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535. L'expression biens meubles, celle de mobilier ou d'effets mobiliers, comprennent généralement tout ce qui est censé meuble d'après les règles ci-dessus établies.

Pierre lègue à Paul, sans autre explication, son mobilier, ou ses biens meubles, ou ses effets mobiliers: ce legs comprend-il l'argent comptant et les dettes actives? L'affirmative ne souffre aucune difficulté. Quid, si Pierre ne s'était servi de l'expression mobilier que par inadvertance ou par erreur, et qu'il fût d'ailleurs constant que le testateur n'entendait donner que ses biens meublants? C'est un principe d'équité que l'on doit plutôt suivre l'intention du testateur que les termes du testament Prior atque potentior est, quàm vox mens dicentis (L. 7, ff. de Supell. leg.). Par conséquent, Paul ne pourrait en conscience réclamer que les biens meublants, et serait obligé à restituer l'excédant aux héritiers du testateur, dans le cas où ils auraient été forcés, par la sentence du juge, d'exécuter le testament à la lettre.

La vente ou le don d'une maison meublée ne comprend que les meubles meublants.

536. La vente, ou le don d'une maison avec tout ce qui s'y trouve, ne comprend pas l'argent comptant ni les dettes actives et autres droits dont les titres peuvent être déposés dans la maison ; tous les autres effets mobiliers y sont compris.

CHAPITRE III.

Des Biens dans leur rapport avec ceux qui les
possèdent.

537. Les particuliers ont la libre disposition des biens qui leur appartiennent, sous les modifications établies par les lois.

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Les particuliers peuvent disposer de leurs biens, mais sous les modifications portées par les lois. Ainsi, aux termes de l'article 674, celui qui veut faire creuser une fosse d'aisance, un puits, etc., doit observer les formalités voulues par les règlements. De même, on ne peut établir des manufactures qui répandent une odeur insalubre, sans une permission de l'autorité administrative, et sans avoir rempli certaines formalités préalables.

Les biens qui n'appartiennent pas à des particuliers sont administrés et ne peuvent être aliénés que dans les formes et suivant les règles qui leur sont particulières.

538. Les chemins, routes et rues à la charge de l'État, les fleuves et rivières navigables ou flottables, les rivages, lais et relais de la mer, les ports, les hâvres, les rades, et généralement toutes les portions du territoire français qui ne sont pas susceptibles d'une propriété privée, sont considérés comme des dépendances du do. maine public.

On appelle domaine public, les biens qui appartiennent à Etat. 11 ne faut pas confondre le domaine public ou de l'État avec le domaine privé du Roi.

539. Tous les biens vacants et sans maître, et ceux des personnes qui décèdent sans héritiers, ou dont les successions sont abandonnées, appar. tiennent au domaine public.

Voyez les articles 713, 755. L'on ne doit point confondre les biens vacants ou sans maître avec les biens ou les choses perdues dont le maître ne se représente pas (Art. 717).

540. Les portes, murs, fossés, remparts des places de guerre et des forteresses, font aussi partie du domaine public.

541. Il en est de même des terrains, des fortifications et remparts des places qui ne sont plus

places de guerre : ils appartiennent à l'État, s'ils n'ont été valablement aliénés, ou si la propriété n'en a pas été prescrite contre lui.

542. Les biens communaux sont ceux à la propriété ou au produit desquels les habitants d'une ou plusieurs communes ont un droit acquis.

Comme il s'élève souvent des difficultés sur les effets de la réunion d'une commune à une autre, surtout au sujet de l'affouage, nous allons rapporter avec ses motifs le décret du 17 janvier 1813, concernant les droits respectifs des differentes parties d'une commune. Ce décret est ainsi conçu : «Vu la requête des habitants de la commune de Tourmont, département du Jura, tendant à faire annuler un arrêté du préfet de ce département, du 29 novembre 1810, par lequel il est enjoint au conseil municipal de ladite commune de comprendre les habitants du hameau des Soupois dans la distribution de l'affouage de 1811, pour des parts égales à celle de tous les autres chefs de famille, habitants de ladite commune; vu l'arrêté du préfet du Jura du 29 novembre 1810; la requête en réponse, fournie par les habitants du hameau des Soupois, et les pièces à l'appui ;

» Considérant qu'en principe général la réunion des com munes ne doit porter aucune atteinte à leurs droits respectifs de propriété; et que, s'il se présentait quelque cas d'exception, il devrait être consacré par un décret spécial

» Considérant que les habitants du hameau des Soupois ne présentent, indépendamment de l'acte de leur réunion à la commune de Tourmont, aucun titre qui les constitue copropriétaires des bois appartenant à cette commune; qu'en conséquence leur prétention, la distribution de l'affouage dont il s'agit, n'est pas fondée; que, par suite, et en vertu du même principe, les habitants des Soupois ne doivent être assujettis à aucune portion des charges inhérentes aux bois appartenant à la commune de Tourmont ;

» Notre Conseil d'Etat entendu, nous avons décrété et décrétons ce qui suit:

Art. 1. L'arrêté du préfet du département du Jura, du 29 novembre 1810, est annulé.

