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n'aura été résolue; aucune solution n'aura été altérée par une infidélité de notre part. (Bravo! bravo! Applaudissements). Cette déclaration constitue ce qu'on a appelé, depuis et bien so vent, le Pacte de Bordeaux, pour l'essai loyal de la République. L'Assemblée de Bordeaux va devenir maintenant l'Assemblée de Versailles.

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§ I. EN L'ABSENCE DE LA FRANCE. - Pendant que Paris était séquestré du reste de l'univers, pendant que la France, toute à ses malheurs personnels, n'avait guère le loisir de regarder ce qui passait hors de ses frontières, des événements s'accomplirert de quelques-uns ne furent pas sans toucher, au moins indirectement. ses intérêts, soit dans le présent, soit dans l'avenir.

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§ II. LES ITALIENS A ROME. De ces événements, le premier par ordre chronologique fut la prise de possession de Rome, par les troupes italiennes et le transfèrement de la capitale de l'Italie dans la Ville éternelle.

A la suite des premiers désastres de nos armes, le gouverte. ment impérial rappela le corps français qui occupait Rome dorth sécurité intérieure et la défense se trouvèrent confiées à l'arm pontificale, composée, en grande partie, sinon en totalité, de mecenaires étrangers, mal vus des Italiens.

Des symptômes d'agitation ne tardèrent pas à se manifester à Rome même et dans ce qui restait encore de territoire au SaidSiége. Il était facile de prévoir qu'une lutte était imminente entre la population romaine et les soldats du Pape.

Le gouvernement de Victor-Emmanuel réunit une armée d'ebservation aux confins des États de l'Église, sous le commandement du général Cadorna, qui reçut pour instructions de franchir la frætière dans le cas où des conflits menaceraient d'éclater entre les habitants et les mercenaires pontificaux ; il devait aussi, le cas échéant, laisser le pape s'éloigner librement de Rome. D'autre part, le gouvernement italien envoya à Rome un délégué mission de proposer au saint Père de laisser les troupes italienses

occuper Rome, dans un commun intérêt de paix et de sécurité, sous la condition que le pape conserverait sa situation, sa souveraineté spirituelle, garantie par le maintien des ambassadeurs des puissances catholiques, et conserverait sous son autorité directe la partie de la ville appelée la Cité Léonine.

Ces propositions n'ayant pas été agréées, ordre fut donné à l'armée d'observation de passer la frontière. L'ordre lut exécuté le 11 septembre; les villes pontificales furent occupées presque sans coup férir.

Le général Cadorna lança une proclamation par laquelle il déclarait qu'il n'apportait pas la guerre, mais l'ordre et la paix, et que les populations nommeraient elles-mêmes les municipalités chargées de les administrer.

L'approche de l'armée italienne provoqua dans Rome des rassemblements que la police ne tenta pas de dissiper. Le pape réunit le corps diplomatique accrédité auprès de lui, et protesta officielle ment contre l'envahissement de ses États.

Le 16, un court engagement eut lieu, à trois kilomètres de Rome, entre une reconnaissance de cavalerie italienne et l'avant-garde pontificale qui se replia.

Le 18, le baron d'Arnim, ministre de Prusse à Rome, fit auprès du général Cadorna une démarche qui aboutit à un délai de vingtquatre heures accordé par le général aux pontificaux.

Le 20 septembre, Cadorna attaqua Rome. Après une canonnade de quatre heures, les troupes pontificales cessèrent le feu et arborèrent le drapeau blanc, sur l'ordre du pape, qu'une plus longue résistance aurait pu mettre dans la nécessité de quitter Rome. Les troupes italiennes firent leur entrée à Rome, où elles furent reçues en libératrices. La garnison qui occupait Rome, se retira à Civita-Vecchia, d'où les étrangers furent renvoyés dans leur pays. Un scrutin ouvert à Rome et dans les provinces pontificales sur leur annexion à l'Italie, a donné pour résultats, sur 167,548 inscrits, 155,291 votants: 135,681 oui, 1,507 non, 103 bulletins nuls.

