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parcequ'il appartient tout entier à l'histoire du dix-huitieme fiecle.

I.

contre la nou

de Molina. Hift. des Con

greg. de Aux.

du P. Serri.

M. Du Pin, Hiftoire du

fuiy.

Nous

ARTICLE II.

Hiftoire des congrégations de Auxiliis,

I.

*

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ous avons vu dans l'hiftoire du feizieme fiecle Ic Cri de la foi commencement des troubles que caufa dans l'Eglife la nouvelle doctrine velle doctrine du Jéfuite Molina fur les matieres de la Grace & de la Prédestination. On entendit alors de toutes parts le cri de l'ancienne foi, qui repouffoit la nouveauté que l'on vouloit répandre & accréditer. Les Dominicains accu ferent hautement Molina de renouveller le Pélagianisme, XVII. fiecle. tom. I & firent fentir la néceffité d'arrêter un fi grand mal dès fa *T.IX.art. nailance. Le novateur fe foutint encore contre cette attaXXI. n. 45 & que, par le crédit de l'impératrice Marie, & par la protection de fon fils le cardinal Albert, archiduc d'Autriche, qui, dans un âge peu avancé, fe trouvoit pour lors grand inquifiteur de Portugal. Les difputes devenant plus vives de jour en jour entre les Jéfuites & les Dominicains, le cardinal Quiroga, archevêque de Tolede & grand inquifiteur d'Espagne, en informa Clément VIII. qui occupoit alors le faint fiége. Ce pape lui ordonna de confulter fur ce fujet les univerfités d'Espagne, les évêques & les plus favans théologiens. Cet ordre du fouverain pontife donna lieu aux diverfes cenfures que les évêques & les théologiens d'Efpagne firent contre le livre de Molina. Elles font au nombre de feize, & la doctrine de ce Jéfuite y eft condamnée comme fcandaleufe & hérétique. La plûpart font de la fin du sei zieme fiecle (1595 & 1596.)

II.

des Jéfuites

Molina vint alors à Madrid; & voulant ufer de récrimiStratagême nation, il déféra aux inquifiteurs quelques propofitions de ceux deux Dominicains (j) Bannès & Zumel. C'étoit un ftrataleurs nouveau- (j) [C'est une méprise de M. Du Pin: Zumel étoit religieux de la Merci. ]

contre

qui attaquent

és. Les inquifiteurs d'Efpa

fent à condam. Les Jéfuites obtiennent à

ner Molina.

Rome un bref

qui impofe fi

lence aux deux partis.

gême que les Jéfuites commençoient à employer. Ils s'en étoient déja fervi en Flandre contre la faculté de Douai, à gne fe difpol'occasion de la cenfure qu'elle avoit publiée contre leur confrere Leffius. Ils avoient accufé cette faculté de favorifer la doctrine de Calvin contre le libre arbitre. Le Jéfuite Ripalda avoue fans détour, que telle étoit la politique de la fociété. Bannès, dit-il, & la plupart de fes difciples commencerent à appeller Pélagienne la doctrine de Molina. Les nôtres de leur côté, pour éloigner d'eux cette note de Pélagianifme, appliquoient celle de Calvinisme à la doctrine oppofée. L'inquifiteur Quiroga ne donna point dans le pićge. Il déclara que Molina devoit se justifier avant que d'accufer les Dominicains; mais il mourut fans avoir prononcé de jugement. Jérôme Manriquès, évêque d'Avila, qui fut fon fucceffeur, mourut quatre mois après, comme il fe disposoit à dresser une condamnation du livre & de la doctrine de Molina. Portocarréro qui lui fuccéda, reçut en 1596. un bref du pape, qui lui défendoit de prendre connoiffance de cette affaire, & qui la réservoit au faint fiége. L'inquifiteur obéit, & envoya à Clément VIII. les cenfures des évêques & des théologiens, avec les écrits que les Jéfuites avoient faits pour leur défenfe. Il repréfenta en même temps au pape, combien il étoit néceffaire de terminer une prompte décision, des disputes qui rouloient fur des points fi importans.