» Art 2. Les habitants du hameau des Soupois sont renvoyés devant le préfet, à l'effet de faire par lui procéder, s'il y a lieu, au dégrèvement en leur faveur des sommes qui pourraient leur être indûment imposées à titre de part contributive aux charges inhérentes aux propriétés de la

commune de Tourmont. Toutefois le conseil municipal de la commune de Tourmont sera autorisé à délibérer sur la question de savoir s'il convient à cette commune de faire participer les habitants du hameau des Soupois à la distribution de l'affouage, à la charge, par ces dernier, de supporter une part proportionnelle des contributions et des frais. »

La réunion d'une commune ou d'une section de commune à une autre, n'étant qu'un acte de l'autorité publique et administrative, dit M. Curasson, dans son excellent Commentaire du Code forestier, ne pouvait avoir aucune influence en ce qui concerne les bois communaux ; chacune de ces communes ou sections de communes conservant, à cet égard, les droits existants avant la réunion.

» Quand elle ne porte que sur un hameau, un domaine ou une grange qui n'ont point de communaux particuliers, l'affaire semblerait devoir présenter plus de difficultés. Cependant, elle est régie et doit être décidée d'après le même principe. Il faut toujours en revenir à la destination des bois et autres biens communaux qui ont été concédés aux habitants d'un territoire circonscrit par des limites, pour leur donner moyen de fertiliser ce territoire, ou qui ont été acquis ou rachetés par les habitants, à proportion des biens qu'ils se retrouveront posséder dans lesdites paroisses, comme le porte l'article 5 de l'édit de 1667.

L'association territoriale une fois formée, les biens que ces habitants tiennent de concession ou d'acquisition appartiennent, quant à la propriété, aux habitants présents et à venir du territoire. Serait-il possible qu'une mesure d'administration publique pût avoir l'effet de forcer les babitants d'un territoire à rendre participants de leur bien des individus qui n'en faisaient pas partie, pour lesquels par conséquent la concession ou l'acquisition n'a nullement

été faite ?

» Il résulterait d'un pareil système que la propriété des communes serait à la disposition de l'administration. Il en résulterait aussi un autre inconvénient; c'est qu'à l'égard des droits d'usage et de pâturage, dont une commune jouit dans la forêt d'un tiers, l'administration pourrait étendre la servitude, en réunissant à une commune un hameau, un domaine ou une grange qui n'en faisaient pas partie aupa

ravant...

» Il existait autrefois un grand nombre d'abbayes et de monastères qui avaient un territoire distinct et souvent désigné par une dénomination particulière, territoire qui n'était

habité que par l'abbé, les religieux, leurs fermiers, leurs gardes, etc.

. Ces propriétés ont été aliénées comme biens nationaux, et se trouvent aujourd'hui occupées par une foule d'acquéreurs ou de sous-acquéreurs, qui dépendent de la commune voisine. Il en est de même de certaines granges isolées dans les montagnes, qui, ayant des pâturages et bois patrimoniaux sans participer à ceux d'une commune éloignée, dont ils faisaient partie, ont été réunies à une autre plus proche. On sent combien cette commune se trouverait surchargée, si elle était obligée d'accorder l'affouage à ces nouveaux habitants. L'arrêté de réunion ne peut avoir d'effet que pour l'assiette des impôts et pour la circonscription municipale; cette mesure ne peut être d'aucune influence relativement à la propriété des bois.. Voyez le Code forestier conféré, etc., par M. Curasson, avocat à la Cour royale de Besançon; le savant Traité de l'Usufruit, par M. Proudhon, professeur à la Faculté de Droit, à Dijon, tom. 6, n° 2834; et tom. 7, n° 3 89; et le Répertoire de Jurisprudence, par M. Merlin, REUNION, S 2.

543. On peut avoir sur les biens, ou un droit de propriété, ou un simple droit de jouissance, ou seulement des services fonciers à prétendre.

TITRE II.

De la Propriété.

(Décrété le 27 janvier 1804. Promulgué le 6 février.)

544. La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.

La propriété est un droit réel, jus in re, c'est-à-dire, un droit en vertu duquel je puis réclamer la propriété qui m'est acquise, et la suivre en quelques mains que je la trouve. Ce droit diffère essentiellement du droit personnel, ou droit à la

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