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Que. Jan. 11, 1904

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Le Tribunal saisi d'une demande de conversion de séparation de corps en divorce est libre de la prononcer ou de la rejeter suivant les circonstances et la gravité des fails. Le divorce ayant pour effet de délier les anciens époux des obligations résultant du mariage, l'art. 212 Code civ. ne leur est plus applicable, et l'art. 301 Code civ. ne peut être invoqué par l'époux contre qui le divorce a élé prononcé.

En conséquence, cet époux est sans droit pour réclamer une pension alimentaire à son ex-conjoint (1).

LA COUR;

(T... C. Dame T...).
ARRÊT.

Attendu que le sieur T... et la dame Félicité C... ont contracté mariage en 1871;- Attendu qu'en 1882, la dame T... présenta requête et fit assigner son

(1) V. Douai, 29 juin 1885 (Jurispr., 1885, p. 331); Douai, 23 novemb. 1885 (Jurispr., 1885, p. 360).

mari en séparation de corps devant le Tribunal de Cambrai; que T... forma une demande reconventionnelle dont il se désista devant le Tribunal; que ledit Tribunal, par jugement du 27 juin 1883, prononça la séparation de corps contre le mari au profit de la femme; que, ce jugement ayant été frappé d'appel par T..., qui reprit sa demande reconventionnelle, la Cour, par arrêt du 16 janvier 1884, a confirmé la décision des premiers juges en ce qui touche la demande de la femme T..., mais, accueillant en outre la demande reconventionnelle formée par le mari, a prononcé la séparation de corps aux torts de l'un et de l'autre des époux; - Attendu que la femme T... demande actuellement la conversion de la séparation de corps en divorce contre son mari; qu'en vertu d'une ordonnance de M. le président du Tribunal civil de Cambrai, qui porte date du 7 janvier 1887, elle a fait assigner son mari le 25 janvier, même mois, à cette fin; - Attendu que l'art. 310 Code civ. dispose que, lorsque la séparation de corps aura duré trois années, elle pourra être convertie en divorce sur la demande de l'un des époux ; Attendu, en fait, qu'il s'est écoulé plus de trois années depuis que la séparation de corps entre les époux T... est devenue définitive; que la femme a qualité pour demander la conversion ; que sa demande est donc recevable; Attendu, en droit, que le Tribunal saisi de la demande n'est pas obligé de prononcer la conversion ; que le législateur, en disposant que cette conversion pourra être prononcée, a clairement manifesté son intention de laisser l'examen et l'appréciation de la demande au juge saisi qui pourra prononcer la conversion, mais qui pourra aussi ne pas la prononcer, suivant les circonstances; Attendu qu'il convient donc de rechercher si la demande de la dame T... est bien fondée; - Attendu qu'en autorisant les deux époux, sans distinguer celui contre lequel la séparation de corps a été prononcée, à réclamer le divorce après trois années écoulées, la loi a voulu permettre la rupture complète du lien conjugal, lorsqu'il est démontré par le temps écoulé qu'aucun rap

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prochement ne peut être espéré entre les époux séparés pour des faits suffisamment graves; Attendu que depuis le jugement de séparation de corps aucun rapprochement ne s'est produit entre les époux T... ; qu'ils ont vécu éloignés l'un de l'autre sans que rien pût faire supposer qu'ils regrettaient la vie commune ;- Attendu qu'il n'est pas né d'enfants du mariage; que le mari est âgé de 38 ans et la femme de 64 ans ; que rien ne permet de croire que les époux oublieront un jour les griefs qu'ils se sont mutuellement reprochés pour reprendre une seconde fois la vie commune ; Attendu que les griefs qui ont fait prononcer la séparation de corps contre chacun des époux sont assez graves pour motiver le divorce; qu'en effet, l'arrêt de la Cour de céans, en date du 16 janvier 1884, constate qu'il résulte de l'enquête et de la contre-enquête, d'une part, que non seulement T... injuriait sa femme de la façon la plus grossière, mais qu'il s'était livré sur sa personne à des voies de fait; que ces scènes honteuses s'étaient renouvelées fréquemment; d'autre part, que la femme T... avait injurié et outragé grossièrement son mari en présence des domestiques et des étrangers; que maintes fois elle s'est livrée sur sa personne à des actes de violences, le menaçant même d'un revolver ;--Attendu que sa demande est donc bien fondée; que la dame T... se trouve, par conséquent, dans le cas prévu par l'art. 310 Code civ. ; que c'est avec raison que les premiers juges ont accueilli sa demande et qu'il convient de confirmer leur décision, en adoptant, en outre, les motifs qui les ont décidés;

En ce qui concerne la demande d'une pension alimentaire de 3,600 fr. par an formée par le mari : Attendu que, si la séparation de corps, laissant subsister le mariage, laisse également subsister entre les époux séparés les obligations énumérées dans l'art. 212 Code civ., il n'en est pas de même du divorce qui rompt complètement le lien du mariage, produit un changement d'état des anciens époux et les délie, par conséquent, des obligations résultant d'une situation juridique qui n'existe plus; - Attendu que l'art.

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