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une haie vive. Dans ce cas, la haie est assimilée aux plantations en général et ne peut être placée qu'à la distance prescrite pour celles-ci.

Dans les villes et faubourgs, la clôture cesse d'ètre facultative (C. civ., 663). Chacun des deux propriétaires voisins doit contribuer à sa construction, sauf le cas où l'un des deux aurait déjà clos à ses frais, auquel cas il n'aurait pas le droit de répétition contre l'autre. La clôture obligatoire consiste dans un mur dont la hauteur doit être de 3m, 20 au moins, chaperon compris, pour les villes de plus de 50 000 habitants, et 2,20 dans les autres.

271. Les clôtures protègent la propriété par la résistance matérielle qu'elles opposent à l'entrée de l'homme ou des animaux, mais elles produisent aussi des effets de droit variables suivant les cas : 1o Les délits sont réprimés avec plus de sévérité quand ils sont commis sur des propriétés closes; 2o Il peut être chassé en tout temps et sans permis de chasse sur les terrains clos et attenant à une maison d'habitation; 3o Les terres closes sont affranchies de la vaine pàture, du ban de vendange, etc.

272. En général, les clôtures réelles sont les seules à produire des effets de droit. En matière de vaine pâture seulement, on admet aussi les clôtures symboliques lorsque leurs effets sont consacrés par les usages. Ces clôtures consistent en de simples signes disposés dans les champs qu'ils doivent défendre. Ces signes sont d'ailleurs variés suivant les régions: tantôt c'est une simple raie de labour ouverte au milieu du champ, tantôt une petite butte de terre élevée à chacun des coins, ou mème de simples brandons ou des bottelettes de foin pendues au bout d'une perche, etc.

DE LA PROPRIÉTÉ (suite).

III. DROIT D'USER.

273. User d'une chose, c'est l'employer de toutes les façons compatibles avec sa nature pour des aliments, c'est les consommer; pour des vêtements, s'en vètir; pour un champ, y passer, y chasser, labourer, planter, le cultiver, etc. Cette faculté est donc une conséquence bien naturelle du droit de

propriété. Néanmoins, elle comportait autrefois un nombre infini de restrictions en matière de propriétés rurales. C'est ainsi qu'il était interdit au propriétaire de chasser, d'avoir certains animaux (taureau, verrat), de se livrer à certaines cultures, alors que d'autres cultures étaient pour lui obligatoires ou qu'il était tenu d'entretenir d'autres animaux contre sa volonté. La plupart de ces restrictions ou obligations avaient un caractère de féodalité, c'est-à-dire qu'elles avaient pour but de réserver au seigneur féodal des droits qu'il avait entendu ne pas abandonner en même temps que la terre ; d'autres devaient leur origine à une législation d'ordre plus général, mais les unes et les autres étaient extrêmement gênantes pour les progrès de la culture, et leur suppression, prononcée principalement par le décret du 4 août 1789 et par la loi des 28 septembre-6 octobre 1791, fut un des plus grands bienfaits de la Révolution (1).

Les restrictions établies par les lois actuelles sont moins nombreuses et procèdent de principes fort différents. Nous aurons à examiner la réglementation du droit d'user, successivement, en ce qui concerne : 1o La chasse; 2o certaines constructions; 3° l'écoulement des eaux; 4° les plantations; 5° les fouilles.

DE LA CHASSE (2).

274. Le droit de chasse était, avant 1789, un attribut de la souveraineté royale, que les nobles obtenaient d'exercer à titre de concessions, mais dont l'exercice était interdit d'une façon à peu près absolue aux communes gens (roturiers et bourgeois),

(1) Les principaux textes qui ont consacré la liberté d'user sont les articles 1er, 2, 3 et 6 du décret du 4 août 1789; les articles 2 (section 1), 1er (section IV), 1er et 2 (section V) de la loi des 28 septembre-6 octobre 1791, dont les diverses dispositions ont été consacrées par le Code civil.

(2) La matière comporte des règles de droit civil, qui seules devraient trouver place dans ce chapitre et des dispositions de police qu'il serait logique de répartir entre d'autres divisions de cet ouvrage. Néanmoins, il nous paraît préférable de ne pas scinder le sujet et de respecter, pour l'étude, les liens qui le rattachent au droit de propriété.

sous les peines les plus sévères. L'ordonnance du 10 décembre 1581 prononce que « les roturiers ne peuvent chasser sous peine de la hart », c'est-à-dire du gibet. Le décret du 4 août 1789, dans les termes suivants a fait du droit de chasse un simple attribut du droit de propriété : tout propriétaire

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a le droit de détruire et de faire détruire, seulement sur ses possessions, toute espèce de gibier, sauf à se conformer aux lois de police qui pourront être faites relativement à la sûreté publique » (art. 3).

