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Les contestations que fait naître l'exercice de ce droit, relativement au passage, aux indemnités dues, ou à la participation aux dépenses s'il y a lieu, sont de la compétence du tribunal d'arrondissement pour ce qui concerne l'irrigation, et du juge de paix pour ce qui concerne le drainage. Mais dans les deux cas, le juge doit décider en conciliant l'intérêt de l'opération avec le respect dû à la propriété. S'il y a lieu à expertise, il peut n'être nommé qu'un seul expert.

PLANTATIONS.

331. « La propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous. Le propriétaire peut faire au-dessus toutes les plantations et constructions qu'il juge à propos... » (C. civ., 552). Toutefois, les arbres, arbrisseaux et arbustes étendent assez loin leurs branches et leurs racines, de plus ils contrarient le passage de la lumière et exercent ainsi, sur les récoltes placées dans leur voisinage, une action plus ou moins nuisible rendant nécessaire une réglementation de l'exercice du droit de planter. Cette réglementation a fait l'objet des articles 671 et suivants du Code civil, modifiés par la loi du 20 août 1881.

332. La distance du fonds voisin à laquelle il est permis d'avoir des arbres, arbrisseaux ou arbustes, peut être fixée de deux façons: 1° par les règlements particuliers et usages déjà existants quand le Code civil fut promulgué (1804); 2o à défaut de ces usages et règlements, par la loi elle-même.

En cette matière comme en beaucoup d'autres, les usages locaux et les règlements particuliers présentent des inconvénients et, notamment, celui de ne pas être très connus, aussi, fut-on tenté de les supprimer, lorsque, en 1881, il fut procédé à la revision des articles 666 et suivants du Code civil pour les incorporer dans le Code rural. Le gouvernement et la commission du Sénat étaient tombés d'accord sur ce point, mais. le Sénat reconnut qu'il y avait un véritable intérêt à respecter sur ce point ces règlements et usages, de sorte que, là où ils existent, ils font la loi quant à la distance. Ce n'est d'ailleurs que l'exception.

A défaut de règlements et usages, ce qui est le plus fréquent,

la loi fixe à deux mètres pour les arbres, les arbrisseaux et arbustes dont la hauteur dépasse deux mètres et à 0m,50 pour les autres plantations arbustives, la distance à observer entre les plants et la propriété voisine, distance mesurée de la limite de la propriété au centre de croissance de l'arbre. Ces règles sont générales, et applicables quelles que soient les essences plantées, que les fonds soient clos ou non et les arbres plantés, ou venus naturellement.

333. Toutefois, les arbres, arbrisseaux et arbustes de toute espèce peuvent être plantés en espalier de chaque côté du mur séparatif sans que l'on soit tenu d'observer aucune distance, à la seule condition qu'ils ne dépasseront pas la crête du mur. Si celui-ci est mitoyen, les plans pourront être appuyés sur chacun des côtés, mais ils ne pourront l'être que par le propriétaire du mur en cas de non-mitoyenneté.

334. D'autre part, les arbres, arbrisseaux ou arbustes peuvent être conservés à des distances inférieures aux distances légales s'ils existent en vertu d'un titre, de la destination du père de famille, ou de la prescription trentenaire. Le titre, c'est un acte juridique dûment prouvé établissant le droit du propriétaire de posséder les plantations dans les conditions où elles se trouvent. Il y a destination du père de famille si les deux fonds voisins, celui sur lequel sont les arbres et celui qui en souffre, faisaient autrefois partie d'un mème domaine dont la division a été établie alors que les arbres se trouvaient déjà à la place qu'ils occupent. Enfin, la prescription trentenaire résultera de ce que depuis trente ans les arbres auront occupé la même place sans que leur propriétaire ait été contraint de les enlever à la suite d'une action en justice exercée par son voisin.

335. Dans le cas où, en dehors de ces exceptions, des arbres existeraient dans le voisinage d'un fonds à une distance inférieure à deux mètres, mais supérieure à 0m,50, le propriétaire peut seulement être contraint par son voisin, de les raccourcir jusqu'à une hauteur de deux mètres. Il pourra être contraint de les arracher si cette distance est inférieure à 0,50. Il résulte de ces particularités que les trente années nécessaires pour prescrire commenceront le jour de la plantation

ou de la levée de l'arbre, parce que le droit est violé dès ce jour-là, si la distance est inférieure à 0,50 et seulement le jour où sa hauteur dépasse deux mètres si la distance est comprise entre 0,50 et deux mètres. Mais, il est une remarque indispensable. Le texte qui réglait la matière avant 1881 disposait que la distance serait de deux mètres pour les arbres à haute tige et d'un demi-mètre pour les autres arbres, de sorte que, quant aux plantations faites sous ce régime, la distinction doit s'établir non d'après la hauteur, mais d'après le caractère de haute tige, d'ailleurs souvent incertain, que peut affecter l'arbre pour les hautes tiges existant avant le 20 août 1881, la prescription court donc du jour de la plantation.

336. Quand les arbres conservés à des distances réduites conformément à ces exceptions viennent à périr, réserve faite pour les espaliers, que régissent des dispositions spéciales, ils ne peuvent être remplacés que si le droit de remplacement at été formellement accordé par titre à leur propriétaire. Hors ce cas, il n'en peut être planté d'autres qu'en observant les distances légales (C. civ., 672).