par

Le même bref, par lequel le pape fe réservoit la connoiffance de cette grande affaire, impofoit filence aux deux partis fur les matieres contestées; & ce filence étoit prefcrit fous les peines les plus rigoureuses. Un pareil ordre, fi contraire à l'efprit de l'Eglife, eut de très-malheureux effets. Les Jéfuites eux-mêmes l'obferverent mal, & en prirent occafion d'accufer leurs adverfaires & de les fatiguer par de continuelles chicanes. D'ailleurs on s'accoutumoit peu-àpeu à l'erreur, & chaque jour on fentoit moins le prix de la vérité. En effet, pouvoit-on dire, le pape fermeroit-il la bouche aux deux partis; défendroit-il aux juges qui font fur les lieux de prononcer; fufpendroit-il la décifion plufieurs

I I I. Importante

pe II. roi d'ET

ler matie

années, s'il s'agiffoit de vérités fort importantes? Cependant il n'étoit question de rien moins que de favoir, qui eft-ce qui décide fouverainement & en premier du fort de l'homme; qui détermine la volonté au bien; qui opere en elle le confentement par lequel elle obéit à Dieu; & par conféquent qui eft celui à qui l'homme doit avoir recours, & en qui il doit mettre fa confiance pour obtenir la juftice & le falut. Il s'agiffoit de favoir fi la doctrine de Molina renouvelloit le fonds du Pélagianifme, comme le foutenoient les Dominicains & tous ceux qui défendoient avec eux l'ancienne doctrine, & comme l'examen que l'on fit ensuite força les papes d'en convenir.

I I.

La faculté de théologie de Douai s'étoit plaint dès l'an requere de La 1591. de l'indifférence que l'on témoignoit à Rome pour nuza à Philip: la vérité; comme on le voit dans la lettre qu'elle adressa pagne, fur la au nonce Octave Frangipani, & que le favant Eftius avoit détente de par- compofée par fon ordre. Le célebre Lanuza fit les mêmes res de laGrace. plaintes, dans une requête qu'il présenta au roi d'Espagne Philippe II. en 1597. Ce théologien étoit de l'ordre de faint Dominique, & mourut évêque d'Albarazin en 1625. Quand il préfenta fa requête, il étoit provincial de la province d'Aragon. Il déclare d'abord, qu'il fut faifi d'étonnement en voyant les ordres que donnoit le pape de ne point parler des matieres de la Il obferve que grace, l'on ajoûtoit chaque jour à la rigueur & à l'étendue de ces ordres, qui étoient plus modérés fous le provincial fon prédécefleur; mais qu'on les avoit portés à un excès, qui l'obligeoit de recourir à la piété du roi. Il appuie ses plaintes fur plusieurs raifons, dont voici les principales:

« 1o. La matiere des fecours de la grace fe préfente, dit »Lanuza, toutes les fois qu'il faut parler de la juftification » des pécheurs, des mérites, du libre arbitre, de la contri»tion, de l'attrition, de la pénitence, de la volonté de »Dieu, de fa providence, de la prédestination qui eft de