Les lois de police annoncées ne se firent guère attendre. La première date des 28-30 avril 1790 et les considérants qui en accompagnent les dispositions ont le soin d'annoncer que cette loi n'est ni complète, ni suffisamment étudiée, mais qu'elle est urgente aux abus de l'ancien régime, la liberté absolue en avait substitué d'autres non moins graves auxquels il fallait au plus vite mettre un terme, aussi n'avait-on pas le temps nécessaire pour élaborer une loi définitive. D'autres actes législatifs divers interviennent bientôt pour interdire la chasse dans les forêts domaniales, réglementer la destruction des animaux malfaisants ou nuisibles, créer le droit de port d'armes, etc. Mais les précautions prises sont insuffisantes pour éviter une rapide destruction du gibier et c'est seulement par la loi du 3 mai 1844 que s'établit une réglementation quelque peu énergique. Toutefois, cette loi elle-même présentait des lacunes. Ses dispositions étaient insuffisantes, principalement pour assurer une protection efficace du gibier et des oiseaux utiles à l'agriculture. Complétée sur ces deux points par les lois des 22 janvier 1874, 16 février 1898 et 30 juin 1903, on peut direq u'elle constitue le code de la chasse, à la condition d'y joindre les arrêtés préfectoraux qui, dans chaque département, peuvent édicter des prescriptions particulières (1). Dans son état actuel, la législation vise à quatre

(1) Il faut y joindre également, en ce qui concerne la destruction des animaux malfaisants ou nuisibles, l'arrêté du 19 pluviôse an V, le règlement du 20 août 1814 portant organisation de la louveterie, la loi du 8 août 1882, modifiée par celle du 31 mars 1903, art. 83, relative à la destruction des loups, et l'article 90 § 9 de la loi municipale du 5 avril 1884.

buts distincts: 1o faire respecter le droit de propriété ; 2o protéger les récoltes; 3° assurer le repeuplement du gibier; 4o protéger les oiseaux utiles à l'agriculture. Elle subordonne l'exercice de la chasse à cinq conditions que nous allons examiner successivement, savoir :

1° Avoir le droit de chasse ou l'autorisation de celui qui le possède;

2o Que la chasse soit ouverte ;

3o Avoir obtenu de l'autorité compétente un permis de chasse;

4° S'abstenir d'employer les moyens prohibés;

5o Ne chasser que le gibier dont la chasse est autorisée.

Deux §§ spéciaux seront consacrés l'un aux mesures destinées à assurer l'exécution de la loi, l'autre aux règles spéciales relatives à la destruction des animaux malfaisants et nuisibles et des bètes fauves.

275. Avoir le droit de chasse ou l'autorisation de celui qui le possède. · D'une manière générale, le droit de chasse appartient au propriétaire du sol, et à tous les propriétaires si le bien est indivis. Mais cette règle comporte des exceptions. 276. En premier lieu, il arrive que le droit de propriété n'est pas tout entier dans les mêmes mains: tel est le cas lorsqu'il y a usufruit ou usage. Le droit de chasse appartient alors à l'usufruitier, à l'exclusion du nu-propriétaire, mais non à l'usuger ni à l'antichrésiste. D'autres fois la propriété a été donnée à bail. Il faut alors distinguer l'emphyteote a le droit de chasse à l'exclusion du propriétaire; quant au fermier ordinaire, sauf le cas de convention contraire, il ne peut chasser que dans l'enclos attenant à son habitation, et encore ne possède-t-il ce droit qu'autant qu'il y a clôture continue et suffisante pour empêcher toute communication avec les parcelles voisines. Une porte de simple passage, constamment ouverte entre cet enclos et une autre parcelle, suffirait pour annuler l'effet de la clôture. Le droit de chasse lui-même peut avoir été donné à bail par le propriétaire. Dans ce cas, il appartient naturellement au concessionnaire à l'exclusion du propriétaire. Le locataire de la chasse peut, sauf conventions contraires, exercer son droit par lui-même, seul ou

inviter ses amis, comme le pourrait faire le propriétaire, et même rétrocéder son droit. Par contre, une simple autorisation gracieuse ne donnerait à celui qui l'aurait obtenue, que le droit de chasser seul et serait d'ailleurs révocable à tout moment.

277. Tout le monde peut chasser sur les voies publiques et le rivage de la mer, sauf le cas d'interdiction générale par arrêtés préfectoraux ou municipaux dans un but de sûreté. Mais le maire ou le préfet ne pourrait point à l'égard de ces voies publiques faire poursuivre tel chasseur plutôt que tel autre comme le peut tout propriétaire à l'égard de ses biens. 278. Que la chasse soit ouverte. - Il n'est permis de chasser que dans le temps où la chasse est ouverte et de jour seulement. La période d'ouverture est fixée de façon à ne pas contrarier la reproduction du gibier et à éviter la dévastation des récoltes. Les dates d'ouverture et de clôture sont publiées par arrêtés préfectoraux au moins dix jours à l'avance. La loi du 3 mai 1844 n'établissait sous ce rapport aucune distinction, et malgré un usage contraire assez prolongé, d'après lequel la période de chasse à courre se prolongeait au delà de la période de chasse à tir, la Cour de cassation avait décidé (arrèt du 16 mars 1872) que l'ouverture et la clôture devaient être générales, c'est-à-dire que les dates en devaient être les mêmes pour tous les procédés de chasse, sauf quelques exceptions autorisées par l'article 9 concernant les oiseaux de passage et le gibier d'eau pour lesquels la période de chasse est presque toujours allongée. De là, de nombreuses réclamations, qui ont motivé une modification de l'article 3 pour permettre aux préfets d'adopter des dates différentes pour la chasse à courre, à cor et à cris et pour la chasse à tir.

D'autre part, de ce que la loi du 3 mai 1844 (art. 9), modifiée par celle du 22 janvier 1874, permet aux préfets de prendre des arrêtés «< pour prévenir la destruction des oiseaux ou pour favoriser leur repeuplement », certains d'entre eux avaient cru pouvoir retarder l'ouverture ou avancer la clôture pour des gibiers à plumes tels que la perdrix et le faisan. Les tribunaux ont encore estimé qu'en cela ils dépassaient la limite de leurs pouvoirs, d'une part parce que la loi n'avait pas étendu les distinctions concernant les dates de clôture et d'ouverture aux

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