Le 11 octobre, la Gazette officielle d'Italie publia le décret royal ratifiant le plébiscite et prononçant l'annexion au royaume d'Italie des anciens États de l'Église, dont le général La Marmora fut nommé

gouverneur.

Le 8 juillet 1871, le siége du gouvernement italien fut installé à Rome; l'Italie acquit et consacra sa capitale naturelle et historique.

§ III. DENONCIATION DU TRAITÉ DE PARIS. Le retour de Rome à l'Italie ne causa d'émotion qu'à quelques cléricaux, en France surtout. La diplomatie laissa le fait s'accomplir sans la moindre protestation. Il n'en fut pas de même lorsque, le 18 novembre 1870, une circulaire, datée du 19 octobre précédent, fut communiquée par le prince Gortschakoff, ministre des affaires étran gères, aux représentants de la Russie près les puissances européennes. Dans cette circulaire, le gouvernement russe déclarait De plus se tenir obligé par les stipulations du traité conclu à Paris, en 1856, portant atteinte à l'exercice de sa souveraineté.

La France n'était pas en état d'imposer le respect de ce traité, La Prusse prêtait son appui à la Russie. Après un échange de dépêches et de notes, il fut décidé, vers la fin de décembre, qu'une conférence se réunirait à Londres, le 3 janvier 1871, pour exauliner et résoudre la question. Chacune des puissances signataires fø invitée à s'y faire représenter, M. Jules Favre devait s'y rendre. mais M. de Bismarck, qui craignait que, malgré la précaution prise pour limiter les délibérations aux seules stipulations se rattadan au traité de 1856, la force des choses n'entrainat la conference à s'occuper de la guerre en France, M. de Bismarck refusa le sauf conduit nécessaire au ministre français pour franchir les lignes prussiennes. D'autre part, le bombardement de Paris ayant com mencé le 27 décembre, M. Jules Favre crut devoir ne pas quitter la ville menacée de destruction. La réunion du 3 janvier fut revoyée forcément à quelques jours plus tard. L'armistice du 28 janvier amena un nouvel ajournement. Un traité conforme aux vues de la Russie fut enfin signé à Londres le 14 mars 1871. § IV. L'EMPIRE D'ALLEMAGNE A VERSAILLES. Les triomplies inespérés de la Prusse dans la guerre de 1870 déterminèrent le roi de Bavière et quelques autres tributaires de la Prusse à préposer à l'assemblée de la confédération du Nord la reconstruction de l'empire germanique telle qu'elle avait été décrétée en 1848.

La proposition fut acceptée d'enthousiasme : l'Allemagne cher chait maintenant dans l'unité despotique la force qu'elle n'avait pas su se donner par une liberté fédérative.

Le 18 décembre 1870, Guillaume reçut à Versailles les délégués allemands qui venaient lui offrir la couronne de l'empire d'Alle• magne, rétablie à son profit, sur la proposition du roi de Bavière. Il répondit que, pour accepter définitivement, il attendait le vœu de tous les princes et des villes libres de l'Allemagne,

Cette condition ne tarda pas à être accomplie. Le 18 janvier, une nouvelle députation d'envoyés allemands fut reçue, avec grande solennité, dans la galerie des Glaces du palais. Le roi de Prusse déclara qu'il acceptait la nouvelle dignité que le peuple allemand lui offrait. Il fut couronné empereur avec grand apparat 1.

§ V. ESPAGNE. Après l'échec de la candidature du prince Hohenzollern, Prim se remit en quête d'un autre aspirant. Il réussit à obtenir le consentement du duc d'Aoste, fils de Victor-Emmanuel, et l'adhésion du roi d'Italie.

