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1266. La cession de biens est volontaire ou judiciaire.

1267. La cession de biens volontaire est celle que les créanciers acceptent volontairement, et qui n'a d'effet que celui résultant des stipulations mêmes du contrat passé entre eux et le débiteur.

La cession volontaire libère le débiteur, ses cautions, ses codébiteurs, en tout ou en partie, suivant la convention; car le débiteur peut convenir avec les créanciers que la dette sera entièrement éteinte par l'abandon, ou qu'elle subsistera encore pour telle somme.

1268. La cession judiciaire est un bénéfice que la loi accorde au débiteur malheureux et de bonne foi, auquel il est permis, pour avoir la liberté de sa personne, de faire en justice l'abandon de tous ses biens à ses créanciers, nonobstant toute stipulation contraire.

Pour obtenir un jugement qui l'admette au bénéfice de la cession, le débiteur doit déposer au greffe du tribunal de son domicile son bilan, ses livres, s'il en a, et ses titres actifs. (Art. 898, Code de procédure.)

On remarquera, d'après l'article 1268, que le débiteur ne peut nullement renoncer dans son contrat au bénéfice de cession, ce qui regarde le for intérieur comme le for extėrieur; car la loi qui annule cette renonciation est vraiment d'un intérêt général.

1269. La cession judiciaire ne confère point la propriété aux créanciers; elle leur donne seulement le droit de faire vendre les biens à leur profit, et d'en percevoir les revenus jusqu'à la vente.

Par conséquent, si le prix d'une partie des biens suffit pour acquitter toutes les dettes, les autres biens doivent être rendus au débiteur.

1270. Les créanciers ne peuvent refuser la cession judiciaire, si ce n'est dans les cas exceptés par la loi.

Elle opère la décharge de la contrainte par corps.

Au surplus, elle ne libère le débiteur que jusqu'à concurrence de la valeur des biens abandonnés, et dans le cas où ils auraient été insuffisants, s'il lui en survient d'autres, il est obligé de les abandonner jusqu'au parfait paiement.

Un homme qui fait cession de ses biens peut-il se retenir secrètement ce qui lui est nécessaire pour vivre? Il peut certainement, au for de la conscience, retenir ce qui lui est nécessaire pour vivre dans son état; mais il doit se réduire à un entretien fort modique. (Conf. d'Ang.)

SECTION II. De la Novation.

1271. La novation s'opère de trois manières : 1. Lorsque le débiteur contracte envers son créancier une nouvelle dette qui est substituée à l'ancienne, laquelle est éteinte;

2. Lorsqu'un nouveau débiteur est substitué à l'ancien, qui est déchargé par le créancier ;

3. Lorsque, par l'effet d'un nouvel engagement, un nouveau créancier est substitué à l'ancien, envers lequel le débiteur se trouve déchargé.

La novation, en général, est la substitution d'une nouvelle dette à l'ancienne, qui se trouve ainsi entièrement éteinte; exemple: Je m'étais engagé à vous livrer cent mesures de ble; nous convenons ensuite qu'au lieu de cent mesures de blé je vous livrerai dix mesures de vin; l'acceptation que vous faites de ces dix mesures de vin me décharge de ma première obligation, qui se trouve par le fait entièrement éteinte. Il résulte, de la définition de la novation, qu'elle ne peut exister qu'autant qu'il y a deux dettes, dont l'une est éteinte par l'autre. Mais, quelle que soit la cause de la première dette, qu'elle ait eu lieu pour prêt, pour legs, pour donation, pour vente, ou qu'elle ait une autre cause, elle peut servir de fondement à la novation, c'est-à-dire à une seconde dette qui est substituée à la première. Les obliga

tions, même purement naturelles, peuvent être l'objet de la novation Non interest qualis præcessit obligatio, seu civilis, seu naturalis; qualiscumque sit novari potest, dummodo sequens obligatio civiliter teneat aut naturaliter (L. 1, 8 1, ff. de Novat.). On n'excepte que les obligations qui ont une cause réprouvée par la loi, non dans l'intérêt particulier du débiteur, mais par des motifs d'intérêt ou d'ordre public. Ces sortes d'obligations étant nulles naturellement et civilement, c'est-à-dire au for intérieur comme au for extérieur, ne sont susceptibles d'aucun effet : Quod nullum est, nullum parit effectum (V. Pothier, des Oblig. no 554; Domat, Lois civ., liv. 4, tit. 3, sect. 2; Merlin, Répert., vo NOVATION, 3; Delvincourt, Cours de Cod, civ., tom. 2, pag. 778; Toullier, Droit civ.fr., tom. 7, n° 292; Duranton, des Contrats, etc., tom. 3, n° 870, etc.)

