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qui se trouvoit dans l'île, que ceux qui voudroient prendre du service seroient à sa solde; et Koller blåma ouvertement cette mesure, qui naturellement devoit jeter une grande défiance sur ses projets pacifiques. Qu'est-ce que cela me fait, répartit Napoléon? J'ai examiné les fortifications, et je défie qu'on puisse m'attaquer ici avec le moindre succès. « Je le crois, reprit le général; mais je crois aussi que le gouvernement français, saisiroit bien vite ce prétexte pour ne pas vous payer la pension convenue. » Croyez-vous, interrompit brusquement Napoléon ? diable, cela ne m'arrangeroit pas du tout; mais que faire à présent? « Il faut, dit le général, publier une nouvelle proclamation, où vous déclarerez que cette invitation ne devoit s'appliquer qu'aux soldats elbois qui servoient la France et qui désireroient rester dans leur pays natal.» Aussitôt Napoléon adopta ce conseil, et remercia beaucoup ce général, qui l'avait déjà habitué à s'entendre dire patiemment qu'il avoit tort. Napoléon lui dit un jour : Vous me dites toujours que j'ai tort; parlez-vous donc aussi comme cela à votre empereur ? Le général l'assura que son empereur seroit très-fâché contre lui, s'il soupçonnoit qu'il ne lui dît pas toujours bien franchement sa façon de penser. En ce

cas, reprit Napoléon, votre maître est bien mieux servi que je ne l'ai jamais été.

Pour gagner l'affection des Elbois, Napoléon leur fit donner, le second jour de son arrivée, soixante mille francs pour faire des routes dont les projets existoient depuis longtemps, mais qui n'avoient pas été effectués faute d'argent. Il avoit fait changer cette somme, qu'il possédoit en or, en pièces d'argent, afin que cela fit beaucoup plus d'effet lorsque ses gens transporteroient à travers les rues, ces sacs du château à la maison-de-ville. Cet artifice eut tout le succès qu'il en attendoit. On ne parla plus d'autres choses que de ces immenses trésors et de sa grande libéralité. Napoléon conclut un traité de commerce avec Livourne, et lorsque le général Koller le quitta, il le chargea des dépêches pour Gênes, afin de négocier un semblable traité, qui eut lieu effectivement. Napoléon lui fit des adieux affectueux, et le pria de venir bientôt le re

voir.

Le 6 mai, on lut dans le mandement du vicaire-général de l'île d'Elbe: « L'île d'Elbe, déjà célèbre par ses productions naturelles va devenir désormais illustre dans l'histoire des nations par l'hommage qu'elle rend à son nou veau prince, dont la gloire est immortelle.

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416 VOYAGE DE NAPOLÉON A L'ile d'elbe.

Elevée à un honneur aussi sublime, elle reçoit dans son sein, l'oint du seigneur, et les autres personnes distinguées qui l'accompagnent. Lorsque S. M. I. et R. fit choix de cette île pour sa retraite, elle annonça à l'univers quelle étoit pour elle sa prédilection. Quelles richesses vont inonder notre pays! Quelles multitudes accourront de tous côtés pour contempler un héros ! Heureux habitans de PortoFerrajo, c'est dans tes murs qu'habitera la personne sacrée de S. M. I. et R. Napoléonle-Grand réside parmi vous; n'oubliez jamais l'idée favorable qu'il s'est formée de ses fidèles sujets, etc. >>

(Extrait de l'ouvrage du comte de Waldbourg-Truchsess, commissaire du roi de Prusse, chargé d'accompagner Napoléon à l'île d'Elbe.)

SOUS LOUIS XVIII.

1814.

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20 AVRIL. ARRIVÉE de LOUIS XVIII à Londres, venant de son château d'Hartwel, dans le comté de Buckingham, à seize lieues de Londres.

Grande fermentation à Turin; le prince Borghèse, gouverneur, a pris la fuite pour se soustraire à la fureur du peuple.

L'empereur d'Autriche s'est promené dans Paris; il a visité le Jardin des Plantes et le Muséum d'Histoire Naturelle.

Armistice entre le commandant supérieur à Besançon, avec S. A. le prince de Lichtenstein, commandant les troupes de l'empereur d'Autriche.

Une révolution subite a éclatée à Milan, lors de la nouvelle des grands évènemens de Paris; le peuple s'est porté chez les ministres de Buonaparte; il a traîné sur la place publique le ministre des finances, M. de Prina, et l'a massacré; le ministre de la conscription, qui

étoit particulièrement l'objet des fureurs populaires, s'y est heureusement soustrait par la fuite. Le palais du sénat a été saccagé, et les sénateurs insultés et dispersés; il s'étoit formé dans le sénat une faction pour proclamer roi le prince Eugène Napoléon, qui s'est sauvé de Milan.

21 AVRIL. Le duc de Berri a fait son entrée à Paris par la barrière de Clichy.

-Les cortès, voulant perpétuer la mémoire du 24 mars dernier, jour de la rentrée de Ferdinand VII sur le territoire espagnol après son heureuse délivrance, ont décreté qu'il sera élevé sur la rive droite de Fluvia, et vis-à-vis le village de Bascara, un monument à l'endroit même où sa majesté fut reçue par la première

armée nationale.

22.

- Les cortès, voulant transmettre à la postérité la plus reculée, la mémoire des grands évènemens qui ont signalé la résistance glorieuse de l'Espagne contre le tyran de l'Europe et amené l'heureux terme des efforts héroïques de la nation, ont décrété, 1° qu'il sera dressé une statue équestre en bronze de Ferdinand VII, sur la place de la constitution à Madrid; qu'on emploiera à ce monument les canons, mortiers et obusiers pris sur l'ennemi; 2o que la régence proposera un prix convenable à l'artiste qui aura présenté le meilleur dessin ou modèle ;

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