337. Celui sur la propriété duquel avancent les branches des arbres du voisin peut, non les couper lui-même, mais contraindre celui-ci à les couper. Si ces branches portent des fruits, ceux qui s'en détachent et tombent naturellement appartiennent au propriétaire du fonds sur lequel ils tombent (C. civ., 673). Le sort des fruits qui ne se détachent pas naturellement n'a pas été réglé par le Code civil. Son silence à leur égard doit faire admettre qu'il les laisse sous le régime du droit commun et qu'il les attribue au propriétaire de l'arbre (Gauwain), mais celui-ci n'est nullement autorisé par la loi à passer sur le fonds voisin pour aller les cueillir. Certains auteurs admettent en sa faveur un droit de passage déduit de la tolérance qu'imposent les relations de bon voisinage (Demolombe).

338. Quant aux racines qui s'avancent sur le fonds du voisin, ce dernier a le droit de les couper lui-même.

339. Les contestations que fait naître l'application de ces règles, aussi longtemps qu'elles ne portent ni sur la propriété

des arbres ou du fonds, ni sur les titres qui l'établissent, sont de la compétence du juge de paix en premier ressort. L'action peut être exercée par l'usufruitier et par l'usager, mais non par le fermier, auquel le Sénat a refusé de reconnaître ce droit par crainte qu'il en abusât vis-à-vis d'un voisin avec lequel il est moins intéressé que le propriétaire lui-même à conserver d'excellentes relations. Toutefois, le fermier peut cultiver librement quant aux racines et les couper quand il les rencontre dans le travail de la terre; en outre, ses droits vis-à-vis de son bailleur restent entiers et en s'adressant à lui, il peut obtenir que les branches gênantes soient raccourcies.

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FOUILLES.

340. « La propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous. Le propriétaire... peut faire au-dessous toutes les constructions et fouilles qu'il jugera à propos, et tirer de ces fouilles tous les produits qu'elles peuvent fournir, sauf les modifications résultant des lois et règlements relatifs aux mines, et des lois et règlements de police. » (C. civ., 552.)

Les limites apportées au droit de faire des fouilles visent plusieurs buts distincts: d'abord, la protection du droit de propriété du voisin; puis la sécurité publique et la bonne exploitation des mines; enfin, la protection de certaines sources d'eaux minérales.

Règle générale.

341. Le propriétaire qui veut faire des fouilles est soumis à la règle générale appelée en toute circonstance à tracer les limites du droit de propriété à savoir que le droit d'un propriétaire cesse dès qu'il atteint celui du voisin. Conformément à cette règle, il ne sera permis de faire des fouilles qu'autant qu'elles n'entraineront aucun éboulement du fonds voisin, c'est-à-dire à la seule condition d'observer une certaine distance entre les excavations et la propriété voisine, ou de prendre toutes précautions utiles pour éviter les éboulements. Mais, dans l'exécution des fouilles, le propriétaire n'est point tenu à l'abstention ou à la

garantie dès qu'il prive son voisin de l'un des avantages attachés à son droit de propriété « sans porter une atteinte positive » à son fonds même ainsi, le propriétaire agit dans la limite de son droit, lorsqu'en faisant des fouilles dans son propre terrain, il coupe les veines d'eau souterraines qui alimentent le puits de son voisin.

Mines.

342. Les substances minérales de toutes sortes que l'homme retire du sein de la terre présentent pour lui une immense importance: matériaux de construction pour ses bâtiments, minerais, combustibles, alimentent de puissantes industries dont l'activité est à la fois la cause et la résultante de la richesse sociale. D'autre part, la mise en exploitation des gisements présente d'immenses exigences en capital, exclusives le plus souvent de toute entreprise purement individuelle, et donne lieu à des travaux, à des manœuvres dangereux pour les ouvriers. De là, un ensemble de mesures législatives des-. tinées à favoriser l'activité d'exploitation tout en assurant la sécurité des ouvriers. Examinant cette législation au seul point de vue rural, nous aurons à voir seulement quelle influence exerce l'existence de gisements exploitables sur la situation du propriétaire et à quelles prescriptions il doit satisfaire pour exploiter lui-même certains de ces gisements.

A ce double point de vue, il y a lieu de distinguer quatre régimes différents, savoir: celui des mines, celui des minières, celui des carrières et celui des sources d'eaux minérales (1).

(1) Sont considérés comme mines, les gisements connus « pour contenir en filons, en couches ou en amas, de l'or, de l'argent, du platine, du mercure, du plomb, du fer en filons ou couches, du cuivre, de l'étain, du zinc, de la calamine, du bismuth, du cobalt, de l'arsenic, du manganèse, de l'antimoine, du molybdène, de la plombagine, ou autres matières métalliques, du soufre, du charbon de terre ou de pierre, du bois fossile, des bitumes, de l'alun et des sulfates à base métallique » (L. 21 avril 1810, art. 2). Cette énumération n'est nullement limitative et la jurisprudence du Conseil d'État y peut ajouter tous gisements de substances analogues à celles-là. Les gisements de phosphates ne sont pas compris dans

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