<< et de mettre toutes voiles dehors, même <«<les bonnettes, afin d'atteindre, le plus << promptement possible, la ligne ennemie, << et de la couper, en commençant au dou« zième vaisseau à partir de la queue. Quel«<ques vaisseaux ne pourront peut-être pas « couper à l'endroit où ils le devraient faire, <<< mais ils seront toujours à même de se<< conder leurs compagnons. S'il y en a quel«ques-uns qui se trouvent jetés à la queue <«< de la ligne, ils compléteront la défaite de <<< douze vaisseaux ennemis. Si la flotte en<< nemie vire vent arrière tout à la fois, ou << fait porter pour courir largue, les douze << vaisseaux formant, dans la première po«<sition, l'arrière-garde de l'ennemi, doivent << toujours être l'objet des attaques de la co«<lonne de dessous le vent, à moins qu'il « n'en soit autrement ordonné par le com<< mandant en chef, ce à quoi il ne faut guère << s'attendre, parce que la direction absolue << de la colonne de dessous le vent (après que «<les intentions du commandant en chef au❝ront été exprimées) doit être laissée à l'ami

<< ral commandant cette colonne. Le reste de « la flotte ennemie demeurera en partage au << commandant en chef, qui prendra soin << que les mouvemens du commandant en <second soient aussi peu troublés que pos

<< sible. >>

NELSON.

Certes, la prévoyance du génie ne saurait aller plus loin, ni ravir plus de chances au hasard dans les combats de mer, où sa part fut toujours si grande.

« Lorsque les deux colonnes de la flotte anglaise furent sur le point d'arriver à por«tée de canon du centre de la flotte franco<< espagnole, elles se divisèrent. Celle que << conduisait le vice-amiral Collingwood fit «porter et se dirigea sur le vaisseau la Santa

Anna; celle que Nelson conduisait en per«sonne gouverna droit sur le Bucentaure. « En ce moment l'amiral Villeneuve fit le si<< gnal de commencer le feu dès qu'on serait à portée. C'est alors que le capitaine Lucas, << commandant du Redoutable, voyant le danger auquel était exposé le vaisseau ami

<< ral par l'éloignement de son matelot d'ar<< rière le Neptune, et jugeant de l'impossi«bilité où se trouvait ce bâtiment de pren« dre son poste, força de voiles, et vint au« dacieusement porter son vaisseau dans la << hanche du vent du Bucentaure. Par cette << manœuvre, digne des plus grands éloges, <«<le capitaine Lucas couvrait son général, et « rendait impossible à l'ennemi de couper <«<< la ligne en arrière du Bucentaure, sans << aborder le Redoutable, et l'entraîner hors « du poste où l'intrépidité de son chef l'avait << placé.

<< Quoique dans les combats de mer, en « général, on doive éviter de tirer de loin, << il existe néanmoins des circonstances où il <«< est utile de le faire. Ici, par exemple, <«< ainsi qu'au combat d'Aboukir, il semble « qu'on eût dû tirer de bonne heure sur les <<< deux colonnes ennemies, dont les vais<<< seaux s'avançaient en présentant le devant, << pour tâcher, en les démâtant, ou en les « dégréant, de porter le désordre parmi eux, «<et de troubler leur manoeuvre. Quel but

« deux

avantageux offraient aux canonniers ces groupes de vaisseaux, dont chacun présentait une quantité de mâts et de ver«< gues, et une masse de cordages et de voiles, « où pas un boulet ne devait être perdu! « Malgré ces chances favorables, on attendit << pour commencer le feu que l'ennemi fût << tout proche de la ligne. Enfin, à midi et « un quart, le Fougueux tira les premiers. << coups de canon sur le Royal - Sovereing, << qui manoeuvrait pour couper la ligne entre « lui et la Santa-Anna: l'amiral Collingwood « réussit dans cette tentative, et la canon« nade s'engagea immédiatement entre sa co«lonne et la plupart des vaisseaux français " et espagnols placés en arrière de la Santa« Anna. Cette colonne se rompit alors, et « quelques-uns des vaisseaux qui suivaient « le Royal-Sovereign vinrent couper la << queue de la ligne franco-espagnole en di« vers endroits, tandis que d'autres vais« seaux s'avançaient à l'abri de ceux-ci, et se << plaçaient ensuite au vent des vaisseaux « coupés, dans les positions les plus avanta

« geuses pour les écraser de leur artillerie, <«< sans en recevoir de grands dommages. « Enfin, ceux qui ne purent ni couper la << ligne, ni prendre une de ces positions, « forcèrent de voiles, et passèrent en arrière << du Principe-de-Asturias, serre-file de la << ligne, pour en mettre la queue entre deux <<< feux.

<<< La colonne de Nelson gouvernait sur le << Bucentaure. Peu de temps après que l'ar<< rière-garde eut ouvert son feu sur le Royal« Sovereing, le Bucentaure, vaisseau amiral << français, la Santissima-Trinidad et le Re<< doutable ouvrirent le leur sur le Victory, et « les vaisseaux qui marchaient à sa suite. « L'effet qu'il produisit dut faire regretter de << n'avoir pas tiré plus tôt : en peu d'instans le « Victory fut désemparé de toutes ses bonnet<< tes, eut un mât de hune coupé, ainsi qu'une << vergue et quantité de manoeuvres. Ses pertes << en hommes furent aussi rapides, et il en << eut cinquante mis hors de combat, avant << qu'il eût franchi le court espace qui le sé<< parait encore de la ligne franco-espagnole.