIV

Modifications ministérielles. Session de 1868. - Interpellations. --- Affaires d'Allemagne. Loi militaire. -Loi sur la presse. Droit de réunion.Budget. Situation intérieure. Procés de presse, LA LANTERNE,- procès politique. Modifications ministérielles. Réunions publiques. Conferences. Enseignement des filles. Extérieur.- Nécrologie.

§1. MODIFICATIONS MINISTÉRIELLES.

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Le Sénat et le Corps législatif Maient convoqués pour le 18 novembre. Quelques jours auparaFant, le 13, M. Rouher, qui avait reçu provisoirement, au mois de anvier précédent, le portefeuille des finances, le céda à M. Magne.

Moniteur prit soin d'annoncer que cette mesure était prise sur a demande de M. Rouher; on peut croire que, à la veille de la ession, ce fonctionnaire se trouvait assez occupé du soin de défenIre la politique officielle et n'était pas fàché de laisser à un homme lus compétent les discussions financières. En même temps M. de | Valette quitta le ministère de l'intérieur où fut appelé un memre du parquet de Paris, M. Pinard. Si ce choix était fait en vue une politique libérale, il était bien difficile de se tromper plus omplétement sur l'aptitude de l'homme à la tâche. C'est au sujet de la reconstitution du ministère que M. Rouher fut chargé par l'empereur de lui présenter divers candidats. M. Rouher adressa alors à son souverain un rapport où il passait en revue tous les hauts personnages du régime impérial, susceptibles d'être appelés u ministère. Ce rapport montrait nettement que le peu d'hommes les premiers jours qui vivaient encore ne pouvaient plus facilement stre employés et que, en dehors de ceux-là, un nouveau personnel gouvernemental ne s'était pas formé 1.

§ II. SESSION DE 1868. DISCOURS DU TRÔNE. - Le 18 novembre, dans son discours d'ouverture, Napoléon III expliqua ainsi la convocation hátive des deux Assemblées : « La nécessité de reprendre l'étude interrompue de lois importantes m'a obligé de vous convoquer plus tit que de coutume. D'ailleurs de récents événements m'ont fait éprouver le désir de m'entourer de vos lumières et de votre con

cours. D

Voir Papiers et correspondances de la famille impériale (note pour Tempereur). Pages 75 et suivantes. Paris, 1875.

Puis, l'empereur constatait que « de vagues inquiétudes sout venues affecter l'esprit public en Europe et restreindre partout la mouvement industriel ». L'empereur manifesta ensuite son étennement de ce que certaines gens pussent croire que les modifications accomplies en Allemagne devaient être une cause de conflit avec le France; il repoussa bien loin cette pensée : « Il faut, dit-il, *cepter les changements survenus de l'autre côté du Rhin, pr clamer que tant que nos intérêts et notre dignité ne seront pos menacés, nous ne nous mêlerons pas des transformations qu s'opèrent par le vœu des populations. »

Ces paroles étaient bien vagues pour rassurer, les dernières sen blaient une réserve dissimulée à l'égard du Sleswig.

Comme preuve de ses intentions pacifiques, l'empereur rapp le spectacle de conciliation offert pendant la durée de l'Exposition Cet esprit de concorde n'excluait pas la nécessité de poursuivre, i dépendamment des circonstances, le perfectionnement de notre ganisation militaire, comme de nos armes et de notre marine.

L'empereur annonça que le projet présenté l'année précédente qui avait paru trop absolu, serait remplacé par un projet nouvez qui ne ferait que modifier sur certains points la loi de 1832. L'e pereur recommanda de l'examiner avec cette pensée que pr nous serons forts, plus la paix sera respectée.

Parlant de la nouvelle expédition romaine, le discours du trông expliquait qu'elle avait eu surtout pour but de refréner des gh tations révolutionnaires » qui menaçaient les États Pontifica se défendait de toute intention hostile à l'unité et à l'indépendancė de l'Italie, et faisait entrevoir l'époque prochaine du retour de nos troupes et le remplacement de la convention de septembre par u nouvel acte international, que les puissances europénnes ont été ins vitées à formuler dans une conférence destinée à mettre fin à toutes complications.

Sur tous les autres points de la politique extérieure et intérieure la harangue impériale n'était pas moins rassurante. Elle commen tait la lettre impériale du 15 août 1867 par laquelle l'empereu ordonnait le tracé de nouveaux chemins vicinaux sillonnant toute la France. S'il y a du ralentissement dans les transactions, c'est ab malaise général en Europe, résultat d'appréhensions mal fondes que doit faire cesser la bonne entente des gouvernements. La rècolte a été mauvaise, le blé est cher, mais le libre commerce pourvoiera aux besoins. Les recettes n'atteignent pas les évaluations

́du bugdet, néanmoins « les lois de finances ne seront pas modiliées et il est permis d'entrevoir l'époque où des allégements d'impôts pourront être étudiés. »

Pressant les députés de s'occuper activement des réformes déaitées en janvier 1867, l'empereur terminait en ces mots : « Vous adopterez, j'en ai l'espoir, les lois qui vous sont soumises; elles confribueront à la grandeur et à la richesse du pays; de mon côté, soyez-en sûrs, je maintiendrai haut et ferme le pouvoir qui m'a été enfié, car les obstacles ou les résistances injustes n'ébranleront hi mon courage ni ma foi dans l'avenir. »

De même que le rapport du ministre d'État montrait la difficulté le renouveler le personnel gouvernemental, des rapports de 1. Pietri, préfet de police, donnaient à l'empereur la mesure des passions hostiles et des « résistances,» injustes au dire de 'empereur, en présence desquelles il se trouvait. Il disait 1 (22 sepembre 1867) que l'opposition exploitait l'irritation populaire causée par la cherté des vivres; à quelques jours de là (28 septembre); signalait l'attitude agressive d'une partie de la presse. Chaque our les rapports sont plus pressants et montrent l'esprit public le plus en plus agité par l'incertitude où le pays est laissé, vivant ntre la paix et la guerre au plus grand détriment des affaires Commerciales.

II. INTERPELLATIONS.

- En attendant que les rapports sur les

'Papiers secrets et correspondance de la famille impériale, p. 425 et Hvantes. Paris, 1873.

* Voici un rapport du préfet de police en date du 30 septembre, qui définit el état d'agitation:

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Depuis quelques temps, la tâche quotidienne qu'impose la préparation de ce rapport est des plus pénibles. A quelques sources que l'on s'adresse, quelque t le correspondant que l'on consulte, quelques renseignements que l'on neille, la situation actuelle apparait toujours comme peu satisfaisante; de elque côté que l'on regarde, on se heurte à des inquiétudes sincères ou à des défiances qu'inspirent des hostilités ardentes.

On est ainsi condamné à présenter à l'empereur des appréciations qui event sembler pessimistes; elles ne font cependant que reproduire les imfessions reçues; elles les atténuent plutôt qu'elles ne les exagèrent, mais le timent du devoir et un religieux dévouement aux institutions impériales * permettent pas de les dissimuler, si amère que soit l'obligation d'en être , cho fidile.

La portion agissante de la société, celle qui s'occupe le plus de politique, Țui aime les discussions, critique les gouvernements, accentue plus que japais son opposition radicale et systématique. Elle seconde activement les mimes de parti, elle se complait dans les attaques de la presse, elle va rétant que l'empire est atteint dans son prestige extérieur, dans la prospérité

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