1272. La novation ne peut s'opérer qu'entre personnes capables de contracter.

Si les personnes, quoique civilement incapables, étaient réellement capables naturellement de contracter, je pense que la novation aurait lieu pour le for intérieur. Voyez ce qui a été dit sur l'article 1101.

1273. La novation ne se présume point; il faut que la volonté de l'opérer résulte clairement de l'acte.

Il n'est pas nécessaire que la novation soit expresse, c'està-dire déclarée dans l'acte en termes formels; il suffit qu'elle résulte clairement de la manière dont l'acte est rédigé, que les parties ont eu réellement l'intention de l'opérer. Cet acte n'est pas même nécessaire pour le for intérieur,

1274. La novation par la substitution d'un nouveau débiteur peut s'opérer sans le concours du premier débiteur.

:

Exemple Une personne qui porte le plus vif intérêt au débiteur, un frère, par exemple, qui veut le libérer des poursuites d'un créancier, peut s'obliger envers ce dernier à la place du débiteur, et opérer une novation, sans que celui-ci intervienne dans l'acte.

1275. La délégation par laquelle un débiteur donne au créancier un autre débiteur qui s'oblige

envers le créancier n'opère point de novation, si le créancier n'a expressément déclaré qu'il entendait décharger son débiteur qui a fait la délégation.

La délégation est une convention par laquelle le débiteur présente à son créancier une tierce personne pour acquitter la dette en sa place. Si, par suite de la délégation, le créancier décharge le débiteur, il y a novation. Secùs, s'il ne le décharge pas: alors il n'y a plus qu'un cautionnement.

1276. Le créancier qui a déchargé le débiteur par qui a été faite la délégation, n'a point de recours contre ce débiteur, si le délégué devient insolvable, à moins que l'acte n'en contienne une réserve expresse, ou que le délégué ne fût déjà en faillite ouverte, ou tombé en déconfiture au moment de la délégation.

Il y a faillite ouverte, lorsque le débiteur a cessé de remplir ses engagements, et en a fait la déclaration au greffe du tribunal de commerce. (Code de com., art, 440.) Il y a déconfiture lorsque le débiteur ne possède pas assez de biens pour payer toutes ses dettes. Or, dans l'un et l'autre cas, le créancier, qui a consenti à la novation, ne l'ayant fait que par erreur, doit avoir recours contre son premier débiteur.

1277. La simple indication faite par le débiteur, d'une personne qui doit payer à sa place, n'opère point novation.

Il en est de même de la simple indication faite par le créancier, d'une personne qui doit recevoir pour lui.

1278. Les priviléges et hypothèques de l'ancienne créance ne passent point à celle qui lui est substituée, à moins que le créancier ne les ait expressément réservés.

L'obligation principale étant éteinte, les obligations accessoires qui la garantissent s'éteignent également.

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1279. Lorsque la novation s'opère par la substitution d'un nouveau débiteur, les priviléges et hypothèques primitifs de la créance ne peuvent point passer sur les biens du nouveau débiteur.

1280. Lorsque la novation s'opère entre le créancier et l'un des débiteurs solidaires, les priviléges et hypothèques de l'ancienne créance ne peuvent être réservés que sur les biens de celui qui contracte la nouvelle dette.

Exemples je vous dois 1,000 fr. solidairement avec deux autres personnes; votre créance est assurée par des hypothèques sur les biens de chacun de nous. Je m'engage à vous livrer 200 mesures de froment si vous voulez substituer cette dette à la première, qui est solidaire. Vous y consentez; dès lors cette dette solidaire s'éteint avec les hypothèques qui la garantissaient. Vous ne pouvez réserver, pour garantir la seconde dette, que les hypothèques qui pesaient sur mes biens.

1281. Par la novation faite entre le créancier et l'un des débiteurs solidaires, les codébiteurs sont libérés.

La novation opérée à l'égard du débiteur principal libère les cautions.

Néanmoins, si le créancier a exigé, dans le premier cas, l'accession du codébiteur, ou, dans le second, celle des cautions, l'ancienne créance subsiste, si les codébiteurs ou les cautions refusent d'accéder au nouvel arrangement.

Si le créancier a exigé. Dans ces cas, si les débiteurs ou cautions consentent, ils contractent par ce consentement l'obligation de rester débiteurs solidaires ou cautions de la nouvelle dette; s'ils n'y consentent pas, la novation n'a pas licu, et l'ancienne créance subsiste.

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