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ces objets, après s'être assuré que la seule objection qu'il dût craindre, celle de l'embarras des finances ne pouvait empêcher l'effet de sa proposition, attendu la certitude acquise par les pétitionnaires que le commerce français et étranger, qui connaît l'étendue des ressources de la colonie, emploiera volontiers ses capitaux pour la relever ; il a rédigé, de concert avec plusieurs de ses collègues, un projet de loi qu'il dépose, signé de lui, sur le bureau, conformément à l'art. 23 du réglement.

M. le président, aux termes de l'art. 24, consulte la chambre sur la question de savoir s'il y a lieu de s'occuper de la proposition qui vient d'être faite.

Plusieurs pairs, en appuyant cette proposition, demandent que la chambre déclare qu'il y a lieu de s'en occuper.

D'autres observent que, suivant l'article 23 du réglement, l'auteur d'une proposition doit en indiquer l'objet. Ils ne pensent pas que le proposant ait satisfait à cette condition, puisque rien n'indique d'une manière précise ni la nature ni l'objet des mesures qu'il propose. S'agit-il de guerre, de finances, d'administration? C'est ce qu'il est impossible de déterminer, et que pourtant il faudrait savoir pour délibérer en connaissance de cause.

Divers membres pensent que l'objet de la proposition est suffisamment indiqué par la pétition dont il a été donné lecture. Les détails qu'elle contient ont dû convaincre l'assemblée qu'il s'agit d'un objet éminemment important et digne de toute son

attention. Qu'a-t-elle besoin d'en savoir davantage pour décider qu'elle s'occuperà de la proposition qui lui est soumise?

L'auteur de la propositiou déclare, au surplus, qu'elle a pour objet d'offrir au Gouvernement les moyens d'accélérer le rétablissement de la colonie de Saint-Domingue.

La chambre consultée décide qu'il y a lieu de s'occuper de la proposition (1). Le proposant demande à être entendu le samedi 13 août. L'assemblée ordonne cet ajournement. M. le président lève la séance, et ajourne l'assemblée au 9.

Séance du 9. Dans cette séance, M. le président déclare qu'il est chargé par le roi de présenter à la chambre un projet de loi sur les naturalisations. Il observe que c'est dans la chambre même que ce projet a pris naissance, à l'occasion d'une pétition présentée par un étranger (2).

« Comment se refuser, dit-il, à l'évidence des droits qui réunissent à l'intérêt du Gouvernement un si grand nombre d'individus, recommandables par leurs talens, leurs lumières et leurs services, qui, nés dans les départemens nouvellement réunis à la France, avaient associé leurs fortunes à ses destinées, avaient mérité sa reconnaissance par leur dévouement, et se trouvent aujourd'hui séparés de leur nouvelle patrie par le traité de paix qui rend

(1) Nous ferons connaître cette proposition dans la prochaine livraison.

(2) V. suprà, page 246.

leur pays à ses anciens souverains. Pendant que les possesseurs actuels des départemens restitués par la France repoussent presqu'universellement de toutes les fonctions publiques et des plus simples emplois la plupart des Français qui s'y étaient établis, et qui demandent à y conserver leur nouveau domicile, une politique plus éclairée, parce qu'elle se rattache à toutes les idées de justice, nous nous com. mande de traiter avec bienveillance tous les anciens sujets de ses nouveaux Etats qui voudront continuer ou transporter leur résidence parmi nous. Il est prudent sans doute de ne pas les admettre sans choix, de les assujétir à quelque temps d'épreuves, de leur demander quelque garantie de leur attachement et de leur fidélité, quand elle n'est pas donnée d'avance par d'éclatans services; mais nous devons accueillir avec intérêt leur désir de se fixer dans le royaume, ne pas les rebuter par d'inutiles délais leur compter pour quelque chose leur séjour plus ou moins long qu'ils ont déjà fait sur notre terri

toire..

» Le Code civil, dont les dispositions sont maintenues, ajoute M. le chancelier, se réfère dans l'article 7 à la constitution de l'an VIII, de manière que la naturalisation ne peut être obtenue dans la règle ordinaire qu'après une déclaration de vouloir s'établir en France, et les dix ans d'habitation prescrits par les lois et sénatus-consultes rendus à ce sujet.

» Il ne faut pas en séparer l'obligation de prendre

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des lettres de naturalisation, prescrites par le sénatus-consulte du 17 mars 1809. Il résulte donc de l'ensemble de ces lois qu'on pourrait anjourd'hui contester le droit de devenir à l'instant citoyen français par des lettres de naturalisation, au Belge ou au Piémontais qui n'auraient pas rendu à la France d'éminens services, et qui cependant y seraient établis depuis plus de dix ans, en y remplissant fidèlement tous les devoirs de citoyens, sous le prétexte qu'ils n'avaient pas déclaré préalablement l'intention formelle de s'y fixer.

» La justice réclame contre une interprétation si rigoureuse: elle ne permet pas d'opposer le défaut de déclaration à ceux qui n'auraient pas même été admis à en faire, puisqu'ils devaient se croire, et qu'ils étaient réellement Français, par suite même de la réunion; elle exige qu'on regarde comme affiliés à la France tous ceux qui de fait ont transporté leur domicile dans l'intérieur de ses provinces, qui l'ont servie dans les armées, dans les emplois civils, qui ont travaillé pour sa gloire, qui ont concouru peut-être ou adhéré franchement à son heureuse restauration. »

Le projet de loi proposé par M. le chancelier se compose de trois articles: le premier est relatif aux habitans des départemens qui avaient été réunis au territoire de la France depuis 1791, et qui, en vertu de cette réunion, se sont établis sur le territoire actuel de la France; le second est relatif aux mêmes individus qui n'ont pas encore dix années de rési-,

dence réelle dans l'intérieur de la France; et lé troisième aux individus nés et encore domiciliés dans des départemens qui, après avoir fait partie de la France, en ont été séparés par les derniers traités. Le projet de loi, paraissant devoir éprouver quelques modifications, je m'abstiendrai d'en rapporter le texte; je me permettrai seulement de faire quelques observations sur la forme dans laquelle il est rédigé.

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On sait que suivant les dispositions de notre charte constitutionnelle, la puissance législative appartient au Roi, à la chambre des pairs et à la chambre des députés. Lors donc qu'une loi porte: nous voulons nous ordonnons ce sont les trois branches de l'autorité législative qui veulent, qui ordonnent. Mais ce n'est pas ainsi que l'entend le ministre qui a signé le projet de loi (M. l'abbé de Montesquiou). Ils (les étrangers) obtiendront à cet effet, DE NOUS, dit l'article premier du projet, des lettres de déclaration de naturalité. Nous nous réservons néanmoins, est-il dit dans l'article d'accorder...... des lettres de déclaration de naturalité. Les mêmes expressions se retrouvent dans l'article 3.

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Ainsi, l'on voit que ce projet est exactement rédigé dans la forme d'une ordonnance émanée de la volonté seule du Roi; et si maintenant on se rappelle que dans le projet de réglement présenté par le même ministre, il existait un article suivant lequel les deux chambres devaient exprimer leur adoption des projets de loi par ces mots vérifié et enregistré,

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