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» toute éternité, de l'accompliffement des commandemens, » de l'obfervation de la loi, des actes des vertus théologales, » la foi, l'efpérance & la charité, & des vertus morales. Toutes ces matieres renferment la partie la plus étendue » & la plus importante de la théologie. La défense que l'on nous fait, tend donc vifiblement au renversement de nos »écoles, au préjudice de ceux qui viennent prendre nos » leçons. 2°. L'ordre des inftructions demande très-fouvent » que l'on parle des vérités de la grace, pour porter les >hommes qui ont des cœurs de pierre, à demander à Dieu » la grace qui peut les amollir, & pour les exciter à faire » cette priere où l'Eglife nous fait demander à Dieu de » rompre nos volontés rebelles: Et ad te noftras etiam re»belles compelle propitius voluntates. Cette raifon fe fait » mieux fentir par des exemples. Qu'un théologien enseigne » ce que l'Eglife a appris dans l'école de l'apôtre, que la » caufe de notre prédeftination n'eft point en nous; ou bien » que ce n'eft point le bon ufage de notre libre arbitre qui »en eft la caufe, puifque ce bon ufage dépend entiérement » de la grace de Dieu, qui eft elle-même l'effet de la pré» destination; le théologien, dis-je, qui enfeignera cette >> doctrine, n'aura-t-il pas lieu de craindre d'être tombé dans » le cas de la défense, puifque dans la propofition qui vient » d'être énoncée, cette autre y eft contenue, que le con» fentement de la volonté dépend de la grace? Et n'est-ce » pas ce que l'Eglife confeffe univerfellement contre ces » nouveaux maîtres qui viennent de paroître ?

כל

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» On ne pourra jamais, continue la requête, citer de » texte de faint Paul, quoiqu'il y en ait un fi grand nombre, »fur l'efficacité des fecours divins, fans parler en mêmetemps de la foibleffe du libre arbitre. Un prédicateur ne » pourra plus exhorter les fideles à demander à Dieu des forces; à le prier que toutes les fois qu'il leur envoie de faintes infpirations, il y joigne le fecours de la grace efficace, de peur qu'il ne rejette ces inspirations.» Une autre raifon de Lanuza, c'eft que le filence impofé par le pape, exposoit tout l'ordre de faint Dominique aux accufations

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» fans

D

des Jéfuites, qui épioient toutes les paroles des Dominicains, pour voir s'il ne leur en échapperoit point quelqu'une, foit dans les chaires, foit dans le confeffionnal, qui regardât les fecours de la grace. « Il y a plus de trois cens ans, dit ce grand théologien, que nous enfeignons la doctrine de »faint Thomas, fpécialement fur les fecours de la grace, que perfonne s'en foit plaint. Nous le faifons au contraire avec l'approbation de l'Eglife & l'applaudiffement >> de toutes les univerfités. Aujourd'hui s'élevent de nouveaux » venus, qui fe vantent d'enfeigner une doctrine nouvelle, » & qui ofent entreprendre de nous fermer la bouche. » Après avoir montré par des témoignages fans replique, combien cette doctrine de l'école de faint Thomas eft faine & véritable, il continue ainfi: « De quel droit nous défend»on de la prêcher, nous à qui la défenfe en a été fpéciale>>ment confiée ? En effet, quoique ce foit un devoir com»mun à tous de la défendre, parceque c'est la doctrine des » faints peres, notre ordre a néanmoins une obligation par»ticuliere de le faire jufqu'au dernier foupir. Pourquoi donc »nous ordonne-t-on de garder le filence, lorfqu'elle eft >> attaquée ? Et quel temps choifit-on pour donner de pareils »ordres? Le temps où nos adverfaires (les Jéfuites) font le >> plus attentifs à tirer avantage de ce que l'on nous trouble » dans notre poffeffion; le temps où ils ont confpiré contre » cette doctrine, où ils fe donnent les mouvemens les plus » grands & font de prodigieux efforts pour la renverfer. » Lanuza remarque qu'il étoit ordonné aux Jéfuites par leurs conftitutions publiées par faint Ignace, de fuivre la doctrine de faint Thomas; mais qu'ils faifoient directement le contraire, & s'y portoient avec une ardeur incroyable. C'eft, dit-il, ce que prouvent évidemment les nouveautés qu'ils introduifent chaque jour, leurs railleries indécentes, & les livres dans lefquels ils attaquent cette doctrine. Il leur reproche l'indigne ftratagême que plufieurs employoient, en le donnant le titre d'interpretes de faint Thomas, afin de combattre plus sûrement fa doctrine. Il remarque que Molina avoit fait ufage de cette rufe: « Ce qui n'empêche pas,

» dit-il

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