Le 16 novembre 1870, le jeune prince fut élu par les Cortès, à la majorité de 191 voix, sur 309 votants, sous le nom d'Amédée Ier. Prim se disposait à aller recevoir le monarque débarqué à Carthagène, lorsque, dans la soirée du 27 décembre, le maréchal, sortant des Cortés, subit, rue d'Alcala, une décharge d'armes à feu, qui lui fit des blessures auxquelles il succomba le 30.

Amédée arriva à Madrid, le 2 janvier 1871, commença un règne qui ne devait pas avoir longue durée. En effet, en février 1873, Amédée, à la suite d'un dissentiment avec ses ministres, pour lesquels se prononcèrent les Cortès, déposa la couronne et retourna en Italie. La République fut aussitôt proclamée.

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§ VI. LES ALLIES DE LA FRANCE. La liberté des alliances, si hautement préconisée par M. Rouher, n'avait abouti pour l'empire qu'à un isolement absolu. Les pratiques impériales nous avaient aliéné les peuples aussi bien que les gouvernements. Aussi, pendant la guerre, aucun souverain ne fut porté par sympathie personnelle ni sollicité par l'opinion publique à nous venir en aide. La France ne trouva nulle part un secours officiel.

Cependant, la France a reçu de l'étranger des témoignages de dévouement dont elle doit garder le souvenir, d'autant plus précieusement qu'ils ont été, non point commandés, mais spontanés, inspirés par un vif sentiment d'affection ou de reconnaissance.

Le prince Bibesco accourut de Roumanie pour combattre à Paris. Une légion montévidéenne de 1,500 hommes, traversa l'Océan et vint lutter pour la France.

Des jeunes gens, des hommes mariés, des officiers et des soldats de l'armée régulière partirent de Grèce, à leurs frais, pour

Voir Versailles pendant l'occupation, par M. Delerot (librairie Plon), et Versailles pendant le siége de Paris, par M. Pigeonneau, dans la Revue des Deux-Mondes du 1 avril 1871.

défendre la France. Il en vint 1,500; il en serait venu plus si le gouvernement grec, sur les sommations de la Prusse et de la Russie, n'eût mis obstacle au mouvement national. Les volontaires grecs ont combattu à côté de nos soldats; plus de deux cents sont tombés sous le feu de l'ennemi, sans compter les blessés et les malades'.

La Belgique et la Suisse ont fait à nos soldats, forcés de chercher un refuge chez elles, un accueil que la France n'oubliera pas2. Il faut citer aussi les libéralités de sir Richard Wallace et l'enpressement des Anglais à nous ravitailler après l'armistice.

CHAPITRE X

Après la guerre. Le 18 mars. La Commune.

Le second siege.

§ I. APRÈS LA GUerre. L'histoire se fait, au jour le jour, AÐseulement par les événements qui restent grands devant la posté rité, mais aussi par les petits faits auxquels les passions et les circonstances du moment donnent une importance qu'ils perdent promptement. L'histoire ne s'écrit pas comme elle se fait. East qu'un certain temps ait passé sur les choses et sur les hommes, 14 amené des aveux, des témoignages, des révélations, et remis hommes et choses dans leur juste et vraie perspective, pour que l'historien puisse, débattant le pour et le contre, porter un jugement siren infaillible (rien n'est infaillible en ce monde), du moins fondé sur une appréciation sérieuse et sincère; il n'y a pas d'autre impartialité à demander à l'historien que la volonté d'être équitable.

Les événements qui ont suivi la guerre de 1870 et rempli les années écoulées entre 1871 et 1873 sont encore trop près de nous, ils ont encore besoin de trop d'éclaircissements complémentaires pour qu'il soit possible d'en entreprendre véritablement l'his

toire.

On ne veut pas le tenter ici. On se propose seulement d'en træcer un tableau rapide, marquant les principales étapes, posant

1 Voir La Grèce et ses volontaires dans la guerre de 1870, par Alfred

zières, Revue des Deux-Mondes du 1 juillet 1871.

1701 internés sont morts en Suisse, 124 en Belgique.

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