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de Fontainebleau, entre Jacques Davy du Perron, alors évêque d'Evreux, & depuis cardinal, & Philippe DupleffisMornai. Pendant la régence de la reine Marie de Médicis, il fut employé dans des affaires très-importantes. Le roi le commit auffi avec le cardinal du Perron, pour trouver les moyens de réformer l'Univerfité de Paris, & pour travailler à la conftruction du collége royal, qui fut commencé par fes foins. En 1601. il fut élu pere temporel & protecteur de l'ordre de S. François dans tout le royaume de France, & il prit alors le foin de faire continuer la nef de l'église des Cordeliers de Paris. Mais ce grand nombre d'emplois ne l'empêcha pas de travailler dans le particulier pour l'avantage de la postérité. Il compofa l'Histoire de son temps, depuis l'an 1545. jufqu'à l'an 1607. en cent trente-huit livres. La derniere édition de cette hiftoire fi généralement eftimée, eft de 1733. en fept volumes in folio. On en est redevable aux foins de Thomas Carte, Anglois, connu à Paris fous le nom de Philips, qui donna cette belle édition à Londres, avec quantité de corrections & un grand nombre de piéces qui n'avoient point encore paru. C'eft fur cette édition que l'on en a donné une excellente traduction françoise en feize volumes in-4°. [en 1734.] Après une préface très-judicieuse, on trouve les mémoires même de M. de Thou compofés par lui-même. Le quinzieme volume de cette nouvelle traduction contient en françois la fuite de l'histoire de M. de Thou, par Nicolas Rigaut, depuis 1 607. jufqu'en 1610. avec la plûpart des pieces qui font dans l'édition latine de Londres, & quelques-unes qui ne s'y trouvent point: le feizieme volume comprend la table des matieres. M. de Thou a auffi compofé un grand nombre de poéfies latines, parmi lesquelles on trouve des paraphrases de l'Eccléfiafte, des Lamentations de Jérémie, & d'autres pieces dont le fujet eft tiré de l'écriture fainte. Il mourut à Paris en 1617. âgé d'environ foixante-quatre ans. Son fils aîné François-Augufte, préfident au parlement, eut la tête tranchée à Lyon en 1642. à l'âge de trente-cinq ans, pour n'avoir pas révélé le fecret d'une confpiration contre le car

dinal de Richelieu. On trouve à la fin du quinzieme volume de la traduction de l'hiftoire de M. de Thou fon pere, plufieurs pieces qui tendent à le justifier, avec une relation des moyens qu'on mit en œuvre pour le faire condamner

à mort.

ARTICLE VI.

Suite de l'églife de France. Regne de Louis XIV.

I.

pere,

I. Louis XIV. déclare fa me

royaume.

LOUIS XIV. né à S. Germain-en-Laie, le 5 Septembre 1638. n'avoit que quatre ans huit mois & neuf jours lorfqu'il commença à régner, étant parvenu à la couronne le re- régente du 14 Mai 1643. Dès le lendemain de la mort du roi fon la reine Anne d'Autriche fa mere l'amena de S. Germain-enLaie à Paris. Le lundi fuivant, il tint fon lit de justice au parlement, qui fut contraint de rendre un arrêt folemnel, par lequel la reine fut déclarée feule régente, avec plein pouvoir de fe choifir tels miniftres qu'elle jugeroit à propos; ce qui étoit contre la difpofition teftamentaire du feu roi, qui avoit nommé le duc d'Orléans chef du conseil de la nouvelle régence, avec le prince de Condé, le cardinal Mazarin, le chancelier Séguier, & le fur-intendant des finances Bouthillier. La reine s'étant laiffée prévenir contre l'évêque de Beauvais, Augustin Potier, lui ôta sa confiance, pour la donner toute entiere au cardinal Mazarin. Celui-ci feignit de vouloir fe retirer en Italie ; mais c'étoit afin de fe faire rechercher davantage. Sa rufe lui réuffit, & la reine s'estima heureuse de ce qu'il vouloit bien fe charger de la direction des affaires. Comme ce cardinal a joué un trèsgrand rôle fous la minorité de Louis XIV. il est à propos de faire connoître en peu de mots fes commencemens.

II. Commencemens du cardi

Jules Mazarin ou Mazarini naquit dans le bourg de Piscina dans l'Abruzze en 1602. Dès fon jeune âge il fit paroître beaucoup d'efprit, & étudia les lettres de la manière dont nal Mazarin.

on le faifoit en Italie. Il trouva moyen d'entrer chez l'abbé Jérôme Colonne, qui fut depuis cardinal. Ce jeune feigneur allant étudier dans l'univerfité d'Alcala en Espagne, fut fuivi par Mazarin, qui y apprit le droit, & qui à fon retour en Italie prit le bonnet de docteur. Enfuite il fe pouffa à la cour de Rome, & s'attacha à Sachetti, depuis cardinal, que le pape Urbain VIII. envoyoit en Lombardie, & s'y instruisit des divers intérêts des Princes, qui y faifoient alors la guerre au fujet de Cazal & du Montferrat. Peu après le cardinal Antoine Barberin, neveu du pape, vint en qualité de légat dans le Milanès & le Piémont. Mazarin entra fi bien dans les fentimens de ce cardinal & le fervit fi fort à propos, qu'il eut ordre de continuer, & d'agir avec Pancirole nonce en Savoie, pour la conclufion de cette affaire. Il s'attacha à connoître les deffeins des François, des Impériaux, des Efpagnols, du duc de Savoie & du duc de Mantoue, & prit des mefures certaines pour accorder leurs intérêts. La paix avoit été conclue à Ratisbonne ; mais les François & les Espagnols refufoient de l'accepter en Italie. Mazarin qui voyoit que ces refus rendoient inutiles tous fes foins, chercha de nouveaux expédiens pour faire recevoir cette paix, & pour empêcher les deux armées d'en venir aux mains. Elles étoient prêtes à donner bataille le 26 Octobre 1630. lorfque Mazarin, après avoir propofé divers moyens, fortit des retranchemens des Espagnols qui étoient devant Cazal, & courant du côté des François, leur cria: La paix, la paix. Enfuite il s'adreffa au maréchal de Schomberg qui commandoit ce jour-là l'armée, & fit des propofitions que nos généraux accepterent, & qui furent fuivies de la paix. Mazarin en eut toute la gloire. Le cardinal de Richelieu fut trèsfatisfait de fa conduite, & conçut pour lui une estime qui fut dans la fuite la caufe de fon élévation. Il fut envoyé en 1634. vice-légat à Avignon, & enfuite nonce extraordinaire en France, Ce fut là qu'il s'acquit, avec la connoissance des affaires, l'amitié du cardinal de Richelieu, & la protection de Louis XIII, Sur la nomination de ce prince, le pape Urbain VIII, le fit cardinal en 1641. Le même roi, après la

mort

mort du cardinal de Richelieu, le fit confeiller d'état, & le nomma l'un des exécuteurs de fon teftament. Tels furent les dégrés par lefquels le cardinal Mazarin s'éleva à cette puiffance prefque abfolue qu'il eut fi long-tems en France. Nous verrons dans la fuite fes principales actions & fon ca

ractere.

I I.

Les Espagnols voulant profiter de la confufion qui paroiffoit inféparable des premiers jours d'une minorité, entrerent en Champagne avec une armée de vingt-cinq mille hommes, & affiégerent Rocroi. Ils ne doutoient pas que la prise de cette ville ne leur eût ouvert les plus belles provinces de France jufqu'aux portes de la capitale. Le duc d'Enguien depuis prince de Condé, âgé de vingt-deux ans, ayant fous lui le maréchal de l'Hôpital, Gaffion & la Ferté, qui furent depuis maréchaux de France, vint au fecours de la place, & forca les ennemis d'en lever le fiége. Non content de leur arracher une conquête qu'ils croyoient fure, il les défit entiérement, & eut un triomphe complet. Cette célebre bataille fut gagnée cinq jours après la mort de Louis XIII. L'infanterie Espagnole ne s'eft pas remife de cette défaite. Ce grand avantage fut fuivi de la prise de Thionville dans le Luxembourg, de Trin & du Pont de Stures dans le Montferrat, & enfin de la victoire navale devant Carthagene fur la Méditerranée par le maréchal de Brezé, amiral de France. De fi glorieux commencemens furent regardés comme un présage de la profpérité du nouveau régne. Le vicomte de Turenne s'étoit fort distingué dans la plûpart de ces expéditions, & il mérica cette même année à l'âge de trente-deux ans le bâton de maréchal de France. Il avoit beaucoup contribué l'année précédente à la conquête du Rouffillon. Au commencement d'Octobre, le roi & la reine quitterent le Louvre, pour se loger dans le Palais royal appellé auparavant le Palais cardinal, & l'on ouvrit la place qui eft devant, pour y faire le corps de garde. Le quai des orfévres fut achevé la même année. Un établissement d'un Tome X.

LI

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IV.

La reine

réfugie en France. ̧ Exploits du ma

renne & du prince de Condé.

1644.

autre genre, & qui fut très-utile, eft celui des Filles de la Charité ou Sœurs grifes, destinées à avoir soin des pauvres malades. Elles fe multiplierent beaucoup en peu de temps, & fe difperferent dans toutes les provinces du royaume. Elles ont plus de trois cens maisons, qui ont toutes relation à celle de Paris, où la fupérieure eft élue tous les trois ans. La demoiselle le Gras leur fondatrice les avoit mifes fous la conduite de Vincent de Paul, inftituteur & général de la Mission, (canonifé de nos jours,) dont les fucceffeurs ont continué d'être chargés de la même direction.

III.

La révolte des Anglois contre Charles I. leur roi légitid'Angleterre le me, engagea Anne d'Autriche à envoyer le comte d'Harcourt en Angleterre, pour offrir la médiation de la France; mais cette démarche fut fans fuccès. Olivier Cromvel deveréchal de Tu- nant chaque jour plus formidable, Henriette de France, reine d'Angleterre, chercha fa fûreté auprès du roi Louis XIV. Elle fut reçue à Paris avec tous les honneurs dûs à fon rang & à fa dignité. Elle fut logée au Louvre, où elle reçut les refpects de toutes les cours fouveraines, de la ville, de l'univerfité, & du jeune coadjuteur de Paris Jean-François-Paul de Gondi de Retz, facré depuis peu archevêque de Corinthe. On foupiroit ardemment après une paix dont l'Europe avoit tant de befoin. Mais il y avoit trop d'intérêts différens à ménager, pour fe flatter que cette paix fût prochaine. Nos plénipotentiaires allerent à Munster; & en paffant à la Haie, ils y firent un traité entre le roi & les états-généraux. Le roi leur accorda le titre de hauts & puiffans feigneurs, comme Louis XIII. avoit accordé fept ans auparavant le titre d'alteffe aux princes d'Orange, qui n'avoient que celui d'excellence. Le maréchal de Turenne fut tiré d'Italie pour recueillir les débris de notre armée d'Allemagne qui avoit été défaite. Ce grand général la répara à fes propres frais, & paffa le Rhin. Le duc d'Enguien fe joignit à lui, & tous deux défirent à Fribourg le général

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